On a déposé, conformément à la loi, deux
exemplaires à la Bibliothèque Nationale.
On regardera comme contrefaçon, tout exem-
plaire qui ne sera pas signé.
Roi de ce globe couvert de végétaux si variés,
peuplé d'animaux si différens, l'homme s'élève au
milieu d'eux pour les commander; ses regards ont
embrassé ce vaste univers, et la force de son gé-
nie mit dans ses mains le sceptre du monde. La
suprême Intelligence lui donna l'excellence de la
formation, et le Créateur ayánt pénétré ce corps
animal de son souffle divin, l'homme marcha
souverain des autres êtres, et fut différent d'eux
tous.
Quand on examine soigneusement cette quantité
innombrable de corps animés répandus sur la sur-
face de la terre, et qu'on réfléchit à la diversité
de leur organisation, on se persuade que la nature
a procédé du simple au composé, et s'est élevée
graduellement pour parvenir enfin à produire
l'homme le chef-d'oeuvre de la création. En effet
[Seite 2] en remontant l'échelle des êtres, s'offrent d'abord
les plantes monocotiledon, formées de la réunion
de simples fibres longitudinales. Dans les végétaux
dicotiledons, l'organisation se complique déjà, et
des fibres se courbent circulairement autour d'un
cylindre médullaire. Vientensuite la première classe
des animaux; ce n'est encore qu'un sac gélatineux,
irritable, entouré de tentacules et percé d'une
seule ouverture. Ajoutez des pieds et les organes de
la mastication, le polype devient un échinoderme.
Donnez à cette ébauche de l'animalisation une
moëlle épinière et quelques organes des sens,
vous aurez un insecte, qui va devenir un molusque,
si vous joignez à cela un système de circulation et
un appareil respiratoire.
Accordez au molusque, le plus parfait des ani-
maux à sang blanc, une colonne épinière, et faites
circuler dans ses vaisseaux un liquide pourpré,
vous avez un poisson, ou un reptile, si des pou-
mons viennent remplacer les branchies.
Le squelette se complique-t-il davantage, les mus-
cles sont-ils disposés de manière à déployer une gran-
de force, à servir à la progression et à la natation
vous avez un quadrupède ovipare. Ajoutez-y des
[Seite 3] mamelles, un cœur plus parfait, et l'ensemble
des organes constituera un cetacé ou un quadru-
pède mamifère. Enfin si le cerveau se perfectionne, si
la sensibilité s'accroît, vous aurez l'homme, le
dernier terme de l'organisation.
Placé à l'une des extrémités de la chaîne des
êtres, il laisse entre lui et les animaux une si
énorme distance qu'on ne saurait le comparer à au-
cun d'eux. Le singe n'est, qu'une copie grossière
de ses formes extérieures, et n'a ni les idées, ni
les sens déliés, ni aucun des attributs de l'espèce
humaine.
Sous le rapport de ses fonctions, l'homme l'em-
porte sur tous les animaux. En est-il chez qui le
toucher suit aussi partait, le goût aussi délicat?
Sans doute l'odorat perd de sa susceptibilité chez
l'homme civilisé; mais on connaît la perfection
de ce sens chez les sauvages, et si l'ouie n'est pas
aussi étendue chez l'homme que chez plusieurs ani-
maux, elle gagne en finesse ce qu'elle n'a pas d'un
autre côté: quant à la vue, les voyageurs nous ap-
prennent que les sauvages l'ont des plus perçantes.
Si l'homme paraît donc au – dessous de quelques
animaux, relativement à certains sens, il ne le doit
[Seite 4] qu'à la civilisation, et dans ce cas même, une percep-
tion bien plus parfaite le dédommage avec usure
de ce qui semble lui manquer.
La digestion est chez lui d'une activité prodi-
gieuse; et, tandis que les animaux sont bornés pour
leur nourriture à deux ou trois substances, il peut
assimiler à son individu toutes les matières ali-
mentaires. Où est l'être dont le système nerveux
soit aussi parfait, la faculté de se produire et de
se conserver, aussi étendue? dont le gosier soit
aussi flexible? l'homme seul peut articuler des
sons, et perfectionner, lui seul peut transmettre
ses idées, les généraliser, les comparer entre
elles.
Si nous considérons la durée de sa vie, nous
trouvons que la nature l'a traité favorablement en-
core. On le voit prolonger sa carrière bien au-delà
du terme assigné aux autres mamifères, sans aller
chercher des exemples rares de longévité.
Fait pour contempler les cieux, l'homme
offre une charpente osseuse entièrement différente
de celle des autres mamaux. Sa tête au lieu de
pendre à l'extrémité de la colonne vertébrale, s'y
maintient en équilibre, et son articulation avec elle
[Seite 5] forme quatre angles droits. Les vertèbres cervicales
ne sont point hérissées de ces longues apophises épi-
neuses destinées, chez les quadrupèdes, à donner at-
tache à un ligament très-fort, qui soutient le poids
de leur tète. Le centre de gravité de la colonne ver-
tébrale, dans le squelette humain, répond à celui
du bassin, dont le grand diamètre s'étend de droite
à gauche; tout est différent chez les quadrupèdes;
et la plus grande dimension du pelvis est; d'avant
en arrière. Le pied de l'homme, qui doit porter à
plat sur le sol, fait avec la jambe un angle de 90
degrés, tandis que chez la plupart des quadrupèdes
la station n'a guère lieu que sur l'extrémité des
orteils.
Les faisceaux musculaires ne nous offriraient
pas chez l'homme des dispositions moins particu-
lières; nous les verrions à la partie postérieure du
tronc, des cuisses et des jambes réunis ensemble,
former les muscles les plus puissans, et disposés
de la manière la plus convenable pour maintenir
la rectitude du squelette.
Par une suite de cette structure, la face de
l'homme est perpendiculaire, ou du moins ne s'é-
carte pas autant de cette direction que chez les
[Seite 6] autres mamifères. Quoique ces dispositions soient
communes à tous les hommes, il existe cependant
entr'eux de légères différences, et c'est ce qui
constitue les variétés de l'espèce humaine, elles ne
semblent pas sorties des mains de la nature, mais
un effet des climats divers que l'homme habite,
de sa manière de vivre et de se nourrir, de ses
moeurs et de ses usages.
Tous les corps organiques semés sur la surface
du globe, sont soumis à l'impér euse loi des cli-
mats; rien ne peut s'y soustraire. Nous voyons
les végétaux varier comme les pays. L'arbre dont
les nombreux rameaux s'étendaient majestueuse-
ment, transporté loin du sol natal devient un
frêle arbrisseau, ou même n'élève plus qu'une tige
herbacée, et le végétal savoureux perd bientôt ses
qualités dans une terre étrangère. Mais si le climat
exerce une si vaste puissance sur le règne végétal,
jusqu où ne doit-elle pas s'étendre sur les animaux
à sang chaud, liés intimement à l'atmosphère dans
laquelle ils existent?
Aussi suffirait-il de parcourir quelques classes
de mamifères pour trouver les preuves les plus
irréfragables de l'influence du climat. Nous les ver-
[Seite 7] rions prendre uns autre stature, des formes nou-
velles, changer les proportions respectives de leurs
parties. La nourriture et la manière de vivre ne
nous offriraient pas des effets moins remarquables.
L'homme, il est vrai, peut plus qu'aucun ani-
mal s'accommoder à tous les climats, à toutes les
températures, aux variations diverses de l'atmos-
phère, se plier à tous les genres de vie. Il sup-
porte les chaleurs les plus excessives, et le Groën-
landais habite presque nu au milieu des, glaces
du pôle. Mais si l'homme vit dans toutes les ré-
gions de la terre pourvu qu'il ne fasse pas de
transitions brusques, son organisation primitive
reçoit cependant des modifications diverses de la
part du concours nombreux des objets dont il est
environné. Il prend une stature différente, une
autre couleur de peau, ses excrétions ne sont plus
les mêmes, il éprouve des changemens jusque
dans son caractère. En un mot, l'homme est dif-
férent de lui-même suivant les climats qu'il ha-
bite. Quoiqu'il ne s'éloigne jamais autant de sa
forme primitive que les autres mamifères, sa taille
est rabougrie dans ces régions malheureuses où
le soleil darde pendant six mois, de pâles rayons
[Seite 8]
et s'élève majestueusement au contraire plus près
de ses feux. Remarquons cependant que ce n'est
pas sous la zone torride que sont les plus grands
hommes, mais dans les pays un peu froids. Aussi
en Europe, voit-on dans la Suède les plus hautes
statures, et la Germanie, autrefois beaucoup plus
froide qu'aujourd'hui, avait pour habitans, du
temps de César et Tacite, des hommes d'une taille
très-élevée. Si nous passons de l'autre côté de l'é-
quateur, nous trouvons les Patagons dans un climat
approchant beaucoup de celui de la Suède.
La couleur de l'homme n'est pas partout la
même; il noircit au feu de l'astre du jour, et blan-
chit quand il en est plus éloigné. C'est ainsi qu'en
Europe, nous voyons, vers le sud, la peau se bru-
nir, les yeux perdre leur azur, et que l'Afrique,
au delà du Sénégal, jusqu'à l'extrémité du Con-
go et le la mer Rouge, nous offre des hommes
parfaitement noirs. Indépendamment du soleil,
un grand nombre de causes accessoires peuvent
faire varier la couleur des peuples, et même sous
des latitudes semblables.
On sait que la blancheur des Européens n'est pas
due à la couleur que réfléchit l'épiderme, puisque
[Seite 9] c'est un corps transparent, mais à celle qu'il
transmet, la peau devient aussi plus foncée à me-
sure qu'elle intercepte un plus grand nombre de
rayons lumineux, et enfin décidément noire quand
elle les absorbe tous. On peut en général distin-
guer deux genres de coloration; l'une dépend de
l'action immédiate du soleil, qui carbonise les
premières couches des tégumens communs, elle
disparaît lorsqu'il cesse d'être aussi ardent, et
n'est pas héréditaire; l'autre est au contraire un
effet de tempéramens, et se propage plus ou
moins long-temps de race en race, suivant que
la constitution a subi des changemens plus ou
moins intimes. C'est ainsi qu'en Europe même,
sans changer de latitude, nous voyons la peau
passer par une infinité de nuances, pour arriver
enfin du blanc à la couleur qui distingue les tem-
péramens mélancoliques. Ces nuances diverses
s'effacent plus ou moins difficilement suivant leur
degré; Des maladies, ou l'action de certains cli-
mats suffisent pour donner immédiatement cette
teinté à la peau la plus belle; ainsi agissent les dif-
férentes cachexies provenant des maladies du foie,
qui s'opposent à ce que le sang se dépouille aussi
[Seite 10] complètement des élémens de la bile. M. Cassan a
observé qu'un des effets le plus communs du
climat des îles, est d'altérer le teint des Européens
qui l'habitent, et que beaucoup d'entr'eux prennent
bientôt après leur arrivée un teint plombé et olivâ-
tre, malgré qu'ils jouissent d'une bonne santé et
n'aient aucun engorgement des viscères. Il paraît
donc que le principe de la coloration est le même
chez tous les hommes, et que la peau des Indiens
et des autres peuples basanés ne diffèrent entr'elles
et même de la nôtre, qu'en degré, selon qu'elles
offrent plus ou moins de ce jaune provenant de
la transmission imparfaite du blanc. Nous allons
examiner l'organisation de la peau des nègres,
comme offrant le dernier terme de la coloration
en noir. Les propositions suivantes sont extraites
d'un mémoire de Jhon Mitchel, inséré dans le
43e vol. des Transactions philosophiques.
La peau des nègres est plus épaisse et d'une texture plus
serrée que celle des blancs. Elle ne transmet aucune
couleur.
Nous allons donner des preuves de ces deux
assertions.
1°. La peau chez le nègre oppose plus de résis-
tance à l'instrument qui la divise que chez la
blanc.
2°. Leur épiderme se sépare plus difficilement de
la peau, et paraît alors plus compact et moins fin
que celui des blancs.
3°. Les nègres ne reçoivent jamais de coups de
soleil, quelle que soit la chaleur à laquelle ils s'ex-
posent.
4°. Dans l'hiver, leur peau qui n'est plus cou-
verte pur l'humeur grasse qui la lubréfie ordinai-
rement, devient dure, âpre, et grossière.
5°. Aucun nègre adulte n'a de boutons, si ce
n'est ceux dont lu peau est la plus fine.
6°. Leur peau ne rougit jamais, même dans les
fièvres les plus ardentes, dans la rougeole, la
variole, etc.
7°. Elle ne change pas de couleur dans l'anasar-
que et le ictère, quoique dans cette dernière ma-
ladie leurs yeux prennent une teinte jaune.
Le corps réticulaire, les lames les plus superficielles
de l'épiderme sont noirs chez les nègres. La peau of-
fre du reste la même couleur que chez les blancs, à
l'exception des fibres qui vont du corps réticulaire à l'é-
piderme.
Lorsqu'on enlève l'épiderme des nègres, soit
par l'action d'un épispatique, du feu ou de l'eau
bouillante, sa surface extérieure conserve à peu
près la même couleur qu'avant cette opération;
mais sa surface interne diffère peu de ce qu'elle
est chez les blancs; l'application des cantharides
sépare le plus souvent, surtout sur les cuisses, cette
membrane en deux lames d'une épaisseur égale à l'é-
piderme des blancs. Les surfaces correspondantes
de ces deux lames sont partie blanche et partie
noire; des fibres de cette couleur pénètrent à tra-
vers l'épiderme, et lorsqu'il est divisé en deux
feuillets, paraissent comme autant de taches noires
semées sur les surfaces qui se touchaient aupa-
vant, mais disparaissent à la surface interne du
feuillet inférieur: la partie analogue du feuillet
supérieur est blanche, à l'exception des taches noires
[Seite 13] dont j'ai parlé. La teinte qu'elle reçoit de sa sur-
face extérieure, qui est noire, fait paraître sa blan-
cheur très-superficielle. Ce feuillet est moins trans-
parent, plus épais, plus grossier, que l'épiderme
des blancs.
Il suffit de râtisser les deux feuillets qui com-
posent la cuticule des nègres, pour enlever les ta-
ches noires qu'on y remarque, et lui donner la
même couleur que chez les blancs, tandis qu'on
ne peut le faire au moyen de la macération, quel
que soit le véhicule qu'on emploie.
Le corps réticulaire du nègre diffère sous deux
rapports, de celui du blanc; il est noir chez l'un et
de couleur blanche chez l'autre; dans le premier
c'est une substance molle, pulpeuse ou muqueuse,
qu'on ne peut enlever que sous la forme de flocons,
dans le second, c'est une véritable membrane
que détachent souvent les épipastiques, et qu'on
emporte alors aussi facilement que l'épiderme
C'est du corps réticulaire que naissent les fibriles
noires que nous avons vu traverser l'épiderme et
lui communiquer cette teinte.
Le derme du nègre est à-peu-près de la même
[Seite 14] couleur que celui d'un blanc à peau brune; mais
recouvert du corps réticulaire, il offre une teinte
analogue à celle des Indiens ou des mulâtres.
La teinte du nègre ne provient pas d'une liqueur noire
aucune humeur ne possède chez eux plus que chez les
blancs cette couleur particulière.
Si la peaudes nègres contenait une liqueur noire,
il existeraitquelque moyen de l'en dégager et
l'on ne peut y parvenir ni par la macération, ni
par les pressions les plus fortes. D'ailleurs elle
teindrait la sérosité contenue dans les cloches dés
vésicatoires, et cette sérosité est la même chez le
noir et chez; le blanc.*)
Concluons donc que le siége de la couleur des
nègres se trouve dans les premières couches des
tégumens communs et le réseau muqueux qui
s'opposent chez eux à la transmission des rayons
lumineux provenant des parties blanches et rouges
situées au-dessous.
Quand on réfléchit que la couleur des peuples
va toujours prenant des teintes plus foncées à me-
sure qu'on approche davantage du midi, on de-
meure convaincu que le climat est la cause la plus
générale de la coloration de la peau, et que l'ac-
tion du soleil en détermine surtout les effets.
Nous le voyons même, indépendamment de toute
autre cause, tendre continuellement à priver la
peau de la couleur blanche qui lui est naturelle; et
si les rayons de l'astre qui nous éclaire brunissent
bientôt le teint le plus éclatant, ce qui est un pas
de fait vers la couleur des peuples d'Ethiopie, leur
action continuée pendant des milliers de siècles,
peut bien le faire enfin passer décidément au noir
et donner à la peau la densité et l'épaisseur qui dis-
tinguent celle des nègres. Cette texture plus serrée,
et cette augmentation d'épaisseur pourrait bien
contribuer pour quelque chose à la couleur noire
[Seite 16] en diminuant la transparence de la peau. On ob-
serve enfin, que le réseau de Malpighi devient
moins muqueux à mesure que la peau s'obscurcit
davantage, et se change enfin, chez l'Africain,
dans une véritable membrane. Plus l'épiderme est
épais, plus ses lames sont nombreuses; plus Sa
texture est sériée, plus il doit y avoir de rayons
lumineux interceptés au passage, et plus la peau
doit pedre de sa blancheur. Observons que l'é-
piderme est moins fin chez les personnes qui ont
le teint foncé, et sur les régions du corps les
moins blanches. Vers le pôle où les hommes exposés
continuellement aux intempéries d'un ciel rigou-
reux, ont un teint fort rembruni, la peau est aussi
très-grosse Le froid et la chaleur agiraient-ils tous
deux sur la peau, comme un stimulus, et augmen-
teraient-ils son épaisseur de la même manière
que les mains des forgerons deviennent calleuses?
Les nègres eux-mêmes offrent des nuances dans la
couleur et la finesse de leur peau; les négrillons
qui Font plus fine, sont moins noirs que les nègres
adultes. On assure aussi qu'ils deviennent jauues
s'ils sont pris d'ictère.
L'action du soleil reçoit un accroissement de
[Seite 17] pouvoir de la nature du sol, selon qu'il est plat
ou montagneux, sablonneux ou fertile, aride ou
coupé de rivières.
La manière de vivre des peuples divers doit en
core contribuer à la couleur de leur peau.
L'aridité d'une, grande partie de l'Afrique aug-
mente l'ardeur du soleil dans cette partie du
monde; c'est là que se trouvent les véritables
nègres; dans les autres pays chauds, au contraire,
la terre est couverte d'un grand nombre de végétaux
dont les exhalaisons rafraîchissent sans cesse l'at-
mosphère et tempèrent la chaleur, d'arbres touf-
fus dont l'ombrage défend les feux du jour.
Le manque d'eau, la manière de vivre dans les
pays chauds, surtout en Afrique, conspirent en-
core pour augmenter l'influence du soleil.
La plupart des peuples de ces contrées, particu-
lièrement ceux qui sont noirs, vont toujours nuds,
vivent sans habitations fixes, vaguent sans cesse
sur des sables brûlans, sans rien qui les préserve
des rayons d'un soleil ardent, sans ombrage, sans
eau pour se désaltérer.
Au contraire, la manière de vivre des Euro-
péens contribue à rendre leur peau plus belle en-
[Seite 18] core. Ils se garantissent soigneusement de l'impres-
sion du soleil, et se tiennent le plus souventren-
fermés dans des maisons solidement construites.
Ils sont couverts de vêtemens chauds, et reposent
mollement la nuit sur des lits délicats. Tout le
monde connaît l'influence d'une vie efféminés sur
la coloration de la peau. Nous la voyons blanchit
à proportion qu'on la défend plus exactement de
l'action de la lumière. Les femmes recherchées
nous en offrent continuellement des exemples.
Le climat et la manière de vivre paraissent donc
la cause de la couleur noire des habitans de la Zone
Torride, tandis que les contumes des peuples du
nord contribuent au contraire à leur blan-
cheur.
La teinte des peuples colorés semble tellement;
une variété héréditaire par accident, provenant du
climat qu'ils habitent, qu'il suffit d'une légère cir-
constance, comme le voisinage d'une montagne,'
d'un pas fait vers le nord, d'un sol plus élevé et
moins aride pour l'affaiblir ou même l'effacer en-
tièrement. Bouger (Fig. dela terre) a eu occasion
d'observer que les sauvages qui habitent au pied
de la Cordillère, et du côté de l'occident, sons
[Seite 19] presqu'aussi blancs que nous, tandis qu'en s'éloi-
gnant de cette montagne, en avançant vers la côte,
les Indiens reprennent leur couleur de cuivre. Ou
lit dans une Collection de Voyages par Chorchil,
que les habitans de la Négritie sont plus noirs que
ceux de la côte d'Or, à l'exception des peuples qui
vivent sur la rive nord du fleuve Senéga, qui ne
sont plus que basanés. Dans l'intérieur de l'Afrique
où les terres sont élevées et montagneuses, ou
des pluies abondantes et continuelles tempèrent la
chaleur et rafraîchissent l'air au point de fair ede
ce climat une région tempérée, les hommes, sui-
vant les observations les plus récentes, sont pres-
que aussi blancs que les Européens. Combien ces
derniers n'offrent-ils pas eux mêmes de différences
sous le rapport de la coloration? Les Bohémiens
paraissent presque noirs, tandis que leurs voisins
les Saxons, ont le plus beau teint. Les Bavarrois sont
demi-basanés. S'il suffisait de la couleur pour for-
mer des races, il y en aurait presqu'autant que d'in-
dividus. Remarquons que les Européennes dont la
peau est brune, ont, comme les négresses le ma-
melon du sein et l'intérieur des parties sexuelles
d'une couleur violâtre, ce qui semble annoncer
[Seite 20] que le principe de la coloration est chez elles la
même. Le blanc paraît d'ailleurs tellement la cou-
leur primitive du genre humain, qu'il tend conti-
nuellement à revenir, les nègres eux-mêmes l'ap-
portent en naissant, jusques ans les régions les
plus brûlantes du midi, et pâlissent dans leurs ma-
ladies; mais une fois que la blancheur à fait place
au noir des Africains, la peau reprend difficilement
sa couleur originelle. Un seul jour suffit en effet
pour ternir les lis de la peau européenne tandis qu'il
faut des mois entiers pour qu'ils brillent de leur
premier éclat.
D'ailleurs l'homme est loin d'être la seule créa-
ture dont le climat change la couleur: presque tous
les cochons sont blancs en Normandie, noirs en
Savoie, et d'un rouge brun en Bavière. La plupart
des boeufs de Hongrie sont d'un blanc grisâtre, ils
sont roux en Franconie. En Guinée le chien et les
oiseaux, galinacés surtout, sont noirs comme
l'homme de ces contrées; comme lui, le chien à la
peau glabre et onctueuse, et jouit aussi d'une trans-
piration particulière.
Si les cheveux du nègre sont crêpus et frisés,
si son crâne offre de légères différences de celui de
[Seite 21] l'Européen, combien le climat et la nourriture
n'apportent-ils pas de changemens plus grands aux
animaux d'une même espèce! Qui ne connaît pas
l'exemple des chiens et des chats d'Angola, des
brebis d'Afrique, dont la laine devient si fine dans
les pâturages d'Angleterre! Oui n'a pas observé
combien de variétés dans la forme de la tête des
chevaux des différens pays! Combien le genrede
vie ne fait-il pas différer les espèces sauvages des
espèces domestiques! Et sous ses divers rapports,
combien l'homme ne l'emporte-t-il pas sur tous les
animaux!
Quelle énorme différence entre la manière de
vivre de l'enfant de la nature et celle du citadin
raffiné? entre les alimens des peuples divers? Pê-
cheur dans ces régions glacées ou la terre se refuse
à la végétation, l'homme se nourrit en grande partie
de poissons; moins au nord, nomade et chasseur,
il vit de lait et de la chair de sa proie; dans des
contrées plus heureuses, il devient sédentaire
et se livre à l'agriculture; enfin, dans ces climats
fortunés où la nature fournit largement à tous ses
besoins, il s'abandonne à l'oisiveté, et se nourrit
entièrement des fruits de la terre. Quels immenses
[Seite 22] changemens ne doivent pas apporter dans sa cons-
titution des genres de vie si différens, des alimens
si opposés! cependant ces dissemblances ne sone
que superficielles, le type de la forme intérieure
est général et demeure constamment le même.
Le climat n'altère pas seulement les formes ex-
térieures de l'homme, il modifie tout son être, ses
moeurs, son intelligence, ses passions, ses sens;
et si ce n'était pas nous écarter de notre sujet
nous montrerions que nos connaissances, nos
lois, nos coutumes tiennent en grande partie au
sol.
N'a-t-on pas observé que la bonté de la vue,
une extrême susceptibilité de l'odorat, la délica-
tesse du tact, la finesse de l'ouie, distinguent des
nations entières? et de la perfection de ce dernier
sens nous verrions peut être découler toutes les lan-
gues, qui ne pourraient bien être que des dialectes
d'un langage primitif, et la musique et même la
poésie sous plusieurs rapports. En effet, qu'est-ce
autre chose qu'une langue soumise à la délicatesse
de l'organe, à l'abondance des idées, et relative
aux objets qui nous environnent? Pleine de méta-
phores dans l'Orient, elle devient chez les Bar-
[Seite 23] des écossais, comme leurs montagnes, grande, gi-
gantesque et monotone. Cette teinte particulière,
ce goût de terroir qui se conserve au milieu des
progrès de la civilisation, caractérisent l'homme,
et le marquent en quelque sorte au coin du pays
qui l'a vu naître.
L'amour fermente avec plus de force sous un ciel
brûlant, et la polygamie est établie chez les peu-
ples d'Orient, dès les temps les plus reculés, tan-
dis que l'habitant du nord s'est toujours borné au
choix d'une compagne? La Jalousie, fille de l'A-
mour, suit la même marche que lui, et devient
plus dominante à mesure qu'on s'approche davan-
tage des régions méridionales.
Une mémoire exequise caractérise les peuples
d'Europe et d'Asie, et aucune nation n'a mieux
transmis les traditions historiques.
L'Imagination, pour ainsi dire enfant de la
Mémoire, comme celle-ci l'est de nos sensations,
devient plus brillante du nord au sud, et aug-
mente en proportion de l'agrément, de la beauté,
de la richesse et de la douceur des climats. N'a-
percevons-nous pas aussi que les passions sont
très-exaltées, tandis que leur voix cesse d'être im-
[Seite 24] périeuse pour l'homme des contrées glaciales;
amoindri dans tout son être.
Qu'est-il donc besoin de recourir à plusieurs
espèces dans la race humaine, pour expliquer des
nuances plus ou moins obscures de la couleur de la
peau, des cheveux plus ou moins frisés, quand
nous voyons l'homme ainsi modifié, au morale et
au physique, par l'action des climats divers.
S'il nous était permis ici de consulter l'histoire,
les religions, les sciences, les arts, les langues
et les écritures alphabétiques, tout nous annon-
cerait que l'espèce humaine ne forme qu'une seule
et même race: c'est ce qu'a prouvé M. William
Jones à l'égard des peuples de l'Asie et des nations
les plus célèbres de cette partie du monde. Nous
découvririons les rapports les plus frappans entre
la religion indienne et celle des Egyptiens, des
Perses, des Hebreux, des Grecs et des autres
peuples occidentaux, et ses coutumes nous sem-
bleraient aussi antiques que les notions qui nous
les offrent. Nous les verrions adorer les mêmes
dieux, les honorer par des cérémonies sembla-
laies, les représenter sous les mêmes symboles.
Partout le triangle nous offrirait l'emblême de
[Seite 25] ces trois pouvoirs, créer, conserver et détruire;
delà les trois têtes sur la figure des Dieux dans
tout l'orient, le Jupiter tricéphale chez les Grecs,
le serpent annoncerait le pouvoir qui donne la vie
aux hommes. Nous verirons dans la pago le d'Elé-
phanta-Vichenou, à qui Brama son père dit
de développer toutes les vies qu il a dans son
sein, tenir à sa main le serpent; l'œuf du mon le dans
la gueule du serpent, symbole du cneph des Egyp-
ptiens, et ce reptile entourer encore l'œuf du monde
dans les médailles pheniciennes et grecqeus.
Nous verrions la ressemblance entre le système
occidental et l'oriental, s'étendre jusque dans le
nord de l'Europe, et l'office et le pouvoir des
Druides différer peu de celui des Brahmes dans
l'Inde. Nous trouverions que les Etrusques de
qui les Romains ont tiré la plus grande partie de
leur doctrine et de leur religion, avaient un sys-
tème qui rapprochait beaucoup de celui des Perses
et des Indiens, et qu'ils écrivaient comme eux al-
ternativement à droite et à gauche (Diss. relat. et
asia t. 2. p. 348.)
Il n'est pas étonnant, sans doute, que de
hommes, sans communiquer entr'eux, adorent
[Seite 26] également le soleil, la lune, les étoiles; qu'ils
imaginent de profondes cavernes, des bois épais
fréquentés par des esprits, et des rivières qui ont
chacune son génie, sa divinité particulière; mais
qu'ils se rencontrent inventer les mêmes cérémo-
nies pour adorer leurs Dieux, et surtout qu'ils
leur assignent les mêmes attributs, les mêmes
noms, voilà ce qui ne peut être l'effet du ha-
sard.
Les recherches les plus profondes en littéra-
ture, nous démontreraient donc, comme celles
en histoire naturelle, l'unité du genre humain.
Heureux si j'ai pu resserrer les liens de cette fa-
mille désunie, et détruire ce préjugé barbare qui
outrage la nature en persuadant qu'elle a créé
des hommes pour ramper servilement sous d'au-
tres hommes. Quelqu'abject que paraisse ton rang,
homme, connais la dignité de ton être: tu marches
l'égal des plus orgueilleux potentats, et ce front
auguste, fait pour contempler les cieux, ne doit
s'incliner que devant le Créateur de cet immense
univers.
A combien de titres vous appartient la
dédicace de est ouvrage; la reconnais-
sance me faisait dejà souhaiter ardem-
ment de pouvoir un jour vous donner un
témoignage public de ma gratitude, et
c'est encore à vos soins que cette nouvelle
édition doit la plus grande partie des
avantages qu'elle a sur les précédentes.
Depuis plusïeurs années vous n'avez
épargné ni peine ni dépense pour enrichir
ma collection des crânes les plus rares
des peuples d'Amérique et des insulaires
de l'océan austral, qui étaient surtout
l'objet de mes desirs. Lors de mon sejour
à Londres, il y trois ans, vous m'aban-
donnâtes le plus entier usage des richesses
de votre muséum, relatives à l'anthropo-
logie; vous avez laissé sans réserve à ma
disposition les trésors encore inédits de
votre bibliothèque, tels que peintures et
[Seite 28]
dessins d'après nature de la main des plus
plus habiles artistes. J'ai été le maître
d'en prendre copie, comme de décrire tout
ce qui me convenait; aidé par de si puis-
sans secours, j'ai pu, en reimprimant cet
ouvrage, l'augmenter considérablement,
et ils m'ont mis en état d'assurer, sans
craindre d'être accusé de jactance, qu'il
a été composé sur la nature même.
Recevez donc, Monsieur, l'hommage
d'un livre qui vous appartient en grande
partie. Son titre m'est un garant de l'in-
térêt qu'il vous inspirera. La section d'his-
toire naturelle qu'il embrasse ne le cède
à aucune autre pour l'importance, et je
m'étonne qu'elle soit si long-temps de-
meurée dans l'oubli.
L'immortel Linné eut la gloire d'avoir
le premier essaiyé dans son Système de la
Nature, de ramener le genre humain, pour
ce qui a rapport aux différens peuples, à
des variétés constantes; il fit tout ce qu'on
pouvait attendre alors, et donna aux qua-
tre parties de la terre des races parti-
culières.
Mais vos découvertes en procurans des
notions plus exactes sur les peuples dis-
persés dans l'océan austral, ont fait sen-
tir l'insuffisance des divisions admises par
ce grand homme. Je me suis donc écarté
de l'ordre qu'il suivit, et guidé surtout par
la sagacité de vos observations, j'ai ra-
mené les variétés de l'espèce humaine
plus près de la vérité de la nature.
J'ai cru devoir aussi substituer au sys-
tème artificiel de classification des mammi-
fères, d'après les dents, un système plus
naturel fondé sur l'universalité de leur
manière d'être. Sans doute la méthode de
Linné suffisait au temps où il écrivit;
mais aujourd'hui la connaissance d'un
grand nombre d'espèces nouvelles la rend
défectueuse et sujette à beaucoup d'ex-
ceptions.
Je suis très-loin cependant de partager
l'opinion, de ceux qui se sont complu à
imaginer, surtout dans ces derniers temps,
je ne sais quelle continuité ou gradation
dans la marche de la nature, et qui at-
tachent la profonde sagesse du Créateur et
la perfection de la création à ce que la
[Seite 30]
nature ne fait point, comme ils disent,
de sauts; mais que les corps qui consti-
tuent ses trois règnes, sont comme les an-
neaux divers d'une même chaîne. En con-
sidérant les choses sans préjugé, il devient
de toute évidence qu'il existe dans le règne
animal des classes entières, comme les oi-
seaux, et des genres, comme les Seiches, qui
ne peuvent naturellement entrer dans un pa-
reil arrangement par des gradations symé-
triques. D'un autre côté il est des genres
d'animaux, les Gyallinsectes, par exemple
où l'on trouve une si grande différence entre
le mâle et La femelle que, pour suivre cet
ordre, il faudrait les éloigner extrêmement
l'un de l'autre, et assigner une place très-
différente aux sexes de même espèce. les
coupures qui séparent, de la manière la
plus tranchée, les règnes de la nature, lais-
seraient encore dans cette chaîne des hiatus
considérables; quoiqu'un examen impartial
me fasse refuser à la doctrine touchant la
gradation des êtres, l'importante qu'y at-
tache généralement un physique théologique.
Je reconnais cependant son utilité comme
[Seite 31]
moyen de faciliter l'étude de l'histoire na-
turelle.
Elle forme comme la base de tout système
naturel dans lequel la place des êtres est dé-
terminée d'après l'habitude générale et le
plus grand nombre de rapports, tandis que
dans un système artificiel la classification
ne roule que sur un seul caractère particu-
lier.
Comme un système naturel établi sur ces
principes soulage infiniment la mémoire en
même temps qu'il éveille le jugement, il mé-
rite sans contredit la préférence. J'ai donc
donné tous mes soins pour distribuer d'a-
près cet ordre naturel la classe des mammi-
fères, les nombreuses découvertes d'espèces
nouvelles, apportant chaque jour des ano-
malies et des exceptions plus choquantes à
la méthode artificielle de Linné, basée sur
les dents.
Il suffit d'en citer quelques exemples.
Nous connaissons deux espèces de Rhinocé-
ros, qui se ressemblent parfaitement par l'ha-
bitude extérieure mais dont les dents sont
si différentes que, suivant la classification
[Seite 32]
Linnéenne, on rangerait l'un parmi les
Belluæs et l'autre dans les Glires.
