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INSTITUTIONS
PHYSIOLOGIQUES.

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INSTITUTIONS
PHYSIOLOGIQUES,
Traduites du Latin, et augmentées
de Notes,

PAR J.F.r PUGNET,
Ci-devant professeur de morale, au-
jourd’hui cultivant l’art de guérir.

Uti non jucundior (disciplina), ita vix
gravier et utilior altera, in universo Medi-
cinae ambitu extat.
(Auct. praef. p. xj.)

A LYON,
Chez J.T. Reymann et C.e, Libraires;
Rue Saint-Dominique, n.o 73.


1797
.

[[III]]

VIRO ILLUSTRI
honoratissimoque sui magistro
MARCO-ANTONIO PETIT,
MONSPELIENSI DOCTORI MEDICO,
PRIMARIO NOSOC. LUGD. CHIRURGO,
SOCIETATIS MED. LUG. CONGREGATAE
ALIARUMQUE MEMBRO,
IN PUBLICUM
GRATITUDINIS ET REVERENTIS
PIGNUS,
sallicam harumce institut. versionem
D. et V.
J. Fr. P.

AVANT-PROPOS
DU TRADUCTEUR
.

[[IV]]

Il nous manquoit une physiologie élémen-
taire, méthodique & éclairée de la lumière
des découvertes modernes; les
Institutions
du savant Blumenbach, professeur Alle-
mand, m’ont paru réunir ces grands avan-
tages: je les offre à ceux de mes compa-
triotes que leur état ou leur goût, appellent
à cultiver la physique du corps humain.

Je les leur offre dans une langue étrangère
à celle qu’a empruntée l’Auteur; son ouvrage
& les lecteurs y perdront sans doute: mais le
latin, doublement mort aujourd’hui parmi nous,
n’est pas assez généralement entendu, & vrai-
semblablement il le sera dans peu, infiniment
moins encore.

Ce n’est pas seulement l’esprit du professeur
de Gottingue que je me suis proposé de faire
connoître aux Français; j’ai voulu le faire
parler lui-même: me bornant au titre d’in-
terprète, j’ai constamment respecté le choix
de ses mots, & l’enchaînement de ses idées.

Je me félicite d’avoir enrichi ma patrie,
d’un bien que l’une de ses rivales possédoit pres-
que exclusivement: puisse bientôt renaître en
France le goût des sciences utiles, & l’Al-
lemagne, qui nous a tant communiqué jus-
qu’à ce jour, recevoir enfin de nous un égal
tribut d’érudition & de savoir!

PRÉFACE
DE L’ÉDITION ORIGINALE.

[[V]]

Les mêmes motifs qui engagèrent
autrefois Boerhaave, & après lui Hal-
ler,
à mettre au jour leurs abrégés
de physiologie, ont déterminé l’au-
teur de ces Institutions à les publier.

Le premier nous apprend qu’il ins-
truisoit mieux en développant ses pro-
pres conceptions, qu’il ne l’eût fait en
commentant des productions étrangères;
qu’il parloit communément alors avec
plus de feu & de clarté,
&c.(1)

Le second avouoit que, quoiqu’il
se fût d’abord servi de l’ouvrage de
Boerhaave pour faire ses préleçons,
il se borna dans la suite à ses propres
écrits, parce que depuis ce grand homme,
l’anatomie avoit été tellement enrichie,
qu’en plusieurs points elle n’étoit plus
la même
(2).

Nous pouvons dire avec bien plus
de raison de la physiologie de nos
[Seite VI] jours, ce que Haller disoit de l’ana-
tomie de son temps: ceux qui ont un
peu médité sur ses objets las plus inté-
ressans, sur la respiration, la chaleur
animale, la digestion, la nature &
les usages de la bile, le mécanisme
de la génération, &c., l’avoueront
sans peine.

Le mérite de ces Institutions appar-
tient donc moins à leur Auteur, qu’au
temps dans lequel il a vécu: si son
ouvrage est plus parfait, s’il se rap-
proche plus du vrai que ceux qui
avant lui ont couru avec le plus de
gloire la même carrière; c’est parce
qu’il a sur eux l’avantage des décou-
vertes modernes.

Les lecteurs justes & instruits dis-
cerneront aisément ce qui lui appar-
tient; ils sauront apprécier les obser-
vations qui lui sont propres, & la
nouvelle manière de rendre celles dont
il a profité. On jugera avec la même
impartialité les notes dont il a accom-
pagné son texte, & dans lesquelles il
s’est permis quelques discussions, que
la marche rapide & serrée de son dis-
cours excluoit.

D’ailleurs, il s’est attaché, autant
qu’il a été en lui, à lier & à co-ordon-
[Seite VII] net entr’elles toutes les parties de cet
ouvrage; à les unir si étroitement,
que l’une parût presque une consé-
quence nécessaire de l’autre.

Loin d’accumuler un vain fatras de
citations, il les a resserrées dans le plus
petit nombre d’ouvrages choisis(1);
se proposant en cela, ou d’indiquer
aux jeunes élèves les auteurs princi-
paux, ceux qui ont traité ex professo
& le mieux, chaque point physiolo-
gique, ou de faire connoître des écri-
vains trop négligés, parce qu’ils n’a-
voient pas directement la physiologie
en vue; tels, des auteurs de voyages,
des physiciens, &c.

Il a également cité les meilleures
planches anatomiques qui fussent à sa
connoissance, celles sur-tout d’Eusta-
che,
dont il désireroit que la précieuse
collection publiée par Albinus, fût
entre les mains de tous ceux qui se
vouent à l’art de guérir.

[Seite VIII]

(1). . . . . . . . . .

Enfin, le grand & unique but de l’au-
teur de ces Institutions, a été de donner
des élémens en même temps exacts,
précis & faciles; de mettre à la portée
de tous ceux qui se consacrent à l’étude
de la médecine, la partie de cette
science la plus agréable, la plus utile
& la plus nécessaire. Telle l’idée que
l’immortel Galien avoit si justement
conçue de la physiologie, lorsqu’il di-
soit d’elle, au commencement de son
ouvrage sur l’art de guérir: ‘“Une ma-
ladie est d’autant plus sérieuse, qu’elle
s’éloigne plus de l’état naturel, – &
celui-là seul pourra juger à quel point
elle s’éloigne de cet état, qui le connoîtra
parfaitement.
”’

Fait à Gottingue, le 15 Novembre 1786.

INSTITUTIONS
PHYSIOLOGIQUES. SECTION PREMIÈRE.
Du Corps humain vivant, en général.

[Seite 1]


1. Dans le corps humain vivant, dont
les fonctions sont l’objet de la physiologie,
il est trois choses à considérer(1): les soli-
des
ou les parties contenantes, les fluides
ou les humeurs qui y sont contenues; &,
ce qui est beaucoup plus important, les
forces vitales. Les forces vitales disposent
les solides à recevoir les fluides, à les chas-
ser loin d’eux, & à exécuter plusieurs autres
mouvemens. On les retrouve dans les fluides
[Seite 2] eux-mêmes, au moins dans certains; & si
elles ne constituent pas l’essence des corps
organisés, elles en sont l’ame.

2. Quoique nous considérions séparément
ces trois choses, & qu’elles soient réelle-
ment distinctes entr’elles; le corps vivant
les réunit d’une manière si intime, qu’il n’est
pas possible de les abstraire. D’une part, les
humeurs les plus limpides abondent en par-
ties terrestres; de l’autre, les solides les
plus parfaitement desséchés, outre qu’ils ont
leurs principes dans les fluides, retiennent
toujours un peu d’humidité: enfin, il n’est
pas une seule fibre dans le corps vivant,
quelque déliée qu’on la suppose, qui soit
totalement dépourvue de force vitale.

3. Examinons chacun de ces objets en
particulier: nous traiterons d’abord des flui-
des, soit parce que leur masse l’emporte de
beaucoup sur celle des solides(1), soit
parce qu’ils forment la partie élémentaire
des corps.

SECTION SECONDE.
Des Humeurs du corps humain en
général.
Du Sang en particulier.