De même le cochon d'Ethiopie, dépourvu
de dents incisives, ne devrait pas compter
parmi les Belluæ mais être au nombre des
Brutes.
Je ne parle pas des Fourmilliers dentés
d'Afrique, ni de plusieurs Makis (indris et
laniger
*)
); cependant, d'après l'anomalie
de leurs dents, les premiers ne pourraient
plus trouver place parmi les édentés, ni les
seconds parmi les Makis.
Pour remédier à cette confusion, qui de
l'avis général est une source de difficultés
dans l'étude de la zoologie, je me suis effor-
cé de ranger dans dix ordres naturels tous
les mammifères. Comme ils m'ont plusieurs
fois occupé dans le cours de cet ouvrage,
j'ai cru devoir joindre ici le tableau de cette
distribution.
C'est avec un respect égal à ma con-
fiance que je soumets cet objet, et tous
ceux ou j'ai cru devoir, dans cet ouvrage,
m'écarter de l'opinion des autres, au ju-
gement du savant qu'une des sociétés les
plut illustres, la société royale des scien-
ces, s'honore d'avoir pour président.
Gottingue, 11 avril 1795.
Elle offre un Tableau sinoptique,
propre à donner une parfaite intelligence
de la règle verticale, dont il est parlé
page 215.
La Figure première répond à la
Figure première de la planche
deux.
La Figure deux à la Figure trois.
La Figure trois à la Figure cinq.
Les cinq Crânes très-intéressans qui
y sont représentés font partie de ma
Collection, et donnent la connaissance
[Seite 38] des caractères distinctifs des cinq Varié-
tés principales du genre humain, dont il
est parlé page 216.
Ce Crâne appartenait à un Tongous,
du nombre de ceux appelés vulgairement
(Rehnthier-Tungusen,) Il se nommait
Tschevvin Amureevv, de la horde de Gil-
gegirsk, et habitait à 300 verstes de
Bergen Il se coupa la gorge en 1791.
Schilling, chirurgien principal de VVer-
chnelldinsk fut envoyé pour constater,
d'après la loi, la cause et le genre de mort.
Il donna au recommandable L. B. de Asch,
le crâne de ce Tartare.
Ce dessin est fait d'après le crâne d'un
chef de Caraïbes de l'Ile St.-Vincent. Huit
ans après la mort de ce sauvage, l'illus-
[Seite 39] tre Banks ayant désiré son crâne, le
cèlèbre Anderson, directeur du Jardin
Royal, dans cette contrée, le fit ex-
humer.
Elle offre le crâne d'une jeune Géor-
gienne, prise par les Russes dans la der-
nière guerre avec la Porte. Conduite à
Moskovv elle y mourut subitement Hil-
tebrandt, professeur d'anatomie dans
cette ville fut chargé de rechercher la
cause de cette mort. L'élégance de la
forme de ce crâne le lui fit soigneuse-
ment conserver. Il l'envoya à Pétersbourg,
à l'illustre de Asch.
Elle représente un Crâne d'Otaï-tie,
rapporté sur la demande de M. Banks, par
le brave Capitaine Guil. Bligh, dans le
mémorable voyage où il transporta des îles
[Seite 40] de l'Océan Austral, dans les Indes Occi-
dentales, des drageons de l'arbre à pain.
Ce dessin a été fait d'après le crâne
d'une Négresse de Guinée. Elle mourut à
Amsterdam, âgée de 28 ans Steph. Jo.
Van Geuns, Professeur de médecine à
Utrecht, la soumit au couteau anatomique.
Dès qu'on se propose d'écrire sur les
variétés de l'espèce humaine, et d'indi-
quer les traits qui les séparent, les pre-
mières recherches doivent se porter sur
les caractères qui distinguent l'homme
des animaux. Mais il arrive ici ce qui se
voit le plus souvent en histoire naturelle,
surtout dans la Zoologie, qu'on reconnaît
beaucoup plutôt au premier coup d'oeil,
une espèce de celles qui l'avoisinent,
qu'on n'en énonce la phrase distinctive.
Nous ne confondons pas le rat avec la
souris, le lapin avec le lièvre, et cependant
il est difficile de décrire ces signes carac-
[Seite 42] téristiques qui nous les font distinguer de
suite et frappent tous les yeux. Noire
ouvrage présente les mêmes obstacles; les
plus habiles naturalistes l'ont déclaré avec
candeur. Linné lui-même, cet immortel
génie qui semble avoir été produit pour
caractériser et réduire en un système ré-
gulier tous les objets d'histoire naturelle,
a dit dans la préface de sa Faune suédoise:
Il est des plus difficile de découvrir le
caractère spécifique de l'homme; bien plus,
il avoue qu'il n'a trouvé aucun caractère
qui marque la différence du singe à l'homme:
il s'étonne, dans son Système de la Nature,
que le singe le plus pétulant diffère si peu
du plus sage des humains, qu'on n'a pu
poser encore les bornes qui séparent ces
deux espèces. En effet, il n'assigna point
à l'homme un caractère spécifique, et
plaça le Gibbon (simia longimana) dans
la même série que lui.
Voici l'ordre que je suivrai en décri-
[Seite 43] vant les différences qui distinguent
l'homme des animaux.
1°. Celles qui ont rapport à sa con-
formation extérieure m'occuperont d'a-
bord.
2°. Celles qui tiennent à sa structure
interne.
3°. Aux fonctions de l'économie ani-
male.
5°. Je dirai un mot des maladies
propres à l'espèce humaine.
6°. J'examinerai les caractères regar-
dés d'ordinaire, mais sans fondement,
comme propres à faire distinguer l'hom-
me de la brute.
Je rapporte à la conformation extérieure
des caractères, qui, quoique tenant à la
structure du squelette, se manifestent
cependant à l'habitude extérieure du corps.
Si l'on considère, surtout dans leur ensem-
ble, ceux qui suivent, ils paraîtront suffire
pour caractériser l'espèce humaine:
D. Dents rapprochées également en-
tire elles.
On pourra facilement rapporter à ces
points les autres particularités extérieures
du corps humain. Je vais m'occuper de
chacun d'eux en particulier.
1°. Que la station verticale est appro-
priée à la structure de l'homme.
2°. Qu'elle lui est exclusive: ceci de-
vient évident plus bas (V. §. 10.)
La première de ces propositions se prouve
à priori, par la structure même de l'homme,
à posteriori, par le témoignage unanime
de toutes les nations. Il devient inutile
de s'arrêter plus long-temps sur ce sujet,
malgré l'argument que fournissent les en-
fans qui, vivant parmi les quadrupèdes, en
ont conservé la démarche dans l'âge
adulte. En effet, pour peu qu'on y fasse
attention, on s'aperçoit que rien n'est plus
opposé à la situation naturelle à l'homme.
Il serait aussi absurde de la dériver de
ces exemples, ainsi que son genre de vie,
que de prendre pour le type de la
structure humaine le produit de quel-
[Seite 46] ques conceptions monstrueuses: d'ailleurs
si l'on recherche soigneusement les rela-
tions qu'on a données des enfans sau-
vages, on trouvera dans celles avérées,
qu'ils se tenaient habituellement debout.
Tel était Pierre Hamelena), (Peter the
wild boy, Juvenis Hanoveranus, Linn.)
la fille sauvageb), l'homme des Pyrénées
c), etc. Au contraire l'histoire de ceux
regardés comme quadrupèdes, tels que
le jeune Irlandais, à qui Linné a donné
l'épithète d'Ovinus
d), offre des circons-
[Seite 47] tances qui les rendent très-douteuses. Sans
doute que le sauvage raisonnable, dont
parle ce naturaliste (S. N. ed. XII. T. I.
p. 28) ne marchait pas plus à quatre
pieds qu'il n'avait le corps recouvert de
fourrure comme un animal.
Il est sans doute ennuyeux et pénible
de s'appesantir sur une proposition dont
[Seite 48] l'évidence se manifeste d'elle-même: ce-
pendant l'opinion contraire à la mienne,
de deux hommes de mérite, P. Moscati
et A. Schragee). m'empêche de garder
entièrement le silence. Il me suffira néan-
moins de rapporter quelques-unes des
raisons en ma faveur.
La longueur respective du tronc et
des extrémités démontre au premier
coup-d'oeil, que la nature a formé l'homme
pour qu'il gardât la station verticale.
Je ne partage pas cependant l'opinion
de Daubenton, quand il assure, qu'ex-
cepté l'homme, aucun animal n'a les ex-
trémités inférieures aussi longues que
le tronc et la têtef), pris ensemble.
Plusieurs mammifères, comme le gibbon,
la gerboise du Cap, sont des exemples du
[Seite 49] contraire, la structure de l'homme s'op-
pose évidemment à ce qu'il puisse ja-
mais prendre la démarche des quadru-
pèdes. Les enfans même ne s'avancent dans
cette attitude que les genoux fléchis,
quoiqu'à cet âge les extrémités infé-
rieures soient proportionnellement plus
courtes*). Indépendamment de la lon-
[Seite 50] gueur, la force comparative des extrémi-
tés supérieures et des inférieures prouve
que ces dernières seules ont été destinées
à soutenir le poids du corps. L'ostéogénie
fournit un argument qui rend encore
cette vérité plus évidente: les os du tarse,
et principalement le calcaneum, atteignent
une ossification parfaite bien avant ceux
du carpe. En effet, dans les premières
années de la vie, l'enfant se sert rare-
ment des mains, et commençant dès-lors
[Seite 51] à marcher, ses pieds devaient être pro-
pres à le soutenir debout. Je ne parlerai
pas de la vigueur des muscles des jambes;
elle est cependant si remarquable, sur-
tout dans le solaire et les gémeaux, qu'ils
semblent destinés par la nature à main-
tenir l'homme dans la station verticale
D'après cette considération, Aristote, et les
anciens Anthopologues, pensaient qu'il
avait seul de véritables jambes.
La disposition entière du thorax de
l'homme démontre qu'il lui serait impos-
sible de prendre l'allure des quadrupèdes;
en effet, s'ils sont longipèdes, leur poitrine
est comprimée sur les côtés et carénée an-
térieurement; ils n'ont point de clavicu-
les, ce qui rend leurs membres plus propres
à soutenir le poids du corps. Leur sternum
est plus alongé; leurs cotes plus nombreu-
ses et plus rapprochées de la portion des-
cendante de la crête de l'os des îles, offrent
aux viscères abdominaux un point d'appui
dans la station horizontale, l'homme des-
tiné à marcher à deux pieds, a toutes ses
parties disposées différemment. Sa poitrine
[Seite 52] est applatie, des clavicules éloignent ses
épaules, son sternum est court, et quoi-
qu'il soit plus ample que chez la plupart
des quadrupèdes, son abdomen n'a point
de soutiens osseux. Il suffit de comparer
le squelette d'un quadrupède, surtout à
longs pieds, avec celui de l'homme, pour
se convaincre combien sa structure s'oppose
à ce qu'il prenne leur allure; effectivement
sa démarche serait alors incertaine, chan-
celante et pénible.
L'examen du bassin ajoute encore à ce
que je viens de dire. Sa forme lui est par-
ticulière et constitue un des caractères
distinctifs de l'homme. Elle démontre de
la manière la plus tranchée, combien en
sont éloignés les singes et les autres mam-
maux.
On pourra m'accuser de paradoxe si
[Seite 53] l'avance qu'on ne trouve vraiment de
bassin que dans le squelette de l'homme:
cette assertion n'est cependant pas sans
fondement; en effet, la forme alongée
que présente chez les autres mammifères
l'assemblage du sacrum, du coccix et des os
innommés, est loin d'avoir cette ressem-
blance avec un bassin qu'offre dans le
squelette humain la réunion de ces mêmes
parties. De tous les mammifères, l'Orang-
Outang et l'Eléphant sont les seuls dont le
pelvis ait quelque analogie avec celui de
l'homme; néanmoins dans l'un la longueur
l'emporte sur la largeur, dans l'autre, la
simphise du pubis est très-alongée, et tous
deux ne ressemblent qu'imparfaitement à
un bassin. Cette similitude, qui ne se trouve
que dans l'homme, est due à l'évasement
des os innominés, à la délicatesse des sim-
phises, et à la courbure d'arrière en avant
du sacrum et du coccix.
La face postérieure du bassin donne at-
[Seite 54] tache à des muscles très-forts. Il n'en
est pas dans le corps humain, dont l'é-
paisseur égale celle des fessiers. Une
couche épaisse de tissu cellulaire les
recouvre; ils forment par la disposition et
l'étendue de leurs faisceaux deux cous-
sinets arrondis, qui masquent l'entrée du
rectum. Cette disposition est si remar-
quable, que les plus habiles naturalistes,
els qu' Aristoteg) et Buffonh), ainsi que
Galieni), Hallerk) et les autres célèbres
physiologistes, ont regardé l'absence des
fesses chez les singes, comme le principal
caractère qui les distinguât de l'homme.
La courbure du sacrum et du coccix in-
flue beaucoup, chez la femme, sur la dis-
position des organes internes de la géné-
ration, et particulièrement sur la direction
du vagin. Son axe s'éloigne de celui du
bassin et se dirige bien plus en avant que
chez les autres femelles des mammifères.
Cette conformation rend les accouchemens
plus laborieux, mais elle remédie à beau-
coup d'autres accidents, auxquels la sta-
tion verticale expose la femme pendant
la grossesse.
On doit encore attribuer à cette dis-
position du bassin la direction d'arrière
en avant que suit chez les femmes le jet
des urines, ce qui n'a pas lieu chez les
autres femelles. Ici le méat urinaire ne
vient pas s'ouvrir entre les lèvres du pu-
dendum, mais en arrière et dans le vagira
même. Je me suis assuré que cette dispo-
sition existe également chez les animaux
anthropomorphes, le Papion, le Maimon
et le Macaque.
La direction du vagin peut aussi résoudre
[Seite 56] cette question si souvent agitée du temps
de Lucrece.
Le rapprochement des sexes peut avoir
lieu chez l'homme de différentes maniè-
resl): on en a voulu faire un caractère
spécifique. Il est cependant des causes phy-
siques qui rendent une situation plus
convenable qu'une autre.
En général, une situation contraire pa-
raît mieux s'accorder avec la disposition
réciproque des parties sexuellesn).
La membrane hymen n'a jusqu'à présent
été reconnue que chez les femmes Je n'ai pu
la trouver chez les femelles des singes,
ainsi que les caroncules myrtiformes qui
n'en sont que les débris. Un éléphant fe-
melle dont j'ai examiné avec d'autant plus
de soin les parties de la génération, que je
savais que Trendelnbourg, médecin cé-
lèbre de Lubeck, avait cru y découvrir
quelques traces de l'hymen, ne m'ont
offert rien de semblable.
La présence de cette membrane est d'au-
tant plus remarquable qu'on ne peut lui
assigner d'utilité physique Les opinions
qu'en ont eues les physiologistes sont on
ne peut moins satisfaisantes, particulière-
ment celles de Haller.
‘“Cùm solo in homine sit repertus;
etiam ad morales fines ei esse con-
cessum signum pudicitiae.”’
Linné paraît douter si les nymphes et
Le clitoris ne sont pas particuliers à la femme;
mais aucun deces organes ne lui appartient
exclusivement. Des auteurs respectables
les ont trouvés, ainsi que moi, chez un
grand nombre de mammifères d'ordres dif-
férens, comme le Mandrille, le Lori pa-
resseux, etc.; le clitoris avait la grosseur
du poing dans une baleine de 52 pieds
de long, qui vint échouer en déc. 1791,
sur les côtes de la Hollande, et que j'exa-
minai très-attentivement.
Un Mongou que j'ai conservé vivant
pendant plusieurs années avait les nymphes
presque semblables à celles des femmes.
Il résulte de ce que j'ai dit jusqu'ici sur
la station verticale de l'homme, que le
grand avantage de cette conformation est
le libre exercice des mains les plus par-
faites; elles sont si supérieures à celles des
[Seite 59] antres animaux, que le sophiste Anaxagoro
en conclut que l'homme ne doit son savoir
qu'à ses mains. Cette opinion, qu'Helve-
tius a renouvelée de nos jours, n'est
qu'un paradoxe. Aristote a dit avec plus
de raison, que l'homme seul a vraiment
des mains. Chez les singes anthropomor-
phes la partie principale de la main, le
pouce, est trop courte et presqu'avortée.
La main de l'homme mérite seule le nom
d'organe des organes que lui donne le
philosophe de Stagire.
Les singes et les animaux que l'on
nomme ordinairement anthropomorphes,
comme les Guénous et les Loris, ne sont
réellement ni bipèdes ni quadrupèdes,
mais quadrumanes. Ils ont aux mains de
derrière un véritable pouce. L'homme
destiné seul à se tenir debout, est pourvu
d'un gros orteilo). Je dirai plus, les mains de
[Seite 60] derrière des quadrumanes méritent mieux
le nom de main que celles de devant; elles
sont en effet plus propres à l'appréhension.
Dans certaines espèces de Sajou (le Coaï-
ta) les mains de devant n'ont pas de pouce,
et il n'est pas d'exemple, chez les ani-
maux quadrumanes, d'une pareille ab-
sence dans les mains de derrière.
On peut facilement, d'après ces con-
sidérations, décider si l'Orang-Outang
et les autres anthropomorphes sont desti-
nés à marcher à deux pieds ou bien à
quatre*); ni l'une ni l'autre de ces al-
[Seite 61] lures ne leur est commode: en effet leurs
mains, bien plus propres à saisir les corps
qu'à la progression, démontre, que la
nature les a formés pour vivre principa-
lement sur les arbres. Ils y trouvent leur
nourriture, et pendant que leurs mains de
derrière les soutiennent, ils cueillent avec
celles de devant les fruits dont ils se nour-
rissent. La nature a pourvu les Sajous, dont
les mains sont imparfaites, de queues pre-
nantes; elles entourent les branches des
arbres et donnent à l'animal un point d'ap-
pui solide.
Il est presqu'inutile d'avertir que la pro-
gression dans la station verticale, n'est
chez les singes que le produit de l'éduca-
tion. Lés dessins d'après nature, que nous
avons de l'Orang-Outangp) démontrent-
[Seite 62] combien cette attitude, peu naturelle
lui est pénible. Il ne saurait alors avancer
qu'en s'appuyant sur un bâton, et ses mains
de derrière restent à moitié ferméesq).
Ni le singe ni les autres animaux ne peu-
vent donc jamais marcher debout; l'homme
est le seul des mammifères, qui dans cette
situation puisse conserver l'équilibre en
se portant d'un pied sur l'autre.
La station verticale lui convient telle-
ment que la nature la lui a exclusivement
accordée.
Les dents chez l'homme sont plus éga-
[Seite 63] lement rapprochées que chez les autres
mammaux.
Les incisives inférieures sont plus verti-
cales; et je regarde ce caractère comme un
de ceux qui distinguent principalement
l'espèce humaine.
Les laniaires ne saillent pas et conser-
vent le même ordre que les dents qui les
avoisinent.
Le sommet des molaires présente des
tubercules singulièrement obtus. Celles
des Orang-Outang, des Gibbons et des
autres animaux de ce genre, dont j'ai
examiné le crâne, en diffèrent évidemment.
Enfin la mâchoire de l'homme offre trois
caractères distinctifs: son peu de longueur,
la petite saillie du menton, qui dépend
de la position verticale des dents incisi-
ves, surtout la forme particulière des
condyles, leur direction et la manière
dont ils s'articulent avec les os des tempes.
Ces dispositions qui ne se retrouvent chez
[Seite 64] aucun autre mammifère, prouvent que
la nature a destiné l'homme à se nourrir
de toutes sortes d'alimens, qu'elle en a
fait enfin un animal omnivore.
Je ne parlerai pas du lobe de l'oreille,
du renflement des lèvres, surtout remar-
quable à la lèvre inférieure, ni de beau-
coup de choses d'aussi peu d'intérêt, qu'on
a cependant cru propres à caractériser
l'homme.
Je vais m'occuper du poli et de la gla-
bréité particulière à la peau humaine,
caractère qu'on peut regarder jusqu'ici
comme un de ceux qui distinguent l'homme
des animaux qui ont avec lui le plus de
ressemblance. Linné a cependant assuré
qu'il se trouvait quelque part des singes
moins velus que l'homme. J'avoue que
[Seite 65] j'ai inutilement cherché cette région de
l'univers. Il est certain, au contraire,
que les singes connus sous le nom malais
d'Orang-Outang, tant d'Angola que de
l'île de Bornéo, et le Gibbon, sont tous
beaucoup plus velus que l'homme, fait at-
testé par le témoignage unanime des voya-
geurs les plus véridiques, et par ceux de
ces animaux qu'on a transportés en Europe.
Quoiqu'ils fussent malportans et pas en-
core adultes, ils étaient néanmoins plus
couverts de poils qu'aucun homme.
On a observé, il est vrai, surtout dans
quelques îles de la mer du Sud, des
hommes extrêmement velus. Mais on en
desirerait une description plus détaillée.
Spangbergr), le premier qui en ait
parlé, trouva une semblable peuplade
dans la plus australe des îles Kuriles (l. 45.
d. 50. m.), lorsqu'il revenait du Japon au
Kamschatkas).
J. R. Forster observa quelques indivi-
dus très-velus parmi les insulaires de Tan-
na, de Mallicolo et de la nouvelle Calé-
doniet).
On dit qu'il existe une même race
d'hommes dans l'intérieur de l'île de Su-
matra, les autres habitans les nomment
Orang-Guguu).
Cependant, en général, les hommes sont
moins velus que les animaux, quoique
quelques parties de leur corps le soient
davantage que chez ces derniers, comme
le pudendum, le dessous des aisselles, le
scrobicule. Les anciens firent de cette par-
ticularité un des caractères de l'espèce
humaine.
Nous avons vu les caractères extérieurs
du corps humain; je vais passer à ceux
qu'offre son organisation intérieure (§ 2).
Les bornes de cet ouvrage me forçant
d'abréger, je réduirai cette discussion à
ces deux chefs:
A) Organes qui manquent à l'homme
seul, ou du moins à bien peu d'animaux.
L'intérieur des mammifères, surtout do-
mestiques, présente plusieurs parties qu'on
croyait autrefois appartenir également à
l'homme. Alors les occasions de disséquer
[Seite 68] un cadavre humain étaient rares, et l'amour,
de la Zootomie les faisait négliger. Ces
parties sont:
Le panicule charnu. Ce muscle sous-
cutané ne se trouve que chez les animaux;
cependant Galien, ses sectateurs et même
le restaurateur de l'anatomie humaine,
Vesale, qui relève si souvent les erreurs
de cet ancien médecin, assurent qu'il
existe dans l'homme. C'est Nicolas Sté-
non qui nous fit le premier connaître qu'il
était particulier aux brutes.
Le merveilleux réseau artériel. Galien
le mettait au nombre des organes internes
de l'homme; Vesale, d'après Berenger
de Carpi, demontra qu'il n'en faisait pas
partie.
Le muscle suspenseur de l'oeil. Fallopo
a prouvé qu'il n'appartenait qu'aux ani-
maux.
L'allantoïde. Cette membrane ne se trouve
pas dans le fétus de l'homme. On a démontré
[Seite 69] dernièrement qu'elle n'existait que chez
les autres mammifères, mais non pas gé-
néralement.
Je ne parle pas des organes particuliers
seulement à quelques animaux, quoiqu'on
ait cru que l'homme en jouissait aussi;
tel est le pancréas d'Asélius, le conduit
hépato-sistique, le corps d'Highmore.
Je passe également sous silence les or-
ganes exclusifs à quelques genres des mam-
mifères, mais qui manquent si manifeste-
ment à l'homme que personne ne les lui
attribués; tels sont la membrane cligno-
tante, que je place ici quoiqu'extérieure,
le ligament suspenseur du cou, etc.
Le trou incisif. Il se trouve situé der-
rière les premières dents incisives supé-
rieures; commun à l'homme et aux qua-
drupèdes, il est simple chez lui et propor-
tionnellement moins grand; double chez
la plupart des autres mammifères et chez
beaucoup d'une grandeur considérable.
La célébrité qu'on a donnée à l'os in-
termaxillaire m'oblige d'en parler sépa-
rément. Les deux os qui composent la
mâchoire supérieure sont, chez l'homme,
immédiatement réunis et les dents viennent
s'y implanter; il n'en est pas de même chez
les animaux; un troisième os placé comme
un coin entre les os maxillaires, reçoit les
dents incisives supérieures, ce qui fait
qu'Haller le nomma l'os incisif; mais
comme en le retrouve chez des animaux
dépourvus de cette espèce de dent, tels
que la Brebis, l'Eléphant, le Rhinoceros
bicorne, et même chez les édentés, j'ai
pensé qu'il était plus convenable de le
nommer os intermaxillairew). Il est unique
chez les uns, divisé en deux chez d'au-
[Seite 71] vires, dans tous les cas, des sutures les sépa-
rent des os voisins; l'une est faciale et
s'étend ordinairement des deux côtés du
nez aux alvéoles des dernières dents inci-
sives, l'autre est palatine et va en for-
mant un arc de ce point au trou palatin
antérieur. Camper a regardé l'absence de
l'os intermaxillaire, comme un des prin-
cipaux caractères qui séparent l'homme des
autres mammifères. Cette opinion donne
lieu naturellement aux deux questions
suivantes:
1°. Manque-t-il en effet chez l'homme.
2°. Existe-t-il chez toutes les autres
mammifères.
La première de ces questions excita
dans le 16e siècle de vives discussions
parmi les anatomistes; Galien comptait
parmi les sutures du crâne, celles de l'os
intermaxillaire, ce fut un des principaux
argumens qu'employa Vésale pour démon-
trer que ce médecin n'avait pas composé
d'après le squelette de l'homme, mais sur
celui du singe, le Traité d'Ostéologie qui
[Seite 72] fit loi si long-temps. Malgré les vains efforts
de J. Silvius, pour défendre Galienx),
la question paraissait si parfaitement jugée
ainsi, que ce fut contre toute croyance que
le célèbre Vicq-d'Azyr tenta de démon-
trer qu'il existait chez l'homme quelque
chose d'analogue à l'os intermaxillairey):
mais cette analogie se borne à une petite
fente sémilunaire qui, dans le fétus et
dans l'enfant, se trouve sur les os maxil-
laires et s'avance transversalement derrière
les dents incisives. Quand il reste quelques
traces de cette fissure chez l'adulte, elles
sont depuis long-temps presque effacéesz),
Falloppe avait fait voir, deux cents ans
[Seite 73] avant Vicq d'Azyr, qu'on leur donnait mal-
à-propos le nom de suturea). Au reste,
cette fissure qui est, chez les singes, une
suture remarquableb), ne s'aperçoit pas
[Seite 74] chez l'homme, sur le côté facial de l'os
maxillaire.
Quant à la seconde question, l'homme
n'est pas le seul mammifère chez lequel
manque l'os intermaxillaire, je l'ai cher-
ché inutilement chez plusieurs quadru-
manes.
On ne trouve point les sutures qui ter-
minent cet os dans le squelette de Monkie
(Simia morta. Lin.), que l'on conserve dans
notre Muséum académique; cependant les
autres sutures du crâne sont assez appa-
rentes.
Je n'ai pu également les découvrir dans
un squelette du même singe, que possède
Billmann, célèbre chirurgien de Casselle;
comme l'animal était très-vieux, et que
presque toutes les sutures sont effacées,
on n'en peut rien conclure.
Schacht, professeur d'Harderwich, m'a
[Seite 75] fait voir un troisième singe de cette es-
pèce, chez lequel l'os intermaxillaire man-
quait. Je n'insisterai pas plus long-temps
sur l'absence ou la présence de cet os dans
les autres individus de cette espèce*).
Je n'ai pu, malgré un examen scrupu-
leux, retrouver des traces de l'os inter-
maxillaire dans le squelette d'un des plus
grands singes, antropomorphe de l'île de
Bornéo. Il fait partie du Cabinet d'His-
toire naturelle du prince d'Orange à la
Haye. Les sutures du crâne sont presque
totalement effacées, ce qui, joint à toute
l'habitude du squelette, prouve la vieil-
lesse de cet animalc).
J'ai vu dans le Muséum britannique, les
restes du squelette d'un jeune Orang-
[Seite 77] Qutang de Sumatra; il n'offre aucunes
traces de l'os intermaxillaire, quoique les
autres sutures soient très-apparentes.
Ed. Tison ne l'a point trouvé dans son
Orang-Outang d'Angola, et le dessin que
d'Aubenton a donné du crâne de cet ani-
mal, n'en offre aucunes traces.
Quoi qu'il en soit, l'étendue des mâchoi-
res, la saillie qu'elles font en avant chez
les singes et les autres mammaux, sont
des caractères qui les distinguent de
l'homme également qu'eux.
Je vais choisir, pour m'en occuper, les
plus remarquables de ces différences, en
commençant par la tête:
Le cristalin est proportionnellement plus
petit et moins convexe chez l'homme que
chez les autres mammaux, si l'on en ex-
cepte les cétacés; le trou occipital plus
grand et situé plus antérieurementd),
le cerveau plus volumineux, non pas
comme le croyait Aristote, par rapport
à la masse du corps, mais selon l'observa-
lion de l'ingénieux Sœmmering, compa-
rativement à la délicatesse des nerfs qui
en partente). Si l'on partage, sous le rap-
port physiologique, le système nerveux
en deux parties, dont l'une, qui mérite
particulièrement le nom de nerveuse,
comprend les nerfs, les portions du cer-
veau et de la moelle alongée les plus voi-
sines de leur origine, et dont l'autre, que
[Seite 79] je nommerai sensoriale, soit l'intermède
entre les fonctions des nerfs et celles de
l'ame, on verra que la nature a pourvu
l'homme de cette dernière, plus ample-
ment qu' aucun autre animal.
Sœmmering a fait une observation
non moins remarquable sur les concrétions
pierreuses de la glande pinéale, c'est que,
passé l'âge de 14 ans, on les trouve si
constamment chez l'homme, qu'elles peu-
vent fournir un caractère particulierf),
Il a cependant rencontré de semblables
concrétions dans la glande pinéale d'un
Daim. Si elles manquent quelquefois chez
l'homme adulte, on doit considérer ce
fait comme une anomalie très-rare. J'en
dois un exemple à L. A. Caldani, célèbre
professeur à Padoue, qui m'écrivit en
1786, que sur quatre cerveaux humains,
consacrés à cette recherche, un seul ne lui
[Seite 80] avait point offert de concrétions dans la
glande pinéale, il appartenait cependant
à un sujet avancé en âge.
Le cœur n'est pas placé chez l'homme
comme chez les quadrupèdes; au lieu de
s'appuyer contre le sternum, la situation
verticale du thorax l'oblige de reposer sur
le diaphragme. La base du cœur n'est pas
tournée vers la tête comme dans les autres
mammifères mais vers la colonne épinière,
de manière que sa pointe répond à la ma-
melle gauche. Il s'ensuit que le cœur est
dirigé d'avant en arrière chez l'homme et
plutôt de droite à gauche chez les autres
mammaux. Il en est peu qui aient comme
lui, le péricarpe uni au diaphragme.
Le tube intestinal est parfaitement dis-
posé pour que l'homme soit un animal
omnivore.
Il ressemble à celui des carnivores par la
structure du ventricule et par la briéveté
du caecum. Il se rapproche de celui des
herbivores par la longueur des intestins
grêles, par leur peu de ressemblance aux
gros intestins, par les cellules du colon,
[Seite 81] et l'absence de glandes odoriférantes si-
tuées au voisinage de l'anus.
Le parenchyme de l'utérus a chez la
femme une conformation particulière; et
l'arrière-faix est remarquable par la tex-
ture du placenta, la longueur du cordon
et la veine ombilicale qui y est unique.
La vésicule ombilicale, encore peu con-
nue, me paraît exclusive au fétus humain.
J'ai fait voir dans un autre ouvrageg) où
j'examinais ses analogies avec le sac qui
enveloppe le jaune de l'œuf soumis à
l'incubation, qu'elle repondait au but de
la nature, et se trouvait chez tous les fé-
tus, environ jusqu'au quatrième mois après
la conception.
Cette délicatesse, cette souplesse, propres
[Seite 82] à la toile muqueuse de l'homme, connue
sous le nom de tissu cellulaire, mérite toute
notre attention. On sait que la structure
de cet organe est très-différente dans les
genres comme dans les espèces diverses:
très-solide dans l'anguille, il devient au
contraire délié dans la truite commune.
Zinn, célèbre anatomiste, a démontré
depuis long-temps, qu'il n'avait chez au-
cun autre mammifère la même délicatesse
que chez l'homme.
Je regarde cette structure comme un des
principaux avantages qui le distinguent
des animaux; en effet, la toile muqueuse,
généralement repandue dans toute l'éco-
nomie, depuis les tégumens communs
jusqu'aux organes les plus intérieurs,
forme le lien qui unit entre elles tout es les
parties du corps Elle devient, d'après cette
disposition, le siége principal des forces
vitales (de la contractilité), qui me paraît
peu différer de ce que Sthall nommait le
ton*): il m'est demontré que l'homme doit
[Seite 83] surtout à la souplesse de son tissu cellulaire,
la facilité de s'acclimater partout, qu'il
ne partage avec aucun autre mammifère.
La nature qui fit l'homme omnivore,
voulut aussi qu'il pût habiter tous les
pays. Si une toile muqueuse souple et dé-
liée entre pour beaucoup dans sa structu-
re*), c'est pour qu'il puisse s'accommoder
[Seite 84] plus facilement aux effets des différens
climats*).
Les autres propriétés physiologiques de
l'homme répondent parfaitement à cette
faculté; son accroissement est lent, son
[Seite 85] enfance longue, sa puberté tardive. Il n'est
point de mammaux dont les os du crâne
se joignent aussi tard, dont les dents se
fassent autant attendre, qui soit aussi long-
temps sans se soutenir sur ses pieds, qui
arrivé si lentement à son accroissement
parfait et à la puberté. Aucune autre mam-
mifère ne jouit d'une vie aussi longue,
si on la compare au volume du corpsh).
Une autre propriété particulière à
l'homme, et qui dépend de la station ver-
ticale, c'est que, mesuré le matin, il est
d'un travers de doigt plus grand que le
soiri).
Si l'on considère les organes de la géné-
ration, on verra qu'ils sont soumis chez
l'homme à des lois qui lui sont particu-
lières.
La nature n'a point limité chez lui,
comme chez les animaux, à une époque
de l'année la faculté de se reproduire.k)
Les pollutions nocturnes sont aussi pro-
pres à l'homme; je les mets, quand il est
bien portant, au nombre des sécrétions
naturelles. C'est le moyen que la nature
emploie pour le débarrasser du stimulus
incommode que produit la trop grande
abondance du sperme.
Le flux menstruel est également exclu-
sif aux femmes, mais leur appartient d'une
manière plus générale; elles y sont toutes
assujéties; Pline a eu raison de n'attri-
[Seite 87] buer qu'à elle seule cette propriété. Il est
cependant d'autres femelles, particulière-
ment dans l'ordre des quadrumanes, qui,
au rapport de plusieurs auteurs, éprouvent,
comme la femme, un écoulement périodi-
que. On a dit que chez la femelle du Ro-
lowai (Simia Diana), cet écoulement se
faisait par le sommet de la queue. Depuis
environ vingt ans que j'ai observé des
femelles de différentes espèces de singes,
j'en ai vu quelques-unes sujettes à des hé-
morragies utérines, mais qui ne sui-
vaient aucune période réglée. Leurs gar-
diens les plus sincères regardaient cet
écoulement comme une affection morbifi-
que; plusieurs même m'ont avoué fran-
chement, qu'ils ne le faisaient passer pour
un flux menstruel qu'afin d'exciter plus
d'admirationa).
Je démentirai ailleurs ces relations fa-
bulenses, que nous a laissées la crédule an-
tiquité, de nations entières dont les fem-
mes n'étaient pas réglées.
On s'accorde à regarder la raison comme
le principal avantage que l'homme ait sur
les autres êtres. Mais quand on veut cher-
cher la signification précise de ce mot, on
voit avec étonnement combien les philo-
sophes les plus distingués y ont attaché
d'idées différentes. C'est pour les uns une
faculté de l'ame qui appartient exclusive-
ment à l'homme, tandis que les autres
croient retrouver chez les animaux des
faibles indices de cette précieuse faculté.
Ceux-ci la regardent comme la réunion
des facultés les plus éminentes de l'esprit
[Seite 89] humain*), tandis que d'autres prétendent
que ce n'en est qu'une direction particu-
lière.
Nous donnerons plus facilement et plus
sûrement la solution de celle question, si
nous appelons raison cette faculté qui
rend l'homme le souverain de tous les
êtresl). On ne peut lui contester cet em-
pire, et il est également évident qu'il ne
[Seite 90] le doit pas à sa force Les qualités seules de
son entendement le lui ont mérité; ce sont
elles qui le rendent si supérieur à tout ce
qui respire, et dont l'assemblage consti-
tue là raison*).
Nous avons vu que la nature fit l'homme
pour se nourrir de toute espèce d'ali-
mens et peupler toutes les régions de la
terre. Cette liberté illimitée dans le choix
de sa nourriture; ce pouvoir, presqu'in-
fini, de varier à son gré le lieu de son ha-
bitation, l'exposent à une multitude d'in-
convéniens dont un seul mode de secours
n'eût pas suffi pour le garantir. Le Créa-
teur y pourvut largement, en lui donnant
la raison et ce génie inventif qui, dans tou-
tes les circonstances lui fournit des res-
sources assurées.
Dans la nuit des temps, les nations les
plus instruites ont rendu hommage au gé-
[Seite 91] nie de l'invention. Les Egyptiens l'ado-
raient sous le nom de Thoth, les Grecs
sous celui d'Hermès.
C'est avec raison que Franklin appela
l'homme fabricateur d'instrumens (a Tool
maikng animal. Il fut obligé de tout in-
venter; il se créa des armes, il apprit l'art
de maîtriser le feu, enfin la parole naquit
des secours et des besoins réciproques; la
variété de son langage est un caractère qui
lui est proprem); elle prouve qu'il est de
son invention, tandis que les animaux l'ont
reçu de la naturen).
Les pleurs de la douleur, et le rire, ex-
pression de la gaîté, sont, comme la pa-
role, des attributs de l'espèce humaine;
mais lui sont-ils aussi exclusifs? ceux-ci
ne sont point de son invention, il les reçut
de la nature; et ils servent bien moins
à la raison qu'ils n'expriment les émotions
dont l'ame est agitée.
Beaucoup d'animaux versent des larmes;
mais sont-elles chez eux les effets de la
douleur? Des témoins, dignes de foi, l'at-
[Seite 93] testent pour quelques espèces. Pallas l'as-
sure du Chameauo) et Steller de l'Ours
de merp) (phoca ursina). Il est bien plus
douteux que le rire soit chez quelques
brutes l'expression de la gaîté. Cependant
le Cat affirme qu'il a vu un Orang-Outang
d'Angola (Simia Satirus) rire et répandre
des larmesq).
La pathologie paraît sans doute au
premier coup d'oeil, appartenir fort peu à
l'histoire naturelle de l'homme; cepen-
dant il n'est pas hors de propos de faire le
résumé des maladies particulières au genre
humain. En effet, quoique s'écartant de
la marche régulière de la nature, elles
[Seite 94] tiennent à l'ordonnance naturelle des par-
ties du corps, à sa manière d'être, à l'éco-
nomie animale; elles méritent d'autant
plus de trouver place ici qu'on joint ordi-
nairement à l'histoire de chaque espèce une
notice des maladies qui lui sont propres:
comme l'épizootie des bestiaux, la morve
des chevaux, et la rage spontanée, si fré-
quente dans le genre chien.
On conçoit qu'il ne peut être ici ques-
tion que des maladies les plus remarqua-
bles et d'un petit nombre de faits avérés:
en effet, la Nosologie des Brutes, à l'ex-
ception de celle de quelques animaux do-
mestiques, est peu connue, à raison des
obstacles nombreux et même insurmonta-
bles qui s'opposent à ses progrès.
On peut cependant regarder avec beau-
coup de probabilité, comme exclusives à
l'homme, les maladies dont je vais donner
le tableau.
Toutes les fièvres exanthématiques peut-
être, et plus particulièrement:
La varioler).
Parmi les affections nerveuses:
Les maladies qui pervertissent les fonc-
tions de l'entendement, telles que
la mélancolie, la nostalgie, etc. ...
peut-être le satyriasis et la nympho-
manie.
Les diverses espèces de prolapsus, tels
que le renversement de la vessie dont
on doit le mode curatif au célèbre
Bonns).
Doit-on placer ici les vers intestinaux
de l'homme et les deux espèces de poux
qui lui sont, je crois, particulières?
Je ne parlerai pas des maladies qui sont
beaucoup plus fréquentes chez l'homme
que chez les autres mammifères, sans ce-
pendant lui être exclusives. Telles sont
la difficulté de la dentition, les moles,
l'avortement, les accouchemens laborieux.
Toutes les fois que l'occasion s'est pré-
sentée, j'ai indiqué les caractères qu'on
avait en tort d'accorder exclusivement
à l'homme; il me reste peu de chose à dire
pour terminer cet objet.
Le peu d'espace qui sépare les yeux:
ces organes sont encore plus rapprochés
chez les singes.
Des cils aux deux paupières: on les trouve
chez les quadrumanes, les éléphans et
beaucoup d'autres animaux.
Le nez saillant: ce caractère est beau-
coup plus prononcé chez le Nasique (Si-
mia Rostratat).
Les oreilles immobiles: elles ne sont
pas ainsi disposées chez tous les hommes,
[Seite 99] et n'ont aucun mouvement chez les four-
milliers.
L'organe du toucher: il est commun à
l'homme et à la plupart des quadrumanes:
il en est de même de la luette.
On avait aussi regardé comme particu-
lière à l'homme la faculté de faire des rotsu)
et de ne pas s'engraisser comme la Brutev);
mais ces puérilités ne méritent pas de nous
occuper.
J'ai recherché jusqu'ici les caractères
qui distinguent l'homme de la brute, je
vais approcher plus près de l'objet princi-
pal de cet ouvrage, et rechercher quelles
sont les différences que la nature a mises
entre les races qui composent la nom-
breuse famille de l'homme, examiner si
ces différences sont dues à la dégénération,
ou bien si elles sont considérables au point
d'obliger à reconnaître plusieurs espèces
primitives dans le genre humain, mais il
faut avant tout résoudre ces deux ques-
tions:
1°. Qu'entend-on par espèce en Zoolo-
gie?
2°. De quelle manière, en général, une
espèce primitive dégénère-t-elle en va-
riétés?
Nous disons que des animaux sont de
la même espèce lorsqu'ils offrent entre eux
de si nombreux rapports qu'on se voit
forcé d'attribuer à la dégénération les
différences qui les séparent.
Quand au contraire ces différences sont
si essentielles qu'elles ne s'expliquent
point par les causes Connues de dégénéra-
tion, on regarde comme étrangers les uns
aux autres les animaux qui les présentent.
Jusqu'ici nous n'avons raisonné que par
abstraction; la grande difficulté est de
trouver des caractères suffisans pour faire,
distinguer les pures variétés et les espèces
naturelles.
Dans le siècle dernier, long-temps avant
Buffon, Ray avait pensé qu'on devait re-
garder comme d'une même espèce tous les
animaux qui, s'accouplant ensemble, don-
nent une génération féconde.
La contrainte dans laquelle vivent les
animaux domestiques, semble rendre ce
caractère douteux à leur égard. Frisch, avec
raison, la restreint aux animaux sauvages.
Selon lui, tous ceux qui s'accouplent vo-
lontairementx) ensemble, ne forment
qu'une même race.
Il faut l'avouer cette restriction offre
peu d'utilité.
En effet, on ne peut guère espérer sou-
mettre jamais à cette épreuve cette multi-
tude d'animaux sauvages, surtout les exo-
tiques, et cependant il serait très-intéres-
sant de reconnaître si ce sont de simples
variétés ou des espèces différentes. La dif-
ficulté s'accroît encore pour les animaux
qui habitent des pays éloignés les uns
des autres, comme le singe d'Angola
(Chimpansé) et celui de Bornéo (Orang-
Outang.)
Les animaux domestiques, exclus de
cette épreuve, offrent, bien plus que les sau-
vages, des sujets de doute et d'incertitude.
Prenons pour exemple le chien (canis
Familiaris): les uns rapportent ses variétés
à plusieurs espèces primitives, les autres
pensent que ce ne sont que des dégénéra-
tions du chien de Berger. Il en est qui les
ramènent au Chacal (canis Aureus); enfin
d'autres croient que toutes les variétés du
chien, tirent leur origine du loup.
Les connaissances que fournit l'ac-
couplement des animaux sont donc insuf-
fisantes pour distinguer les espèces des
simples variétés. On tenterait également
envain d'arriver à cette connaissance au
moyen de quelques caractères qui parais-
sent constans. Les pupiles sont rouges
et les poils blancs dans la variété blanche
du lapin; cependant ce caractère in variable
ne saurait devenir spécifique.
L'analogie et la vraisemblance paraissent
pour ainsi-dire les seuls moyens de parve-
nir dans l'étude de la zoologie à la connais-
sance des espèces.
Les dents molaires des éléphans d'A-
frique ne ressemblent point à celles des
éléphans d'Asie; j'ignore si dans ces ré-
gions éloignées, ces animaux ont produit
ensemble, et si leurs dents sont constam-
ment différentes; mais cette variété de
caractère s'étant constamment offerte dans
celles que i'ai observées, et ne connaissant
pas d'exemple d'un changement analogue
provenu de la dégénération, j'en conclus,
[Seite 105] par analogie, que ces éléphans constituent
deux espèces distinctes.
Le furet ne paraît au contraire qu'une
simple variété du putois, non parce qu'ils
produisent ensemble, mais parce que le
premier a les pupiles rouges, et que l'ana-
logie m'a démontré que tous les mammaux
dont la coroïde est privée d'un vernis noi-
râtre, sont des variétés dégénérées de l'es-
pèce primitive.
On voit facilement le but que je me pro-
pose: l'analogie me paraît, en effet, le seul
moyen de parvenir à la solution du pro-
blème précédent (§ 22.)
Mais en suivant cette route, il faut sans
cesse avoir présentes à l'esprit ces deux
règles de philosophie du grand Newton:
1°. ‘“Tout effet naturel semblable doit
être rapporté aux mêmes causes.”’
Ainsi, lorsque j'indiquerai les causes de
la différence de structure des peuples di-
vers, elles se trouveront nécessairement
les mêmes que celles qui ont produit des
changemens analogues chez les animaux
domestiques dispersés dans tous les climats.
2°. ‘“Il ne faut pas, en histoire natu-
relle, admettre plus de causes qu'il n'en
est nécessaire pour l'explication des phé-
nomènes.”’
Si la dégénération me paraît donc ex-
pliquer suffisamment les variétés de struc-
ture du genre humain, je regarderai
comme inutile d'y reconnaître différentes
espèces.
Pour résoudre plus aisément cette ques-
tion, je l'examinerai sous ce double rap-
port.
A) J'exposerai, 1°. les principaux, phé-
nomènes de la dégénération des brutes.
B) 2. Les causes de cette dégénération.
Je parviendrai plus facilement à compa-
rer après cela, dans la section suivante,
les phénomènes de variétés dans l'espèce
humaine, tant à ceux de dégénération chez
les brutes qu'aux causes qui les ont pro-
duits.
Je me bornerai à citer un petit nombre
d'exemples tirés des animaux à sang chaud
et surtout des mammifères, parce que leur
structure se rapproche le plus de celle de
l'homme. Ils suffiront pour démontrer qu'il
n'est, dans le genre humain aucun acci-
dent dont les animaux domestiques ne
nous offrent l'analogue comme un produit
de la dégénération.
Presque tous les cochons sont blancs en
Normandie, noirs en Savoie et d'un rouge
brun en Bavièrey).
La plupart des boeufs de Hongrie sont
d'un blanc grisâtre, il sont roux en Fran-
conie.
En Corse, le pelage des chiens et des
chevaux est agréablement tacheté.
La couleur noire appartient aux din-
dons de la Normandie; ils sont au contraire
presque tous blancs en Hanovre.
En Guinée, les chiens et les oiseaux ga-
linacész) surtout, sont noirs comme
l'homme de ces contrées. Comme lui le
chien (canis ægyptius Lin.) a la peau gla-
bre, et d'une mollesse àl-a-fois onctueuse
[Seite 109] et soyeuse. Elle jouit aussi d'une trans-
piration particulièrea) et plus abon-
dante.
Combien n'observe-t-on pas de variété
de structure dans la laine des brebis des
différens climats, depuis la laine super-
fine du Tibet jusqu'aux poils épais et gros-
siers des brebis d'Ethiopie.
La soie des cochons ne présente pas
moins de différence: ceux de Normandie
l'ont si molle qu'on ne peut en faire des
brosses. Sous ce rapport il existe une dif-
férence extrême entre le sanglier et le
cochon, et surtout sous celui du duvet pla-
cé entre les soies.
Il est des climats qui influent prodigieu-
sement sur les poils de plusieurs genres
de mammifères domestiques: c'est ainsi
[Seite 110] que clans la Natolie les chèvres, les lapins
et les chats d'Angola ont le poil très-long,
fins comme de la soie et presque toujours
d'une blancheur de neige.
Le Patagon et le Lapon diffèrent moins
entr'eux, sous le rapport de la stature que
ne le font plusieurs animaux domestiques
de pays différens. Le cochon d'Europe
transporté à Cuba, est devenu du double
plus grandb), et les boeufs ont éprouvé
le même changement dans le Paraguayc).
Quant à la proportion des parties, quelle
grande différence entre les chevaux ara-
bes et syriaques et ceux du Nord de la
Germanie! entre les boeufs haut montés
[Seite 111] du Cap de Bonne-Espérance et ceux à cour-
tes jambes de l'Angleterre.
Les cochons de Normandie ont les jam-
bes de derrière beaucoup plus longues que
celles de devant.
Dans quelques provinces d'Angleterre
et d'Irlande les boeufs sont privés de cor-
nesd). Ces animaux en ont d'énormes en
Sicile.
Je ne parlerai pas des cornes monstrueuses
des boeufs d'Abyssinie, parce que, d'après
le témoignage de Bruce, leur grandeur
dépend d'une cause morbifique.
Il existe des brebis qui ont des cornes
nombreuses.
Des races entières de cochons n'ont aux
pieds qu'un seul ongle, tandis que d'autres
en ont troise).
Les brebis à large queue, le serin huppé,
[Seite 112] et d'autres variétés offriraient de sembla-
bles différences dans toutes les parties du
corps.
Les variétés de l'espèce humaine offrent
de légères différences dans la forme du
crâne, mais incomparablement plus fai-
bles que celles qu'on retrouve dans les di-
verses races d'animaux domestiques. Le
crâne du nègre ne diffère pas autant de
celui de l'Européen que le crâne du san-
glier de celui du cochon domestique, et
la tête moutonnée du cheval Napolitain est
bien plus éloignée de celle du cheval Hon-
grois, remarquable par son peu de longueur
et par l'étendue de la machoire inférieure.
Camper a observé des fosses lacrymales
très-profondes sur l'Urus, tige des boeufs
domestiques. La dégénération les a entiè-
rement effacées chez ces derniers.
Je ne parle pas de la prodigieuse alté-
[Seite 113] ration du crâne dans les poules Pa-
douannesf)
La vie animale suppose l'existence de
deux facultés; dependant des forces vita-
les, et comme les conditions primitives
et principales, indispensables à l'exécu-
tion des fonctions en général et en parti-
culier.
La première est la faculté de recevoir
l'action des stimulus, de manière que le
corps en soit affecté.
La seconde, le mode de réaction qui en
résulte et détermine l'action du solide
vivant.
Aucun mouvement ne s'opère dans la
machine animale sans ce stimulus et la
réaction qui en est la suite.
Tels sont les principes sur lesquels re-
posent les fondemens de la physiologie
animale, ce sont les sources fécondes de la
génération et des causes de la dégradation
des êtres: une courte explication suffira
pour le démontrer, même aux personnes
peu instruites en physiologie.
J'ai déjà tenté dans un ouvrage ex
professo, sur le sujet qui nous occupe, de
prouver que le système de l'emboîtement
ne répondait ni aux phénomènes de la
nature, ni aux raisonnemens d'une saine
philosophie. On sait que d'après ce sys-
tème, aucun être vivant n'est engendré,
mais qu'au moment de la création pre-
mière, la totalité des germes fut enve-
loppée dans les individus, et qu'ils n'ont
fait depuis que se dérouler successivement;
mais si, ayant égard aux phénomènes de
la génération, on raisonne conséquem-
ment, je crois qu'on dira plutôt:
Le liquide génital est la matière
[Seite 115] informe des corps organiques; mais
elle diffère de la matière inorgani-
que, par les phénomènes d'une force
manifeste, qui, sous un certain con-
cours de maturité, de mixtion, de
lien, etc.... lui fait prendre dans
l'acte de la génération, la forme qui
lui est destinée. Cette forme se con-
serve ensuite par la nutrition, et si
elle a souffert mutilation, se répare
autant qu'elle le peut au moyen de
la reproduction.
Je nomme cette force, impulsion géné-
ratrice, pour la distinguer des autres actes
de la puissance vitale, des expressions in-
signifiantes de force plastique et autres
semblables, dont les anciens se servaient
sans y attacher de sens précis. Je ne pré-
tends pas désigner par-là, une cause, mais
plutôt un effet abstrait, perpétuel, tou-
jours semblable à lui même, par la cons-
tance et l'universalité de ses phénomènes.
C'est ainsi qu'on emploie les mots attrac-
tion et gravité, pour désigner certaines
forces dont les causes restent ensevelies
dans les ténèbres les plus profondes.
Dès que les autres forces vitales sont
excitées par l'application d'un stimulus
convenable, elles entrent en action et réa-
gissent promptement; il en est de même
de l'impulsion génératrice, elle répond
aux agens appropriés; telle est la chaleur
pour l'œuf pendant l'incubation.
La contractilité et l'irritabilité se ma-
nifestent par le mouvement, l'impulsion
génératrice éclate par l'accroissement de
la matière et en lui donnant une forme dé-
terminée; c'est par elle que chaque plante,
chaque animal propage son espèce, soit
que ce phénomène se fasse immédiatement,
ou s'opère graduellement, par métamor-
phose, au moyen de l'action successive de
différens stimulus.
L'impulsion génératrice peut dévier de
sa direction ordinaire de trois manières
principales; de là, les générations mons-
trueuses, les générations métives, qui
viennent du mélange du liquide seminal
de deux espèces différentes, et enfin la dé-
génération en variété proprement dite.
Les générations monstrueuses sont les
résultats du trouble, et pour ainsi dire
de l'erreur de l'impulsion génératrice, ou
dépendent d'un accident étranger, comme
une chute, une pression; dans tous les
cas, les corps organiques prennent alors
une structure difforme, vicieuse, et
contre nature. Cet objet ne doit pas nous
occuper.
Ce n'est pas aussi l'instant de parler
des générations métives. Elles provien-
nent du mélange d'espèces différentes,
et n'auraient probablement jamais lieu
chez les animaux, sans les efforts de
l'homme; en effet, la sagesse de la na-
ture s'y oppose pour prévenir la confusion
des formes spécifiques. Cependant les
métis ne sont pas toujours stériles, au
point d'être incapables de propager leurs
formes nouvelles; leur histoire peut
répandre beaucoup de clarté sur le sujet
qui nous occupe, à raison de l'analogie de
ces métis avec les produits des simples varié-
tés. Ils fournissent encore un argument
victorieux contre le système de l'emboî-
[Seite 118] tement, et prouvent évidemment l'exis-
tence et l'action de l'impulsion généra-
trice; effectivement, si l'on unit pendant
une longue suite de générations, des métis
prolifiques avec les mâles de l'espèce pri-
mitive, on altèrera peu-à peu dans les
produits les formes maternelles, et ils fi-
niront par revenir entièrement à l'espèce
du mâleg).
Le mélange de deux espèces différentes
ne détruit pas, comme nous venons de le
voir, toute la puissance de l'impulsion
génératrice, mais lui donneseulement une
directionirrég ulière; l'action qu'exercent
sur les corps organiques certains stimulus,
pendant une longue suite de générations,
dérange également, mais d'une manière
insensible, la marche habituelle de l'im-
pulsion génératrice. Telle est la cause la
plus fréquente des dégenérations ou des
variétés proprement dites.
Il paraît évident que le climat doit exer-
cer une puissance presqu'infinie sur tous
les corps organiques et particulièrement
sur les animaux à sang chaud; liés intime-
ment à l'atmosphère, ils sont tant qu'ils
existent exposés à son action. On sait au-
jourd'hui quel'air, qu'on regardait comme,
simple, est composé d'une multitude d'é-
lémens: les gas en sont les parties consti-
tutives, la lumière, la chaleur, la matière
électrique entrent comme accessoirs dans
sa composition. La proportion de ces di-
verses parties varie prodigieusement, et
chacun de ces changemens doit modifier
Faction de l'atmosphère sur les animaux
qui y sont plongés Mais il éprouve sur tout
des variations importantes par ces causes
qui mettent tant de disparités entre les dif-
férens climats; l'élévation du sol et des
montagnes; le voisinage des lacs, des
[Seite 120] fleuves, des mers; les vents endémiques,
la situation respectivement aux zones du
globe, etc.
Les animaux à sang chaud respirent dès
leur naissance cet air ainsi modifié: leurs
poumons, laboratoire vivant, le décom-
posent, une partie roule avec le sang ar-
tériel dans toute l'économie, dont se déga-
gent proportionellement d'autres élémens;
une autre est déposée à la surface du corps,
et la dernière, ramenée par les veines à
l'organe respiratoire, est rendue à l'atmos-
phère.
De là, diverses modifications du sang,
des liquides qui en émanent et surtout des
humeurs huileuses, telles que la graisse,
la bile, etc.
De là enfin, leur action sur le solide
vivant, comme autant de stimulus, sa
réaction, et ce qui appartient de plus près
au sujet qui nous occupe, la détermi-
nation et la direction de l'impulsion gé-
nératrice.
L'immense et perpétuelle influence du
[Seite 121] climat sur l'économie animale, l'habitude
et la forme du corps n'avaient pas échappé
aux observateurs des siècles passés; mais
c'est particulièrement dans ces derniers
temps que les grands progrès de la chimie
et la précision des études physiologiques
l'ont mise dans toute son évidence.
Cependant il est souvent très-difficile
de déterminer, dans une variété, ce qui
doit s'attribuer uniquement à l'action du
climat, aux autres sources de dégénéra-
tion, et enfin ce qui appartient à la réu-
nion de ces causes différentes. Néanmoins,
je vais citer des exemples de dégénération
qui me semblent évidemment dus à l'in-
fluence du climat.
Plusieurs animaux blancs dans les ré-
gions septentrionales, prennent dans les
pays plus tempérés une couleur toute dif-
férente: tels sont le renard, le lièvre,
le faucon, le corbeau, le choucas, le
merle, le pinçon, etc.... L'analogie ap-
prend que leur blancheur dépend du froid,
aussi bien que celle des animaux de ces
climats, qui changent pendant l'hiver
[Seite 122] leur couleur d'été en blanc ou en gris,
comme l'hermine, la foine commune, le
lièvre, l'écureuil, le renne, le lacopède,
le bruant des neigesh).
La mollesse soyeuse et la blancheur
éclatante du poil de la plupart des ani-
maux d'Angourie (§ 28.), me paraissent
plutôt dépendre du climat que de la nour-
riture. En effet, les animaux carnaciers
usent d'alimens plus variés et plus nourris-
sans que les herbivores; cependant la
chèvre et le chat ont dans ce pays la même
espèce de fourrure.
La couleur noire qui teint, en Nigritie
et dans quelques autres parties de la Zone
torride, plusieurs espèces d'animaux, tant
oiseaux que mammifères, paraît dépendre
de la même cause.
Il est bien digne de remarque que cette
couleur, ainsi que la blancheur des ani-
maux d'Angola, se conserve constamment
pendant une longue suite de générations,
[Seite 123] chez des individus transportés dans des
pays très-éloignés.
L'action du climat ne se fait pas moins
sentir dans l'accroissement des corps vi-
vans; le froid les rabougrit, tandis que la
chaleur les accroît et les développe: ainsi
les chevaux des pays glacés de l'Ecosse et
du nord de la province de Galles, sont
d'une petite taille. Dans la Scandinavie,
les chevaux et les bestiaux sont comme les
hommes indigènes, grands et vigoureux,
leur stature diminue sensiblement dans la
Gothie méridionale; elle est réduite au
dernier degré de petitesse dans l'Ostro-
gothie boréale.
Les principes de toutes les substances
alimentaires sont probablement les mêmes,
quel que soit le règne dont on les ait tirées.
Cette opinion ingénieuse de G. Fordice
paraît conforme à la vérité; aussi les ani-
maux à sang chaud, carnaciers, ou herbi-
[Seite 124] vores, ont tous un même chyle, un même
sang, malgré la différence de leur nourri-
ture, pourvu qu'elle soit élaborée d'une
manière convenable, par les organes de
la digestion. Cependant il faut conve-
nir que les nombreuses propriétés des ali-
mens, influent prodigieusement sur la
nature et les qualités des animaux. Quel-
ques exemples suffisent pour démontrer
cette vérité.
L'effet que produit une nourriture par-
ticulièré sur le plumage des oiseaux chan-
teurs, prouve l'influence des alimens sur la
coloration: ce phénomène s'observe sur-
tout dans le genre des alouettes et des moi-
neaux; leurs couleurs deviennent foncées
quand ils se nourrissent de graines de
chanvre.
Les brebis d'Afrique, transportées en
Angleterre, offrent un exemple singulier
de l'influence du changement de nourri-
ture sur la texture des poils: la laine de
ces animaux est naturellement grossière
et semblable au poil de chameau; elle de-
vient de la plus grande beauté quand ils
[Seite 125] ont passé quelques années dans les pâtura-
ges d'Angleterrei).
Les animaux domestiques sont des
preuves évident es de l'influence de la nour-
riture sur la grandeur et les proportions
des parties. Les chevaux qui paissent de
gras pâturages, comme ceux de la Frise,
acquièrent une haute stature; ceux qui
vivent au contraire dans les terreins pier-
reux d'Œland, ou dans des bruyères arides,
restent toujours de petite taille. Les boeufs
nourris sur un sol fertile, deviennent gras
et ventrus, leurs jambes sont proportionnel-
lement plus courtes. Ceux du Cap, qui
paissent des gramens moins nourrissans ne
se chargent pas d'autant de graisse, mais
leurs jambes sont plus fortes et plus char-
nues; je ne parle pas des variétés infinies
de poids, de saveur, etc. qui dépendent
toutes de la différence de la nourriture.
Je rapporterai au genre de vie, consi-
déré comme cause de dégénération, tout
ce qui peut à la longue, indépendamment
du climat et de la nourriture, apporter des
changemens dans l'habitude du corps, en
agissant de la même manière et sans inter-
ruption. L'éducation et l'habitude produi-
sent surtout cet effet; les animaux domes-
tiques nous fournissent particulièrement
des exemples du pouvoir qu'elles exercent
sur les êtres.
Voyez le cheval des forêts et le coursier
généreux que l'homme a su dompter; ils
sont aussi différens dans leurs formes que
dans leurs manières: l'un attaque avec les
dents, et ses pieds sont pour lui pres-
qu'une arme inutile; au contraire, l'autre
accoutumé au frein, a perdu l'habitude de
mordre; ses pieds sont armés de fer, et
c'est avec eux qu'il combat son ennemi.
Des oreilles et une queue pendante sont
les signes de servitude et de dégradation
[Seite 127] que portent presque tous les mammiféres
que l'homme s'est assujétis. Les fonctions
même ont éprouvé dans l'esclavage des
changemens considérables. Le sanglier
n'a point le panicule graisseux qui sur-
charge le cochon domestique; le duvet
lanugineux qui garnit ses soies, diminue
et finit par disparaître dans les variétés
domestiques.
Des portées monstrueuses plus fréquen-
tes, des maladies inconnues aux habitans
des forêts, et de nouvelles espèces de
vers, dont on ne retrouve pas même de
trace dans les races sauvages et dans la
variété primitive, viennent affliger les
animaux que l'homme a domptés. Qu'il me
suffise, pour prouver ce que j'avance, da
citer l'hidatide de la peau.k) (All. fin-
nen. ital. Lazaroli.) Ces infiniment petites
statures, fruits d'une union prématurée
que la nature désavoue, sont également
dues à la domesticité.
Les trois causes de dégénération que
nous venons d'examiner, changent peu-
à-peu la manière d'être et le caractère
primitifs des animaux, et ne peuvent pro-
duire de variétés qu'en se perpétuant
pendant une longue suite de généra-
tions.
Mais si deux variétés, résultats de l'ac-
tion lente de l'une de ces causes, viennent
à se mêler ensemble, alors il se forme de
suite un produit nouveau, qui, sans res-
sembler exactement à l'une ou à l'autre,
participe à leurs différens caractères et
va constituer une espèce mitoyenne.
On entend ordinairement par mulet,
le produit de deux espèces entièrement
distinctes, comme celui du cheval et de
l'âne, du serin et de la linotte: je ne par-
lerai point de ceux-ci, puisqu'on ne peut
y rapporter aucune des variétés de l'espèce
humaine. En effet, quoiqu'il y ait dans
les deux sexes plusieurs exemples d'accou-
plemens avec les brutes, jamais cependant
[Seite 129] il n'est résulté aucun fruit de ces unions
criminellesl),m),n),o),p),q).
Je m'occuperai uniquement des mulets
que donnent deux variétés d'une même
espèce; l'union du serin vert et du serin
blanc, par exemple, produit une race nou-
velle pour la couleur ou pour les formes.
On a très-utilement employé ce moyen pour
perfectionner les espèces domestiques,
surtout les chevaux et les moutons.
Le sujet de ce paragraphe semble au
premier coup-d'œil, se rapporter plutôt
à la pathologie qu'à l'histoire naturelle;
cependant, avec un peu d'attention,
on voit clairement qu'il appartient, à
plusieurs titres, aux causes de dégéné-
ration.
Il existe chez les animaux plusieurs
qualités extérieures qui, aux yeux du
vulgaire, ne paraissent nullement dépen-
dre d'une affection maladive, elles y tien-
nent néanmoins de très-près et se trouvent
le plus souvent unies à une constitution
valétudinaire. Telle est la blancheur de
quelques animaux, que Bacon a nommée
couleur de la faiblesser); l'exemple des
bœufs de Hongrie, qui deviennent blancs
après la castration, démontre assez que
[Seite 132] la débilité de la constitution, est, dans
bien des cas, la cause de ce défaut de co-
loration: d'ailleurs on observe qu'il s'y
joint presque toujours quelques maladies;
les chiens et les chats d'Angora, ont géné-
ralement l'ouie dure.
La nature, au bout d'une longue suite
de générations, s'accoutume insensible-
ment à l'action de quelques-unes des ma-
ladies héréditaires; elles deviennent avec
le temps, moins incommodes, moins fà-
cheuses, et finissent par mériter à peine le
nom de maladie. Cette blancheur contre
nature qui, jointe à l'absence de la muco-
sité noirâtre qui vernit l'intérieur de l'œil
des animaux à sang chaud, constitue cette
maladie connue sous le nom de leucœthio-
pie, nous en offre un exemple.
On aperçoit facilement dans un foetus
attaqué accidentellement de cette affection,
car elle est toujours congéniale, un genre
de cachexie lépreuse; mais dans la variété
du lapin blanc, où une longue hérédité a
presque naturalisé la leucœthiopie, on ne
[Seite 133] retrouve plus de traces de la maladie
primitive, qu'indique cependant l'analo-
gie avec les animaux, dont la blancheur et
les pupilles rouges sont une anomalie.
La zoologie assigne an furet, comme espèce
particulière, une place dans le genre des
martes; néanmoins, si toutes les probabi-
lités ne me trompent pas, ce n'est qu'une
simple variété du putois, produite par la
leucœthiopie, comme je l'ai dit au para-
graphe 23.
L'altération des formes ou des mutilations
répétées, à dessein ou par l'effet du ha-
sard, pendant une longue suite de géné-
rations, peuvent-elles enfin changer la
nature au point de devenir counée? Si des
auteurs ont adopté cette opinions) elle
a aussi trouvé des contradicteurst).
Les premiers citent à leur avantage des
chiens et des chats, à qui l'on avait coupé
la queue et les oreilles, et dont les petits
sont nés, privés de ces parties. Il est éga-
lement certain que les enfans viennent
quelquefois au monde avec les marques des
cicatrices de leurs parens, et qu'il naît
chez les nations, soumises à la circonci-
sion, des garçons sans prépuceu). Buffon
rapportait à la même cause, des caractères
de différens animaux, comme les callosités
de la poitrine et des genoux du chameau,
la dénudation furfuracée de la base du bec
du fren. Ceux qui ne partagent pas ce sen-
timent, rejettent l'opinion de Buffon comme
un petition de principe, et attribuent
au hasard les exemples que j'ai cités.