[Seite 3]

4. Tous les fluides qui entrent dans
la composition de nos corps, peuvent
être distribués en trois principales clas-
ses. 1°. L’humeur qu’on appelle crue; tel
le chyle parcourant les premieres voies
avant sa commutation en sang, ou cette
espece de vapeur que l’absorption introduit
en nous. 2°. Le sang lui-même. 3°. La
matière des sécrétions que fournit le sang;
soit que, devant séjourner dans le corps,
elle y ait quelque usage particulier à rem-
plir, soit qu’inutile & purement excrémen-
titielle, elle en doive être rejetée.

5. Nous parlerons ailleurs de la pre-
mière & de la troisième de ces classes; de
l’une, en traitant de la chylification; de la
dernière, lorsqu’il s’agira des sécrétions &
des fonctions auxquelles les différentes hu-
meurs se rapportent. Nous ne nous occu-
perons ici que du sang, humeur princi-
pale, vraiment vivifiante & la source de
toutes les autres; humeur en laquelle se
convertit celle que nous avons appelée crue,
[Seite 4] d’où découle toute autre sans aucune excep-
tion, & qui parcourant en tout sens tou-
tes les parties du corps, ne manque que
dans l’épiderme, la membrane arachnoïde,
l’amnios(1), l’émail des dents, &c.

6. Le sang est un fluide d’un rouge plus
ou moins brun, visqueux au toucher, &
naturellement chaud(2). Sa composition
est un secret que la nature s’est réservé
jusqu’à ce jour, & que l’art n’a encore pu
imiter.

7. récemment tiré d’un homme vivant,
& reçu dans un vase, il offre les phénomè-
nes suivans.

Tant qu’il conserve sa chaleur naturelle,
il exhale une vapeur aqueuse, qui contenue
dans un récipient, s’y distribue en gouttes,
semblables à celles de la rosée & aussi lim-
pides qu’une eau de source; elles en différent
cepen dant par une odeur forte, plus déve-
loppée chez les animaux carnivores, & qui
atteste elle-même son origine animale, en se
rapprochant de l’odeur de l’urine chaude, ou
[Seite 5] de celle que répandent les capacités thorachi-
que & abdominale d’un cadavre ouvert
depuis peu. Une partie de cette humeur se
sépare ainsi du sang & s’évapore; une autre,
non moins considérable, demeure combinée
avec ce que nous appellerons dans la suite
ses principes, ou ses parties constituantes.

8. A mesure que le sang se refroidit, il
se divise en deux parties; l’une forme le
coagulum ou le caillot, on nomme l’autre
le serum. Celui-ci, d’un rouge pâle & jau-
nâtre, transsude par tous les points de la
surface du premier, qui perd de sa densité
& de son poids, en raison de la sérosité
qui s’en échappe. On croit retrouver dans
la substance du coagulum, celle du foie
ou du placenta, si on ne considère que sa
couleur & sa nature pulpeuse; on se repré-
sente une île flottante dans le milieu des
eaux, quand on observe sa position & sa
mobilité, dans le centre du sérum qui l’en-
vironne & le supporte.

9. La dissection délicate du coagulum,
ou de fréquentes lotions de cette espèce de
dépôt, la séparent en deux nouvelles par-
ties: le cruor ou la partie colorante du sang,
& la lymphe qu’on appelle, à raison de sa
consistance, la base du caillot. La violence
qu’il faut faire à la lymphe pour la déta-
cher du cruor, prouve combien elle lui est
plus intimement unie qu’au sérum; dès-
lors, elle pâlit de plus en plus, & se con-
vertit en un grumeau blanc & fibreux.

[Seite 6]

10. Telles sont les quatre parties élé-
mentaires du sang: l’humeur aqueuse, le se-
rum,
le cruor & la lymphe. Leur distinction
ne naît que de leur état de désunion & de
mort; elles paroissent former une liqueur
homogène, quand elles sont exactement
mêlées & douées de toute leur force
vitale.

Nous allons nous occuper des trois der-
nières; nous en parlerons plus longuement
que de l’humeur aqueuse, qui n’offre
plus rien de particulier; qui d’ailleurs n’ap-
partient pas plus au sang, que l’air lui ap-
partient à elle même ou aux autres parties
de notre corps avec lesquelles il s’unit. Nous
dirons un mot de ce nouveau fluide, en
terminant cet article.

11. Le serum est une humeur gélatineuse,
celle qui contribue le plus à donner à toute
la masse du sang, le caractère de viscosité
qu’elle présente. En général, il ressemble
au blanc d’oeuf(1). Il en a la blancheur, &
en acquiert la consistance pulpeuse, quand
on le soumet au 150°. degré de chaleur du
thermomètre de Fahreinhet*); ou lors-
qu’on le mélange avec une certaine quantité
de chaux vive. Moscati(2) observe que
[Seite 7] ce dernier procédé est moins prompt, &
qu’il ne produit son effet qu’après un inter-
valle de vingt heures. Si on le livre à lui-
même, ou à une lente dessication, on le
voit se convertir en une substance transpa-
rente, qui à l’extérieur ne diffère en rien
de la gomme arabique; mais qui bientôt &
insensiblement s’entoure, comme le blanc
d’oeuf, d’un grand nombre de scissures,
toutes affectant la direction d’une spirale.

12. Parmi les propriétés du sérum(1),
il en est une bien remarquable que j’ai
vérifiée plusieurs fois, en répétant l’expé-
rience de Priestley(2). C’est la facilité avec
laquelle l’air auquel on expose un vase plein
de sang, agit sur cette humeur, l’altère &
la décolore; tandis que le coagulum plongé
dans elle, & soumis à la même influence,
est à peine affecté. En considérant combien
est différente l’impression que ressentent ces
deux parties d’un même tout, on seroit
porté à croire qu’elles sont mutuellement
aussi étrangères, que le seroit au coagu-
[Seite 8] lum, l’eau, l’huile, ou tout autre fluide; ou
au moins toute autre humeur du corps
humain, telle que la salive, l’urine, &c.

13. Le cruor est la troisième & la plus
intéressante partie du sang. Sa couleur, la
figure des particules qui le composent, les
principes que l’activité du feu en dégage,
tout en lui est remarquable. Il paroît avoir
sa principale source dans les sucs nourriciers
du corps les plus parfaitement élaborés; car
on ne commence à le distinguer dans le
foetus, que quatre semaines après la con-
ception; & dans les germes fécondés des
poulets, que quarante heures après le pre-
mier acte d’incubation. Il est d’ailleurs,
dans les cas de grandes pertes de sang, la
portion de ce fluide la plus difficile à ré-
parer.

14. Leeuwenhoek a le premier découvert
qu’il étoit composé de globules, dont le
volume & la figure ne varioient jamais dans
un sang récemment tiré. Il affirme très posi-
tivement, qu’on n’en trouve de semblables
dans aucune espèce d’humeur, si ce n’est
peut-être dans le lait; & que, quoique leur
forme paroisse beaucoup plus simple que ne
l’ont jugée des auteurs recommandables,
ils différent absolument de toutes les autres
parties constituantes du sang. Sans parler
des six divisions que Leeuwenhoek a sup-
posé exister en chacun d’eux, je puis as-
surer que je n’ai jamais pu leur recon-
noître, ni la figure annulaire que leur
[Seite 9] donne le savant Della Torre(1), ni celle
de vésicules renfermant un noyau opaque,
ainsi que Hewsson prétend l’avoir ob-
servé(2), ni la convexité lenticulaire que
d’autres assurent y avoir aperçue. Ce sont
uniquement, si je ne me trompe, de fort
petits globes solides & gélatineux. On a
disputé si l’étroitesse ou l’ampleur des vais-
seaux qu’ils parcourent, imprimoient quel-
que changement à leur forme; s’ils deve-
noient ovales en circulant dans les uns, &
se rétablissoient en rentrant dans les autres.
L’expérience ne m’ayant rien démontré à
cet égard, je m’en rapporte aux observa-
tions de l’exact Reichel(3). Il est cependant
à noter qu’on ne leur aperçoit cette forme
globuleuse que dans un sang vivant ou
frais: avec le temps ils la perdent, & pa-
roissent en quelque sorte se dissoudre.