Je ne prononce pas maintenant sur cette
question; mais je suis prêt à me ranger avec
les derniers, s'ils m'expliquent pourquoi
des conformations particulières, obtenues
[Seite 135] d'abrod de l'art, ou l'effet d'accident, ne
pourraient passe transmettre, tandis qu'on
ne saurait assigner d'autres causes à des
caractères communs à toute une race, qu'on
observe particulièrement au visage, dans
la forme du nez, des lèvres, des sourcils,
et qui se propage dans les familles pendant
une suite plus ou moins nombreuse de gé-
nérations, avec plus ou moins de constance
et de régularité. Les maladies organi-
quesw), le bégaiement et les autres vices
de prononciation sont aussi héréditaires.
Voudrait-on attribuer tous ces faits au
hasard?
L'évidence de la plupart des causes de
dégénération que nous avons indiquées,
est si manifeste, qu'il est facile de leur
rapporter le plus grand nombre des phé-
[Seite 136] mènes de dégéneration que nous avons
déjà examinés; mais plusieurs d'entre elles
peuvent agir simultanément, ou en sens
contraire. Les corps organiques varient à
l'infini dans leur disposition et leur résis-
tance à la dégénération; les effets de ces
causes sont eux-mêmes singulièrement mo-
difiés, selon que leur action est médiate
ou immédiate. Enfin il est possible qu'ils se
conservent pendant une longue suite de
générations, comme ils peuvent disparaître
dans un court espace de temps. Cette
multitude de rapports différens exige la
plus grande circonspection dans la recher-
che des causes des variétés.
Je vais établir, comme corollaire, les
règles les plus importantes qui doivent di-
riger dans ce travail:
1. Plus le concours des causes de dégé-
nération est nombreux, plus leur action
se prolonge sur une même espèce, plus
elles en allèrent ses formes primitives.
Sous ce rapport aucun animal n'entre en
[Seite 137] comparaison avec l'homme Il est omnivore,
cosmopolite, et soumis à la vie domestique,
presque dès son origine, long-temps avant
les autres animaux. Les effets du climat,
de la nourriture et du genre de vie se trou-
vent donc réunis chez lui depuis un temps
considérable.
2. Une cause de dégénération, assez
puissante d'ailleurs, peut être modifiée
et même annullée par des circonstances
particulières, surtout, si leurs effets lui
sont absolument opposés.
C'est ainsi que sous des latitudes pa-
reilles, des températures très-différentes
selon la nature du sol, une situation plus
basse ou plus élevée, un ciel pur ou né-
buleux, le voisinage des montagnes, des
forêts, des marais ou des mers, etc.
produisent, dans la manière d'être des
animaux, des effets dissemblables et même
opposés.
3. Souvent un phénomène remarquable
de dégénération est moins un produit im-
[Seite 138] médiat, qu'un produit éloigné d'une cause
qui échappe aux premiers regards.
La couleur foncée de plusieurs nations
ne dépend pas uniquement de l'action di-
recte du soleil sur la peau, mais tient en-
core à l'influence qu'il exerce sur les fonc-
tions du foie.
4. Les changemens dus à des causes
éloignées sont les plus intimes, les plus
fortement empreints, ceux qui se propa-
gent avec le plus d'opiniàtrété dans les
générations suivantes.
Voilà je pense pourquoi la couleur noire
des habitans de la Zone torride (§ 34.) per-
siste beaucoup plus sous un ciel étranger
que la couleur blanche des peuples du
Nord.
5. Les influences médiates de sembla-
bles causes peuvent être si éloignées
qu'elles aient même échappé à nos con-
jectures. On doit y rapporter tous les phé-
[Seite 139] nomènes de dégénération encore énig-
matiques.
Sans doute il faut aussi attribuer à ces
causes médiates, en grande partie in-
connues, les formes nationales du crâne,
la couleur qu'ont les yeux chez des races
entières, etc...
Après avoir considéré chez las animaux,
les causes et les modes de dégénération
en général, je vais en faire l'application
aux variétés de l'espèce humaine. Je trai-
terai de chacun d'eux en particulier, et j'y
joindrai tout ce qu'on sait des causes aux-
quelles ils peuvent se rapporter. La couleur
de la peau m'occupera d'abord: ce carac-
tère trompe quelquefois à la vérité, mais
il est cependant plus constant et se trans-
met plus sûrement qu'aucun autrex)
; il
[Seite 141] paraît bien manifestement chez les mé-
tis, nés de variétés diversement colorées
(§ 37), par les mélanges des teintes pa-
ternelles et maternelles, et l'on connaît
son accord avec la couleur de l'iris et des
cheveux, sa relation avec les tempéra-
mens. C'est aussi le caractère qui frappe
le plus les yeux, même des personnes les
moins instruites.
Je me suis déjà occupé du tissu muqueux
ou cellulaire, et de son importance dans
la machine animale (§ 17.); il en forme,
pour ainsi dire, la base et le soutien; il
s'insinue entre toutes nos parties et par-
vient jusqu'à la moelle des os. On le
trouve encore à l'extérieur, ou rap-
proché dans un tissu blanc et solide, il
revêt entièrement la péripherie du corps et
prend le nom de derme. Il devient alors le
rendez-vous d'une multitude innombrable
[Seite 142] de nerf, de veines lymphatiques et de
vaisseaux sanguins, qui s'y terminent en
formant les réseaux les plus déliés et les
plus délicats.
Les nerfs apportent le sentiment au
derme, le constituent l'organe du tact et
pour ainsi dire la sentinelle du corps.
Les vaisseaux lymphatiques en font un
instrument de résorbtion et d'inhalation.
Les vaisseaux sanguins donnent aux té-
gumens communs des fonctions analogues
a celles du poumon et du tube intestinal;
ils deviennent aussi un laboratoire chimique
et le grand dépurateur de la machine hu-
maine. Je ferai bientôt voir leur prodigieuse
influence sur la Coloration de la peau.
Le derme est recouvert d'un léger mu-
cilage, nommé réseau de Malpighi, du
nom de celui qui l'a décrit le premier. Il
forme le moyen d'union entre le cuir et
l'épiderme. Ce dernier est demi-transpa-
rent, s'étend sur toute la superficie du
[Seite 143] corps, et se trouve à la naissance exposé
le premier au contact de l'air atmos-
phérique.
Loin d'avoir comme le cuir des nerfs et
des vaisseaux, ce mucilage, ainsi que
l'épiderme en est entièrement privé. Une
structure infiniment simple n'est pas leur
seul rapport; leurs parties integrantes pa-
raissent les mêmes, et il est très-vraisem-
blable que le réseau de Malpighi produit
la cuticule qui le recouvre*).
Le siége de la couleur se trouve dans ces
deux dernières couches des tégumens com-
muns; chez les blancs elles sont incolores,
et laissent aperc voir la blancheur rosée,
particulière au derme; dans les autres in-
dividus, la couleur de la peau est fixée dans
le réseau de Malpighi, et l'épi derme par-
ticipe manifestement à cette teinte, mais
elle y est moins sensible. Plus la couleur
est foncée, plus le réseau prend de consis-
tance et se rapproche de la nature de l'épi-
derme. Il devient au contraire plus mu-
cilagineux à mesure que la teinte s'é-
claircit.
La couleur de la peau semble chez
[Seite 145] l'homme passer par toutes les nuances, de-
puis les lis de la jeune Européenne jus-
qu'au noir foncé des habitans des rives du
Sénégal et de la Gambiey). Aucun de ces
modes de coloration n'est cependant tel-
lement propre aux indigènes d'un même
pays, aucun n'appartient si exclusivement
à un peuple, qu'on ne puisse le retrouver
chez des individus d'une nation différente;
néanmoins on peut en général reduire à
cinq classes principales toutes les variétés
héréditaires de la couleur.
1°. La blancheur, qui appartient à la
plupart des Européens, doit tenir le pre-
mier rang. Des joues vermeilles distinguent
presqu' exclusivement cette variété. On ne
[Seite 146] les retrouve que très-rarement chez d'au-
tres peuples.
2°. Le jaune ou couleur de buis (ang.
yellow-olive tinge): il fait la nuance entre
la teinte du froment et celle des coins cuits;
ou de l'écorce de citron desséchée. C'est la
couleur des nations Mongoles.
3°. Le bronsé (ang copper-colour): c'est
un orange foncé, comme ferrugineux,
et très-semblable à la canelle ou au tan-
nin. Ce mode de coloration est propre aux
peuples de l'Amérique.
4°. Le basané (ang. tawny): il tient
le milieu entre la couleur de la châtaigne
et celle du girofle ou du bois de Mahalebe.
Il appartient au Malais et aux habitans de
l'Archipel austral.
5°. Le noir (ang. tawny black): il ap-
proche de celui de la poix chez quelques
nations nègres, mais il n'est pas exclusif
à ces peuples; on le trouve mélangé à la
couleur principale dans les variétés du
[Seite 147] genre humain les plus différentes. Les in-
digènes du Brésil, de la Californiez), des
Indes, et des îles de la Mer du Sud, en sont
des exemples. Sons le rapport de la colo-
ration, les insulaires de Tongatabu et de la
nouvelle Calidonie forment une nuance
insensible entre le basané des O-Taïtiens
et le noir des habitans de la nouvelle Hol-
lande.
On connaît parfaitement aujourd'hui
le siége de la couleur de la peau. La distri-
bution de ses variétés en classes, quoiqu' ar-
bitraire, semble claire et satisfaisante;
mais la difficulté consiste à découvrir les
causes qui les produisent: on s'est sur-
tout efforcé de donner l'explication de la
noirceur des nègresa); cette couleur dès
[Seite 148] les premiers temps, a dû fixer, plus que
tout autre, les regards des Européens, et
appeler leurs recherches. Je ne rapporterai
pas la multitude d'hypothèses imaginées
à ce sujet; elles sont assez connues et d'ail-
leurs on a pris soin de les réunirb). L'opi-
[Seite 149] nion que je vais exposer me paraît la plus
conforme à la vérité:
La cause prochaine de la teinte noire
et brûlée des dernières couches des tégu-
mens communs doit s'attribuer à une sur-
abondance de carbone dans l'économie
animale, rejeté au-dehors avec l'hydro-
gène par l'action du derme; l'oxigène de
l'atmosphère le précipite et il vient se
fixer dans le réseau muqueux de Malpighi.
On sait qu'au moment de la naissance
les nègres ne sont pas noirs; ils ne le de-
viennent que par le contact de l'air at-
mosphérique.
Cette couleur semble tenir aussi à
l'action des vaisseaux sanguins du derme,
qui séparent et fixent le carbone (§. 42.)
Ce travail est-il troublé ou interrompu,
la peau présente çà et là des taches d'une
blancheur de neige chez le nègre et
l'homme basané.
Une cause quelconque vient-elle exciter
chez les blancs l'action des vaisseaux du
[Seite 150] derme, il paraît sur la peau des taches
rousses ou basanées, d'une couleur ana-
logue à celle des nègres.
En général le carbone paraît prédomi-
ner dans les tempéramens mélancoliques,
et l'on remarque un accord manifeste entre,
le foie, les tégumens communs, et leurs
dépendances. C'est au concours mutuel de
ces deux organes qu'on doit principale-
ment la dépuration de la masse du sang.
L'ardeur d'un soleil brûlant provoque
et augmente étonnamment, entre les tro-
piques, l'action du climat sur les fonctions
du foie. Les maladies bilieuses sont par
cette raison endémiques et nombreuses
dans cette partie de la terre et le tempé-
rament des indigènes est en général bi-
lieux et irascible. On a également obser-
véc) depuis long-temps que les Européens,
fixés aux Indes, et surtout leurs enfans,
participaient de cette constitution.
Les chaleurs les plus longues et les plus
fortes, des qualités chimiques, particu-
lières à l'atmosphère, dues à des vents spé-
cifiques, à des pluies, etc. mettent au-
dessus de toute comparaison le ciel brû-
lant des régions humides et marécageuses
de l'Afrique orientale et occidentale, situé
sous la Zone torride.
Les nègres indigènes; l'un des plus an-
ciens peuples du monded), sont exposés
à l'influence du climat depuis un nombre
infini de générations: il n'est pas étonnant
qu'une disposition qui a jeté des racines
si profondes, se conserve la même sous un
ciel étranger, pendant les premières gé-
nérations. La constance de la couleur des
nègres semble démontrer qu'elle est le
produit d'un laps de temps considérable.
D'après cela on doit regarder comme un
miracle de la nature l'histoire, si elle est
[Seite 152] véritable, de ces Portugais qui, en 1500,
émigrèrent en Guinée, et dont les des-
cendans sont devenus, dans l'espace de
quelques siècles, parfaitement semblables
aux indigènese), seulement par l'effet
de la puissance du climat!
L'exposé sommaire que je viens de faire
des causes de la couleur de la peau est
pleinement confirmé par des recherches
plus exactes, et par un grand nombre d'ob-
servations liées et puisées dans l'histoire
naturelle de l'homme.
La chimie antiphlogistique a prouvé que
[Seite 153] le carbone et un des élémens du corps hu-
main, et le principe de tome coloration
obscure depuis le jaune jusqu'au noirf)
;
mais comme la surabondance de ce prin-
cipe pourrait devenir dangereuse, l'éco-
nomie animale s'en délivre par plusieurs
émonctoirs, dont la peau et le foie sont
les principaux.
La pathologie vient ici, comme en beau-
coup de circonstances, éclairer la physiolo-
gie et démontre les rapports mutuels du foie
et des tégumens communs. Quand je n'in-
sisterais pas sur l'analogie de la couleur
dans l'ictère avec les teintes nationales de
la peau, il y aurait encore des phénomè-
nes dignes de toute notre attention, com-
muns aux ictériques et aux nations co-
lorées. La cornée opacte est, en effet, éga-
lement jaunâtre chez les uns et chez les
autres, nominativement chez les In-
diensg), les Américainsh) et les nè-
gresi).
La peau prend, dans la jaunisse, selon
le degré de la maladie, les diverses teintes
des nations colorées, et il n'est pas rare
qu'elle les conserve après la guérisonk).
Une métastase critique a quelquefois,
dans la mélancolie, occasionné à la peau
[Seite 155] des taches d'une couleur analogue à la
teinte des nègresl).
La couleur de cire qu'a la graissem)
chez les peuples basanés, provient de
son affinitén) avec la bile.
Il faut rapporter à cette cause la couleur
foncée et l'odeur d'huile animale que con-
tractent les nations qui consomment une
grande quantité de cette substanceo).
Les O-taitiens recherchés, qui veulent
blanchin, vivent, chaque année pendant
plusieurs mois, uniquement des fruits de
[Seite 156] l'arbre à pain. Ils attribuent à cette nourri-
ture de grandes vertus pour blanchir la
peaup). Effectivement elle devient moins
foncée pendant qu'ils en usent, mais il
faut compter pour quelque chose le sé-
jour qu'ils font dans leurs maisons, où
ils sont couverts de vêtemens.
Nous voyons tous les jours combien la
privation du contact de l'air libre peut
donner d'éclat à la blancheur de la peau:
nos élégantes, qui sortent peu l'hiver,
ont la peau d'une blancheur éblouissante
au retour de la belle saison; mais si elles
s'exposent ensuite, sans precaution, à
l'ardeur du soleil, elles brunissent sensi-
blementq).
Si le changement de saison agit d'une
manière aussi marquée sur la teinte de
la peau, on ne doit pas s'étonner que des
climats si différens les uns des autres,
dans le sens indiqué (§ 34.), exerce une
puissance si grande et si durable sur la
couleur nationale. Il suffit pour mettre ce
pouvoir en évidence, et faire varier la
couleur des peuples, de quelques degrés de
latituder), ou même sous des latitudes
[Seite 158] semblabless) du concours des causes dont
j'ai parlé ci-dessust).
Les Créoles sont des exemples frappans
de l'action du climat sur la couleur de la
[Seite 159] peau; j'entends par ce nom, qu'on a sou-
vent mal-à-propos appliqué aux mulâ-
tresu), désigner des personnes nées aux
Indes Orientales ou Occidentales, de pa-
rens Européensw)
x); leur physionomie
semble empreinte des ardeurs du midi.
Les femmes, d'ailleurs, très-blanches et
très-belles, se distinguent surtout des
Européennes, et même de leurs sœurs
nées en Europe, par leur chevelure et le
[Seite 160] feu de leur regardy). Le descendans des
Mongoles et des Perses qui ont émigré
aux Indes Orientales, offrent les mêmes
caractèresz).
Les enfans issus d'individus colorés, re-
çoivent constamment une couleur qui
semble le résultat du mélange des teintes
de leurs pareils; il est cependant des exem-
ples de métis, qui n'avaient la couleur que
de l'un d'euxa). Mais en général, cette
teinte héréditaire mixte est constante, et
l'on peut, sous ce rapport, suspecter le té-
moignage de J. Bruce; selon lui, les enfans
de quelques villages du royaume de Tigré,
sont toujours noirs, lors-même qu'il n'y a
que l'un ou l'autre de leurs parens de cette
[Seite 161] couleur, et l'union de l'Arabe avec la né-
gresse, ne produit que des enfans blancs
comme euxb).
Les Métis ont reçu, suivant la couleur
de leurs parens, des noms particuliers. Je
vais les exposer d'une manière synoptique.
L'union des blancs avec les nègres donne
des Mulàtres
c).
Des blancs avec les Indiens, des Métis d).
Des blancs avec les Américainse), des
Métis, Métifs
f), Mestindes
g) ou Mame-
lucks
h).
Des nègres avec les Américains, des
Zambes
i) qu'on nomme aussi Mulàtres
k),
Lobest
l), Caribocas et Kabugles
m).
Dans ces produits divers, on reconnaît
la couleur et les traits des pères et des
mères, mais confondus et mêlés parfaite-
ment ensemble Ils sont tous plus ou moins
noirs ou jaunes, et leurs joues offrent à
peine les traces d'un faible incarnat. Ils
ont tous les yeux noirs, mais leur che-
veux ne sont pas toujours de cette couleur.
Les mulâtres sont les seuls qui prennent
généralement une chevelure crêpue.
L'union des Mulâtres donne des Caqs n).
Celle des Européens avec les Mulâtres,
des Tercerons
o), Quarterons
p), Mo-
riscs
q) ou encore Métis
r). Ils ont la che-
velure et le visage des Européens, leur
peau est légérement basanée, leurs joues
sont vermeilles, les lèvres et les parties
sexuelles violâtres.
L'union des Nègres avec les Mulâtres
[Seite 165] donne des Griffes
s), des Cabres
t) ou
Zambes de Mulatres
u).
Des Européens avec des Métis Indiens,
des Castis
w).
Des Européens avec les Métis Améri-
cains, des Quarterons
x), Quatralves
y),
et encore Castis
z).
Des Américains avec les Métis des Tré-
salves
a).
Des Américains avec les Mulâtres, des
Métis
b).
Des Européens avec les Zambes de pre-
mière génération des Mulatres
c).
Les Espagnols donnent, par mépris, le
nom de Cholos au produit des Zambes
entre euxd).
Des Américains avec ces mêmes Zambes
des Zambaiges
e).
L'union des Européens avec les Terce-
rons, donne des Quarterons
f), Ocha-
vous
g) ou Octavons, ou Alvins
h). Les
observateurs les plus exacts assurent qu'il
ne leur reste aucunes traces de leur ori-
gine africainei).
L'union des Mulâtres avec les Tercerons
donne des Saltatres
k).
Des Européens et des Castis Indiens,
des Postis
l).
Des Européens avec les Quarterons Amé-
ricains de la seconde génération, des Oc-
tavons
m).
Des Quarterons avec des Métis Améri-
cains de la première génération, des Coyo-
tes
n).
Des Griffes avec des Zambes de première
génération, des Giveres
o).
Des Zambaiges avec les Mulâtres, des
Cambujor
p).
On étend quelquefois la généalogie des
Métis, jusqu'à la quatrième génération,
et l'on appelle les enfans des Européens et
des Quarterons de la troisième génération,
Quinterons
q), en espagnol Puchuelas. On
désigne également par la même expres-
sion les enfans des Européensr) et des Octa-
vons Américainss). Mais ils ne doivent
conserver aucune trace constante de leur
[Seite 169] origine mélangéet), si comme l'assurent
des témoins oculaires, très dignes de foi,
les produits de la troisième génération,
ressemblent parfaitement aux Européens
pour l'a couleur et la physionomie, ce
qu'on a peine à croire.
Les hommes de couleur et surtout les
Nègres ont souvent sur la peau des taches
d'une blancheur de neige: on les nomme
alors Nègres-pies (Ang. Piébald-Negroes).
Ce phénomène, qui ne paraît pas toujours
dès la première enfanceu) ajoute beaucoup
à ce que j'ai dit (§ 44.) de la puissance
des vaisseaux sanguins du derme, pour
porter au-dehors la matière charbonneuse,
qui ensuite est précipitée par le contact
de l'oxigène.
J'ai vu à Londres un Nègre pie, il se
nommait Jean Richardson et servait T.
Clarck, qui faisait voir à Exeter-change
des animaux exotiques vivans. Ce jeune
homme était parfaitement noir, à l'ex-
ception des régions ombilicales et épigas-
[Seite 171] triques et de la partie moyenne des extré-
mités inférieures, ce qui comprend les
genoux et les portions voisines du fémur
et du tibia. Toutes ces parties d'un blanc
de neige étaient tachetées de noir, comme
une peau de panthère. Il avait aussi les
cheveux de deux couleurs. Les blancs oc-
cupaient le milieu du sommet de la tète et
descendaient à angle aigu du vertex vers le
front. Leur blancheur n'égalait pas celle de
la peau, mais tirait un peu sur le jaune. Au
reste, les cheveux blancs et les noirs étaient
crépus comme ils le sont chez les nègres.
J'en conserve un échantillon depuis deux
ans, et je les trouve de même qu'ils étaient
alors. Je possède le dessin de ce jeune
homme et de trois autres Nègres pies, dont
l'un mâle et les deux autres du sexe fémi-
nin. Tous avaient l'abdomen et les membres
inférieurs blancs en plus ou moins grande
partie. Les pieds, les mains et les aînes
qui noircissent d'abord chez les Nègres,
étaient entièrement de cette couleur; le
reste du corps présentait des taches blan-
ches, disposée d'un manière assez symé-
[Seite 172] trique. Celui que j'ai examiné avait les
gencives et l'intérieur de la bouche d'un
beau rouge. Ses parens comme ceux des
Nègres-pies dont j'ai lu l'histoire, étaient
parfaitement noirsw). Buffon a donc eu
tort de croire que ces individus fussent le
produit d'un Nègre et d'un Nègre blanc.
Je consacrerai à ces derniers un article
à part.
Il ne faut pas confondre ces taches de
la peau, qui n'en changent aucunement
le tissu, avec celles qui altèrent sensible-
ment l'organe cutané, le rendent raboteux
furfuracé et comme écailleux. Cette es-
[Seite 173] pèce de maladie s'observe particulièrement
aux Malabaresx) et chez les Tartares
Tschulymiquesy).
Les Nègres ne sont pas les seuls dont
la peau offre des taches blanches, douces
au toucher et provenant d'une action par-
ticulière des plus petits vaisseaux du derme.
Ce phénomène s'observe quelquefois chez
les blancs; je l'ai remarqué sur deux Al-
lemands; l'un était un jeune homme et
l'autre un vieillard de plus de soixante ans.
Ils avaient la peau jaunâtre et irrégulière-
ment marquée de taches d'une grande blan-
cheur. Elles parurent spontanément chez;
l'un dans la première enfance, chez l'autre
dans l'âge viril, et s'accrurent d'une
manière insensible.
Nous avons démontré par des faits la
puissance de l'action des petits vaisseaux
du derme sur la coloration de la peau;
d'autres phénomènes analogues semblent
prouver que sa cause prochaine se trouve
dans la surabondance du carbone fixé
dans le réseau de Malpighi. (§ 44. 45.)
Les Européennesz) malgré leur blan-
[Seite 175] cheur, ont souvent, pendant la grossesse;
la peau plus pu moins couverte de taches
charbonneuses, qui s'effacent insensible-
ment après les couches. La chimie mo-
derne explique sans peine leur naissance.
Avant la conception la faible quantité de
carbone surabondant s'échappe facilement
par la transpiration, mais dans la grossesse
il existe de plus le carbone du fétus, qui,
plongé dans la liqueur de l'amnios, ne trans-
pire pas encore. Le sang de la mère con-
tient donc alors une surabondance de ma-
tière charbonneuse; la transpiration ne
peut plus l'excréter en entier; la portion
excédante vient se fixer dans le réseau de
Malpighi, et colore la peau jusqu'à ce que
l'accouchement en rétablisse l'équilibre.
L'épiderme et le réseau muqueux qui se
détruisent et se renouvellent, reprennent
bientôt alors leur blancheur ordinaire.
Des congestions semblables de la ma-
tière charboneuse paraissent encore pro-
duire toutes les taches noirâtres qui se ma-
nifestent sur les diverses régions du corps,
et altèrent pour un temps la blancheur
de la peau: telles que les taches, observées
sur la peau des femmes qui n'ont jamais
été régléesa); les taches des scorbuti-
quesb)
*), et celles semées sur le corps
[Seite 177] des individus bilieux, qui vivent dans
la saleté et la' misèrec).
Les nègres ne sont pas constamment
noirs. Quelquefois leur couleur s'affaiblit
et même blanchit entièrement. Ceux qui
dès leur plus tendre enfance n'ont pas
cessé d'habiter des climats tempérés, de-
viennent sensiblement moins noirsd)
; ils
[Seite 179] pâlissent beaucoup plus promptement
quand ils sont atteints de maladies très-
gravese). On a des exemples avérés de
nègres dont la peau est spontanément de-
venue par degrés de la blancheur de celle
des Européensf).
Indépendamment de la variété de la
couleur, la peau chez certains peuples
possède encore des qualités particulières
qui vont nous occuper un instant.
Elle présente au toucher une mollesse
[Seite 180] soyeuse chez les Caraïbesg), les nègresh),
les O-taïtiensi), et même les Turcsk).
On ignore si cette disposition tient à la
finesse de l'épiderme ou bien à l'épaisseur
plus considérable du réseau de Malphigi.
Les affinités chimiques du corps avec
les élémens de l'atmosphère paraissent la
cause de la fraîcheur particulière à la
peau chez plusieurs peuples d'Afriquel)
et des Indes Orientalesm).
Enfin l'odeur singulière des Caraïbesn)
des Nègreso), et de quelques autres peu-
plesp) semble appartenir à la transpiration
insensible de Sanctorius, que de même
l'arum particulier à plusieurs variétés
d'animaux domestiques, comme au chien
d'Egypte et aux chevaux d'un blanc roux.
(Germ. Rothschimmel. Gal. V. Rouan.)
Les poils et surtout les cheveux reçoivent
la naissance et leur nourriture des tégu-
mens communs; il doit donc y avoir entre
eux de nombreux rapports. Aussi sont-ils
de différentes couleurs chez les nègres pies,
et rougesq) chez les blancs dont la peau
est tachetée. Il existe également un accord
frappant entre les tempéramens et la cou-
leur des cheveux. S'ils sont blonds, la fibre
est lâche et molle, l'éruption des maladies
exanthémateuses facile; des cheveux
noirs accompagnent au contraire une
structure générale plus dense, un tem-
[Seite 183] pérament mélancolique, et l'on a remar-
qué que les individus de cette constitution
abondent dans les hôpitaux de fous et dans
les prisons.
Les variétés nationales des cheveux peu-
vent se réduire à quatre principes.
1°. Les cendrés, dont la cœur tient
le milieu entre le jaune et le noir. Ils sont
mous, longs et ondoyans; on les trouve
fréquemment chez les peuples des régions
tempérées de l'Europe; ils étaient autre-
fois très-communs chez les Germainsr).
2°. Les cheveux noirs, roides, droits,
et peu fournis; cette chevelure est propre
aux nations Mongoles et Américaines.
3°. Les cheveux noirs, mous, épais,
[Seite 184] abondans dans et frisés; ce sont ceux de pres-
de tous les insulaires de la mer du Sud.
4°. Les cheveux noirs, crêpus et laineux;
ils appartiennent aux Nègres.
Cette division peut en général s'admet-
tre avec avantage: il serait superflu d'aver-
tir que la nature n'a pas rendu cette clas-
sification plus exclusive que celles des au-
tres variétés nationales. Je pourrais prou-
ver que la cheveux crêpus ne sont pas
absolument particuliers aux Nègres; il
en serait de méme de la couleur assignée
à ceux des trois dernières variétés; on
trouve en effet des races noires dont
la chevelure longues), tandis qu'elle
devient crêpue et laineuse chez des na-
tions cuivréest) possède de cheveux
[Seite 185] de la nouvelle Hollande, qui tiennent un
milieu parfait entre ceux des Nègres et
des Insulaires de la mer pacifique. Cette
double ressemblance a donné lieu aux re-
lations différentes que les Hollandais, et
depuis les Anglais, ont donnés de la che-
velure des habitans de la nouvelle Hol-
lande.
Des témoins dignes de foi ont observé
beaucoup de chevelures rougesu) chez les
[Seite 186] peuples auxquels se rapportent les trois
dernières variétés de cheveux.
Nous avons vu la teinte des cheveux con-
corder avec celle des tégumens communs;
Aristotev) avait observé que la couleur
des yeux suivait celle de la peau, qu'ils
étaient bleus si elle était blanche, et noirs
quand sa couleur devenait obscure. Dans
nos climats, où la plupart des enfans nais-
sent avec des yeux bleus et les cheveux
blonds, et brunissent ensuite, les yeux
et les cheveux prennent insensiblement
des teintes plus foncées et arrivent à leur
coloris parfait pour ainsi dire du même
pas. Si les cheveux blanchissent, l'enduit
[Seite 187] qui revêt la coroïde perd alors beaucoup
de sa teinte foncée. Les nègres blancs, dont
je parlerai bientôt, ont les cheveux d'un
jaune particulier, la coroïde presqu'en-
tièrement privée de sa mucosité et les yeux
d'un rouge pâle.
En général, la couleur des yeux ne varie
que chez les animaux, dont la teinte de
la peau et des poils n'est pas constante.
Ceci ne doit pas s'entendre seulement
des hommes et des chevaux, comme le pen-
saient les anciens, mais de tous les ani-
maux, et. surtout des espèces domestiques.
Les poils ont-ils des teintes différentes,
la même variété se retrouve le plus souvent
dans la coloration de l'iris. Observation
déjà faite sur les chiensx), les chevaux
et les moutons, mais nulle part aussi ma-
nifeste que chez les lapins. Sont-ils gris,
ce qui est leur couleur naturelle, l'iris est
totalement brun; leur fourrure est-elle
[Seite 188] variée de noir et de blanc, l'iris présente
des taches absolument identiques à celles
du poil; sont-ils enfin tout-à-fait blancs,
l'iris devient alors d'un rouge pâle.
Âristote assignait avec raison trois cou-
leurs principales à l'iris des yeux humains;
2°. L'oranger obscur (Vulg. yeux de
chèvres)y).
Ces trois couleurs se trouvent répandues
chez tous les peuples; mais chacune d'elles
[Seite 189] semble comprise d'une manière plus cons-
tante dans les limites de quelques degrés
de latitude, et devenir nationale; d'après
cette observation, Linnéz) a donné aux
habitans de la Gothie Suédoise des yeux
bleu-cendré et des cheveux d'un blond de
filasse; aux Finois des cheveux blonds: et
des yeux bruns; et aux Lapons des yeux et
des cheveux noirs*).
Des cheveux blonds et des yeux bleus
forment le caractère originel des Germains;
cependant il se retrouve aussi chez des
peuples très-éloignés de l'Allemagnea).
L'iris des Nègres est d'un noir si foncé
qu'on la distingue à peine de la pupille,
surtout pendant la vieb).
Nos propres yeux nous convainquent
de la diversité prodigieuse des visages;
ce serait un phénomène d'en rencontrer
deux absolument semblables. La même di-
versité s'observe chez le sauvage et les
peuples d'Europec). Néanmoins des for-
[Seite 191] mes nationales du visage appartiennent à
chaque variété de l'espèce humaine, quel-
que fois même à chaque provinced), et for-
ment un caractère distinctif.
J'ai comparé soigneusement les dessins
que les artistes les plus distingués ont
donnés des nations étrangères; J'ai moi-
même examiné les individus des différent
peuples qui fréquentent en grand nombre
les marchés de Londres et d'Amsterdam,
et d'après tout ce que j'ai vu, je crois qu'on
[Seite 192] peut ranger dans cinq classes les princi-
pales variétés na onales du visage Quoi-
que présentant des exceptions, cette di-
vision paraît conforme à la nature.
1°. Visage ovale, droit, traits peu sail-
lans.
Nez étroit, légèrement arqué, ou
pour le moins bossué.
Les os des pommettes nullement
proéminens.
Bouche petite, les lèvres, et surtout
l'inférieure, mollement étendues.
D'après sa symétrie on regarde cette
forme de visage, qui est celle des peuples
d'Europe, comme la plus gracieuse et la
plus belle.
C'est le point mitoyen d'où dérivent,
par la dégénération, les deux extrêmes
opposés, les faces larges et les faces alon-
gées.
Chacune de ces variétés regardée de
profil se soudivise à son tour en deux au-
tres: dans les unes les traits sont peu dis-
tincts, légèrement prononcés; dans les
autres ils sont profondément marqués,
saillans et presqu'anguleux. On doit donc,
outre la première variété, ou prototype,
en établir quatre autres.
A) Deux variétés de faces larges.
2°. Face large, unie et déprimée, traits
légèrement prononcés et se confon-
dant entre eux,
Les yeux séparés par un espace large
et plane.
Les joues presque globuleuses et
très-éminentes.
L'ouverture des paupières étroite et
linéaire. (Vul. yeux bridés).
Cette forme de visage est celle des na-
tions Mongoles. Les Anglais la nomment
[Seite 194] face tartare, parce qu'ils confondent,
comme je le dirai, les Tartares avec les
Mongols*).
3°. Face large sans être unie ni dépri-
mée; les pommettes proéminentes, les
traits vus de profil sont saillans et pro-
fondément sculptés.
Cette figure appartient à la plupart des
peuples d'Amérique.
B) Deux variétés de faces alongées.
4°. Face étroite, proéminente inférieu-
rement.
Les yeux saillans. (Vulg. à fleur de
tête).
Le nez épaté et se confondant pres-
qu'avec les joues.
Les lèvres, et surtout la supérieure,
tuméfiées.
Cette forme de figure (Agg. guinea fa-
ce) est particulière aux Nègres.
5°. Face moins comprimée, légèrement
avancée intérieurement, vue de pro-
fil, les traits sont plus saillans et
mieux marqués que dans la précé-
dente.
Le nez ample, large et gros à sa
pointe (Ang. Bottled.)
Cette forme de figure est propre à la
[Seite 196] race Malaie, et surtout aux insulaires de
la mer du Sud.
Mon projet n'est pas de considérer les
formes du visage sous l'aspect physiono-
mique, comme indices des tempéramens.
Cependant il est chez certains peuples une
physionomie nationale qui les caractérise
et paraît dépendre de leurs habitudes.
Sans doute les Bracmanes absthêmes et les
originaires de l'Inde doivent à leur nour-
riture ce visage calme qui les distingue,
et les Boticoudese) anthropophages, l'a-
trocité de leurs traits.
C'est de même à l'influence de la reli-
gion qu'il faut attribuer les physionomies
béates qu'on remarque, surtout aux fem-
mes, dans quelques parties de l'Europe mé-
ridionale.
C'est une vie molle et abondante qui
met tant de différence entre l'O-taïtien ef-
féminé et le sauvage mâle et robuste de
la nouvelle Zélande.
Je vais rechercher les causes de variétés
nationales du visage, de la forme, de la
direction, de la proportion des parties
qui le composent et constituent le caractère
spécifique qui distingue chaque variété
de l'espèce humaine.
Les difficultés dont cette recherche est
hérissée nous forcent à nous en tenir à des
probabilités.
Trois considérations me déterminent à
croire que le climat est la cause principale
des formes nationales de la face.
1°. Quelle autre cause pourrait produire
ce visage national commun à tous les hom-
mes qui habitent sous le même ciel, quels
que soit d'ailleurs leur rang et leur ma-
nière de vivre? Tous les Chinois ont la
face applatie, et parmi les Européens
la beauté et la regularité des traits sont
[Seite 198] le partage des Anglais et des Major-
cainsf).
2°. Des peuples ont perdu, en émigrant,
la forme originelle de leur visage et pris
celle qui appartenait à leur nouvelle pa-
trie. La plupart des auteurs qui ont traité
des antiquités septentrionales, font des-
cendre les Jakoutes de la race Tartare, au-
jourd'hui ils ont les traits des Mongoles.
Je possède le crâne d'un Jakoute qui pré-
sente tous les caractères propres à ceux de
ces derniers peuplesg). Je ferai observer,
plus bas, le même phénomène chez les Amé-
ricains des Zones glaciales (§ 88.)
Les Créoles des Antilles, d'origine an-
glaise, ont perdu peu à peu la forme de
visage de leurs ancêtres, pour s'approprier
la figure des Américains. On a remarqué
depuis long-temps qu'ils ont comme eux
les yeux enfoncés et les pommettes éle-
véesh).
Les Egyptiens et les Indiens en-deçà du
Gange offrent les exemples les plus frap-
pans du changement des traits.
Cette partie de l'Inde a successivement
été soumise par des peuples différens. Les
vainqueurs, affaiblis bientôt par l'action
énervante du climat, devenaient à leur
tour la proie des habitans du Nord: leurs
traits en s'accommodant à ce nouveau ciel
leur ont donné le visage national des Indiens
de la plus haute antiquité, que nous ne
connaissons plus aujourd'hui que par les
statues des temples souterrains des îles Sal-
sette et d'Eléphanta, monumens des arts
de cet ancien peuplei). Les derniers vain-
queurs de l'Inde, les Mongoles, ont beau-
coup perdu, depuis Tamerlan, de leur
figure originelle; elle s'est rapprochée de
celle des anciens Indiens, comme un sa-
[Seite 200] vant très-versé dans tout ce qui concerne
l'Inde, G. Walsh, me l'a démontré d'après
des portraits indiens.
Quant aux Égyptiens, je suis surpris
que les antiquaires qui se sont occupés de
cet ancien peuple, ne lui aient reconnu
qu'une seule et même forme de visagek).
L'examen comparé de leurs monumens m'a
démontré qu'il y avait chez eux trois phy-
sionomies bien distinctes: la première se
rapproche decelle des Nègres*), la seconde
de celle des Indiens, la troisième, propre
au climat d'Egypte, dépend de son in-
[Seite 201] fluence, et les deux autres viennent s'y
confondre par les progrès du temps. On.
la reconnaît à l'habitude spongieuse du
corps, à la briéveté du menton et à la
proéminence des yeuxl).
3. Des colonies entières du même peu-
ple ont contracté sous un ciel différent un
visage national différent. Les Hongrois et
les Lapons offrent la même originem);
ces derniers ont acquis dans les climats
glacés du Nord, les traits des nations sep-
tentrionales. Les autres au contraire, ha-
bitant un pays tempéré, voisins de la
Grèce et de la Turquie, ont pris une phy-
sionomie beaucoup plus élégante.
Ces changemens, il est vrai, viennent
en grande partie des alliances avec d'au-
tres peuples. Je parlerai bientôt de leur
influence, néanmoins la puissance du cli-
mat, pour modifier les traits nationaux du
visage, paraîtra toujours immense, sur-
tout en la comparant à ce que nous avons
dit des causes de la dégénération des
Brutes.
Il est très-difficile d'expliquer d'où
vient que tel et tel climat donne au vi-
sage tel ou tel caractère. Cependant des
hommes très-instruits dans cette recherche,
ont tenté de le faire, Kantn) pour les
Mongoles et Volneyo) pour les Nègres.
Les observations de Dampierre, sur la
partie occidentale de la nouvelle Hollande
font penser que des causes endémiques,
accessoires au climat, modifient quelque-
fois la physionomie.
Dés nuées de moucherons peuvent ef-
fectivement avoir contribué au caractère
de la figure des habitans de ce paysp).
Doit on adopter l'opinion de Leibnitz
sur l'influence du climat? Selon lui il
existe une certaine analogie entre les ani-
maux d'un pays et les peuples indigènes.
Les Lapons, par exemple, ont quelque
chose de la physionomie de l'ours, et celle
[Seite 204] du singe a des rapports avec la figure des
Nègres et des peuples de l'extrémité de
l'Orientq)
*).
La manière de vivre peut, comme le cli-
mat contribuer à la forme nationale de
la face. On assure, que les lèvres épaisses
et le nez écrasé des Nègres viennent en
partie de ce que, dès leur première enfance
leurs mères les portent sur le dos, lors-
qu'elles récoltent le millet et pendant leurs
travaux les plus péniblesr).
D'après les rapports nombreux de té-
moins dignes de foi, il est certain que les
Nègress), les habitans du Brésilt), les
Caraïbesu), les peuples de Sumatraw),
[Seite 206] des îles de la Société, etc.x), dépriment
et applatissent soigneusement le nez des
nouveau-nés. Dans cette opération, les os
propres du nez sont quelquefois luxés ou
fracturésy).
Cette compression violente, long-temps
exercée sur une partie molle et sans consis-
tance, n'a fait seulement qu'ajouter à sa
configuration originelle et la conserver,
mais n'a point été capable de la déterminer.
Tout le monde sait que les fétus offrent les
traits nationaux particuliers à leur race.
Les formes nationales du visage ne se
confondent pas moins que les couleurs
dans les différens mélanges des variétés du
genre humain; les enfans qui en résultent
ont des traits mixtes, comme on le voit chez
les Mulâtres. La figure des Cozaquesz) et
[Seite 207] des Kirguisa) a été sensiblement défor-
mée par leur mélange avec les Kalmoucks,
tandis que la race des Tartares Nogais s'est
embellie par leur alliance avec les Geor-
giensb).
Le Germain se faisait autrefois remar-
quer par sa physionomie que n'avait altérée
le mélange d'aucune autre nationc); c'est
ainsi que l'ont conservée les Cingares, qui
sont les véritables originaires de la Transil-
vanied), et le Juif, ce qui tient au type
fondamental de son visagee), reste le
[Seite 208] même sous tous les ciels, et garde un ca-
ractère national difficile à décrire, mais
que tout le monde reconnaît au premier
coup-d'œilf).
La forme de la figure et celle des os de
la tête ont entre elles des rapports inti-
mesg). Un aveugle, s'il avait des notions
[Seite 209] de l'immense différence du visage d'un
Mongole d'avec celui d'un nègre, recon-
naîtrait aussitôt, à l'aide du toucher, le
crâne d'un Kalmouck de celui d'un Afri-
cain; et personne ne croira jamais que
c'est d'après eux qu'ont été sculptés les
chefs-d'œuvre de l'antique Grèce. Cette
vérité est manifeste et de toute évidence:
L'anatomie scrupuleuse des crânes de
peuples différensh) répand beaucoup de
clarté sur l'étude des variétés de l'espèce
humaine: dépouillés des parties molles,
qui varient toujours infiniment, ils sont
des modules de la tête, fixes et constans:
on peut les explorer, les comparer entra
eux, les considérer sous tous les aspects.
Cet examen convaincra que les for-
[Seite 210] mes du crâne divergent de côte et d'autre,
dans l'espèce humaine, comme les couleurs
de la peau ou les variétés de cette sorte;
qu'elles se confondent insensiblement les
unes et les autres avec celles qui les avoi-
sinent; qu'on ne saurait néanmoins leur
refuser en général de la constance; qu'elles
sont même un des principaux caractères
qui déterminent la manière d'être natio-
nale, et qu'elles répondent parfaitement
à la physionomie des peuples. Dès Spigeli)
des anatomistes célèbres, engagés par cette
stabilité, ont cherché à établir une règle
de dimension à laquelle on eût pu rappor-
ter les variétés des crânes et qui eût servi
à les disposer en ordre. La ligne faciale de
l'ingénieux Camperk) mérite une atten-
tion particulière.
On conçoit aisément, sur un crâne vu
de profil, deux lignes droites qui se cou-
pent mutuellement. La première est hori-
zontale, passe par le méat auditif externe,
et la base des narines. L'autre prend nais-
sance au-dessus du nez, à la partie la plus
saillante du front, et de là tombe sur la
portion la plusavancée du bord alvéolaire
supérieur. Le concours de ces deux lignes
forme un angle dont la grandeur devait,
d'après l'opinion de Camper, constisuer la
différence des crânes, des variétés humai-
nes et des brutes.
Cette règle paraît défectueuse sous plu-
sieurs rapports:
1°. D'après ce que j'ai dit des variétés
nationales des figures (§ 56.), on voit que
la ligne faciale convient seulement à celles
que caractérisent la direction des mâchoires
[Seite 212] et ne peut s'admettre quand la largeur de
la face forme le caractère distinctif.
2°. La direction de la ligne faciale se
trouve souvent la même chez des nations
très-différentes, dont les crânes n'offrent
entre eux aucune analogie, tandis qu'elle
éprouve de très-grandes variations dans
des crânes qui sont au reste parfaitement
semblables et appartiennent au même
peuple. Il devient donc impossible d'éta-
blir un jugement d'après la direction de
la ligne faciale, si l'on fait abstraction
de la largeur des crânes. J'ai sous les yeux
ceux d'un nègre du Congol) d'un Po-
lonais de Lithuaniem) la ligne faciale est
à-peu-près la même; cependant si l'on
compare la tête étroite et carénée du Nè-
gre avec le crâne presque quadrangulaire
du Sarmate, on trouve entre eux une im-
mense différence. Je possède deux têtes do
Nègres, dont la ligne faciale est absolu-
[Seite 213] ment dissemblablen), et quandon les voit
en face, leur crâne étroit et comprimé,
et leur front bossué prouvent évidemment
qu'elles ont une même origine.
3°. Camper lui-même, dans les de sins
qu'il a joints à son ouvrage, emploie d'une
manière si arbitraire et si inconstante ces
deux lignes régulatrices, il change tant
de fois les points de contact qui les diri-
gent, et d'où dépend leur certitude, que
c'est convenir tacitement qu'il reste dans
le doute sur leur usage.
L'habitude et l'usage constant de ma col-
lection de crâne me font reconnaître chaque
jour davantage l'impossibilité d'assujettir
leurs variétés à la règle d'un angle quelcon-
que, lorsque la tête est susceptible de
tant de formes, et que les parties qui la
[Seite 214] composent, et déterminent toutes du plus
ou moins le caractère national, sont de
proportion et de direction si différentes.
On doit, je crois, préférer pour con-
dérer le crânes, le point de vue
qui présente le plus grand nombre de par-
ties principales, et surtout de celles qui
fournissent le caractère national. L'expé-
rience m'a démontré que pour y parvenir
il fallait regarder par derrière, fixant les
yeux sur le vertex, une suite de crânes
dont les os de la pommette soient disposés
sur une même ligne horizontale, ensemble
avec les mâchoires inférieures; on aper-
çoit alors les parties qui contribuent le plus
au caractère national, soit qu'il consiste
dans la direction des mâchoires et des os
de la pommette; dans la largeur ou dans
l'étroitesse de l'ovale supérieure, dans la
forme applatie ou bombée de l'os frontal.
J'ai cru pouvoir nommer règle verticale
l'aspect où l'œil embrasse tous ces carac-
tères à-la-fois, la planche première en
fera facilement concevoir l'usage. J'y ai
placé les dessins de trois têtes, disposées
[Seite 215] d'après cette règle. La tête du milieu (f.
3.) la plus symétrique et la plus belle ap-
partenait à une Géorgienne; les deux au-
tres très-différentes entre elles ne le sont
pas moins de la première; l'une (f. 3.)
alongée en avant et présentant une espèce
de bec, est celle d'un nègre de Guinée,
l'autre (f. 1) applatie et étendue en lar-
geur vient d'un Tungous.
Dans la première, le contour du front
modérément développé, cache le limbe
des orbites, la mâchoire supérieure et les
os de la pommette étroits et d'une propor-
tion gracieuse.
Dans la seconde, les os maxillaires sont
comprimés et proéminens.
Dans la dernière, l'espace inter-sur-
cillier, les os de la pommette et ceux du
nez, sont presque sur un même plan, et
la face présente une énorme largeur.
Nous réduisons à cinq variétés, comme
nous l'avons fait pour la face (§ 56.) les
[Seite 216] formes nationales des crânes des différens
peuples. La planche seconde offre le dessin
de chacune d'elles, fait d'après des mo-
dèles choisis.
1°. La tête des plus symétrique, presque
ronde, le front modérément étendu, les os
de la pommette petits, ne faisant point de
saillie et dirigés de haut en bas, à partir
de l'apophise externe de l'os frontal.
Le bord alvéolaire bien arrondi.
Les dents incisives des deux mâchoires
implantées perpendiculairement.
Le dessin (p. 2 et 3.) a été fait d'après le
crâne d'une Géorgienne; sa forme beau-
coup plus belle, tient le milieu entre les
deux extrêmes suivans,
2°. La tète presque quadrangulaire, les
pommettes proéminentes en-dehors.
Le nez camus, ses os, ceux de la pom-
mette et l'espace inter-surcillier sur un
même plan horizontal.
Les arcades surcillières à peu près nulles.
[Seite 217]La fosse maxillaire légèrement marquée.
Le bord alvéolaire s'arrondit obscuré-
ment en devant.
Cette forme de crâne est particulière
aux nations Mongoles. Le dessin (f. 1,
2) est fait d'après un Tungous.
3°. La tête étroite est comprimée sur les
côtés.
Les os de la pommette saillans en avant.
Les fossettes maxillaires profondément
creusées et derrière les trous sous-orbi-
taires.
Le bord alvéolaire étroit et elliptique.
Les dents incisives supérieures dirigées
obliquement en avant.
La mâchoire inférieure grande et forte.
Le crâne presque toujours épais et pe-
sant.
Cette forme de tête appartient aux Nè-
gres. Le dessin (f. 5, p. 2) est fait d'après
une Nègresse de Guinée.
Ces deux dernières formes de crâne sont
les plus éloignées de la première. Il se
trouve entre elles deux autres variétés.
4°. Dans l'une, les pommettes étendues,
cependant plus arquées et plus arrondies que
dans le crâne du Mongole, sans être ni
anguleuses ni saillantes sur les côtés.
Les orbites presque toujours profonds.
La forme du front et du vertex dépen-
dant le plus souvent d'efforts artificiels.
Cette forme de tête caractérise les Amé-
ricains.
Le dessin (f. 2, pl. 2) est fait d'après le
[Seite 219] crâne d'un chef de Caraïbes de l'île de St-
Vincent.
5°. Dans l'autre, le sommet de la tête
légérement rétréci.
Les os de la pommette nullement sail-
lans.
La mâchoire supérieure un peu portée
en avant.
Les bosses pariétales très-prononcées.
Cette forme de tête est propre à la race
Malaie, répandue dans l'Océan austral.
Le dessin (f. 4, pl. 2) représente un crâne
d'O-taïtie.
Ces formes nationales du crâne sont gé-
néralement si constantes qu'on les apper-
çoit dès la plus tendre enfance. Je possède
le crâne d'un jeune enfanto), où l'on voit
tous caractères de la race Mongole; et celui
[Seite 220] d'un Négrillonp) qui offre tous ceux de
la race Africaine.
Les os sont les parties les plus denses,
les plus solides du corps humain, et en for-
ment à-la-fois la charpente et le soutien.
Les expériences physiologiques et les
phénomènes de la pathologie démontrent
cependant qu'ils sont exposés à des chan-
gemens beaucoup plus fréquens que les
parties molles.
Ils se détruisent sans cesse, leurs élé-
mens sont resorbés d'une manière insen-
sible, et le torrent de la circulation leur en
apporte de nouveaux, qui, déposés au
même lieu que les anciens, se solidifient
et les remplacent.
Ce changement continu des os s'ob-
serve dès leur première formation; c'est
[Seite 221] par lui qu'ils s'accommodent aux par-
ties voisines dont l'action les modèle;
phénomène que rend surtout évident
la configuration du crâne à un âge avancé:
la face interne de sa base paraît alors avoir
été sculptée par les lobes et les circonvolu-
tions du cerveau qui reposent sur elles.
L'extérieur ne présente pas des traces
moins marquées de l'action musculaire,
et l'on peut d'après la forme des os de la
face, deviner assez facilement quelle était
la physionomie habituelle.
Si le climat influe autant qu'il le paraît
(§ 57.) sur le visage national, il devient
évident qu'il doit être en grande partie la
cause, quoique plus médiate, de la forme
nationale des crânes, surtout en ce qui tient
aux os de la face.
Cependant à cette cause principale, il
s'en joint d'accessoires, telles qu'une forte
pression long-temps continuée. Il me
paraît qu'elle peut en effet influer sur les
os de la face. Le célèbre Banks m'a donné
le crâne extrêmement rare d'un habitant
[Seite 222] du voisinage de Botany-Bayq); entre autres
singularités la mâchoire supérieure est ap-
platie à l'endroit où s'implantent les dents
laniaires et incisives. On sait que ces sau-
vages ont la singulière coutume de traver-
ser la cloison des narines par un morceau
de bois, qui bouche tellement ces ouver-
tures, qu'ils ne respirent que par la bouche.
L'applatissement dont je viens de parler,
depend vraisemblablement de la compres-
sion qu'opérait habituellement ce morceau
de bois.
Une pression exercée continuellement
pendant une longue suite d'années donne-
bien plus souvent aux os planes du crâne
une configuration particulière, qui devient
même nationale. Cet effet peut dépendre
de la manière dont plusieurs nations pla-
cent leurs enfans dans le berceau, ou bien
d'une compression manuelle, exercée avec
soin pendant long-temps.
Vesale rapporte que de son temps les,
[Seite 223] Allemands avaient presque tous la tête ap-
platie postérieurement et élargie sur les
côtés, parcequ'on les couchait constamment
sur le dos, pendant qu'ils étaient au ber-
ceau.
Les Belges, accoutumés au contraire,
à mettre les enfans à dormir sur le côté, se
faisaient remarquer par la longueur de
la tête.
Les Américains sauvages, depuis la Ca-
roline méridionale jusqu'au nouveau
Mexique, ont tous le crâne déprimé, parce,
qu'ils donnent, dans le berceau, à leurs en-
fans une position déclive; de manière que
le vertex, qui repose sur un sac rempli de
sable, supporte tout le poids du corpsr).
Un usage qui a existé chez les nations
les plus antiques comme chez les mo-
dernes, dans nos climats et dans les pays
les plus éloignés, c'est de ramener la tête
[Seite 224] des nouveau-nés à une forme nationale,
au moyen de liens, d'instrumens diffé-
rens, ou de la simple pression des mainss).
Cette habitude eut lieu jadis, ou se re-
trouve encore aujourd'hui chez les habi-
tans de plusieurs parties de la Germaniet),
chez les Belgesu), les Françaisv), chez
quelques peuples d'Italiex), chez les Insu-
laires de l'Archipel Grecy) les Turcsz)
[Seite 225] les anciens Sigensa), et les Macrocéphales
du Pont-Euxinb); elle appartient aux ha-
bitans de Sumatrac), de Nicobard), et
surtout aux différentes nations de l'Amé-
rique, telles que les peuples du détroit de
Nootkae), les Schactasf), nations Indi-
gènes de la Géorgie, les Waxsaws de la
Carolineg), les Caraïbesh) les Péru-
viensi) et les nègres des Antillesk).
Il est sans cloute bien étonnant que des
auteurs modernes aient osé révoquer
en doutel) un usage général, prouvé
par l'aveu unanime d'une foule de témoins,
qui même a donné le nom à plusieurs peu-
ples de l'Amérique septentrionalem) et
méridionalen), et qui fut défendue, il
n'y a pas deux siècles, par le conseil d'Es-
pagneo). On possède les descriptions les,
[Seite 227] plus exactes des moyensp) que ces sauvages
employaient pour donner à la tête de leurs
enfants, par une pression uniforme, la con-
figuration qu'ils desiraient. Les crânes de
ces sauvages et les dessins qu'on en a faitsq)
y repondent parfaitement.
Cette vérité reconnue il reste encore
à prouver si, comme on le disait dès le
temps d'Hippocrate, les formes du crâne,
obtenues par ces moyens, finissent, après
une longue suite de générations, par être
héréditaires et devenir une conformation,
naturelle.
Hippocrate, dans son excellent Traité des
airs, des eaux et des lieux, parle en par-
ticulier des Macrocéphales; nation voisine
du Pont Euxin. Selon lui aucun autre
peuple n'a la tête faite comme eux, cette
[Seite 228] conformation particulière qui, dans le
principe dépendait de leurs usages, devint
ensuite naturelle. Les Macrocéphales regar-
daient la longueur de la tête, comme un
indice de courage; d'après cette opinion
ils pétrissaient la tête des enfans nouveau-
nés, et tâchaient, par différens moyens,
de l'alonger aux dépens de sa largeur. Cette
forme finit par devenir naturelle et il fut
inutile de rien faire pour la produire.
Le Vieillard de Cos cherche à rendre
raison de ce phénomène, par son système
célèbre de la génération. Il diffère peu de
celui de Buffon et admet que le liquide gé-
nérateur procède de toutes les parties du
corps, qu'il en conserve les formes et qu'on
les retrouve dans les fétus. C'est par cette
raison que les chauves engendrent des
chauves, ceux qui ont les yeux bleus des
enfans aux yeux bleus, et les Macrocé-
phales des Macrocéphales.
Les peuples du Perour) et les Génoiss)
[Seite 229] avaient à cet égard des rapports avec les
Macrocéphales.
Je ne décide pas la question et je m'eu
rapporte à ce que j'ai dit au paragraphe 39.
Les variétés des dents se présentent na-
turellement après celles du crâne.
J'avais observé dès 1779 sur des frag-
mens et des têtes entières de momies
égyptiennest) une anomalie particulière
des dents incisives. Leur couronne n'était
pas taillée en biseau, mais épaisse et sem-
blable à un cône tronqué. Les canines ne dif-
féraient des petites molaires, quant à leurs
couronnes, que par la situation. On a ob-
servé cette conformation singulière dans
[Seite 230] les momies de Cambridgeu), de Casselw)
de Stutgardx). J'ai moi-même trouvé à
Londres sur la momie d'un jeune sujety)
de semblables dents incisives. Il est pres-
qu'inutile d'avertir que, pendant les siè-
cles où les Egyptiens ont embaumé les ca-
davres, leur pays ayant souvent changé
d'habitans et de vainqueurs, il doit y avoir
des variétés dans les crânes de leurs momies.
Il est donc possible qu'on ne retrouve pas
toujours dans les dents la forme particu-
lière que j'y ai observée. Cette variété me
semble importante, elle peut, servir à faire
reconnaître le siècle et la nation à laquelle
ont appartenu les différentes momies.
Quoiqu'il soit difficile d'assigner la cause
de cette conformation, il me paraît qu'elle
[Seite 231] se trouve en grande partie dans la nour-
riture. Diodore de Sicile dit formellement
que les anciens Egyptiens se nourrissaient
d'une manière agreste et vivaient de tiges
et de racines de végétaux; leurs dents de-
vaient beaucoup s'user, et l'on a remar-
qué chez les hommesz) et chez les ani-
mauxa) qu'elles augmentaient alors en
épaisseur; une observation de Winslowb)
vient à l'appui de cette conjecture: il a vu
le crâne d'un Groënlandaisc) de l'île des
[Seite 232] Chiens, dont les dents incisives ressem-
blaient aux molaires; il attribue cette
particularité à la viande crue dont se nour-
rissent ces sauvagesd).
J'ai dernièrement reçu de la terre
de Labrador deux crânes d'Esqui-
mauxe), dont les dents qui sont épaisses
[Seite 233] et prodigieusement usées, répondent par-
faitement à cette observation. Les Eski-
maux et les Groënlandais appartiennent
en effet à la même race, et leurs noms
viennent également de l'usage qu'ils font
de la chair crue.
Plusieurs auteursf) assurent que les
dents des Calmoucks sont plus longues
et plus espacées que chez les autres hom-
mes. Cette observation est prise de la re-
lation d'Yvon de Narbonne, de l'an 1243.
Elle ne convient nullement aux crânes des
Mongoles d'aujourd'hui, qui ornent ma
collection.
Les autres variétés nationales des dents
tiennent uniquement à la mode. C'est
ainsi que quelques Tribus de Nègres
limentg) leurs dents en forme d'a-
[Seite 234] lèneh), que des peuplades de Malaisi) en
ratissent en grande partie l'émail, et même
y tracent des sillonsk).
J'ai également observé que plusieurs
Chinois et Javanais se liment avec la pierre
de touche le bord libre des dents incisives;
et prennent grand soin de le rendre par-
faitement uni.
Nous nous sommes occupés jusqu'à pré-
sent de la recherche des principales varié-
tés qu'offrent les différens peuples, soit
pour la couleur de leur peau, de leurs
cheveux ou de leurs yeux, soit pour la
forme du visage ou des crânes.
Celles qui nous restent encore à exami-
ner sont moins importantes, et il suffit de
les parcourir rapidement.
En supposant même qu'on ne puisse
mettre également en évidence les causes
de toutes ces variétés, aucune, néanmoins,
ne nous paraîtra si étrange, ou tellement
énigmatique, qu'elles ne deviennent plus
intelligibles, comparées aux phénomènes
analogues observés chez les animaux, dans
la Section précédente.
Les antiquaires savent que plusieurs
idoles de l'ancienne Egypte, faites en ai-
rain, en terre cuite, en pierre, en bois de
sycomore, ou peintes dans les sarcophages,
ont les oreilles très-élevées. Un auteurl)
a jugé à propos dernièrement, d'attribuer
cette particularité à l'ignorance de l'ar-
tiste; le goût et le beau travail de la plu-
part de ces idoles, et cette disposition sur-
tout remarquable dans celles qui offrent le
visage indienm) et qu'on retrouve aussi
dans les portraits originaux des Indiens,
souvent de la plus grande exactitude,
m'empêchent d'adopter cet avis. Cette va-
riété dans la position de l'oreille, n'est pas
en général plus considérable que celle ob-
[Seite 237] servée chez les animaux domestiques, et
particulièrement parmi les chevaux et les
cochons, dont la situation de l'oreille varie
beaucoup: elle explique aussi pourquoi,
dans les figures indiennes et égyptiennes,
l'ouverture des paupières se dirige de la
racine du nez vers l'oreille. On sait en
effet que sa hauteur dépend en grande
partie de cette situation de la tête, dans
laquelle l'occiput est élevé et le menton
déprimé.
Les écrits des auteurs anciens, et les mo-
numens antiques apprennent que l'oreille
des premiers Bataves avait une forme et
une situation particulièresn).
Les Biscaïens ont, dit-on, les oreilles
d'une grandeur remarquableso).
Elles sont mobiles et éloignées de la tête
[Seite 238] chez des nations sauvages. Plusieurs peu-
plades des Indes orientales et des îles de la
mer pacifique emploient divers moyens
pour alonger prodigieusement le lobe de
l'oreille. Ce fut sans doute une coutume
aussi bizarre qui servit de fondement aux
fables des anciens auteurs qui assurent
qu'il existe des peuples dont les oreilles
sont d'une grandeur monstrueuse.
Les mamelles des femmes de quelques
nations sauvages, surtout d'Afriquep) et
de plusieurs îles de la mer pacifiqueq)
sont, d'après une foule de témoins, lon-
gues et pendantes; Il paraît cependant
qu'on a beaucoup exagérér), ou que cette
[Seite 239] manière d'être n'est pas commune à toutes
les femmes d'un même peuple. On voit
en effet journellement dans les comptoirs
des Européens des femmes des îles de la
mer du Suds), ainsi que des négresses,
dont la gorge est de la plus grande beauté.
Au reste cette ampleur des mamelles n'est
pas exclusive aux nations sauvages; on la
retrouve également eu Europe; on l'a
observée jadis chez les Irlandaisest), et
[Seite 240] on la voit aujourd'hui chez les Morla-
quesu).
Ce phénomène dépend surtout de ce que
les mères portent continuellement sur le
dos, leurs enfans pendant qu'elles allaitent
et que la durée de l'allaitement s'étend à
plusieurs années; on a même dit que les
femmes de plusieurs peuples s'efforçaient
d'alonger leurs mamelles, donc elles regar-
daient la longueur comme un beautéw).
Les mamelles volumineuses ont distin-
gué quelques nations: Juvenal s'exprime
ainsi en parlant des Egyptiens:
Cette ampleur n'était point en Egypte
exclusive aux femmes, les hommes la parta-
geaientx).
Les Portugaises ont la gorge très-am-
pley), les Espagnoles, au contraire, en
ont fort peu, parceque, dans le siècle
[Seite 242] dernier, elles s'opposaient à son accrois-
sement et s'étudiaient à la comprimerz).
Il est certain que l'on peut favoriser
l'accroissement les mamelles; on voit à
Londres, chez de très-jeunes filles qui
vaguent pendant la nuit dans les rues de
cette grande cité, un exemple remarqua-
ble de l'influence de la jouissance précoce
des plaisirs de Vénus sur le volume de la
gorge.
On croit généralement que le membre
viril est noir chez les Nègres. Celui que
je conserve dans mon cabinet anatomique
répond parfaitement à cette opinion; mais
je ne sais si cette particularité est cons-
tantea) ou lui est exclusive. Les femmes
[Seite 243] ardentes préfèrent dit-on les caresses des
Nègresb)
; les Européens à leur tour desi-
rent davantage les femmes de couleurc),d).
J'ignore les causes de cette préférence;
elles peuvent être nombreuses.
Ces femmes ressembleraient-elles à celles
de quelques peuplades Mongouse) et
Américainesf) qui conservent, dit-on, l'é-
troitesse des parties sexuelles même après
la maternité?
Steller attribue une conformation opposée
aux femmes Kamtschadalesg).
On assure que plusieurs d'entre elles
ont les nymphes pendantes et alongées;
celles des Hottentotes ressemblent, dit-
on, à des appendices dactiliformesh). Il
paraît que cette conformation tient à un
alongement artificieli) des grandes lè-
vresk), coutume qui a sans doute donné
lieu aux fables debitées sur une prétendue
[Seite 245] peau qui pendait de l'abdomenl), et devait
selon des auteurs crédules, couvrir les par-
ties sexuellesm).
Les membres inférieurs offrent chez quel-
ques nations des variétés pour la forme et
les proportions.
Les Indiens ont les jambes très-lon-
guesn), les Mongoles fort courteso), et
[Seite 246] les cuisses des Irlandaises sont, dit-on,
très grossesp),*).
Les habitans de la nouvelle Zélande ont
les jambes si volumineuses qu'elles parais-
sent œdématiéesq).
On prétend que nos antipodes ont les
jambes difformes et contournées, et que
ce défaut lient à la manière dont ils ont cou-
tume de s'asseoirr).
Les jambes torses sont très-communes
chez les Kalmoucks: cela dépend de la
forme du berceau des enfans et de l'équi-
[Seite 247] tation, à laquelle on les habitue dès le pre-
mier âges).
Les insulaires de la terre de Feut),
appelés Pescherais par Bougainvilleu),
ont les pieds extrêmement difformes.
C'est surtout en Afrique que les diffor-
mités des jambes et des pieds deviennent
nationales chez plusieurs peuples. Les
anciens avaient fait cette observation par-
ticulièrement sur les Egyptiensw), les
Ethiopiensx), et les esclaves nègresy).
Il faut aujourd'hui distinguer chez ces
derniers, trois espèces de difformités des
extrémités inférieures. La courbure des
[Seite 248] jambesz) (vulg. jambe cambrée), leur
grosseur difformea), et enfin les gerçures
et les fissuresb).
Il faut en grande partie attribuer la
courbure des jambes à la position des en-
fans, qui, fixés pendant l'allaitement sur
le dos de leurs mères, s'y appuient forte-
ment avec les genouxc). La plupart des
[Seite 249] autres difformités sont dues à des causes
morbifiquesd).
Il est probable que l'épaisseur démesu-
rée des pieds, quand elle ne tient pas à un
état pathologique, provient d'un travail
violent et continu.
Les fissures qui se font, surtout à l'épi-
derme calleux de la plante du pied des Nè-
gres, dépendent évidemment du marcher
sur un sol brûlant et sablonneuxe).
Des observateurs attentifs ont remar-
qué des peuples dont les pieds et les
mains étaient infiniment petits. Les In-
[Seite 250] diensf), les Chinoisg), les Kamcha-
dalsh), Les Eskimauxi), les Péruviensk),
les Hottentotsl), les habitans de la nou-
velle Hollandem) sont dans ce cas.
Le petitesse du pied peut être un effet
de l'art, comme on le voit chez les Chi-
[Seite 251] noises, mais il est vraisemblable quelle
dépend souvent aussi de la mauvaise ma-
nière de vivren) et de se nourriro).
Nous avons vu tout ce qui a paru digne
[Seite 252] de remarque dans la forme et les propor-
tions relatives des différentes parties du
corps humain; je vais traiter briévement
des variétés de stature. Aucune recher-
che anthropologique n'a donné lieu à tant
de fables, à des relations aussi exagérées.
Aujourd'hui qu'elles sont en grande partie
réfutées et réduites à leur juste valeur, il
devient inutile de s'appesantir sur cet
objet.
Les anciens Pygmées d'Afrique ne sont
plus que le symbole des graduation du ni-
lomètre*).