15. Les physiologistes ne s’accordent
pas davantage à déterminer leur volume.
Hales l’évalue à 1/3240e. de pouce, Senac, à
1/3300e; ainsi des autres.

16. Ces globules ont une couleur rouge,
[Seite 10] qu’ils paroissent communiquer à tout le
sang, & qui est plus ou moins foncée selon
les circonstances dans lesquelles on l’exa-
mine. Elle est plus pâle dans les animaux
mal nourris, ou qui ont souffert de graves
hémorragies; elle est plus vermeille dans le
sang artériel & dans celui qui a été exposé
à l’air atmosphérique ou à l’air déphlogisti-
qué; elle est plus obscure dans le sang vei-
neux & dans celui qui a été frappé de l’in-
fluence d’un air fixe ou inflammable(1).

17. Il est évident que ce sont les mêmes
causes qui donnent au sang sa couleur, &
en augmentent l’intensité. Mais, d’où lui
vient cette disposition à se colorer ainsi?
Haller l’attribuoit au saffran de mars; & en
effet, quoique le sang admette une très-
petite quantité de parcelles ferrugineuses,
on remarque qu’il en contient plus qu’au-
cune autre partie du corps(2). Les auteurs
varient singuliérement dans l’estimation de
cette quantité. Menghini la comparoit à la
masse du sang dans un rapport de 1 à 100;
[Seite 11] Rhades l’évaluoit à raison de 1 sur 427, &
dans quelques autres expériences, il pousse
la disproportion qu’il établit entr’eux jus-
qu’à la différence de 1 à 503, &c. Ce qui
est plus constant, c’est qu’on ne trouve du
fer que dans le sang calciné: si on l’a aban-
donné à une dessication lente, l’eût-on en-
suite porphirisé, & étendu ou dans l’eau
ou dans le mercure le plus pur, on ne par-
vîendroit pas à en séparer la plus petite
portion imaginable, même avec le secours
d’une pierre d’aimant.

18. La dernière des parties élémentaires
du sang est la lymphe, que les uns appellent
la base du coagulum; d’autres, la partie mu-
queuse ou visqueuse du sang; d’autres en-
fin, sa partie fibreuse.

On la confondoit autrefois avec le sé-
rum(1). Elle en diffère cependant sous tous
les rapports, puisqu’elle se coagule au con-
tact de l’air froid, & revient à son état de
fluidité, si on la combine avec de la chaux
vive.

19. Nous avons précédemment indiqué
comment on parvenoit à la séparer du cruor;
mais nous n’avons rien dit d’un moyen de
la convertir en une espèce de membrane,
[Seite 12] appelée du nom de l’auteur auquel cette dé-
couverte appartient, membrane de Ruisch(1).
On opère cet effet en la battant avec des
verges.

La ressemblance parfaite qui se trouve
entre cette membrane l’ouvrage de l’art,
& plusieurs phénomènes maladifs, que dé-
véloppent sur-tout les accidens inflamma-
toires, prouve assez que ces derniers nais-
sent d’une semblable coagulation de la
lymphe.

C’est donc à cette cause que nous rap-
porterons – la croûte pleurétique qui re-
couvre quelquefois le coagulum du sang,
contenu dans un vase en repos; – ces
fausses membranes qui paroissent si commu-
nément naître des visceres enflammés, & les
investir; – celle que Hunter avoit observé
transsuder de l’utérus d’une femme enceinte
& infectée du vice syphilitique*); – les
membranes celluleuses qui, à la suite de pé-
ripneumonies, s’établissent comme moyen
d’adhésion entre les poumons & la plè-
vre; – celles qui ont coutume de se former
dans la capacité de l’abdomen après de graves
hémorragies; enfin, pour citer un exemple
notable, ces masses souvent énormes appe-
lées Lithopaedion, qui, après avoir long temps
séjourné dans le bas-ventre, s’y unissent
[Seite 13] presqu’inséparablement avec les viscères qui
y sont renfermés(1). J’attribue à la même
cause la formation des polypes & de plu-
sieurs autres fongosités semblables.

20. Ces phénomènes & plusieurs autres
dont nous aurons occasion de parler dans la
suite, démontrent sensiblement quelle est
la prépondérance de la lymphe sur les au-
tres parties du sang. Au moins, est il vrai-
semblable que si ce liquide jouit de quelque
vitalité, c’est principalement dans la lymphe
qu’elle réside.

21. Ce ne sont pas là les seuls principes
du sang: nous avons déjà averti qu’il en
est d’autres se combinant avec eaux dont
nous venons de parler.

Tel sur-tout l’air, que l’on estime assez
généralement, faire la trente-troisieme par-
tie de la masse du sang. Il s’en faut de beau-
coup qu’il soit vraiment libre & élastique,
dans le sang d’un homme vivant & sain;
il y est, au contraire, dans l’état de com-
pression & de condensation le plus opposé
à son rétablissement. Bien plus, l’expérience
m’a appris que la plus petite quantité d’un
air pur, introduite dans la veine jugulaire
d’un chien, suffisoit pour développer dans
cet animal les accidens de palpitation, d’as-
soupissement & de convulsion les plus gra-
ves. Je ne doute pas que poussé un peu plus
[Seite 14] abondamment, il ne l’eût aussitôt frappé de
mort(1).

22. Les proportions des parties élémen-
taires que nous venons de décrire, varient
avec l’âge, la nourriture & les autres cir-
constances qui déterminent le tempérament
de chaque sujet.

23. Nous n’avons rien de plus précis ni
de plus constant, sur la quantité du sang
contenue dans les vaisseaux du corps hu-
main. Haller l’estime dans un adulte de 30
à 36 livres. Il est d’autres auteurs dont
l’estimation est différente.

SECTION TROISIÈME.
Des Solides du corps humain en général. Du Tissu cellulaire en particulier.



24. Les solides naissent des fluides(2);
leurs élémens sont purement gélatineux. Ce
n’est qu’insensiblement que leurs différens
[Seite 15] degrés de cohésion se resserrant, ils passent
d’un état de mollesse semblable à celui de
la substance médullaire du cerveau, à un
état de solidité extrême: tel celui qu’of-
fre l’émail des dents.

25. La base de tous les solides est une
terre calcaire plus ou moins abondante,
combinée avec des acides saccarins & phos-
phoriques, mais sur-tout avec ces derniers.
Le principe de leur cohésion se trouve,
soit dans le mode de leur structure, soit
dans la grande quantité d’air(1) qui les
pénétre, & qui les pénétre d’autant plus
abondamment, qu’ils sont eux-mêmes plus
solides; soit enfin dans un gluten analogue
au mucilage que donne l’analyse des parties
solides des animaux, on remontera aisément
à la source de ce gluten, si on rappelle ce
que nous avons dit du caractère visqueux
du sang.

Je ne parlerai pas du fer, quoique plu-
sieurs regardent sa présence dans le corps
humain, comme l’une des grandes causes
de sa solidité. Il entre en si petite quantité
dans les parties même les plus dures, que
[Seite 16] sur deux livres d’os, on trouve à peine la
cinquième partie de ce métal.

26. La plupart des solides de notre corps
sont des composés fibreux, résultans d’un
nombreux assemblage de filets disposés sur
des lignes plus ou moins parallèles; on les
aperçoit sur-tout dans les os des foetus,
dans les muscles, les tendons, les ligamens,
les aponévroses & certaines membranes,
comme la dure-mère.

27. Il est d’autres parties dont la struc-
ture est totalement différente, & forme une
classe particulière. Leur substance est ce
que les Grecs ont appelé un parenchyme(1).
Chaque organe, & sur-tout chaque organe
sécréteur, en a un qui lui est propre. Ainsi,
celui des reins ne ressemble point à celui du
foie, &c.

28. Tous ces composés & fibreux &
parenchymateux ont cela de commun, qu’ils
sont enveloppés & pénétrés par un même
tissu appelé cellulaire, qui tient un rang
fort distingué, entre les plus importantes
parties du corps(2).