Les os énormes déterrés en différens en-
droits, et qui devaient avoir appartenu à
[Seite 253] une race de géans, sont aujourd'hui ren-
dus à des animaux sauvagesp).
Tout ce qui nous reste des anciens pour
nous éclairer sur leur stature, les momies,
les armures, les ossemens et particuliè-
rement les dents, trouvés dans les sépul-
cres et les urnes des temps les plus recu-
lésq), tous s'accordent à prouver que la
stature de l'homme a toujours été la même.
Sans doute il existe des variétés nationa-
les de stature; en Europe les Danois, les
[Seite 254] Suédeis et les habitans de quelques cantons
de l'Helvétie lnt plus avantageuse, et les
Lapons plus petite. Dans le Nouveau-Mon-
de les Abiponens sont au-dessus, et les Eski-
maux au-dessous de la taille moyenne. En
général il n'existe aujourd'hui, sous le
rapport de la stature, aucune variété na-
tionale dont on ne puisse aisément rendre
compte par des modes ordinaires de dégé-
nération ou par des phénomènes analogues
observés chez les autres mammaux.
On connaît néan moins deux variétés qui
méritent des articles séparés: on a cru,
jusqu'à ces derniers temps, que l'une d'elles
différait prodigieusement par sa grandeur,
et l'autre par sa petitesse, de la stature
ordinaire. Les géans sont les Patagons, ha-
bitans de l'Amérique méridionale et les
nains les Quimos, qu'on croit être des
montagnards de Madagascar.
A l'extrémité du continent de l'Amé-
rique australe, vers le Sud-Est, habite
[Seite 255] un peuple que reconnut l'équipage de Ma-
gellane. Il lui donna le nom composé de
Patagon, parce qu'il les croyait de la même
race que leurs voisins les Chonis, et qu'ils
avaient les pieds enveloppés de peau de
Cuanac ce qui les faisait paraître velus
et semblables à ceux des Patas, mais ils
se nommaient vraiment Teheulete.
Antoine Pigaffetta, l'un des compagnons
de Magellan, a le premier parlé des Pata-
gons et a rapporté qu'ils étaient une fois
plus grandsr) que les Européens: pendant
deux siècles et demi après cette époque
les relations des voyages vers cette plage
du Nouveau-Monde se contredirent telle-
ment au sujet de ce peuple, qu'elles ne
peuvent qu'exiter une juste défiance;
elles offrent une preuve du peu de foi
qu'on doit ajouter au récit des voya-
geurss). Je me bornerai aux faits dont
[Seite 256] une saine critique a prouvé la vraisem-
blance.
Il existe une race dont la stature, sans
être gigantesque, est plus avantageuse et
plus athlétique que celle des autrest)
[Seite 257] hommes. Les relations que nous en avons
sont si ambiguës et si différentes, qu'il est
impossible de déterminer exactement sa
grandeur. Cependant, d'après des témoins
dignes de foi, elle n'excède pas six pieds
et demi, mesure anglaise; cette taille nous
paraîtra moins étonnante si nous faisons
attention que tous les Américains sont
très-grands, surtout ceux du Sud, et qu'il
est vraisemblable que ces peuples, comme
les anciens Germains, au rapport de Tacite,
ne contractent d'alliance avec aucune na-
tion, et conservent par-là, leurs caractères
nationaux dans toute leur pureté.
Les Patagons sont Nomades, comme les
habitans de la Terre-de-Feu et les autres
peuplades de l'Amérique méridionale. Il
n'est donc pas étonnant que les Européens,
qui abordèrent à des époques différentes
sur les mêmes points de ce pays, n'y aient
[Seite 258] pas toujours rencontré la même race
d'hommes.
On reconnaît aussi facilement l'origine
des fables, débitées sur la taille des Pa-
tagons.
Il existait une vieille tradition que la
terre avait nourri autrefois des géans; les
voyageurs sont avides de prodiges: il n'est
pas étonnant qu'ils crussent trouver ceux
qu'ils connaissaient déjà, en voyant dans
le Nouveau-Monde un peuple vigoureux et
d'une haute stature, des tombeauxu)
très-grands et des ossemensw) d'une lon-
gueur prodigieuse.
Le Conseil d'Espagne pouvait espérer
écarter les Européens du Magellan par de
semblables exagérationsx); et ceux-ci,
soit vanité ou terreur, ne firent que des
relations mensongères; c'est ainsi que dans
le siècle dernier, l'auteur du Voyage de
Roggewin assure que les insulaires de l'île
de Pâque, située dans la mer pacifique,
[Seite 260] étaient des géans de douze pieds de
hauty).
Etienne Flacourt, dès le siècle dernier,
regardait comme une fable cette ancienne
tradition, qui donnait pour habitans aux
montagnes de l'intérieur de Madagascar
une nation de nains très-belliqueux dont
les invasions subites inquiétaient souvent
les autres insulaires. On appelait ces petits
hommes des Quimos ou Kimos.
Cette histoire a trouvé de nos jours des
défenseurs dans le gouverneur Modave et
le célèbre botaniste Commerson. Mais si
l'on réduit leurs récits aux faits, sur les-
[Seite 261] quels ils s'accordent, et à ceux qui ne
sont pas contradictoires, il en résulte que
Modave avait acheté une esclave très-
petite, qu'on lui avait vendue pour être
de la race des Quimos; qu'elle était pâle,
avait les mamelles déprimées et que ses
bras allaient presqu'à ses genoux. Le ba-
ron de Clugny, qui voyage a pendant six
mois dans le même navire qu'elle, démon-
tra que son nabotisme venait d'une confor-
mation vicieuse, d'une constitution mala-
dive; que cette femme était Macrocéphale
et stupide, qu'elle ne formait que des sons
confus, etc. Je suis donc convaincu, que
sa maladie tenait au crétinisme, et cela
d'autant plus que tous ces symptômes s'y
retrouvent, et qu'on a particulièrement
observé la longueur des bras sur les crétins
de Salzbourg.
Sonnerat s'efforce de prouver qu'on doit
rapporter cette histoire aux Zaphéracqué-
musses. Ces chefs des anciens habitans de
la province Manate de Madagascar préten-
[Seite 262] dent tirer leur origine d'un nain, et leur
nom est conforme à cette opinionz).
Il n'existe aucun peuple entièrement
composé de nains ou de géans. Les variétés
nationales de la stature humaine paraissent
(§ 71) renfermées dans des bornes beau-
coup plus étroites que celles assignées aux
animaux domestiques (§ 29), et s'expli-
quent facilement par les causes ordinaires
de dégénération.
Le climat (§ 34): l'exemple des Lapons
et des Hongrois démontre suffisamment
[Seite 263] son action: ces deux colonies du même
peuple placées sous un ciel différent, ont
pris une stature différente.
La nourriture (§ 35): La physiologie
prouve son influence sur la stature; c'est
à des alimens plus abondans que les chefs
des O-taïtiens doivent l'élévation plus con-
sidérable de leur taillea). La stature de
plusieurs nations sauvages a sensiblement
diminué depuis qu'elles abusent des li-
queurs alkooliséesb).
L'époque de la puberté: elle varie chez
les différens peuples et influe beaucoup
sur la stature nationale, La continence fa-
vorise l'accroissement de ceux qui restent
long-temps impubères, comme le remarqua
César sur les anciens Germains. Des jouis-
sances prématurées s'opposent au contraire
[Seite 264] aux développemens de ceux dont la pu-
berté est précoce. Cette observation a été
faite dans tous les pays par les plus habiles
observateursc).
Tant que les nations ne se mélangent
pas, elles conservent généralement la
même stature; mais elle s'altère sensible-
ment au contraire par des alliances avec
des peuples Je tailles différentesd).
On ne peut douter de l'influence des
auteurs d'une race sur la stature de leurs
descendans; il existe des familles entières
remarquable par la grandeur ou la petitesse
de leur taille.
Depuis Hérodote, nos géographes ont
puisé dans des sources diverses et sur-
tout dans les écrits d'Aristée, de Ctésias,
de Mégasthene, le récit d'une multitude
de formes monstrueuses, attribuées à dif-
férentes nations Ce sont des Arimuspes,
qui n'ont qu'un œil, des Cynamolgues à
tête de chien, des Monocelis, qui n'ont
qu'une jambe, des sauvages du Mont-
Imaus, qui ont la pointe du pied en ar-
rière, etc....e).
Ce n'est pas ici qu'il convient de s'arrê-
ter sur ce sujet; cependant une semblable
recherche offre à-la-fois de l'intérêt et de
l'utilité, en faisant voir l'origine de ces
fables. Dans l'anthropologie comme dans
toutes les branches de l'histoire naturelle,
il n'est presqu'aucun fait, quelqu'absurde
qu'il paraisse, qui n'ait pour base une vé-
[Seite 266] rité denaturée par l'hyperbole on par une
fausse interpretationf).
Parmi cette multitude de nations mons-
trueuses, je ne parlerai que des peuples à
queue, dont tant d'auteurs, de siècles dif-
férens, ont attesté tour-à-tour l'exis-
tenceg).
Pline, après lui Ptolomée et Pausanias
firent mention de peuples de l'Inde, qui
avaient des queues. Ce fait fut confirmé au
siècle dernier par le géographe de la Nu-
bie, Marc-Paul, Vénitien, et quel-
[Seite 267] ques autres. Dans des temps plus rappro-
chés un grand nombre d'auteurs ont at-
tribué, les uns d'après les autres, des
queues à différens insulaires de l'Archi-
pel indienh), et aux habitans de quel-
ques provinces de la Russiei)
k).
On s'aperçoit, dès qu'on y fait attention,
que ces assertions sont d'un faible poids.
La plupart des auteurs ne rapparient ce
fait que sur des ouï-dire.
Ceux qui se prétendent témoins ocu-
laires sont reconnus pour mériter une bien
légère confiancel)
Les relations varient à ce sujet d'une ma-
nière qui les rend suspectesm).
Les voyageurs les plus exacts, les plus
véridiques, qui ont parcouru ces contrées,
ou gardent un silence profond sur cette
monstruosité, ou bien, forts du témoi-
gnage des indigènes, assurent que c'est
une pure fictionn).
D'autres enfin rapportent l'origine de
cette opinion erronée.
Les uns, à un appendice des véte-
menso).
D'autres, à la queue des singes anhtro-
pomorphesp).
Il n'existe pas même un exemple de na-
tion à queue, qui ait eu pour témoins ocu-
laires des hommes qui méritassent d'être
crus, pas même une seule famille signalée
par cette étrange anomalie, tandis que
tout le monde sait que plusieurs offrent
des monstruosités d'un autre genre héré-
ditaires et constantes, telles qu'un sixième
doigt, etc....
On sent qu'il n'est pas ici plus question
de ces individus qu'on a quelquefois vus,
même en Europe, et dont le coxis portait
[Seite 270] une excroissance monstrueuse, que d'une
multitude d'autres monstres de naissance.
J'ai fait observer (38) que les dispo-
sitions morbifiques des animaux influent
particulièrement sur leur coloration,
et qu'en se propageant pendant une lon-
gue suite de générations, elles deviennent
pour ainsi dire naturelles et donnent
naissance, dans quelques espèces d'ani-
maux, à des variétés constantes. J'ai rap-
porté l'exemple très-connu de la variété
blanche du lapin et de la souris, dont la
couleur rose des pupilles et la blancheur
du poil sont dues à la leucœthiopie.
Cette affection, observée quelquefois
chez les hommes, est plus sporadique; on
ne la trouve nulle part aussi fréquemment
et aussi constamment que chez les animaux
[Seite 271] que je viens de nommer, où elle forme
une variété particulière et nombreuse.
Je parlerai néanmoins de la leucoe-
thiopie humaine, mais en peu de mots;
parcequ'on peut affirmer qu'elle constitue
à peine une variété, et qu'il serait inutile
de répéter ce que j'ai déjà dit ailleurs sur
cette maladieq).
Deux symptômes constans et pantho-
gnomoniques dans la Leucœthiopie doi-
vent la faire ranger parmi les affections
cachexiques:
D'abord la couleur de la peau; elle est
d'un blanc vicieux, tirant sur un rouge
contre nature, et présente même quelques
taches d'un aspect lépreuxr); les cheveux
et les poils sont d'une blancheur particu-
[Seite 272] lière qui ne ressemblent ni à celle qu'amène
l'âge, ni à ce beau blond doré, si com-
mun en Allemagne. Cette couleur ne peut
se comparer qu'à celle de la crème.
Le second symptôme se trouve dans l'or-
gane de la vue; l'œil est privé du vernis
noirâtre qui, dans l'état naturel recouvre
l'intérieur de la coroïde et concourt puis-
samment à la vision par l'absorption des
rayons lumineux. L'iris des Nègres blancs
est légèrement rosée et presque sans cou-
leur, la pupille est d'un rouge plus vif,
semblable à celui des cornalines, couleur
de chairs pâles*).
Ces deux symptômes se trouvent si cons-
[Seite 273] tamment réunis, que je n'ai jamais vu les
yeux avoir cette teinte particulière, sans
que les cheveux et les poils ne fussent
d'un blanc plus ou moins gris. Des obser-
vateurs trop attentifs aux autres phéno-
mènes dont nous avons parlé, n'ont pas
pris garde à cette rougeur des pupilles;
ces yeux souffrent difficilément la lumière,
et les paupières sont le plus souvent rap-
prochées.
La leucœthiopie est toujours de nais-
sance et ne se contracte jamais.
Toujours incurable*), il est sans exemple
que le vernis noirâtre des yeux ait paru
après la naissance.
Elle est souvent héréditaire, car il est
faux qu'elle rende, comme on l'a préten-
du, inhabile à la génération.
En général, les relations qu'on possède
sur cette singulière maladie du genre hu-
main sont remplies d'erreurs. Dans les unes
on hésite à la ranger dans la pathologie;
dans les autres on la confond avec le cré-
tinismè de l'histoire de l'Orang-Ou-
tang. Enfin on a prétendu qu'on ne
voyait cette affection qu'entre les Tropi-
ques.
Les Nègres en ont fourni les premières
observations. La noirceur de leur peau et
de leurs cheveux rendait plus remarquable
cette blancheur accidentelle, qui fit nom-
mer cette maladie leucœthiopie. Les Hol-
landais donnèrent, par mépris, aux
Nègres qui en étaient atteints, le nom d'un
insecte qui fuit la lumière, et les appelèrent
Kackerlacken, les Espagnols Albinos, et
les Français Blafards ou Nègres blancs. Il
est certain que cette maladie, loin d'être
exclusive à une région, a été observée dans
toutes les parties de la terre et chez toutes
les variétés de la race humaine.
J'en ai déjà vu seize exemples dans dif-
[Seite 275] férentes parties de l'Allemagnes). On en
a observé dans le reste de l'Europe, chez
les Danoist), les Anglaisu), les Irlan-
daisw), les Françaisx), les Suissesy),
les Italiensz), les insulaires de l'Archipel
[Seite 276] greca), les Hongroisb)
; et hors de l'Eu-
rope, chez les Arabesc), les Malabaresd),
les Madécassese), les Caffresf), les Nègres
africains et ceux d'Amériqueg). On en a
vu à l'isthme de Darienh), et au Brésili),
[Seite 277] dans l'océan indien, à Sumatrak), à
Balil), à Amboinem), à Manillen),
dans la nouvelle Guinéeo), les îles des
Amisp), et de la Sociétéq),*).
La leucœthiopie n'est point exclusive
au genre humain; on l'a observée chez
beaucoup d'animaux à sang chaud. Tout
le monde connaît les lapins. les souris,
les furets et les chevaux atteints de cette
maladie. Dans ces quatre espèces d'ani-
maux cette affection est devenue, par la
suite des temps, presqu'une seconde na-
ture (§ 38). Je connais des exemples de la
leucœthiopie chez les singesr), les écu-
reuilss), les ratst), les hamstersu), les
[Seite 279] cochons d'Indew), les taupesx), les di-
delphesy), les martresz), les fouinesa),
les chèvresb), et parmi les oiseaux, chez
les corbeauxc), les merlesd), les serins,
les perdrixe), les poules et les paons.
Il est bien remarquable qu'il ne s'en
trouve aucun exemple parmi les animaux
à sang froid.
J'ai suffisamment développé les causés
[Seite 280] qui pouvaient avoir fait dégénérer le genre
humain, sous l'aspect de la couleur, de la
stature, de la structure et des proportions
des parties du corps, et comment les va-
riétés s'étaient opérées. Je ne crois pas
avoir laissé échapper un seul fait, capable
d'éclaircir la célèbre question de l'unité
de l'espèce humaine. Je ferai voir dans la
Section suivante quelle conclusion l'on
doit tirer de ces Recherches.
Dans le dénombrement que nous ve-
nons de faire des variétés du genre hu-
main, nous avons vu (Section III) qu'il
n'en est pas qui ne se retrouvent parmi les
animaux à sang chaud, surtout chez les
espèces domestiques; que même elles
sont ordinairement beaucoup plus appa-
rentes et proviennent de causes dont l'é-
[Seite 282] vidence est manifeste. Nous nous sommes
également assurésqu'il n'est aucune variété
soit pour la couleur, le visage, la sta-
ture, etc. quelque considérable qu'elle
paraisse, qui ne se fonde insensiblement
avec celles du même ordre, de manière
qu'elles sont toutes relatives, et ne diffé-
rent que par le degré.
L'aprés cela il n'est pas étonnant que
leur classification ne paisse être qu'arbi-
traire.
Dans l'arbitraire même, des raisons nous
font préférer une classification à une autre;
ainsi, après une mûre réflexion et l'examen
le plus soigneux de toutes les connaissan-
ces acquises sur cette matière, j'ai cru qu'on
pouvait très-convenablement à sa dispo-
sition naturelle, diviser le genre humain
en cinq variétés principales que je nomme:
La variété Caucasienne se trouve placée
la première pour des raisons que j'expli-
querai plus bas.
Elle se transforme en deux extrêmes
très-éloignés, très-différens l'un de l'au-
tre, la race Mongole et la variété Afri-
caine.
Deux variétés servent de passage de cette
race prototype aux deux variétés qui en
sont les plus éloignées.
La variété Américaine entre la Cauca-
sienne et la Mongole, la variété Malaie
entre la Caucasienne et la Nègre.
Nous allons indiquer les caractères et
tracer les descriptions propres à faire re-
connaître en général ces cinq variétés;
j'avertirai, avant tout, que cette multipli-
cité de caractères qui n'ont que des diffé-
rences graduelles s'opposant à ce qu'un
seul suffise, il est devenu nécessaire d'en
réunir plusieurs, et que ce caractère com-
plexe n'est pas tellement constant qu'on
ne puisse y trouver dans chaque variété
plusieurs exceptions. Tel qu'il est néan-
moins il donne sur les différentes races du
genre humain des notions assez claires et
assez précises.
La couleur blanche, les joues rosées
les cheveux bruns ou blonds, la tête pres-
que sphérique.
La face ovale, étroite, les traits mé-
diocrement prononcés, le front uni, le
nez légérement arqué, la bouche petite.
(§ 56).
Les dents incisives des deux mâchoires
placées perpendiculairement (§ 62).
Les lèvres, et surtout l'inférieure, mol-
lement étendues, le menton plein et
rond. (§ 56).
La regularité des traits de ce visage,
qui est celui des peuples d'Europe, le fait
en général regarder comme le plus beau
et le plus agréable.
Cette race comprend tous les Européens,
à l'exception des Finois et des Lapons;
elle s'étend dans l'Asie occidentale jus-
qu'au fleuve Oby, la mer Caspienne et
le Gange; on la retrouve encore dans la
partie septentrionale de l'Afrique.
Cheveux noirs, roides, droits et peu
fournis, (§ 52) la tête presque quadran-
gulaire. (§ 63.)
La face large, à-la-fois plane et dépri-
mée, les traits peu marqués et comme
fondus ensemble.
L'espace intersurcilier, large et uni.
Les joues globuleuses et saillantes en-
dehors.
L'ouverture des paupières étroite et
linéaire.
Cette variété se compose de tous les
Asiatiques, excepté les Malais de l'extré-
[Seite 288] mité de la Péninsule, au-delà du Gange,
et les habitans de la partie occidentale
de l'Asie, nommés précédemment. En Eu-
rope on la retrouve chez les Lapons,
chez les Finois, et en Amérique, chez
les Esquimaux, répandus depuis le détroit
de Bhering jusqu'au Groënland.
Les cheveux noirs et crépus. (§ 52).
La tête étroite, comprimée sur les
côtés. (§ 62).
Les os de la pommette saillans en avant.
Le nez gros et se confondant pres-
qu'avec la mâchoire supérieure, qui est
portée en avant. (§ 56).
Le bord alvéolaire étroit et alongé.
Les dents incisives supérieures placées
obliquement. (§ 62).
Les lèvres, particulièrement la supé-
rieure, gonflées.
Les jambes sont souvent cambrées. (§
69.)
Cette variété comprend toute l'Afrique
excepté ses parties septentrionales.
Cheveux noirs, droits, roides et rares.
(§ 52.)
Le nez presque camus et cependant
saillant.
En général les pommettes sont émi-
nentes, la face est large sans être plane
ni déprimée, les traits, vus de profil,
paraissent très-prononcés et comme pro-
fondément sculptés. (§ 56.)
La forme du front et du vertex est sou-
vent ici au produit de l'art. (§ 62.)
Cette variété occupe toute l'Amérique,
excepté le pays des Eskimaux.
Cheveux noirs, mous, épais, abondant
et frisés. (§ 52).
Le nez gros, large, épaté, la bouche
grande. (§ 56).
La mâchoire supérieurs un peu avancée.
(§ 62).
Les traits vus de profil, sont marqués et
distincts. (§ 56).
Cette dernière variété comprend les
insulaires de la mer pacifique, les ha-
bitans des îles Marianes, Philippines, Mo-
luques, de la Sonde, et les indigènes de
la péninsule de Malaca.
Il est juste d'exposer l'opinion des diffé-
rens auteurs qui ont écrit sur les variétés
du genre humain; le lecteur pourra les
comparer et choisir celle qui lui paraîtra la
plus probable.
Vers la fin du siècle dernier un anonyme
divisa le premier le genre humain en
quatre races: la première occupe l'Europe
entiêre, excepté la Laponie, l'Asie mé-
ridionale, l'Afrique septentrionale, et
toute l'Amérique. La seconde peuple le
reste de l'Afrique. La troisième le reste de
l'Asie et les îles de l'Est. La quatrième la
Laponief).
Leibnitz a placé dans notre continent
quatre races d'hommes; deux en occupent
les extrémités, les races Négre et Lapone;
[Seite 294] il nomme celle du milieu orientale (Mon-
gole) et occidentale (Européenneg)).
Linné, d'après la géographie, divise
les hommes en Américains rouges, en Eu-
ropéens blancs, en Asiatiques jaunes et
en Africains noirsh).
Buffon reconnaît dans la race humaine
six variétés dont voici les noms: la Pô-
laire ou Laponne*), la Tartare, que j'ai
nommée Mongole d'après son nom vulgaire,
[Seite 295] l'Asiatique australe, l'Européenne, la
Nègre, et l'Américainei).
L'illustre gouverneur Pownal mérite
une place distinguée parmi ceux qui, d'a-
près le nombre des fils de Noé, ont di-
visé le genre humain en trois races: c'est
lui qui dans cette étude fixa le premier
l'attention sur la forme nationale des crâ-
nes. Ces trois races se distinguent, d'a-
près la couleur, en blanche, en rouge, et
en noire. Les Américains et les Mongoles
sont placés entre les premières variétés,
parcequ'indépendamment des autres ca-
ractères ils se rapprochent mutuellement
par la configuration du crâne et la nature
des cheveuxk).
L'abbé de la Croix divise les hommes,
en blancs et en noirs; les premiers se sou-
[Seite 296] divisent en blancs proprement dits, en
bruns, en jaunâtres et en olivâtresl).
Kant fait dériver quatre variétés de la
couleur propre à chaque pays (Weisse von
brünetter Farbe), la blanche du Nord de
l'Europe, la cuivrée d'Amérique, la noire
du Sénégal et l'olivâtre des Indesm).
Jo. Hunter M. D. reconnaît sept variétés:
la noire, qui comprend les Nègres et les
Papons; la noirâtre, où se trouvent les
Maures et les Indigènes du cap de Bonne-
Espérance; la cuivrée, des Indes Orien-
tales; la rouge, d'Amérique; la basanée,
dans laquelle sont compris les Tartares,
les Arabes, les Persans, les Chinois, etc.; la
brune, où se trouvent les habitans du Midi
de l'Europe, les Turcs, les Abyssins, les
Samoïdes et les Lapons. Enfin la blanche
[Seite 297] qui occupe le reste de l'Europe, la Géor-
gie, la Mingrélie et le Cardistann).
Zimermann croit l'homme originaire
de la plaine montueuse de la Scytie asia-
tique, située entre les sources du Gange,
de l'Indus et de l'Obi. Il reconnaît quatre
variétés dans le genre humain: la pre-
mière occupe l'Europe; la deuxième, l'Asie
boréale, et l'Amérique surtout septen-
rionale; la troisième, l'Arabie, les Indes,
Archipel Indien, la quatrième; l'Asie mé-
ridionale, la Chine et la Corée. Cet homme
célèbre pensait que la variété nègre
tirait probablement son origine de la pre-
mière ou de la troisième de ces raceso).
Meiners rapporte tout le genre humain
à deux races, les belles et les laides
(schone und hassliche): la première se
compose des nations à peau blanche, et
la seconde, de celles dont le teint est plus
ou moins foncé (dunkelfarbige). La belle
[Seite 298] race est formée par les Celtes, les Sar-
mates et les peuples de l'Orient. La laide
constitue le reste du genre humainp).
Klügel partage les hommes en quatre
variétés: la première est Originaire de la
partie élevée du plateau de l'Asie; elle peu-
ple cette partie du Monde, toute l'Europe et
les régions septentrionales de l'Afrique
et de l'Amérique; la seconde comprend les
Nègres; la troisième les Américains, à
l'exception de ceux du Nord; et la qua-
trième les insulaires de l'Océan australq).
Metzger reconnaît, dans le genre hu-
main, deux variétés principales, qu'il con-
sidère comme les extrêmes: 1° Les blancs
habitant l'Europe et les parties septen-
trionales de l'Asie, de l'Afrique et de
l'Amérique; 2°. les Nègres qui occupent
le reste de l'Afrique, les Américains, les
peuples de l'Asie méridionale, et les
[Seite 299] insulaires de la mer du Sud, forment des
nuances entre ces deux racesr).
Après avoir développé avec soin les
différens caractères que nous avons assi-
gnés aux cinq variétés du genre humain,
il ne nous reste plus, pour terminer, qu'à
rassembler les observations éparses, re-
latives à chacune d'elles.
J'ai donné à cette variété le nom du
mont Caucase, parceque c'est dans son
voisinage que se trouve la plus belle race
d'hommes, la Géorgiennes), et que s'il
[Seite 300] est possible d'assigner un berceau au genre
humain, toutes les raisons physiologiques
concourent à le placer dans cet endroit.
Les habitans de la Géorgie nous offrent en
effet cette belle forme des crânes (§ 60) dont
les autres semblent dériver, jusqu'à ce
qu'ils arrivent aux points les plus éloignés,
les crânes des Mongoles et des Nègres.
Enfin, la peau des Géorgiens est blan-
che, et cette couleur paraît encore ap-
partenir primitivement au genre humain
(§ 45) mais elle dégénère facilement en une
couleur noirâtre, et se rétablit avec peine
quand la sécrétion et la précipitation du
carbone se sont profondément établies (§
44).
Cette variété est la même que l'on con-
naissait sous le nom vague et indéterminé
de Tartaret); cette dénomination a causé
beaucoup d'erreurs dans l'étude des varié-
tés du genre humain. Buffon, et ceux qui
l'ont suivi, trompés par elle, ont trans-
porté les caractères nationaux des Mon-
goles, tirés des anciens auteursu), qui
[Seite 302] les appelaient Tartares, aux vrais Tar-
tares qui appartiennent, comme je l'ai dit,
à la première variété.
Au reste, les Tartares se confondent
avec les Mongoles par les Kirguis et les
peuples voisins, comme les Mongoles avec
les Indiens, les Thybetansw) avec les
Américains par les Eskimos avec les Malaies
par les habitans des îles Philippinesx).
Cette variété se trouve si loin de nous,
surtout sous le rapport de la couleur, que
plusieurs personnes ont cru qu'elle for-
mait une espèce particulière. Voltaire,
aussi ignorant en physiologie qu'habile à
manier le ridicule, partageait cette opi-
nion. Il devient inutile de la réfuter, ayant
rendu manifeste (Sect. III) qu'il n'existe
pas même un seul caractère tellement pro-
pre et commun à tous les Ethiopiens, qui
ne se retrouve d'une part répandu çà et là
dans les autres variétés du genre humain,y)
[Seite 304] qui ne manque aussi à beaucoup de nègres;
enfin qu'il n'en est aucun qui ne se con-
fonde insensiblement avec ceux des variétés
voisines. Il suffit, pour s'enconvainere, d'exa-
miner avec soin seulement chez quelques
nations noires les différences qui les sépa-
rent, et comme elles forment chez les Fou-
lachs, les Golofres, les Mandingues, les
gradations qui les rapprochent des Maures
et des Arabes.
On a prétendu que les Ethiopiens avaient
plus de rapport avec le singe que les autres
hommes; je suis de cet avis, dans ce
sens, que le cochon solipède (20 30)
ressemble davantage au cheval que les au-
tres cochons. Ce mode de comparaison rela-
tive me semble d'autant moins de valeur,
que parmi les principales variétés du
genre humain, il s'en rencontre à peine
une seule qui n'ait pas fourni des peuples
qui offrissent à des observateurs d'ailleurs
exacts, de traits de ressemblance avec le
singe: on l'a dit formellement des La-
[Seite 305] ponsz) des Esquimauxa) des Caaigousb)
de l'Amérique, australe et des insulaires
de Mullicoloc).
On est à-la-fois indigné et surpris des
[Seite 306] fables qu'on s'est plu à répandre sur les
caractères nationaux de cette variété.
Les uns ont refusé la barbe aux hommesd)
et les évacuations sexuelles aux femmese).
D'autres ont prétendu que la couleur de
tous les Américains était parfaitement uni-
formef); enfui on a voulu qu'ils eussent
tous la même figureg).
Des observateurs exacts assurent au-
jourd'hui unanimement que la nature n'a
point créé les Américains imberbes. Je
regrette d'avoir réuni auparavant une
foule de témoignagesh) qui prouvent que
dans le Nouveau-Monde, depuis les Esqui-
maux jusqu'à la terre de Feu, tous les in-
[Seite 307] digènes ont de la barbe. Il est également
certain que ceux qui paraissent n'en point
avoir, ne sont ainsi que parcequ'ils se
l'arrachent soigneusement. Cet usage se
retrouve chez d'autres peuples, et parti-
culièrement dans les nations malaiesi) et
Mongoles.k)
Les Américains ont, comme les Mon-
goles, la barbe fine et peu fournie: mais
on ne sera pas mieux fondé à le dire, im-
berbes que d'appeler chauves les hommes
dont les cheveux sont clair-semés.
Ceux qui ont cru les habitans du Nou-
veau-Monde naturellement imberbes, sont
tombés dans la même erreur que les anciens
qui regardaient les oiseaux de Paradis
comme apodes, parceque ceux dont ils
[Seite 308] la tenaient avaient l'habitude de leur re-
trancher les pieds.
Les Européens parcourant le Nouveau-
Monde crurent probablement que les
Américaines n'étaient point sujettes à
l'évacuation menstruelle, parce qu'ils
envoyaient un grand nombre presque nues
et n'apercevaient aucune trace de cet
écoulementl). Cela tenait vraisemblable-
ment à deux causes; d'abord, dans ce
pays, les femmes sont, à cette époque,
regardées impures; on les sépare de la
société; elles se retirent loin des hommes
dans des cabanes écartées où, grace à ce
préjugé, elles peuvent jouir du repos pen-
dant tout ce tempsm). En second lieu
cette propreté qui les distingue et la pu-
deur leur font soigneusement en le vertou-
tes les traces d'évacuation sexuellesn).
La couleur de la peau des Américains,
loin d'être uniforme, arrive jusqu'au noir,
comme je l'ai dit (§ 43); le climat et les
lois de la dégénération expliquent facile-
lemento) pourquoi ces peuples qui sem-
blent venir de l'Asie septentrionalep),
n'ont pas des tons de couleurs aussi variés
que les autres races provenant de la même
origine répandues dans l'ancien continent.
Il faut en dire la même chose de la pré-
tendue ressemblance des visages améri-
cains. Les témoins occulaires observateurs
exacts ont ri de l'hyperbole de ces voya-
geurs qui assuraient que voir un Améri-
cain c'était les connaître tousq). On sait
au contraire, par les dessins, les temoigna-
ges les plus fidèles que leur physionomie
offre autant de variété que chez les autres
[Seite 310] peuplesr), quoiqu'ayant toujours les carac-
tères nationaux que nous lui avons assi-
gnés (§ 56). Les Européens, qui les premiers
visitèrent le Nouveau Monde, trouvèrent,
avec raison, que ses habitans ressemblaient
aux Mongoles,s) et c'est un nouveau mo-
tif de croire qu'ils tirent leur origine de
ce peuple par l'Asie septentrionale.*) Ces
migrations se firent probablement à plu-
[Seite 311] sieurs fois à des intervalles éloignés, et
furent causées par des catastrophes politi-
ques et physiques. Voilà, si l'on peut se
livrer à des conjectures, pourquoi les Es-
kimos ressemblent plus aux Mongoles.t)
que les autres Américains. Ils ont dû, en
effet, émigrer les plus tard,u) et le climat
qu'ils venaient habiter différait peu de
celui de leur patrie. Je pense aussi que le
climat, dont l'action puissante conserve et
rapelle les traits nationaux (§ 57) est cause
que les habitans des régions froides de
l'extrémité méridionale de l'Amérique,
comme les Sauvages du détroit de Magellan
se rapprochent davantage de leur ancien
visage Mongole, et y reviennent pour ainsi
direw).
La variété américaine fait, comme nous
l'avons vu, la nuance entre la variété
caucasienne, prototype, et la race mon-
gole; de même entre la race nègre et la
Caucasienne se trouve la variété Malaie.
J'appelle Malaie cette variété du genre
humain qui habite la partie des Indes voi-
sines de Malacca, les îles de la Sunds, de
Sandwich, de la Société des Amis; on
observe même, que depuis Madagascar
jusqu'à l'île de Pâque, les indigènes se
servent de l'idiome Malaiex)
Cette race offre de grandes différences
pour la beauté et pour la stature; d'après
cette observation, on a partagé les O-taï-
tiens en deux variétés:y) l'une à stature
élevée, à peau blanche et dont les traits
diffèrent à peine de ceux des Européens;
l'autre, au contraire, est d'une petite
taille, a les cheveux crêpus et ressemble
assez aux mulâtresz) par la couleur et la
forme du visage. Elle a beaucoup de rap-
ports avec les insulaires des îles occidentales
de la mer du Sud, qui se rapprochent, sur-
tout par les habitans des nouvelles Hibri-
des, des Papous et des insulaires de la
nouvelle Hollande; tandis que ces derniers
se fondent, à leur tour, insensiblement avec
[Seite 314] les Nègres; de manière qu'on pourrait les
placer dans le même cadre, dans la distri-
bution des variétés du genre humain.
Les nuances insensibles qui rapprochent
toutes les variétés humaines, les causes et
les modes de dégénération analogues,
observées chez les animaux domestiques,
l'application de la Physiologie et de la
Zoologie à l'histoire de l'homme, con-
duisent à cette conclusion.
Les variétés connues du genre humain
se rapportent à une seule et même espèce.
SECTION PREMIERE.
Différence de l'homme aux animaux.
SECTION II.
De la dégénération des animaux en géné-
ral, de ses causes et de ses modes,
Nota. Le même imprimeur-libraire prend des arrange-
mens favorables pour faciliter les auteurs et libraires qui
desireront traiter avec lui, soit par billets, échange de livres,
vente de livres, ou manuscrits, centre l'impression qu'il leur
fera. Il tient généralement tous les ouvrages de Médecine,
Chirurgie, Pharmacie, Botanique, Physique, Histoire
Naturelle, toutes sortes de Littératures, au même prix qu'ils
sont annoncés dans les journaux et catalogues. Il fait la
commission pour les libraires, et se charge des envois pour-
les départemens.
Vraie Théorie Médicale, ou Exposé périodique et Développemens
de la Théorie de Brovvn, dite de l'Incitation, d'après les plus
célèbres médecins étrangers, avec la critique des traitemens
institués selon les théories adoptées et suivies en France, par
les Médecins de ce pays les plus famés; par une Société de
Médecins Français et Etrangers. an XII. 4 vol. in-8°. 14 fr.
La Médecine simplifiée, ou Eclaircissemens et Confirmation de la
Doctrine de Brovvn; par M. Weikard, Conseiller d'Etat en
Russie, traduite en Français par M. Bertin, Docteur en
Médecine. 2 vol. in-8°.
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par Lafont-Gouzzi, Docteur en Médecine, et ancien Profes-
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célèbres médecins de l'Europe, 1 vol. in-8°. 2 fr. 75 cent.
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affaiblissante du froid. 1 vol. in-8°. 2 Fr.
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Brown est le seul vrai en physiologie. 1 vol. in-8°. 1 fr. 50 c.
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Forces médicatirices de la nature. 1 vol. in-8°. 2 fr.
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contenant de nouvelles idées sur la nature de l'Inflammation,
des Convulsions, de la Veille et du Sommeil. 1 vol. 2 fr. 25 c.
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exercent la Médecine en France, ou Traité de l'abus de la
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duction à la Médecine pratique, renfermant la réfutation des
objections faites par M. le Professeur Pinel, contre la Théorie
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M. Chortet se propose aussi de publier, dans le cours de cette
seconde année, les Ouvrages suivans:
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de l'Incitation. 1 vol. in-8°. 4 fr. 50 cent.
Analyse raisonnée de la Doctrine de Brovvn. 3 gros vol. in-8°. 12 fr.
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cm de l'organe de la pensée, avec tous les organes externes et
internes du corps, soit dans un même individu, soit entre les
divers individus; le tout considéré sous un nouvel aspect,
contenant de nouvelles vues sur le soufre, l'électricité, le
galvanisme, le magnétisme, la lumière, etc. avec des applica-
tions à l'explication de la plupart des phénomènes généraux,
relatifs à ces objets, ainsi qu'à l'explication de la plupart de
ceux relatifs à l'économie animale en état de santé et de maladie,
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National, l'un sur les sympathies, et l'autre sur des décou-
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résidant de l'Académie Royale de Physique et d'Agriculture de
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De l'Unité du Genre humain, et de ses Variétés, ouvrage pré-
cédé d'une lettre à Josep Banks, Baronet et Président de la
Société Royale de Londres; par Fréd. Dumenbach, Médecin,
Membre de la même Société; traduit du Latin sur la troisième
Édition, par Fréd. Chardel, Médecin. Cette Ouvrage paraîtra
le premier Vendémiaire an XIII. 1 vol. in-8°. 5 fr.
Manuel de Médecine et de Chirurgie pratique, par M. Weikard,
Docteur en Médecine, et Conseiller d'Etat en Russie; traduit
de l'Allemand sur la troisième Edition; par J. F. Chortet,
Médecin, l'un des Rédacteurs du Journal de la Vraie Théorie
Médicale, et Auteur de plusieurs Ouvrages sur le Système de
Brown. 3 vol. in-8°. 10 fr. et franc de port 14 fr.
Cette Traduction paraîtra à dater du premier Vendémiaire
au XIII.
Les capsules atrabilaires, ou glandes sur-rénales,
ont paru à M. Cassau, beaucoup plus volumineuses chez
le nègre que chez le blanc, et l'humeur noire qu'elles
renferment, plus abondante chez eux que chez ces derniers.
M. Rousseau, naturaliste au Museum d'Hist. Nat.,
a en occasion de disséquer plusieurs nègres, et m'a dit
qu'il n'avait trouvé aucune différence entre ces organes
chez le blanc et l'homme de couleur; seulement les mus-
cles de ce dernier lui ont paru d'un rouge plus foncé.
Le professeur Geofroi a fait deux gen-
res distincts des Indris et des Makis. (Note
du Trad.
Je suis bien éloigné d'avoir la manie de
forger de noms nouveaux, pour les substituer
à ceux consacrés par une longue habitude, et
je pense même que ces fabricateurs de nomen-
clatures ont été une vraie calamité pour l'his-
toire naturelle. Je me suis donc très-rarement
écarté de la terminologie de Linné, et seule-
ment lorsque les noms qu'il donne induisent
Lien évidemment à des notions fausses. J'ai
donc rétabli le nom générique Tatou et rejeté
le nom Dasypus adopté pur Linné, parcequ'au
cune raison ne pouvait le défendre. Ou sait en
effet que ce nom grec désigne un animal à
pied velu, et que les anciens l'avaient donné
pour cela au lièvre et au lapin, dont la plante
[Seite 34] des pieds est même couverte de poils; mais
il ne convient en aucune façon à ces animaux
d'un nouvel hémisphère qui sont couverts d'une
sorte de cuirasse.
Je pense qu'on doit de même restituer dans
le genre des chauve-souris, le nom de vampire
à l'espèce de l'Amérique australe que Linné ap-
pelle spectre, lorsqu'il nomme au contraire vam-
pire cette chauve-souris de l'Inde orientale et des
îles de l'océan austral connue vulgairement sous
le nom de chien volant. La dénomination de
vampire désigne un animal qui suce le sang et
convient parfaitement à la chauve-souris d'A-
mérique, que cette habitude rend dangereuse
pour les animaux et même pour l'homme, et
nullement à l'autre espèce qui est phytophage.
cfr. conjunctiss. Voigt Magazin fur Phy-
sik und Naturgesch. Tom. IV. P. III. pag. 91.
Et (Monboddo) antient metaphysics T. III.
Lond. 1784. 4. p. 57. et 367.
Tulpius dans ses Observ. Med. rapporte,
qu'un jeune Irlandais, agé de 16 ans, elevé
au milieu des brebis sauvages, en avait en quel-
que sorte contracté la nature: – L'aspect fa-
rouche, rude, hardi et téméraire. Il vivait au
[Seite 47] milieu des rochers, dans les lieux les plus dé-
serts, était aussi sauvage qu'eus.
Est-il des brebis sauvages en Irlande? qu'est-
ce qu'une nature de brebis? est-elle féroce et
indomptable? Si l'on soumet cette histoire à
la critique, on sera convaincu que ce jeune idiot
n'avait pas plus été élevé au milieu des ani-
maux sauvages, que celui qu'on faisait passer
pour un Esquimau n'appartenait aux indigènes
des terres de Labrador. (Recherches phil. sur les
Américains. T. I. p. 258.).
Verhandeling over de Longteering dans son
journal intitulé Genees-Natuur-en Huishoud-
kundige Jaa boeken. T. III. P. I. p. 32.
La disposition des parties de l'enfant prouve
qu'il est peu propre à la station verticale. Sa
tête, proportion gardée, est plus volumineuse
que celle de l'adulte; les muscles destinés à
l'étendre sont peu exercés, tandis que ceux qui
la fléchissent étaient tous en action dans le fétus.
Les vertèbres n'ont pas d'apophises épineuses,
de manière que la tête doit nécessairement tom-
ber sur la poitrine, et agissant alors sur la co-
lonne épinière comme sur l'extrémité d'un le-
vier, entraîner facilement le corps en avant: à
cette époque de la vie le thorax est très-étroit,
bombé en avant; son centre de gravité est fort
en arrière. Les extrémités inférieures, dépour-
vues d'apophises, sont presque parallèles à la
colonne; Je cintre de gravité du corps est
beaucoup plus haut qu'à un âge plus avancé,
et parconséquent beaucoup plus éloigné de la
[Seite 50] base sur laquelle l'enfant repose. La colonne ver-
tébrale ne décrit pas ces courbures qui s'oppo-
sent à ce que le centre de gravité ne la quitte
aussi facilement. Le bassin est des plus étroits
et très-oblique en avant; il n'est pas solide-
ment établi sur les cuisses, qui sont fort rap-
prochées l'une de l'autre. Les muscles fléchis-
seurs l'emportant sur les extenseurs. Les jam-
bes se ployent sur les cuisses et celles-ci sur le
bassin; la petitesse qu'ont alors les pieds, l'arc
qu'ils font avec les péronés, les rendent peu
propres à supporter le poids du corps. L'enfant
doit donc chercher dans la station horizontale
un remède qui pare a tous ces inconvéniens.
(Not. du Trad.)
Spigel en traitant de la structure du corps hu-
main, dit. p. 9.
L'homme est le seul animal qui se tienne com-
modément assis; le seul qui ait des fesses amples
et charnues, elles sont alors comme un coussin
étendu sous lui, afin que pouvant sans peine gar-
der cette attitude, il abandonne plus entièrement
son ame à la contemplation de la Divinité.
V. la Collection de dessins d'anatomie hu-
maine et comparée, faits à la plume par Léonard
de Vinci, et conservés dans la Bibli. roy. de
Londres.
Robinet dans le T. V. du Livre de la Nature,
[Seite 60] donne (pl. 9) pour le dessin d'un fétus de singe,
celui d'un fétus humain, qu'on reconnaît au premier
coup-d'oeil, dès qu'on lui regarde les pieds, ils
n'ont pas de pouce mais de véritables orteils.
La station oblique, celle qui approche le
plus de la station propre à l'homme, appartient
aux singes; ils font alors avec le sol un angle
de 45 degrés. Dans cette position, l'extension de
la jambe sur la cuisse est moins parfaite que dans
la station verticale. Aussi les muscles qui fléchis-
sent cette partie sont, chez les singes, plus forts
[Seite 61] que ceux qui l'étendent, et s'insèrent loin du cen-
tre des mouvemens; la cuisseau lieu d'être ronde;
prend chez eux une forme applatie. Mais bientôt
fatigués de cette attitude, les singes sont forcés
de s'aider de leurs extrémités supérieures, qui
sont très-alongées. (Not. du Trad.)
Linné a dit mal-à-propos, que les singes
marchent comme l'homme, qu'ils se servent comme
lui des pieds et des mains.
Sans doute l'île Nadigsda; King, le compa-
[Seite 66] gnon de Cooke, eut seulement des connaissances
verbales, touchant ses habitans. Voyage to the nor-
thern hémisphère, T. III, p. 377.
Vitet et Vicq-d'Azyr l'appellent os maxil-
laire inférieur, et Blaire, dans son Ostéographie
de l'Eléphant, le nomme os palatin.
Il se tourmente tellement pour excuser son
divin Galien, qu'il va jusqu'à dire que si l'os in-
termaxillaire manque chez les hommes d'aujour-
d'hui, il pouvait exister chez ceux du temps de
Galien, qu'on ne doit donc pas accuser le prince
de l'anatomie, ‘«sed naturae impedimenta quaedam,
nostris corporibus in victu et venere intempes-
tiva ac immodica vitiis succedentia.»’
‘«Dissentio, ab iis qui publicè testantur re-
periri suturam sub palato per transversum ad
utrumque caninum pertinentem, quae in pueris
pateat, in adultis verô ità obliteretur, ut nullum
ipsius relinquatur vestigium. Nam reperio hanc
divisionem vel Rimam potiùs esse quàm suturam,
cùm os abosse non separet neque in exterioribus ap-
pareat.»’
Eustachii, Tab. Ann. 46, fig. II.
J'ai retrouvé cette fissure sur les crânes de deux
jeunes Européens, l'un âgé de dix ans, et l'autre de
sept et demi: le crâne d'un jeune Hottentot à-peu-
près du même âge, me l'a également offerte. Elle
s'étendait sur ces trois sujets du trou palatin, an-
térieur vers les dents laniaires, et paraissait une
véritable suture qui pénétrait l'épaisseur de l'os et
ressemblait à la suture qui unit la portion quarrée
des os palatins aux os maxillaires.
J'ai vu aussi, vers le trou palatin antérieur, de
légères traces de la suture en question sur les crâ-
nes de trois nègres d'environ 20 ans, et sur plu-
sieurs têtes de blancs du même âge. J'ai également
[Seite 74] remarqué sur les animaux, qu'on les retrouve en-
core à cet endroit, lors même qu'elles sont entière-
ment effacées par tout ailleurs. Not. du Trad.
Holme, célèbre médecin de Manchester, m'a
fourni un quatrième exemple de l'absence totale
des traces de l'os maxillaire dans le squelette du
même singe.
Je l'ai trouvé dans des espèces très-voisines de
celles-ci, sur le Marikina (Simia Rosalia).
Je suis surpris que Çamper ait prétendu que
[Seite 76] ce squelette est celui d'un jeune singe anthropo-
morphe. V. E. Naturgeschichte des Orang-Utang,
p. 146.
Les sutures de l'os intermaxillaire étaient très-
manifestes sur trois crânes d'Orang-Outang que
j'ai examinés avec soin.
Il me paraît que l'os intermaxillaire existe chez
tous les quadrumanes et les quadrupèdes; je l'ai
même aperçu sur un squelette de tortue. M. Rous-
seau, natural, au Mus. d'Hist. nat., et très-versé
dans la dissection des animaux, m'a dit, qu'il ne l'avait
pas vu manquer; je l'ai trouvé, comme je viens
de le dire, chez les Orangs, et il en a été de même
pour les autres genres de singes, tant Babouins,
que Guénous, Sapajous et Sagouins.
Il m'a semblé qu'il est des animaux chez qui
les sutures de l'os intermaxillaire s'effacent beau-
coup plutôt que chez les autres; tel est le genre
du cheval; mais dans les jeunes poulains elles s'a-
perçoivent bien distinctement. On remarque aussi
en général qu'elles disparaissent, de même que les
autres sutures de la face, plus vîte que celles du
crâne, qui, au lieu d'être harmoniques, sont par
engrainure. Elles persistent aussi davantage à la
face palatine, parcequ'elles sont à cet endroit beau-
coup moins unies. On sent d'après cela, que la
[Seite 77] durée des traces des sutures de l'os intermaxil-
laire dépend en grande partie de ce qu elles étaient
dans le principe plus ou moins délicates. Note
du Traducteur.
Diss. de Basi encephali, Gœtting, 1778,
p. 17.
Id. über die kœrperliche Verschiedenheit des
Negers vom Europaer, pag. 59.
Id. Gottfr. Ebel observationes nevrolog. ex
anatome comparata Francof. ad Viadr., 1788.
Sœmmering de capillis vel propè vel intra
glandulam pinealem sitis. Mogunt. 1785.
Il en donne le dessin dans sa Dissertation sur
l'entre-croisement des nerfs optiques, 1786.
Le ton, ou force tonique est une des proprié-
tés de la vie, et s'étend à tous les solides vivans.
[Seite 83] C'est à lui qu'est dû ce mouvement d'oscillation qui
pendant toute la vie s'exécute du centre vers la cir-
conférence et de la circonférence vers le centre.
C'est lui qui produit dans le muscle, pendant ce
qu'on appelle son état de repos, cette sorte de ba-
lancement de forces dont l'action se dirige du centre
du muscle vers ses extrémités, ensuite des extré-
mités vers le centre, et tend sans cesse à rappro-
cher les extrémités de la partie moyenne, et à les
en éloigner ensuite; mouvement qui s'exerce dans
l'absente de tout stimulus extérieur, et même in-
dépendamment de l'action du cerveau.
Le tissu cellulaire s'insinue entre toutes nos
parties, et les lie entre elles. Il unit chaque fila-
ment de la libre musculaire, dont il compose des
faisceaux. Il fournit une enveloppe aux nerfs, joint
ensemble les différens filets nerveux et leur donne
[Seite 84] plus de consistance et de fermeté; à mesure qu'il s'ap-
proche de la périphérie du corps, il devient moins
délié et finit peut-être en s'épanouissant, par for-
mer les tégumens communs, comme il paraît l'élé-
ment de toutes les membranes. (Note du Trad.)
L'homme vit sous toutes les températures et
supporte des variations considérables du poids de
l'atmosphère. En Sibérie, le thermomètre descend
à 34 degrés au-dessous de o; au Sénégal, il monte à
l'ombre, à 40 degrés au-dessus, et dans les able à 60.
Ces deux termes ne sont cependant pas, à beaucoup
près, les extrêmes du froid et du chaud que l'homme
peut supporter sans mourir. Si on évalue la surface
du corps à 15 pieds quarrés, l'atmosphère exerce sur
lui, quand le baromètre est à 18 pouces, une pres-
sion de 32,235 livres. Le plongeur en supporte une
de 303,350, elle n'est plus que de 17,160 sur le
sommet des Cordilières. De nouvelles expériences
faites au fond des mines et au milieu des airs, offri-
raient, sans doute, des extrêmes bien plus éloignés.
Il est difficile d'assigner à la vie humaine un
terme naturel qui soit comme le point où finit
ordinairement la vieillesse la plus prolongée. Ce-
pendant, en comparant soigneusement les tables
des vieillards d'Europe, on trouve qu'un assez
grand nombre arrive à 84 ans, et qu'il en est peu qui
depassent ce terme. Cette longévité de l'homme,
comparée à la durée de la vie des autres mammi-
fères prouve que la nature l'a payé avec usure de
sa longue enfance.
Ce fait a été observé pour la première fois,
en 1784, par un prêtre anglais nommé Wasse,
Philosophical Transactions, T. XXXIII.
Aimera-t-onmieux s'en rapporter à Augus-
tin Niphus, qui discute, dans son Livre sur l'A-
mour, les causes qui font: ‘“ut aestate puellae
sint libidinosiores et amantiores: viri autem contrà
hyeme.”’ La grande beauté de Jeanne d'Aragon
lui valut la dédicace de cet ouvrage.
Selon les observations de M. Des Fontaines,
la femelle du Pitheque (Simia Pithecus) est sujette
à un léger écoulement périodique; ses parties na-
turelles augmentent alors sensiblement de volume.
(Buff. Hist. Nat. par Sonnini.) Note du Trad.
On la nomme alors sagesse. L'oracle de Del-
phe l'avait bien définie par ce peu de mots:
To gnoti saouton Stob. Ser. 21.
Se connaître soi-même. (Note du Trad.)
‘»Quisquis es iniquus aestimator sortis hu-
manae, cogita quanta nobis tribuerit parens nos-
ter, quantò valentiora animalia sub jugum mi-
serimus, quantò velociora assequamur, quam
nihil sit mortale non subictu nostro positum.»’
Les nouveaux Scolastiques fournissent, ainsi
que les anciens, une foule d'argumens en faveur
du langage des bêtes Je citerai pour exemple Albert
le Grand: il n'accordait la parole qu'au singe pig-
mée, et encore avec de grandes restrictions: le pig-
mée, disait il, parle quoique privé de la raison,
mais il ne discute pas, il ne peut parler de tout,
et son langage est borné aux objets qui lui sont par-
ticuliers.
Sussmilch a mis en doute, dans ces derniers
temps, que l'homme fût l'inventeur de son langa-
ge, quoique Hobbe l'eût déjà senti: ‘»La parole
[Seite 92] est l'invention la plus belle et la plus utile, c'est
par elle que les hommes se communiquent leurs
pensées pour subvenir à leurs besoins récipro-
ques ou pourleurs plaisirs. Sans elle ils n'eussent
jamais formé de réunion, ni connu les douceurs
de l'état social, et vivraient entre eux comme
les lions, les ours ou les loups.»’
Jansen, médecin célèbre, m'écrivit, il y a
quelques années, qu'un singe venait de contracter
à Amsterdam, des boutons varioleux, mais qu'ils
n'avaient pas été accompagnés de fièvre.
Pourquoi ce vice de conformation commun
chez l'homme, n'a-t-il jamais été observé chez les
animaux? Je pense que cela vient Je ce que la sym-
phise du pubis est plus étroite chez l'homme et
comme partagée en deux par une fissure particu-
lière que Bonn a décrite avec la plus grande exacti-
[Seite 97] tude. – Roose diss. de nativo vesicae urinariae
inversae prolapsu. Gotting. 1793.
La vessie peut faire hernie au dessus du pubis en
s'échappant par l'anneau inguinal ou par l'arcade
crural; ce qui est plus rare, au-dessous, en écar-
tant les fibres des muscles du périnée ou celles du
vagin. Dans tous les cas, il faut qu'elle ait été
préalablement fort distendue, et par conséquent
qu'il y ait eu rétention d'urine. Cette hernie n'est
pas ordinaire chez les jeunes sujets mais particu-
lière aux vieillards. (Note du Trad.)
‘»Wenn sich Thiere von Natur mit einander
gatten, so ist solches ein unsehlbares Kennzei-
chen, dass sie von einerley Specie sind.»’
Berthont von Berchem fils que est tout récem-
ment revenu à ce caractère: ‘«Si les animaux se
mêlent dans l'état de nature, etc.»’ ne parle ni
de Frisch ni de Ray il dit même expressement:
‘»M. de Buffon, qui le premier a abandonné les
distincitons peu sûres des nomenclateurs, est
aussi le premier qui a fait sentir que la copula-
tion était le meilleur gui le pour reconnaître les
espèces.»’
Mem. de la Soci. des Sc. phy. de Lau-
sane. T. II, pag. 49.
Pallas Spicileg. Zoologie, fasc. IV, pag. 22.
Sandifort, Museum anatomie. Acad. Lugd. Balav.
T. I, p. 306.
Kölreuter dritte Fortsetzung der Nachricht
von inigen das Geschlecht der Pflanzen betreffen-
den Versuchen. p. 51, parag. 24.
Th. Warton ad Theocriti Idyll. I. 88, p. 19.
‘«Audivi ex docto quondam amico, qui per Sici-
liam insulam iter faciens, ibidem cùm vetera
monumenta, tum populi mores accuratiùs inves-
tigaverat, inter confessionis articulos à Siculis
caprariis apud montes vitam solitariam degenti-
bus, etiamnùm per sacerdotes proprios ritè so-
lere exigi, an rem cum hircis suis habuerint?»’
Mart. à Baumgarten Eq u. Germ. Peregrina-
tio in Aegyptum, Arabiam, etc. pag. 73. ‘»Ex
Alchanica Aegypti egressi, venimus ad casale
quoddam Belbes dictum, ubi carabenae eunti
Damascum sumus conjuncti. Ibi vidimus sanc-
tum unum Saracenicum, inter arenarum cumu-
los, ità ut ex utero matris prodiit, nudum se-
dentem. – Audivimus sanctum illum, quem eo
loco vidimus, publicitùs apprimè commendari:
eum esse hominem sanctum, divinum ac inte-
gritate praecipuum, eo quod nec foeminarum
unquam esset nec puerorum, sed tantummodo
asellarum concubitor atque mularum.»’
Th. Phillips, voy. en Guinée dans Churchill's,
[Seite 130] collection of voy. T. VI, p. 211. ‘«Il y a dans ce
pays un grand nombre de très-grands Baboins;
quelques-uns ont la taille d'un fort mâtin. Ils
vont par troupes de 50 à 100, et il est très-dan-
gereux d'en être rencontré, surtout pour les
femmes. Des personnes dignes de confiance m'ont
assuré qu'il arrive souvent qu'ils les violent l'un
après l'autre, jusqu'au point de les faire mourir.’
Les femmes de Mendes avec le bouc sacré.
Hancarville, Recherches sur l'origine des arts
de la Grèce. T. I. pag. 320.
Les Cretins, malgré la stupeur qui les accable,
sont cependant transportés de desirs si effrénés qu'il
n'est pas rare de les voir s'accoupler avec les trou-
peaux dans les Alpes Saltzbourgeoises. Michaelis
med. cast. Hanov. Medicinische Bibliothek. T. III,
pag. 649.
Kant Berliner Monatsschrift 1785. T. VI,
p. 391; et Deutscher Mercur 1788. P. I. p. 48.
Un épipastique appliqué sur l'épiderme des
nègres, le sépare souvent en deux feuillets, dont
le plus superficiel est noir comme l'est chez eux
le corps réticulaire, et le plus profond incolore.
Cette disposition rend probable que le feuillet
extérieur vient seul du corps réticulaire; peut-
être que l'autre est dû à chaque série de vaisseaux
qui, partant du derme, soulèvent le corps réti-
culaire et finissent par une expansion membraneuse
mince, formée de différentes lames ou petites
membranes écailleuses, dont deux anatomistes
célèbres, Cowper et Ruysch, ont observé que l'é-
piderme était composé. Cette membrane qu'on a dit
n'être que la matière inorganique de la sécrétion
[Seite 144] du derme semble cependant susceptible d'acquérir
de la sensibilité: il se détache à l'origine des on-
gles, des portions d'épiderme qui s'enflamment
quelquefois et deviennent fort douloureuses. A
moins de supposer qu'elles soient doublées par
une lame du derme on ne peut refuser une orga-
nisation à la cuticule. (Not. du Trad.)
La signification arbitraire que les auteurs
donnent au nom des couleurs fait une des grandes
difficultés de l'étude de l'histoire naturelle. Ce dé-
faut m'a beaucoup gêné, et pour éviter le repro-
che qu'ils ont merité, j'avertis que les noms an-
glais, joints à ceux des cinq couleurs principales,
ne sont pas des synonymes. Je veux seulement dire
que divers auteurs s'en sont servi pour classer les
mêmes couleurs nationales.
Buffon, Hist. Nat. T. III. Zimmerman,
Geographie des Menschen, T. I. l'Abb. Nauton
[Seite 148] (Journ. de Phi. T. XVIII.) accordent beaucoup
à l'influence du climat. Barrère (Diss. sur la cause
phi. de la couleur des nègres) à celle de la bile; et
Th. Towns (Philos. Trans. T. X.) à celle du sang.
Kant (Philosoph. fur die Welt, P. II.) pense que
la couleur des nègres dépend d'une surabon-
dance de fer dans leur sang, et qu'une trans-
piration d'acide phosphorique le précipite dans
Je réseau de Malpighi. Le Cat (Traité de la couleur
humaine) attribue la couleur noire à je ne sais
quel mélange de suc nerveux et d'un liquide sécrété
par les papilles nerveuses et artérielles des tégu-
mens communs. Attumonelli (Elementi di Phy-
siologia Med. T. I.) explique la couleur des nègres
par l'alongement des fibres, la dissolution de la
partie rouge du sang, l'évaporation du serum et
la fixation dans la peau des particules huileuses,
salines et graisseuses.
Il existe réellement sur les bords de la Gam-
bie des nègres issu de Portugais, mais leur couleur
me semble dépendre d'alliances avec les indigènes.
En effet, les Européennes trans ortées immédia-
tement en Guinée y périssent bientôt; le climat rend
leurs évacuations sexuelles si abondantes qu'elles
dégénèrent en peu de temps en ménorragie mor-
telle.
J'ai pulsieurs fois observé ce phénomène sur
[Seite 154] les individus en-deçà du Gange et de la Loubere,
chez ceux d'au-delà du Gange. Descrip. du roy. de
Siam, T. I, p. 18.
Nicolas Fontana avait fait la même remarque sur
les habitans de Nicobar. (Asiatick Researches,
T. III, p. 151.)
Rochefort (Histoire Naturelle des Antilles,
p. 383.)
F. Xav. Veigl, dans de Murr joural zur
Kunstgeschiste, T. XVI, p. 115, dit en parlant des
Maynaïs, peuple de l'Amérique australe, près le
Maragnan supérieur, ‘»Le blanc de l'œil a chez
eux une légère teinte de noir.»’
Soëmmering über die Körperliche Verschie-
dencheit des negers vom Europaër, page 11.
Strack, Observa. de feb. intermit. L. III.
Cap. II, de ictero ex feb. interm. page 194.
Meckel, Hist. de l'Acad. des Scien. de Berlin,
an. 1753, p. 52, et Soëmmering, p. 43.
Granz (Historie von Groënland, T. I.) attri-
bue la couleur foncée des Groënlandais à leur nour-
riture huileuse.
Sloane (Voyage to Jamaïca T. I. Introd. page
182, T. II, page 351.) prétend que la peau des Eu-
ropéens jaunit quand ils mangent en grande quan-
tité de la tortue franche.
Parmi la multitude d'observateurs qui ont
remarqué dans les pays étrangers, cet effet très-
connu, dépendant du genre de vie, ‘«je ne citerai
que Poiret (Voy. en Barbarie, T. I. p. 31.) Les
Maures ne sont pas naturellement noirs, malgré
le proverbe, et comme le pensent plusieurs écri-
[Seite 157] vains, mais ils naissent blancs et restent blancs
toute leur vie, quand leurs travaux ne les expo-
sent pas à l'ardeur du soleil. Dans les villes, les
femmes ont une blancheur si éclatante, qu'elles
éclipseraient la plupart de nos Européennes.
Mais les Mauresques montagnardes, sans cesse
brûlées du soleil, et presques toujours à moitié
nues, deviennent, même dès l'enfance, d'une
couleur brune qui approche beaucoup de celle
de la suie.»’
Les Biscaïennes sont blanches, et les Gre-
nadines très-brunes. A mesure qu'on avance, dans
les provinces méridionales, les images de la Vierge
deviennent aussi d'une couleur plus foncée. Tores
Reise nach Surate, page 9.
Les Malabars sont moins noirs à mesure qu'il
[Seite 158] s'approchent du Nord. Tranquebarischen Missions-
Berichten continual. XXII, p. 896.
Les nègres qui habitent au nord du Sénégal,
sont moins noirs Barbot. Churchill's, Collection
of Voyages, T. V, page 34.
Zimmermann. Géograph. Geschichte des
Menschen, T. 1, page 86. trouve dans ces consi-
dérations le pourquoi les Américains ne sont pas
noirs sous l'équateur.
Marsden, Histo. of Sumatra, page 45. et
Wallis Hawkesworth's, Collection of Voyages
(T. I, page 260.) ont remarqué les effets de l'air
de la mer, sur la coloration de la peau.
Hartsink (Beschryving van Guiana, T. I, p. 9.)
l'influence du voisinage des forêts.
Brouguer (Fig. de la Terre, Introd. page 101.)
celles des montagnes, et Robertson (History of
America, T. II, page 403.) a également reconnu
[Seite 159] combien l'élévation du sol influait sur la colora-
tion.
Le nom de Créoles vient sans doute des
nègres esclaves transportés en Amérique au 16me
siècle, et qui appelèrent les premiers leurs enfans
nés dans ce pays, Criola et Criolles. Les Espa-
gnols appliquèrent, bientôt après, ce nom à leurs
propres enfans. (Garcillasso del origen de los
Incas, p. m. 255.)
Aujourd'hui, on donne, en Amérique, le nom
de Créole à tous les animaux domestiques qui ne
sont pas originaires du pays. Oldendorpe Gerchich
der Mission auf den Caraib. Inseln, T. I. p. 232.
Bruin Reizen over Moskovie, p. m. 358.
Valentin ond en nieuw Oost-Indien, T. I. p. 2
pag. 18.
Garcilasso, ‘«Cholos.’ Es Vocablo de las islas
de Barlovento, quiere decir perro, no de lor Cas-
tiços. Sino de lus mui bellacos goçones: y los
Espanoles usan del por infamia y vituperio.
Twiss assure qu'on appelle Harnizes, les en-
fans des Américains et des Coyotes, Albarassades,
ceux des Cambujes et des Mulâtres, et Barzins,
les enfans des Albarassades et des Mulâtres.
W. Byrd rapporte (Philosoph. Transac. T.
XIX, p. 781.) que des taches de cette couleur ne
parurent sur la peau d'un jeune nègre, qu'à l'âge
de 4 ans, s'accrurent avec le temps.
V. le dessin d'une jeune Negresse blanche,
T. IV du Supplément d'Histoire naturelle de
Buffon.
Si je ne me trompe, c'est le même dont
Gumilla a donné une longue description. Orinoco
illustrado. T. I, page 109.
La Mothe donne l'observation d'un Nègre sem-
blable dans la Bibliothèque impartiale du mois d'A-
vril 1752; et Morgan, dans les Transactions de la
Société phil. de Philadelphie. T. II, page 392.
Cette maladie est voisine de la lèpre. Tran-
quebarische Missions-Berichte contin. T. XXI,
page 741.
Strahlenberg Nord-Ostlich Europa und Asien,
page 166.
Gmelin Reise durch Siberien. T. II.
Bell, Travels from St. Petersburg to diverse
parts of Asia. T. I, page 218.
Camper, kleinere Schriften, T. I, page 47.
‘«De nos jours une pareille métamorphose s'est
renouvelée annuellement dans la personne d'une
dame de distinction, d'un beau teint et d'une
peau fort blanche. Dès qu'elle était enceinte elle
commençait à brunir, et vers la fin de sa gros-
sesse elle devenait une véritable Négresse. Après
ses couches la couleur noire disparaissait peu à
peu. Sa première blancheur revenait et son fruit
n'avait aucune teinte de noir.»’
‘«Une paysans des environs de Paris; nourrice
[Seite 175] de son métier, a regulièrement le ventre tout
noir à chaque grossesse, et cette couleur se dis-
sipe par l'accouchement.»’
‘«Une autre a toujours la jambe gauche noire
dans cette circonstance.»’
J. Narborough Voyages to the Streights of
Magellan p. m. 64: ‘«Leurs cuisses et leurs jam-
bes étaient devenues aussi noires qu'un chapeau.»’