[Seite 17]

29. Il forme presqu’entiérement la plu-
part des membranes & des cartilages, qu’une
macération un peu soutenue rappelle bientôt
à leur premier état; il est, si je puis m’ex-
primer ainsi, la charpente de celles qu’il ne
forme point; tels sont les os les plus durs,
qui d’abord celluleux, cartilagineux ensuite,
ne doivent leur solidité, qu’au suc dont ils
se nourrissent; il n’est enfin, aucune partie
du corps humain dans la substance duquel
on ne le trouve, si on excepte l’émail des
dents, où il ne m’a pas été possible de le
découvrir, même à l’aide des acides les plus
forts.

30. Non seulement ce tissu forme ou
pénètre les parties dont nous venons de
parler, mais il sert aux unes de haie & de
cloison; c’est ainsi qu’il sépare les muscles
& les membranes: il enveloppe les autres
& les fortifie; c’est à cet effet qu’il accom-
pagne les vaisseaux & les nerfs. Il a un
usage bien plus étendu: il embrasse le corps
entier, il est le lien commun de toutes ses
divisions, il établit des rapports entre tou-
tes en général, & en particulier entre cha-
cune de celles que leur situation rapproche.

31. Il résulte de-là, 1°., que le tissu cel-
lulaire contribue tellement à la forme & à
la configuration de notre machine, que si
par l’imagination on en retranchoit tout ce
qui n’est pas lui, le laissant seul en place,
on n’en concevroit pas moins le corps &
tous les organes qu’il renferme, révêtus
[Seite 18] de leur même figure. 2°. Qu’il établit la
voie de communication la plus directe, soit
entre les parties de nous-mêmes qui diffé-
rent le plus par leur nature, soit entre
celles dont le siege est le plus éloigné(1).
Cette seule considération suffit pour ter-
miner la dispute élevée sur la continuité
des membranes, & expliquer la plupart des
phénomènes maladifs.

32. Mais d’où tire-t-il son origine? Il
paroît que c’est de la lymphe. J’ai vu cette
humeur transsuder des poumons de mala-
des affectés de péripneumonie, se convertir
en un tissu parfaitement semblable au tissu
cellulaire, & former ces fausses membra-
nes qui ont coutume de les unir à la
plèvre.

33. Voilà ce que nous avions à dire en
général, de la nature & de l’importance
du tissu cellulaire. Examinons maintenant
quelques-unes de ses particularités.

D’abord sa consistance n’est pas par tout
la même: il est, toutes choses égales d’ail-
leurs, beaucoup plus délicat chez l’homme
que chez les autres animaux; & je ne doute
pas que la nature ne nous ait accordé ce
privilège, pour rendre nos sens plus sub-
tils, nos mouvemens plus libres, pour nous
[Seite 19] rendre nous-mêmes plus habiles à exercer
les fonctions qu’elle nous appelle à remplir.
La laxité & le resserrement de ce tissu,
varient également d’homme à homme, con-
sidérés dans leurs différens rapports d’âge,
de sexe, de genre de vie, de climat, &c.
Ils varient enfin chez un même sujet sui-
vant les points du corps où on l’examine.
Par exemple, il est plus lâche aux paupiè-
res & au prépuce qu’aux environs des
oreilles.

34. Nous avons déjà indiqué plusieurs
usages de ce tissu; il en est un autre que
nous ne devons pas omettre: c’est sa desti-
nation à recevoir divers fluides dans les
cellules dont il est composé.

Celui qui s’étend à toute l’habitudé du
corps, se charge, s’imbibe comme une
éponge, d’une vapeur séreuse, qu’il distri-
bue ensuite à toutes nos parties pour les
lubréfier(1).

35. Celui que bornent certaines dimen-
sions, reçoit d’autres liqueurs: ainsi, les cellu-
les du corps vitré contiennent une humeur du
[Seite 20] même nom; la membrane médullaire, si
improprement appelée périoste interne, en-
veloppe la moëlle; & les nombreuses ex-
pansions qui s’interposent entre nos parties
molles, recueillent le reste de la graisse.

36. Trois autres particularités se présen-
tent à décrire. 1°. Il est en nous des parties
dont le tissu cellulaire, quoique très-lâche &
très-flasque, ne se pénètre jamais de graisse
dans un homme sain: tel est celui qui forme
les paupières, ou qu’on trouve au-dessous
des parties génitales de l’homme. 2°. On
observe en plusieurs points du corps, cette
humeur se déposer dans les mêmes cellules
que nous avons dit être destinées à contenir
une humeur aqueuse(1). 3°. On observe
encore ailleurs, & si je ne me trompe, dans
des endroits fixes, des amas de graisse con-
sacrés à des usages déterminés. Ainsi, on en
voit chez les femmes, former au-dessus du
pubis le mont de Vénus, & ne servir qu’à
élever l’espece de motte qu’ils figurent(2).

37. Puisque c’est ici le lieu de parler de
la graisse(3), nous ajouterons qu’on appelle
[Seite 21] de ce nom, une huile très-analogue à celle
que fournissent les végétaux(1), douce,
inodore, inflammable, plus légère que
l’eau, & combinée avec une médiocre quan-
tité de phlegme, par l’intermède d’un acide
qui lui est propre(2).

38. Elle se forme dans le foetus beaucoup
plus tard que le sérum; car à peine elle y est
perceptible avant le cinquième mois depuis
la conception. Elle est d’ailleurs plus ou
moins consistante, selon le siége qu’elle
occupe. Celle, par exemple, qui matelasse
les fosses orbitaires est assez fluide, tandis
que celle qui avoisine les reins, a la dureté
du suif.

39. On demande ici comment elle se
sécrète: sont-ce des glandes particulières,
ainsi que l’a pensé Hunter, qui la filtrent;
ou s’échappe-t-elle des artères en suintant
de leurs tuniques? Sans reproduire tous les
argumens qui favorisent cette dernière opi-
nion, nous dirons qu’elle paroît beaucoup
plus vraisemblable, par cela seul qu’on la
rencontre dans des régions dont la nature a
coutume de l’exclure; ce qui s’explique
d’une manière bien plus satisfaisante, en
[Seite 22] rapportant cette erreur de lieu à une dé-
viation de quelques vaisseaux, qu’en sup-
posant le développement contre nature de
certains corps glanduleux. C’est ainsi, qu’on
a trouvé de la graisse dans la bulbe de l’oeil,
dans le vide que l’extirpation d’un testicule
avoit laissé dans le scrotum, dans presque
toutes les parties du corps. Il en est très-
peu qui n’aient quelquefois offert a la dissec-
tion, des tumeurs stéatomateuses plus ou
moins considérables. Nous pensons donc
que les glandes auxquelles on a rapporté la
sécrétion de la graisse, sont purement des
êtres de raison. Quoi qu’il en soit, une expé-
rience journalière atteste que cette sécrétion
& la résorbtion qui lui succède, s’opè-
rent avec une célérité incroyable.

40. La graisse sert à différens usages.
Elle lubréfie les parties solides, & facilite
leurs mouvemens; elle émousse leur trop
grande sensibilité; elle garantit des impres-
sions du froid; elle contribue enfin à la
souplesse & à la beauté de la peau(1).

Je ne dirai rien des usages particuliers de
cette humeur, uniquement affectée à certai-
nés parties; telle est la moëlle des os, &c.

Il ne paroît pas qu’elle serve beau-
coup à la nutrition d’un homme sain(2).

SECTION QUATRIÈME.
Des Forces vitales en général. De la Contractilité en particulier.

[Seite 23]

41. Nous entreprenons une tâche bien
difficile, la description du Solide vif(1), &
l’exposition des forces vitales qui, animant
toutes les parties de notre corps, leur don-
nent le sentiment & le mouvement.

42. Déterminons d’abord ce que nous
entendons par forces vitales.

Nous ne parlons point ici de celles
[Seite 24] dont le corps humain jouit concurremment
avec tous les corps de la nature; de l’élas-
ticité, par exemple, quoiqu’elle soit l’une
des grandes propriétés de l’économie ani-
male(1). Nous ne parlons pas plus de
celles que l’ame a reçues en partage, quoi-
qu’elles concourent très-puissamment à
mouvoir nos corps. Il s’agit uniquement
des forces qui appartiennent exclusivement
à la matière organique dont nous sommes
composés; & il nous paroît qu’on peut les
réduire aux classes suivantes.

43. La première, celle dont les effets
sont plus étendus, & sur laquelle reposent
en quelque sorte toutes les autres, est la
contractilité. Elle consiste dans le simple effort
que fait une partie pour se raccourcir.
Résidente dans le tissu cellulaire, elle se
déploie sur son domaine entier, & com-
mande à presque tout le corps. Nous pen-
sons qu’elle seroit convenablement dénom-
mée force cellulaire.

44. L’irritabilité, entendue dans le sens
que lui donne Haller, est la seconde. Elle dif-
fère de la simple contraction, en ce que
beaucoup plus facilement déterminée par
l’impression de tout stimulus âcre, elle s’ac-
compagne d’un mouvement d’oscillation &
[Seite 25] de tremblement particulier. Etant l’apa-
nage de la fibre charnue, nous l’appellerons
force musculaire.

45. La troisième est la sensibilité, que
nous nommerons force nerveuse; parce
qu’elle n’appartient qu’à la substance mé-
dullaire des nerfs. Ses effets sont, de rap-
porter au sensorium les impressions dont
sont affectés les organes dans lesquels elle
existe.

46. On peut considérer ces trois forces,
comme des forces communes; car on les re-
trouve dans la plupart des parties que les
anciens appeloient similaires.

47. Elles différent en cela d’une qua-
trième, que j’appellerai la vie propre. J’en-
tends par cette dénomination, les forces
en vertu desquelles seules, certaines parties
de notre corps remplissent les fonctions
spéciales dont la nature les a chargées.

Il ne répugne certainement pas à la saine
raison d’admettre que des parties dont la
structure, l’organisation & les usages, for-
ment une classe à part, aient reçu des for-
ces particulières. D’un autre côté, des ob-
servations exactes nous ont fait aperce-
voir dans les viscères sur tout, des forces
qu’on ne peut attribuer, sous aucun rapport,
à l’influence des forces communes. Prenons
pour exemples, les mouvemens de l’iris,
ceux des franges qui terminent, les trompes
de Fallope, l’érection du mamelon des fem-
mes, l’action du placenta & de l’uterus à
[Seite 26] l’époque de l’enfantement, la descente des
testicules dans le scrotum des foetus mâles;
& si je ne me trompe, le mécanisme de
presque toutes les sécrétions; peut-on ne
pas rapporter ces phénomènes à l’influence
d’une vie propre?

48. Il nous reste à désigner une cin-
quième & dernière force, que nous nom-
merons force de formation, parce qu’en
effet elle est la cause efficiente de tout
acte conservateur & reproducteur. C’est par
elle que les matières génératives & nutri-
tives sont introduites dans des réservoirs
favorables, qu’elles y sont convenablement
élaborées, qu’elles y subissent les change-
mens de forme nécessaires; enfin, qu’elles
y sont commuées en parties susceptibles
ou de contractilité, ou d’irritabilité, ou de
sensibilité, ou de vie propre.

49. Nous traiterons plus en détail de
cette force de formation, en exposant com-
ment la génération s’opère. Il en sera de
même de l’irritabilité & de la sensibilité,
dont nous nous occuperons en parlant du
mouvement musculaire, & en développant
les fonctions du systême nerveux. A l’égard
de la vie propre, nous en parlerons dans
tout le cours de cet ouvrage, lorsque
l’occasion s’en présentera.

Achevons ici le peu que nous avons à
dire sur la contractilité.

50. Déjà nous avons observé que, rési-
dente dans le tissu cellulaire, elle étend son
[Seite 27] empire sur presque tout le corps humain.

Et en effet, elle existe d’abord dans tou-
tes les parties que forme entièrement ce
tissu par exemple, dans les membranes,
auxquelles on ne disputera pas cette pro-
priété, si on considère avec quelle facilité
se resserrent le dartos, la peau & le péri-
toine, qu’on a vu, par ce seul resserrement,
déterminer l’étranglement d’une hernie(1).

Elle existe encore dans les viscères que
ce même tissu compose en grande partie;
tels sont les poumons dont j’ai fréquem-
ment vérifié la contractilité, par des inci-
sions que je pratiquois sur eux dans l’état
de vie. J’apercevois alors leur superficie
se contracter fortement, & cependant ne
donner aucun signe de cette irritabilité que
Varnier leur attribue.

Elle existe enfin dans les os eux-mêmes.
Le resserrement que subissent les alvéoles
après la chûte des dents, & l’astriction qui,
dans un cas de nécrose, s’empare de l’os ré-
généré, pour le rappeler insensiblement à
la densité & à la forme de celui qu’il rem-
place, le prouvent d’une manière convain-
cante.

A la vérité, on ne la retrouve point
[Seite 28] dans l’émail des dents; mais celui-ci est dé-
pourvu de tissu cellulaire. Aussi, pensons-
nous que la perte de substance qu’il
éprouve à la suite d’une carie ou de tout
autre accident, est à jamais irréparable.

51. C’est à un principe extraordinaire de
vigueur & de santé, que le tissu cellulaire
doit sa force contractile; & je ne doute
point qu’il ne soit le siége du ton, que le
grand & ingénieux Stalh a tant célébré.
Pour nous en convaincre, jetons un coup
d’oeil rapide sur un seul fait. Dans un
homme sain, il absorbe l’humeur aqueuse
dont nous avons parlé, il s’en pénètre,
comme pourroit le faire une éponge; &
bientôt, à l’aide de sa contractilité, il s’en
décharge, & la chasse dans les vaisseaux
lymphatiques. Au contraire, chez un sujet
malade, ce même tissu, frappé d’atonie,
reste surchargé par la quantité d’eau qui
séjourne en lui, & donne lieu ou à des
oedématies, ou à d’autres affections cachec-
tiques de même nature.

52. On peut conclure de ce que nous
avons dit de l’étendue de l’empire de la con-
tractilité sur le corps humain, de son in-
fluence presque souveraine sur les autres
forces vitales, des modifications sans nom-
bre qu’elle éprouve dans les différens indi-
vidus, combien elle contribue à décider le
tempérament & l’état de santé propre à
chaque homme en particulier.

SECTION CINQUIÈME.
De la Santé & de la Nature humaine.

[Seite 29]

53. Les solides, les fluides & les for-
ces vitales agissent & réagissent perpétuelle-
ment les uns contre les autres dans le corps
humain vivant. Les fluides agissent en sti-
mulant les solides; ceux-ci, en vertu de la
force vitale dont ils sont doués, ressentent
cette action, & réagissent contre elle. Ces
alternatives d’action & de réaction, ces
mouvemens opposés se balancent dans un
homme sain, & se maintiennent dans un
état d’equilibre précis.

54. Il y a de plus entre nos différentes
parties, quelle que soit leur distance res-
pective; un accord, un consentement trop
admirable, pour n’en pas rechercher les cau-
ses(1).

L’une remonte aux nerfs: c’est au moyen
de leurs étonnantes anostomoses, de l’en-
trelacement qui constitue leurs plexus &
leurs ganglions, que l’impulsion des divers
[Seite 30] stimulus, propagée jusqu’au sensorium, vient
de-là réagir contre les organes les plus éloi-
gnés. Une autre se trouve dans la distri-
bution des vaisseaux sanguins & lymphati-
ques. Une troisième naît de la similitude des
parties, & c’est principalement de celle-
ci que leur sympathie dépend. Enfin, il est
évident que le tissu cellulaire ne peut unir
toutes les parties de notre corps, sans ai-
der puissamment leur commerce de rela-
tions.

55. Ici se rapporte encore un grand
mystère de la nature; l’union de l’ame avec
le corps, & l’immense pouvoir qui soumet
l’un à l’autre. Nous proposant d’en traiter
ailleurs, nous nous contenterons mainte-
nant de faire observer que ce n’est pas
seulement la volonté qui exerce un empire
absolu sur la plupart des muscles, qu’il
est aussi d’autres puissances très-distinctes
d’elle, auxquelles le corps est subordonné.
Tel l’amour, tels plusieurs sentimens innés,
aveugles & purement animaux comme lui.

Notre corps n’est pas moins asservi par
les sens internes, par l’imagination sur-tout,
& les vives passions qu’elle allume; mais
en le dominant, ils établissent une corres-
pondance soutenue entre ses affections or-
ganiques & les facultés intellectuelles les
plus sublimes(1).