Les taches noires qu'on observe sur la peau
des personnes attaquées de scorbut, proviennent
d'un épanchement de sang. On peut même, en dis-
séquant les cadavres, le suivre dans le tissu cellu-
laire: lorsque les forces de la vie tombent dans
l'anéantissement, les parois des artères perdent
alors de leur résistance et le gang les pénètre ou
[Seite 177] s'échappe à travers les extrémités capillaires des
vaisseaux, comme on le voit dans les fièvres adyau-
miques avec pétéchies, la morsure de la vipère,
et aux régions postérieures des cadavres. Une expe-
rience directe vient à l'appui de cette opinion. Es-
saye-t-on sur un animal vivant, convenablement
préparé, le procédé de l'injection: tous les efforts
sont inutiles; mais si on tue subitement l'animal
sans hémorragie et par la section de la moelle
épinière, aussitôt l'injection pénètre et va rem-
plir des vaisseaux non-perméables au sang avant
la mort. (Exp. du cit. Buniva, Rec. peri. de la
Soc. de Med. de Paris. Dec. an VIII, T. VII.)
Je possède un morceau de la peau du ventre
d'un mendiant, qui est aussi noire que celle d'un
Nègre. Beaucoup de personnes ont fait des obser-
vations semblables.
Haller, Elément. physic. T. V. p. 18.
Ludwig Lettres à Haller, T. I, page 393.
De Riet, de Organe tactûs, page 13.
Albinus, de sede et caussâ colons Ethiopum,
page 9.
Klinkosch, de cuticulâ, page 46.
Soemmering über die kœrperliche Verschieden-
heit des Negers vom Europæer, page 48.
Loschge in Naturforscher. P. XXIII, page
214.
J'ai observé sur la peau d'un sexagénaire des
taches brunes, dont quelques-unes avaient une
palme d'étendue, elles lui étaient venues dans
la jeunesse à la suite d'une fièvre quarte.
Il existe encore à Venise un cordonnier
nègre, dont la couleur s'est sensiblement affaiblie
depuis son arrivée dans cette ville. Il y fut trans-
porté dès son enfance, il y a fort long-temps; sa
couleur ressemble aujourd'hui à une legère teinte
de jaunisse. Caldani Institut. physiolog. p. 151.
On en a vu d'une telle pâleur, qu'à peine les
distinguait-on d'un blanc d'une faible complexion.
Labat, Relation de l'Afrique occidentale, T. II.
page 260.
‘“Leur chair est basanée et fort douce; il
semble que ce soit du satin quand on touche
leur peau. Biet, Voyage de la France équinoxiale,
page 352.’
‘“Il n'y a femme de quelque laboureur ou
rustic en Asie (Turquie) qui n'ait une peau si
polie qu'il semble toucher à un fin velour. Belon
Observ. p. m. 198.’
‘“Ils ont tous une odeur forte et désagréables
Je ne puis rien indiquer qui pût en rapprocher
l'idée. Quand on trouve ailleurs une odeur sem-
blable, on l'appelle aux îles (Antilles) une
odeur de Caraïbe, ce qui prouve l'embarras ou
l'on est de la désigner.”’ Thibault de Chanvalon
Voyage à la Martinique, page 44.
Pausanias rapporte que les Ozoles indigènes
de Locre avaient une odeur infecte.
Lavater, Fragmens sur la Physionomie, T. 4.
page 368.
Jac. Frid, Ackermann de discrimine sexuum
præter genitalia, page 10.
C'est une chose très-commune dans nos cli-
mats. On a fait la même observation dans les
pays les plus eloignés; Forster à Otaha, une des
îles de la mer pacifique Bemerkungen auf seiner
Reise um die Welt, pag 205.
Verhande ingen van het Bataviaasch Genoot-
schap. T. I, p. m. 319.
Bruce, Voyage aux sources du Nil. T. 2,
en parlant de Gallas.
De incolis regni Bornu, procedings of the Afri-
can Association, p. m. 201.
Les insulaires de l'île du Duc d'York, dans
la mer pacifique, près la nouvelle Irlande:
‘“ils sont d'une couleur de cuivre pâle, et leur
cheveux sont laineux.”’ Hunter's hist. Journal
of the transactions at Port Jackson. p. 233.
Teutschen Merkur 1788. P II, page 341;
La plupart des Wotjaks m'ont semblé rouges,
Gmelin, Reise durch Sibirien, T. I, page 89.
Charlevoix, dans son Histoire de la nouvelle
France, dit (T. III). que plusieurs Eskimots sont
blonds.
Lopez a vu des Nègres dont les cheveux étaient
rouges. Relazione del Reame di Congo, p. m. 6.
J'ai vu beaucoup de mulâtres dont les cheveux
étaient rougis, et j'en conserve les échantillons
Groben a fait la même remarque sur les mulâ-
tres de la Sierra-leona.
Sonnerat, Voyage à la nouvelle Guinée,
[Seite 186] page 153. Marion et Duclesmeur, Nouveau
Voyage à la mer du Sud, page 138.
Des yeux d'un vert particulier ressem-
blant à la cendrée, (vulg. vert-pomme) tien-
nent le milieu entre les yeux bleus et les oran-
gers. Les personnes à cheveux rouges et à peau
tachetée, ont souvent les yeux de cette couleur.
Liber singularis de Colorib. oculorum sim-
portii. Forent. 1550.
Homère dépeint les Grecs comme ayant les
yeux noirs (Elicaupes Achaioi). (Note du Trad.)
J'en ai fourni des exemples dans des notes
Voyage de Bruce, aux sources du Nil, T. V.
page 339.
Guillaume Anderson, a observé une grande
diversité de physionomie parmi les indigènes des
îles des Amis, situées dans l'océan Austral.
‘“Leurs traits sont si variés qu'il est presqu'im-
possible d'en trouver un qui caractérise leur
figure, si ce n'est l'ampleur du bout du nez,
très-commune parmi eux. D'un autre côté,
nous y avons observé cent visages Européens
et des nez à la romaine”.’ Voyez dernier Voyage
de Cook. T. I, page 380.
Les Nègres et les Américains ont offert, comme
je le dirai, des exemples analogues.
L'on retrouve si souvent aussi parmi les Eu-
ropéens, des figures ressemblant à celles des
Nègres et des Mongoles, qu'on les nomme ainsi
vulgairement.
Libavius (de Æthiopibus Virgilianis, sin-
gularium, T. IV, p. m. 659.) auteur estimable,
avait fait cette observation il y a plus de deux
cents ans.
‘„Dans la Thuringe, la Saxe, la Souabe, et
presque dans chaque bourg, les habitans ont
une physionomie qui leur est propre; de ma-
nière, qu'avec de l'attention, peu s'en faut
qu'à la vue seule on ne parvienne à dire à cha-
que personne quel est son pays”.’
Tartares Mongoles, Mongouls, Mogol,
Mongous, Mancheous, Le nom des Tartares va-
rie beaucoup, parce qu'ils prennent souvent celui
de leur souverain par attachement pour sa per-
sonne.
Je dois la connaissance de ces cruels an-
tropophages à deux Portugais du Brésil, de
Camara, et d'Andrada.
Ces statues faites avec un art particulier,
sont l'ouvrage des premiers Indiens. Il s'en
trouve à Londres au Muséum Britannique, et
dans le cabinet des antiques de Charles Townley,
(Archeolog. T. VII, table 15, 26, 27).
Wenkelman, Description des pierres gra-
vées de Stosch. page 10 et suivant.
D'Ancarville, Recherches sur l'origine des arts
de la Grèce, T. I, page 30.
La tête du Sphinx est caractérisée Nègre
dans tous ses traits.
Hérodote. (lib. 3, p. 150) Pour moi, j'estime
que les Colches sont une colonie les Egyptiens,
parce que comme eux, ils ont la peau noire et les
cheveux crêpus, (Volney, Voyage en Egypte.
J'ai parlé de ce triple caractère des monu-
mens des arts de l'ancienne Egypte, dans les Tran-
sactions philosop. année 1794, part. II, p. 191.
Ol. Rudberck, fils, Analogia Linguæ, fen-
nonicæ cura ungarica, à la fin, specim usus
linguæ gothicæ, Upsal 1717 p. 4, et surtout 18.
J. Huger, neue Beweise der Verwandts-
chaft der Hungarn mit den Lapplandern
Wien 1794, 8.
Voyage en Sirie et en Egypte. T. I, p. 74.
‘“En effet, j'observe que la figure des Nègres
représente précisément cet état de contraction
que prend notre visage lorsqu'il est frappé par
la lumière, et une forte réverbération de la
chaleur. Alors le sourcil se fronce, la pomme
des joues se lève; la paupière se serre; la
[Seite 203] bouche fait la moue. Cette contraction qui a lieu
perpétuellement dans le pays chaud et nu des
nègres, n'a-t-elle pas dû devenir le caractère
propre de leur figure?”’
‘„Leurs paupières sont toujours demi fer-
mées pour empêcher que les mouches ne leur
donnent dans les yeux; de là vient qu'étant in-
commodés de ces insectes dès l'enfance, ils
n'ouvrent jamais les yeux comme les autres
peuples. T. II, p. 169.’
Dans ce cas, pourquoi le Renne ne ressem-
ble-t-il pas à l'ours, le tigre au singe? Note du Tr.
Marsden, History of Sumatra page 173.
‘„Des écrivains ont remarqué qu'il y a ordinai-
rement de l'analogie entre les inclinations et les
qualités des animaux d'un pays et celles des
hommes indigènes des mêmes contrées, lors-
que le mélange avec des étrangers n'a pas altéré
le caractère originel. Le Malais peut se corn-
parer au bufle et au tigre. Dans sa vie privée,
il est indolent, opiniâtre et lascif comme le
premier, dans sa vie publique, perfide, sangui-
naire et rapace comme le second. On dit aussi
[Seite 205] que l'Arabe ressemble au chameau, et le pai-
sible Gentou à la vache.”’ Barbot dans Chur-
chills, collection of voyages, T. V, page 36.
‘„Les enfans des femmes plus distinguées, sou-
mises à des travaux moins rudes que celles de la
basse classe, n'ont pas le nez aussi écrasé que
ceux de ces dernières, qui sont portés pendant
très-long-temps sur le dos de leur mère; il est
à présumer que leur nez s'applatit en frappant
continuellement, dès qu'elles font quelques
mouvemens violens du corps ou des bras; sur-
tout quand elles battent ou broyent le millet
ce qui est chaque matin l'ouvrage des femmes
d'un rang inférieur.”’
Report, of the Lords of commitee, of
Council, fort the considération of slave trade 1789,
fol. p. I. fol. c. l.
Bern. Picart a placé, dans son ouvrage très-
connu, Cérémonies et costumes Religieuses, un
nombre presqu'infini de juifs: ils ont tous des traits
différens, et cependant on les reconnaît facile-
ment, parce qu'il leur a donné une physionomie
nationale.
Je me suis entretenu avec l'illustre Benj.
West, président de l'Académie Royale des Arts,
sur la physionomie nationale des Juifs. Il pense
qu'elle se rapproche sur-tout de celle des chèvres,
mais moins par la courbure du nez que par la
forme et la disposition de la partie qui sépare les
narines de la lèvre supérieure. Camper semble n'a-
voir pas fait assez d'attention à l'opinion de cet
homme célèbre, über den Naturlichen Unterschied
der Gesichtszüge p. m. 7. Je suis aussi surpris de
l'entendre assurer, dans ce même ouvrage,
que le nez des juifs ressemble à celui des Mongoles.
Th. Brown's, discourse of the Sépulchral
urns, found in Norfolk, p. 13; ce savant d'un
esprit très-pénétrant, est le premier qui ait pris
[Seite 209] garde à la forme nationale des crânes des nègres:
‘„il est difficile de méconnaître le crâne d'un
nègre”.’
J'ai parlé des règles que j'observe, et des
précautions que je prends à ce sujet. Decad. prima
collect. crainorum, p. 5.
V. E. J. Kleinere Schriften. T. I. P. page 15.
E. J. Naturgeschichte des Orang-Utang, p. 181,
212; et le livre über den natürlichen Unters-
chied der Gesichtszüge, etc.
J. Chr. Gottl Ackermann, dans Neuen Ma-
gazin für Aerzte de Baldinger. T. II, page 56.
Philites, médecin épirote, m'a dit avoir
été témoin de cette coutume à l'île de Chio.
L'illustre de Asch m'apprend, dans une
lettre du mois de juillet 1788, que les sages-
femmes de Constantinople demandent à la mère,
quelle forme il faut donner à la tête de l'enfant?
On préfère en Asie, la forme que fait prendre une
[Seite 225] bandelette dont on entoure fortement la tête,
parce qu'alors disent-ils, le turban se place mieux.
Oviedo, Histo. Géner. de las Indias Rai-
mond, Breton, Dictionnaire Caraïbe-français.
Torquemada, Monarchia Indiana, T. III.
Ulloa, Relacion del viage para medir algunos
Grados de Meridiano, T. II, pag. 533.
Tête de boule et tête plate, Charlevoix,
Hist. de la Nouvelle France, T. III, p. 187, 323.
‘“Le nom d'Omaguas, dans la langue du
Pérou, ainsi que celui de Cambevas, que leur
donnent les Portugais du Para dans la langue
du Brésil, signifie Tête-plate: en effet, ces peu-
ples ont la bizarre coutume de presser entre
deux planches la tête des enfans qui viennent de
naître, et de leur procurer l'étrange figure qui
en résulte, pour les faire mieux ressembler,
disent-ils, à la pleine lune, la Condamine,
Mém. de l'Acad. des Scienc. de Paris, 1745,
pag. 427.”’
Jos. Sanz de Aguire, Collectio maxima con-
ciliorum omnium Hispaniæ et novi orbis, T. VI,
pag. 204.
Histoire du III Synode du diocèse de Lima,
décret du 17 juillet 1585.
Mém. de l'Acad. des Sciences de Paris, 1722.
p. 323.
Hond-Eyland, cette île très-connue est située
dans le détroit de Disko, à l'Occident du Groën-
land, et se trouve dans les cartes les plus exactes
de cepays, depuis Zorgdrager.
Jene sais ce que veut dire Camper, quand il
accuse VVinslow, d'ignorance, d'après la Géol-
graphie d'Hubener, qui met l'île des chiens
dans la mer pacifique, sous le tropique du Capri.
Ignorait-il que cette dernière fut décou-
[Seite 232] verte par Schouten, en 1616, qu'alors elle était
absolument déserte, et n'a depuis été visitée
d'aucun Européen. L'île des chiens, dont VVins-
low avait reçu un crâne est au contraire très-
fréquentée par les pêcheurs de Baleines.
‘“Les dents incisives sont courtes; elles
sont larges de devant en arrière, et plates au
lieu d'être tranchantes, et ressemblent plus à
des dents molaires qu'à, des incisives.’
M. Ejecte, qui avait trouvé ce crâne, m'a dit
‘„que les habitans de cette île mangent de la
chair toute crue. Ils sont plusieurs mouvemens
extraordinaires avec la mâchoire, et beaucoup
de grimaces en mâchant et en avalant; c'était
principalement ce spectacle qui porta M. Riecke
à chercher quelques cadavres des Insulaires,
pour voir si leurs mâchoires et leurs dents
avaient quelques conformations particulières.”’
Winslow.
Van Linschoten, Schipvaert naer Oost, P. I.
p. m. 60.
Von der Groben. Guineische Reisebeschreibung
pag. 51, 94.
Brabot, dans Churchill's collect. of voy., T. V,
p. 13, 145, 385.
Il est étonnant que des auteurs respectables
comme Romer et Niebuhr ayent pris cette confor-
mation artificielle pour un produit de la nature.
Efterretning om Kysten Guinea, pag 21. Deutschen
Museum 1787, P. I, pag. 425.
Smet antiquit. Neomagenses, pag. 70.
Cannegieter de Britinburgo matribus brittis,
pag. 144.
Fermin, Economie animale, T. I, pag. 117.
Kolbe, pag. 474, en parlant des Hottentos.
Schouten, en parlant des habitans de l'île
d'Horn. Dalrymple collection. T. II, p. 53.
Towrson, dans la Collection de Voyages
[Seite 239] de Hakluyt, T. II, pag. 26, dit, en parlant des
nègres du fleuve de St.-Vincent: ‘“Plusieurs
femmes ont des gorges si énormes que chez
quelques-unes elles pourraient s'appuyer sur
la terre, et reposer auprès d'elles.”’
Bruce (Voy. aux Sources du Nil, T. II,
pag 546.) assure qu'il est chez les Shangales des
femmes dont les mamelles pendent jusqu'aux
genoux.
Lithgow's, rare Adventures and pain sul pe-
rigrinations, pag. 433.
‘“J'ai vu dans le nord de l'Irlande des femmes
aller en route et vaquer aux soins du ménage
[Seite 240] avec leurs enfans pendus au cou, et donner par
derrière l'épaule, la mamelle à leur nourrisson,
afin qu'il pût teter derrière le dos sans qu'elles
le prissent sur leurs bras. Ces gorges m'ont
semblé très-propres à faire des bourses pou
serrer l'argent des négocians des deux Indes,
car elles avaient plus d'une demi-verge de long,
et étaient aussi bien préparées qu'aucun tanneur
n'apprêta jamais le cuir pour un semblable
usage.”’
Les habitans de l'Afrique occidentale entre
[Seite 241] le cap Blanc et le Sénégal. Fl. Cadamosto in Ra-
musii Collectione, T. I, p. m. pag. 100.
‘“L'Amiral, l'Afrique et le peuple Africain.
Paris, 1789, pag. 45. – –”’ Au Sénégal, les jeunes
‘„filles font leurs efforts pour faire tomber leur
gorge, afin qu'on les croye femmes, et qu'on
les en respecte davantage.”’
Faust assure la même chose des Ecossais
septentrionaux qui ne portent pas de culotte.
[Seite 243] (Wie der Geschlechtstrieb der Menschen in
Ordnung zu bringen, pag. 52.
J'ai appris que cette assertion était hasardée,
Medicinischs Bibliotec. T. III, pag. 413.
Hawkesworth's collect. T. III, pag. 388.
Je dois à l'illustre Banks différens dessins des
parties sexuelles, faits d'après nature, au cap de
Bonne Espérance. Dans l'un, la grande lèvre a
été alongee au point d'avoir 6 pouces et demi,
mesure du Rhin.
Voltaire se sert de ce prétendu tablier pour
prouver que les Hottentos sont une espèce diffé-
rente des Européens; lettres d'Amabed.
Vaillant dit, dans son second Voy. en Afri-
que, que chez les Houswanas les femmes ont les
fesses si proéminentes qu'elles tremblent pen-
dant la marche, et pourraient servir d'appui aux
pieds des enfans. (Note du Trad.)
Soemmerring über die korperliche Verschie-
denheit des Negers, page 40.
Chanvalon. Voy. à la Martinique, p. 58. –
‘“Cette forme des jambes courbées est assez com-
mune aussi parmi les Américains, mais elle est
quelquefois moins sensible que parmi les Nè-
gres.”’
Alb. Dürer von menschlicher Proportion,
fol. T. III ed. 1528.
Ramsay. Traitement et conservation des escla-
ves africains, page 217.
On m'apporta en janvier 1789, la jambe
droite d'un Nègre mort la veille à Cassel; l'épi-
derme de la plante des pieds était extrêmement
épaisse, gercée et lamelleuse.
Hogde travels in India, page 3.
‘“On a observé sur les armes des Indous, qu'on
apporte fréquemment en Angleterre, que la poi-
gnée des sabres est trop petite pour beaucoup
de mains européennes.”’
V. post. H. Ellis, Dav. Cranz, etc., cl. Wa-
les in philosop. transact., T. LX, page 109 et cl.
Curtis ibid. T. LXIV, p. 383.
‘“Un Sauvage d'Amérique a la main et le
poignet petit, par la même raison qu'un maria
a les épaules larges et les bras musculeux, un
portier a les jambes et les cuisses.”’
Jefferson dans Morse's Américain. Univ. Geog,
T. I, pag. 87.
On observe aussi qu'un exercice continuel rend
les jambes des danseurs et les bras des boulangers
très-musculeux. (Note du Trad.)
Tench. l. c. de l'Observa. du gouverneur du
Cap: – ‘“Le colonel Gordon m'a dit que c'était
un signe d'indigence. Il citait pour preuve le
Hottentot et le Caffre: le premier est misérable,
ses mains et ses pieds sont petits, le Caffre, son
voisin, vit dans J'abondance, et ces parties
sont chez lui très-grandes.”’
Les Grues étaient, selon les anciens, enne-
mies déclarées de ce peuple et en faisaient un grand
massacre:
Il est étonnant que Buffon (T. X. sup.) at-
tribue à des géans les os des animaux exhumés en
différens temps. J'ai vu, à Lucerne, ceux qu'on
y déterra en 1577, et je les ai reconnus au pre-
mier aspect pour des os d'éléphant. Félix Plater,
médecin célèbre et de plus bon anatomiste, crut
au contraire qu'ils appartenaient à un géant de 17
pieds de haut, tant les préjugés peuvent égarer
les meilleurs esprits!
Je dois à Bozenhard, consul général de l'em-
pereur chez des Danois, le crâne et les os d'un
vieillard qui furent trouvés dans un tombeau cim-
bre de l'antiquité la plus reculée. Ils répondent à
la stature ordinaire.
Buffon Hist. natu., T. III, et sup., T. V.
[Seite 255]De Brosses, Hist. des Navig. aux terres austra-
les, T. V.
Pauw., Recherches sur les Américains, T. I.
Voyage du Commodor Biron autour du monde.
Histoire d'Amérique de Robertson, T. I.
Com. Carli Rabbi Lettere americane, T. I.
Relation de ultimo viagge al estrecho de Magal-
lanes. 1785, 786.
C'est ainsi que les témoins les plus véridiques
ont décrit les Patagons, et tels étaient ceux qui
Tinrent en Espagne à la fin du seizième siècle, les
seuls qu'on ait vus en Europe.
Van Linsckoten, qui les vit à Séville, dit, en
parlant d'eux: – “Waren wel gestatuert ende
grof van leden”, etc.
‘“M. Wood qui a fait une carte exacte du dé-
troit de Magellan, m'a dit qu'il avait trouvé
dans la partie méridionale de l'Amérique, divers
tombeaux, de près de quatre verges de long. En
les ouvrant, il vit qu ils contenaient un homme
et une femme dont les pieds se répondaient.’
Ils placent près du sépulcre de leurs pères
les ornemens de leurs coursiers. V. Falkner,
Beschreibung von Patagonien, p. m. 149.
C'est une coutume très-ancienne et particulière
à plusieurs nations, d'enterrer les chevaux avec
les guerriers. Cette habitude a souvent fait pren-
dre des os de cheval pour des os de géant.
C'est ainsi qu'on a découvert en Sibérie des os-
semens de chevaux dans des sépulcres très-an-
ciens. Gmelin Reisen, T. III, page 313.
On a même trouvé, vers le milieu du siècle;
dans les sarcophages des chevaliers chrétiens,
placés dans des caveaux funéraires, outre leurs
squelettes et leurs armes, les ossemens de leurs
coursiers. V. Dorville, Sicula, page 148.
Jo. Winter, hakluyl's collect. T. III.
Voyage de Narbourough au détroit de Magellan,
p. m. 90.
V. Anon, tweejaarige Reyz rond om de
wereld Dordr. 1728, 4.
Behrensius, son compagnon de voyage, fut
beaucoup plus exact et plus vrai (Reise durch
die Süd-Lander und um die Welt. Francof, 1737
8, page 87).
Pallas semble croire que les Quimos tirent
leur origine d'une génération métive. Il dit, en
parlant des Nègres (Obs. sur la form. des mon-
tag. page I.), ‘“il n'est point nécessaire de re-
courir ici à une mésalliance de l'espèce humaine,
comme il semble qu en est arrivé une pour pro-
duir les montagnards Congimanes ou Quimos
de Madagascar.”’
Sur les Sauvages de la Baie d'Hudson V.
H. Ellis Reise nach Hudson's Meerbusen, page
201. Umfreville über den gegenwärtigen Zustand
der Hudsonsbay, pag. 21.
Voyage de Coock dans l'hémisphère Sept.,
T. III.
C'est ainsi que dans les Commentation.
Soci. Reg. Scient. Gottingensis. T. I, pag.
39. – Heyne a ramené à la vérité l'histoire fabu-
leuse des Hermaphrodites de la Floride.
Le dernier prôneur des hommes à queues
fut Monboddo, dans deux ouvrages: of the Origin
ad progress of language, T. I, et antient Meta-
phisics, T. III. pag. 250.
V. c. Ins. terra del fuego. V. Tab. geograph.
apud Alon. D'Ovaglie relasione del Regno di cile
Rom. 1646. fol.
En parlant des habitans de Nicobar. Beskrif-
ning om en Resa genom Asia, Africa, etc. af N.
Mathss. Köping (Skeps-Lieut.) p. m. 131. Quoi-
que cet ouvrage soit un tissu des fables les plus
absurdes, Linné le regarde comme digne de la plus
grande confiance dans ses lettres à Monboddo.
Dav. Tappe. 15 jährige ostindiche Reisebeschrei-
bung, page 49 l'assure des peuples de Sumatra.
Il y a eu trois témoins, soi-disant oculai-
res, qui parlent d'hommes à queue dans l'île de
Formose Jo. Strausse, J. Ott. Helbig et El. Hesse.
C'est ainsi qu'on a rapporté à un homme à
[Seite 269] queue le dessin d'un singe. Chaque auteur le chan-
geait un peu, et il finit par devenir presque
semblable à celui d'un homme.
Martini, dans sa Traduction des Œuvres de
Buffon, prit son dessin dans les Aménités de Lin-
née, celui-ci le devait à Aldrovand qui l'avait
pris à Gesner. Ce dernier avoue l'avoir tiré d'une
description allemande de là Terre Sainte; il n'en
nomme pas l'auteur; c'est Bernard Breydenbach.
Son dessin était assez soigné. Son singe avait aux
quatre mains de véritables pouces, et on en fit
peu à peu un animal bimane.
Commentation. So. reg. S. Gott., T. VII.
page 29. Medicinische Bibliot., T. II, page 537.
Hist. d'une Négresse blanche, Jou. Dephi.,
T. XXXII, pag. 374.
‘“Les yeux sont longs, relevés par l'angle ex-
térieur; l'iris est cris avec un léger mélange
de rayons jaunes; la prunelle d'un cris foncé et
presque noire. Ils ont quelquefois un mouve-
ment involontaire, ne clignotent pas, ne sont
pas incommodés par la grande lumière, et ne
sont ni miopes ni presbites.”’
(Not. du Trad.)
Observ. d'une Négresse blanche, Journ. de
Physiq., T. IX, pag. 357. ‘“Son père et sa mère
ont plusieurs enfans noirs, mais on dit qu'un
aîné né blanc a noirci peu après en grandissant;
cet Ethiops, toujours croissant, s'est enfin arrêté
à la couleur des Cabres”.’ (Note du Trad.)
Benj. Dudell's, Supl. to his treatise on the
diseases of the horny-coad Lond. 1736. 8. p. 19.
Jo. Hunter, on certain parts of the animal Œco-
nomy, pag. 206.
Saussure, Voy. dans les Alpes, T. IV, p.
m. 303.
Bourguet, Lettres philosop. sur la formation des
sels, pag. 163.
Buzzi. v. Dissertatzione sopra una varietà parti-
colare d'Uomini bianchi Eliofobi. Mediol, 1784. 4.
Jo. Hawkins m'a dit avoir vu à Rome une jeune
fille de cette couleur.
Hawkins, dans son premier Voy. en Grèce,
a vu à Chypre deux frères leucœthiopes. Ils avaient
environ douze ans.
Je ne citerai que trois témoins oculaires;
Oliv. Goldsmith, History of the Earth, T. II,
pag. 240.
Toutes les observations prouvent que les
Nègres blancs ne diffèrent de leurs parens, que
par la couleur, qu'ils en ont les traits, que leur
constitution n'est pas aussi robuste que celle des
autres Nègres, sans être ni aussi faible ni aussi
dégradée qu'on l'a dit; qu'ils ont quelquefois de
là carnation, et les lèvres vermeilles; que leur
tête est couverte d'une laine rousse, et qu'ils ont
des poils lanugineux de la même couleur, sur les
autres parties du corps; que leur vue n'est pas
[Seite 278] aussi bonne que chez les autres hommes; que l'i-
ris est diversement coloré, que le globe de l'œil a
une direction et une vibration particulières; qu'ils
ne sont pas sourds, et que leurs facultés intellec-
tuelles sont à-peu-près les mêmes que chez les
autres Nègres; que la peau des mains et des pieds
est ridée, même dans la jeunesse comme dans la
décrépitude. (Arthaud. li. c. Note du Trad.)
Cette division se trouve dans toutes les édi-
tions des œuvres de ce grand homme. Gmelin y a
substitué la mienne dans une dernière edition.
La plupart des auteurs admettent cette race;
mais les crânes des hommes des deux continens
dont elle se compose n'offrent aucun changement.
Ils sont les mêmes que ceux des Mongoles. Il pa-
raît donc que la petite stature des ces peuples est
due au froid rigoureux des régions qu'ils habi-
tent, et que sous ces latitudes la fibre trop solide
ne peut plus se développer autant. (Note du Tr.)
Herder a supérieurement décrit ces six va-
riétés dans son ouvrage, Ideen zur philosophie
der geschichte der menschheit, T. II, p. 4 et 68.
‘“Le sang Je Georgie est le plus beau de l'O-
[Seite 300] rient, et je puis dire du Monde. Je n'ai pas remar-
que un visage laid dans ce pays-là parmi l'un et
l'autre sexe; mais j'y en ai vu d'angéliques. La
nature y a répandu sur la plupart des femmes
des grâces qu'on ne voit pas ailleurs. Je tiens
pour impossible de les regarder sans les aimer
L'on ne peut peindre de plus charmant visage,
ni de plus belle taille que celle des Georgien-
nes.’
Jo. Eberh., Fischer Conjecturæ de gente et
nomine Tartarorum inter Ej. questiones Petropo-
litas, pag. 46, il. Ej. Sibirische Geschichte, T.
I, pag. 28. 142.
Le premier ouvrage où l'on ait donné le
nom de Tartare aux Mongoles est une lettre d'Y-
von, prêtre de Narbonne, écrite à Gérard, ar-
chevêque de Bourges, en 1243, et insérée par le
moine Math. Paris son contemporain, Hist. Majo.
pag. 530. ed. Londin. 1686. fol. Il y parle des hor-
ribles ravages des Tartares, et il les décrit ainsi:
‘“Habent autem Tartari pectora dure et robusta,
facies macras et pallidas, scapulas rigidas et
erectas, Nasos distortos et breves, menta proe-
[Seite 302] minentia et acuta, superiorem madibulam hu-
milem et profundam, dentes longos et raros,
palpebras à crinibus usquè ad nasum protensas,
oculos inconstantes et nigros, aspectus obliquos
et torvos, extremitates ossosas et nervosas, crura
quoque grossa, sed tibias breviores, statura
tamen nobis aequalis, quod enim tibiis deficit
in superiori compose compensatur.”’
On peut tirer cette conclusion des dessins
faits d'après les habitans du Tybec par Ketile, ce
que m'a fait voir War. Hastings.
Un Indien des îles Philippines, que j'ai vu
à Londres chez Dalrymple, offrait parfaitement
cette transition.
J'ajouterai à ce que j'ai déjà dit à ce sujet,
que cette poussière fuligineuse qu'on trouve chez,
les Nègres, dans le réseau muqueux de Malpighi,
ne leur est pas exclusive, comme l'ont prétendu
quelques auteurs; je l'ai observée, quoiqu'en
moindre quantité, plus inégalement distribuée
chez les matelots indiens, qu'on nomme Lascares.
Mais je vois une Indienne de Bombay, qui est ma
domestique, devenir avec le temps sensiblement
moins noire sur les bras et sur la figure, elle con-
serve ailleurs sans altération, la couleur de châtai-
gne.
Regnard termine sa description du Lapon,
en disant: ‘“Tel est ce petit animal qu'on appelle
Lapon, et l'on peut dire qu'il n'en est point,
après le singe, qui approche plus de l'homme.”’
Œuvres, T. I, pag. 71.
L'Eskuimos Attuiock, dont je dois le por-
trait d'après nature à l'illustre Banks, lorsqu'il vit
pour la première fois un singe, pendant le séjour
qu'il fit à Londres, parut très-surpris et deman la
à M. Cartwright qui l'accompagnait: ‘“si c'était
un Esquimos?”’ ajoutant: ‘“Il faut avouer
que pour la couleur et pour les formes il res-
semble infiniment à un homme de ma nation.”’
J'en avais déjà cité quelques-uns dan Got-
tingischem Magazin, anni 2di P. VI, p. 419.
Marsden, en parlant de Sumatra, Wilson
des habitans de l'île Pelew, Carteret des Papons,
Bougainville des indigènes des Iles des Naviga-
teurs.
C'est ainsi que Nicolas del Techo dit que
les Caaiguos ont le nez camus, Mart Dobrizhoffer
que leurs voisins les Abipons l'ont souvent aqui-
lin; Allon donne aux Péruviens un nez étroit et
recourbé; et Molina un nez gros aux habitans du
Chily. Forster rapporte qu'il est très-déprimé
chez, les insulaires des terres de Feu.
Lettere di arrer. Vespucci, pag 9. – ‘“Non
sono de volto molto belli perche tengono il viso
largo, che Voglion parere al Tartaro”.’
V. News views of the origin of the tribes
and nation of America by Benjamin Smith Barton.
Philadelphia, 8, 1798.
On y soutient l'Amérique peuplee par l'Asie, on
y donne un essai de Vocabulaire pour le prouver.
Ceci me paraît évident d'après les portraits
des Eskimos et deux de leurs crânes qui sont
en ma possession.
L'opinion paradoxale de Robertson qui fait
venir les Eskimos des Normands, ne mérite pas
d'être réfutée. Hist. of. America, T. II, p. m. 40.
Linschotan, célèbre voyageur et observa-
teur très-exact, compare aux Samoïdes les habi-
[Seite 312] tans du détroit de Magellan, pour la physionomie,
le visage, la couleur, les cheveux et la barbe.
Banks a remarqué le premier que tous ces
peuples avaient le même idiome. Hawkesworth's
collection, T. III, pag. 573. Après lui Bryand
dans le voyage de Coock à l'hémisphère septentrio-
nal à Marsden dans l'Archéologie, T. VI, pag. 151.
L'immortel de Guiros, qui le premier dé-
couvrit lus îles de la Société, distingua soigneu-
sement la disparité qui existe entre leurs habi-
tans; il dit que les uns ressemblent aux blancs,
les autres aux mulâtres, et enfin aux nègres.
Dalrymple, collect. of Voy. to the South pacific
Océan, T. I, pag. 161.