[Seite 31]

56. De l’accord qui règne entre les so-
lides, les fluides & les forces vitales; de la
sympathie qui rapproche les nombreuses
divisions dont nous sommes composés; en-
fin, de l’union étroite du corps avec l’ame,
résultent la vie & la santé; deux attributs
dont les degrés de latitude sont multipliés
& diversifiés à l’infini.

57. Les différens degrés de la vie sont
placés entre deux extrêmes, dont l’un est
son maximum, & l’autre son minimum. Nous
appelons le maximum de la vie, cet état de
vigueur & de force, cet état vraiment ath-
létique, qui réunit à la fleur de l’âge le
libre exercice de toutes les fonctions. Les
Grecs l’exprimoient par ce mot ακμην. Son
minimum, au contraire, suppose, non un
[Seite 32] état où les fonctions soient empêchées, mais
où, à raison de certaines circonstances na-
turelles, elles s’exercent beaucoup plus len-
tement. Ainsi, la vie du foetus dans le sein
de sa mère est d’autant moins active, qu’il
est dans un âge plus tendre & touche de
plus près à son origine. Ainsi, en général,
la vie qui se soutient durant le sommeil &
la caducité de la vieillesse, est bien inférieure
à celle dont la veille & l’âge viril font
jouir.

58. La santé admet autant de variétés
que la vie, ou pour mieux dire, chaque indi-
vidu a la sienne propre(1); & ceux que
nous estimons être parvenus à son plus haut
point, ne laissent pas de différer entr’eux
sous ce rapport. Ces différences, soit qu’el-
les naissent de la qualité du sang, soit
qu’elles résultent de l’état du ton & des au-
tres forces vitales, nous expliquent pour-
quoi un même stimulus qui agit sur eux, les
affecte si diversement.

Il est peut-être aussi une idiosyncrasie pro-
pre à chaque sujet, fort difficile à recon-
noître, qu’il tient de l’habitude, & qui le
porte ou à éloigner de lui certaines choses
d’ailleurs non nuisibles, ou à en désirer
d’autres qui ne sont pas à son usage.

59. De là nous paroissent découler la
[Seite 33] nature & la diversité des tempéramens sur
lesquels on a tant écrit. Dépendans de la
combinaison des parties élémentaires du
sang, de la vigueur des forces vitales, de
l’influence réciproque de l’ame sur le corps
& du corps sur l’ame, de toutes ces circons-
tances qui varient dans chaque individu; il
n’est pas étonnant de retrouver en chacun
d’eux, une manière propre & plus ou
moins parfaite de sentir & de se mouvoir.

60. La variété des tempéramens est in-
calculable, & il sera toujours impossible
de leur assigner des classes précises. Cepen-
dant, pour les rassembler sous un point de
vue facile à saisir, nous adopterons la di-
vision reçue qui les réduit à quatre: savoir,
le phlegmatique, le sanguin, le bilieux &
le mélancolique(1).

61. Quoique Galien ait établi cette divi-
[Seite 34] sion sur un faux principe, c’est-à-dire
sur un état de disproportion entre les par-
ties constituantes du sang; il n’en est pas
moins, vrai qu’elle a été puisée dans la
nature, & qu’elle, est parfaitement accom-
modée aux différences que l’âge introduit
dans les tempéramens de tous les hommes.
Le tempérament phlegmatique appartient à
l’enfance; le sanguin, à l’adolescence; le
bilieux, à la virilité; & le mélancolique à
la vieillesse.

Ils sont susceptibles d’autres variétés
bien plus nombreuses encore: celles-ci nais-
sent de leur combinaison mutuelle, & sont
en effet si multipliées, qu’elles épuiseroient
toutes les divisions & sous-divisions pos-
sibles.

62. L’ensemble des lois qui régissent le
corps humain, & des facultés qui rendent
ses organes, habiles à exercer leurs fonc-
tions durant tout le cours de la vie, est ce
qu’on appelle la nature humaine: c’est parce
qu’elles sont l’objet de la science dont nous
traitons, qu’on a donné à celle-ci le nom
de physiologie.

63. On distingue quatre classes de fonc-
tions.
Si cette méthode n’est pas la plus
exacte, elle est la plus naturelle & la plus
facile à retenir. 1°. Les fonctions vitales,
ainsi appelées, parce qu’elles sont si essen-
tielles à la vie, que leur interruption seule
la seroit cesser. Telles sont la circulation du
sang, & la respiration, dans un individu
[Seite 35] qui a vu le jour. 2°. Les fonctions anima-
les,
ou celles qui distinguent les animaux
de tous les corps organisés appartenans à
un autre règne. Telles sont dans l’homme,
l’union qui existe entre son corps & son
ame, & la faculté de sentir & de se mou-
voir dont il est doué. 3°. Les fonctions
naturelles dont l’exercice a pour objet la
conservation & l’accroissement du corps.
4°. Enfin, les fonctions génératives qui ont
rapport à la propagation de l’espèce.

Nous allons nous occuper de chacune
d’elles séparément. Commençons par les
fonctions vitales.

SECTION SIXIÈME.
Du Mouvement du sang en général.



64. Nous avons vu que le sang for-
moit les principales parties du corps, &
alimentoit les autres. De-là ne devons-nous
pas conclure qu’il se répand & se distribue
à tous les points (un très petit nombre ex-
cepté) de sa profondeur & de sa circonfé-
rence? Nous sommes convaincus que rel est
en effet l’ordre de sa distribution, par les
injections fines qui ont été poussées dans
ses vaisseaux, & par une expérience jour-
[Seite 36] nalière, qui atteste qu’on ne peut presqu’au-
cune part entamer sa continuité, même
avec la pointe d’une aiguille, sans faire
couler du sang.

65. Les anciens pensoient que, contenu
dans des vaisseaux de même ordre, il alloit
& venoit, ainsi qu’on nous représente l’Eu-
ripe rouler vaguement ses flots en sens
opposés. Nous savons aujourd’hui qu’il cir-
cule, & que dans son cours il décrit un
cercle, qui le transmet par les artères, du
coeur à toutes les parties du corps; & le
ramène par ses veines, des différentes par-
ties du corps au coeur.

66. C’est à l’immortel Harvée que nous
devons cette précieuse découverte. Quel-
ques auteurs paroissoient l’avoir soupçon-
née avant lui(1); mais le premier il la
[Seite 37] développa clairement dans l’ouvrage qu’il
publia en 1628(1).

Les progrès du temps, l’inspection faite
sur des animaux vivans, avec le micros-
cope(2), la direction que suivent les
liqueurs injectées dans des vaisseaux arté-
riels, cette sublime expérience de la trans-
fusion du sang des vaisseaux d’un animal
dans ceux d’un autre, tous deux vivans,
& plusieurs essais analogues, ne laissent
aucun doute sur cette importante vérité(3).

67. Il n’est pas aussi facile de démontrer
la vîtesse avec laquelle le sang circule dans
un homme sain. Outre qu’elle varie d’homme
à homme, elle est plus ou moins accélérée
selon l’âge, & les parties qu’on examine.
Il paroît seulement que le sang veineux,
& celui que renferment les petits vaisseaux,
[Seite 38] coule plus lentement que le sang artériel
& celui que contiennent les principaux
troncs. Mais les anciens physiologistes ont
beaucoup trop élevé cette différence.

Au reste, on estime communément la
rapidité de la circulation du sang dans l’aorte,
telle, qu’à chaque battement, il parcourt
environ huit pouces, ce qui donne à peu
près cinquante pieds par minute.

68. On a prétendu que les globules du
cruor rouloient sur eux mêmes, & avoient
un mouvement plus rapide, que les autres
parties constituantes du sang. Je ne sais si
cette assertion est fondée sur quelque expé-
rience, ou si elle a été seulement déduite des
lois connues de l’hydraulique; quoi qu’il en
soit, ce seroit à grand tort qu’on auroit ap-
pliqué à la circulation du sang, c’est-à-dire,
au mouvement d’une humeur vitale dans
les canaux animés d’un corps vivant, des
lois purement mécaniques en vertu des-
quelles l’eau est chassée dans des machines.
D’ailleurs, il ne m’a jamais été possible de
saisir cet aperçu dans la marche des vais-
seaux sanguins.

69. Je penche plus à croire qu’ils sont
entraînés par le cours des autres parties du
sang, dans lesquelles ils flottent, plutôt
qu’ils ne roulent sur eux-mêmes.

Outre le mouvement progressif dont nous
parlons, on attribue au sang un mouvement
intrinsèque: mais celui ci est bien moins dé-
montré, Tout ce que j’ai pu recueillir des
[Seite 39] recherches que j’ai faites sur la marche de
ce liquide, c’est que ses élémens sont diver-
sement mus, selon les anastomoses, les
divisions & les différentes directions qu’af-
fectent ses vaisseaux.

70. Voilà ce que nous avions à dire sur
le mouvement du sang en général: avant
de le considérer d’une manière plus particu-
lière, il est à propos d’examiner les vaisseaux
dans lesquels il est contenu, & la nature
des forces qui rendent ces vaisseaux propres
à le recevoir ou à le chasser.

SECTION SEPTIÈME.
Des Artères.


71. Les artères sont des vaisseaux qui
portent le sang, du coeur à toutes les autres
parties du corps(1).

Elles ont en général un diamètre moins
grand que les veines; mais leur texture est
plus solide, plus compacte, plus élastique,
& comme le démontrent les expériences de
Wintringham, d’une consistance extrême-
ment forte.

[Seite 40]

72. Elles sont composes de trois cou-
ches ou tuniques membraneuses(1).

Leur tunique externe(2), dénommée
celluleuse par Haller, nerveuse par Albi-
nus,
cartilagineuse par Vesale, par d’autres
tendineuse, &c. n’est réellement qu’un tissu
cellulaire très-lâche au dehors, mais de plus
en plus dense, à mesure qu’on l’examine plus
profondément. Un grand nombre de petits
vaisseaux sanguins serpentent dans son épais-
seur(3), & c’est à lui sur-tout, que les
artères doivent leur solidité & leur élasticité.

Leur tunique moyenne est un composé
de fibres transversalement demi-circulaires,
& d’une substance assez semblable à celle
des muscles: delà vient qu’on l’a appelée tu-
[Seite 41] nique musculeuse. C’est principalement dans
celle-ci que paroît résider la force vitale des
artères.

Enfin, leur dernière tunique, celle qui
revêt leur intérieur, est une membrane dont
la superficie est extrêmement lisse & polie.
Elle est assez apparente dans les troncs &
leurs principales branches, mais il est de pe-
tites ramifications dans lesquelles on la dis-
tingue à peine.

73. Toutes les artères partent ou de l’ar-
tère pulmonaire, qui sort du ventricule
droit, & va se distribuer aux poumons;
ou de l’artère aorte, qui naît du ventricule
gauche, & s’étend à tout le reste du corps.
Ces deux troncs se divisent en rameaux, &
ceux-ci en ramifications.

74. C’est une opinion assez généralement
reçue, & qu’on applique à tout le systême
sanguin, que l’ensemble des rameaux offre
une plus grande capacité que le tronc qui
les a fournis. Nous ne l’adoptons point,
d’abord, parce qu’on lui donne trop de
latitude; mais, de plus, parce que nous
craignons que ceux qui l’ont émise, n’aient
confondu les dimensions du diamètre des
vaisseaux avec celles de leur circonférence.
Je les ai fréquemment observées ces dimen-
sions, non sur des vaisseaux remplis de cire,
quoi de plus propre à faire illusion? mais
sur les vaisseaux intacts de cadavres frais,
sur l’artère innommée & ses branches caro-
tidienne & sous-clavière droites, sur l’ar-
[Seite 42] tère brachiale & ses divisions en cubitale
& radiale; j’ai constamment trouvé que,
des diamètres réunis du tronc & des ra-
meaux, résultoit un triangle rectangle, dont
le quarré de l’hypothénuse (selon le théo-
rème pythagoricien si connu) étoit égal à
la somme des quarrés de la base & du som-
met(1).

Haller avoue que les troncs des petites
artères ont plus de capacité que leurs rami-
fications. N’est-ce pas accorder que le calcul
qui donne si généralement plus d’ampleur
aux rameaux artériels pris ensemble, qu’à
leurs troncs, n’est, tout au plus, applicable
qu’à un petit nombre de vaisseaux?

75. C’est encore une opinion générale-
ment reçue, que les troncs & leurs divisions
ont une figure conique, de telle sorte, que leur
calibre se resserre à mesure qu’ils s’éloignent
du coeur, & se dilate en s’en rapprochant.
Cette opinion n’est pas plus fondée que la
précédente; elle est même démentie par un
examen attentif, qui démontre toujours
les vaisseaux comme une suite de cylindres
parfaits, qui en découvre, au contraire,
quelques-uns dont la capacité augmente en
raison de leur éloignement du coeur. Tels
sont les mammaires internes, la crosse de
l’aorte, &, en général, toutes les grandes
artères avant de fournir quelques rameaux.

[Seite 43]

76. Il est impossible de soumettre à une
division exacte le nombre toujours croissant
des rameaux & des ramifications que distri-
bue sur sa route un tronc artériel. Il suffit,
pour s’en convaincre, de considérer l’éton-
nante variété qu’offrent, à cet égard, les
différentes parties du corps, & sur-tout
les viscères. D’ailleurs, les artères n’arri-
vent jamais à leurs dernières extrémités par
une distribution égale; elle est tantôt plus,
tantôt moins nombreuse.

Delà, les contradictions qu’on reproche
avec raison aux auteurs qui ont voulu es-
sayer de semblables calculs. Keil, par exem-
ple, compte cinquante divisions; lorsqu’ Hal-
ler
n’en reconnoît que vingt.

77. Après avoir fourni toutes leurs dis-
tributions, & leurs nombreuses anastomo-
ses, qui naissent de rameaux appartenans à
différens troncs, les artères arrivent à leur
dernière destination; & là, recourbant leurs
extrémités, ou se réfléchissant sur elles-mê-
mes, elles deviennent l’origine des veines,
c’est-a-dire, de ces canaux par lesquels le
sang qui est parvenu jusqu’à eux avec tou-
tes les propriétés d’un sang artériel, re-
tourne au coeur converti en sang veineux.

78. Quoique la continuité des artères &
des veines soit en quelque sorte sensible à
l’oeil dans plusieurs parties du corps; il est
douteux si le sang passe immédiatement dans
toutes, de l’un de ces vaisseaux dans l’au-
tre, ou s’il traverse au moins dans quel-
[Seite 44] ques unes, une espèce de parenchyme inter-
posé entre leurs extrémités. Il est assurément
des phénomènes, tels que l’érection de cer-
taines parties, & la rougeur dont d’autres
se colorent, qui semblent favoriser cette
dernière opinion.

79. L’anatomie nous découvre deux nou-
veaux ordres de petits vaisseaux, dont l’o-
rigine remonte aux extrémités des artères:
ce sont les vaisseaux séreux, d’une étroitesse
telle, qu’ils ne peuvent recevoir dans un
homme sain aucun globule de sang, mais
seulement la sérosité de ce fluide; & les
vaisseaux sécrétoires, destinés à séparer cer-
taines humeurs, de la masse du sang artériel.

80. Par vaisseaux séreux, nous n’enten-
dons ni les vaisseaux jaunes & blancs qu’a
imaginés Boerhaave, ni ceux qu’a créés Leu-
wenhoek
pour recevoir ses six espèces de glo-
bules, ni enfin ceux que Wieussens & Ferrein
ont prétendu constituer la plus grande par-
tie des viscères, & auxquels ils ont donné
le nom de nèvro-lymphatiques. Si ce ne sont
pas là des chimères, ce sont au moins des
hypothèses bien mal étayées.

Nous parlons uniquement de ces vaisseaux
blancs, qu’un état inflammatoire grave,
ou une injection très-fine, peuvent, seuls
rendre sensibles à la vue. Tels sont ceux de
la cornée, qu’on ne peut injecter que dans
des sujets affectés avant leur mort d’une
violente ophtalmie.

81. Les vaisseaux sécrétoires sont bien
[Seite 45] différens de ceux-ci, & n’appartiennent
qu’aux organes sécréteurs, ou aux glandes
conglomérées. On peut également les décou-
vrir par une injection délicate. Ainsi, celle
que l’on pousse dans l’artère de la parotide,
ressort quelquefois par le canal de Stenon.
Mais ailleurs nous en traiterons ex-professo.

SECTION HUITIÈME.
Des Veines.


82. Il faut que le sang répandu dans tout
le corps par les artères, revienne au coeur
par les veines.

Or, ces derniers vaisseaux diffèrent des
précédens, autant par leur structure que
par leurs usages; il n’en est qu’un très-
petit nombre, dans lesquels cette différence
n’est pas aussi sensible.

83. Ils ont (la veine pulmonaire ex-
ceptée) un diamètre plus grand que les
artères(1). Leurs divisions sont plus nom-
breuses & plus vagues; leur texture est
[Seite 46] plus molle & moins élastique; ils offrent
cependant une ténacité & une expansibilité
incroyables.

84. Leurs tuniques assez minces pour
transmetrre au dehors la couleur du sang
qu’elles contiennent, se réduisent à deux(1),
dont l’une externe & celluleuse, ressemble
à la couche nerveuse des artères; & l’autre
interne & très-lisse, à celle qui revêt l’in-
térieur de ces mêmes vaisseaux. On ne
retrouve la tunique musculaire que dans les
troncs les plus voisins du coeur.

85. La membrane interne dans le très-
grand nombre des grosses veines, dans tou-
tes celles qui ont plus d’une ligne de dia-
mètre, se reploie çà & là sur elle-même en
forme de valvules très-souples, d’une
structure telle qu’elles figurent un sac dont
l’entrée s’ouvriroit vers le coeur, & le fond
regarderoit l’origine du vaisseau. Tantôt
elles sont solitaires, tantôt elles se réunis-
sent au nombre de deux ou trois; il est des
parties où elles manquent absolument: c’est
ainsi qu’on n’en trouve ni dans le cerveau,
ni dans les poumons, ni dans tout le systême
de la veine porte, &c.

86. Les ramifications des vaines, qu’on
[Seite 47] appelleroit plus exactement leurs radicules,
viennent aboutir à des rameaux qui se con-
vertissent en six principaux troncs, savoir:
les deux veines caves, l’une supérieure,
l’autre inférieure; & les quatre troncs de
la veine pulmonaire. La seule veine-porte
a cela de particulier, qu’aussitôt après avoir
pénétré l’intérieur du soie, elle y remplit
les fonctions d’une artère, s’y distribue
comme elle en rameaux, dont les dernières
divisions se continuent avec les radicules
de la veine-cave inférieure, & se réu-
nissent en un nouveau tronc.

87. Ce que nous avons dit de la figure
conique des vaisseaux artériels, de la ca-
pacité relative de leurs branches & de leurs
troncs, peut, toutes choses égales d’ailleurs,
être appliqué aux veines. On peut aussi ap-
pliquer à l’origine de celles ci, ce que nous
avons dit de la terminaison des premières.
Enfin, on trouve également parmi elles
quelques exemples de vaisseaux fort dis-
tans du coeur, & néanmoins plus dilatés.
La poplitée en fournit un à son passage
sur les condyles du fémur.

SECTION NEUVIÈME.
Du Coeur.

[Seite 48]

88. Nous avons vu que les artères &
les veines communiquoient entr’elles, &
par leurs extrémités mutuelles, & par le
coeur, où aboutissent les principaux troncs
de tout le systême sanguin.

89. Or, le coeur(1) peut être considéré
comme le premier agent & le premier
moteur de tout notre être matériel: c’est
par lui que s’exécute la première des fonc-
tions vitales, ce mouvement circulaire du
sang, qui a lieu sans interruption, depuis
environ la quatrième semaine après la con-
ception, jusqu’au dernier moment de la vie.

90. Il reçoit & chasse alternativement le
sang dans l’ordre que nous allons décrire;
il le recueille de toutes les parties du corps
par les veines caves supérieure & infé-
rieure, & même de sa propre substance
[Seite 49] par l’orifice commun des veines coronai-
res(1), dans son sinus antérieur & l’oreil-
lette qui lui est annexée; de-là il le conduit
dans celui de ses ventricules qui est situé au
dessous, du même côté.

91. De ce ventricule antérieur que les
anciens appeloient droit, parce qu’ils n’a-
voient examiné la position du coeur que
dans les animaux, le sang se porte dans les
poumons par l’artère pulmonaire, nommée
autrefois veine artérielle; il en revient par
les quatre veines pulmonaires, auxquelles
on avoit également donné le nom d’artères
veineuses, & se jette dans leur sinus com-
mun & dans l’oreillette qui lui est unic.
On a fait subir à cette oreillette le même
changement de dénomination, qu’au ventri-
cule au dessus duquel elle est placée.

92. Il passe de cette oreillette dans le
ventricule postérieur; mais bientôt il en
est chassé par l’artère aorte, qui le distribue
à tout le reste du systême artériel, & par
les artères coronaires à la propre substance
du coeur(2).

93. Parvenu aux dernières divisions ar-
térielles, il s’introduit dans les radicules
[Seite 50] du systême veineux, qui le portent dans
les veines caves. Il passe aussi des ar-
tères coronaires dans les veines de même
nom, & vient recommencer la marche cir-
culaire que nous lui avons déjà tracée.

94. Les principales ouvertures du coeur,
celles qui le sont communiquer avec ses
sinus, & celles qui s’ouvrent dans les deux
grands troncs artériels, sont intérieure-
ment cernées par des valvules, dont l’usage
est de favoriser le cours régulier du sang
dans ses cavités, & de s’opposer à son
retour contre nature.

95. Tel est l’office de l’anneau ou du
tendon veineux, qui sépare de son sinus le
ventricule antérieur. On le voit descendre
dans cette cavité, & là se diviser en trois
valvules presque tendineuses(1), que les
anciens ont appelées valvules triglochines
ou triscupides, parce qu’ils comptoient trois
pointes à chacune. Elles adhérent à des
masses charnues, connues sous le nom de
papilles musculaires.

96. L’anneau qui sépare le ventricule
postérieur de son sinus, se divise également
en deux valvules(2), auxquelles leur con-
figuration a fait donner le nom de valvules
mitrales.

[Seite 51]

97. On voit enfin s’attacher à l’entour
des orifices, soit de l’artère pulmonaire(1),
soit de l’artère aorte(2), trois autres val-
vules sémilunaires ou sigmoïdes. Elles sont
beaucoup plus petites que les précédentes;
mais elles ont des fibres charnues, & une
forme bien plus élégante.

98. Il est facile de concevoir comment
ces différentes valvules peuvent s’opposer
à ce que le sang soit reporté par un mou-
vement rétrograde, dans la veine cave d’où
il sort: assez souples pour se replier sur
elles-mêmes, & lui ouvrir une voie lorsqu’il
arrive, elles se développent & se tendent
fortement contre son retour.

99. La valvule d’Eustache qui se trouve
dans le foetus à l’orifice de la veine cave in-
férieure, s’efface peu à peu & plus ou
moins quelque temps après la naissance; elle
cesse enfin de remplir la fonction qui lui
étoit primitivement assignée. Il est vrai
qu’alors elle la rempliroit inutilement, parce
que la voie ouverte à l’entrée du sang dans
les poumons, est fermée à son retour par
les valvules sémilunaires, & que ses flots
chassés avec force par derrière, ne peuvent
que rouler sur ceux qui les précèdent.

[Seite 52]

S’il arrive cependant, qu’un obstacle
s’oppose à son passage du ventricule droit
dans les poumons, il revient sur les vei-
nes caves, s’accumule dans la supérieure,
& ne tarde pas à y développer un battement
non naturel.

100. On a mis en question, si les val-
vules sémilunaires permettent aux ventri-
cules d’exprimer toute la quantité du sang
qu’ils contiennent, ou si leur expansion en
retient une partie(1).

Des observations faites sur des grenouil-
les & sur des poussins, attestent que le
coeur se vide parfaitement dans ces ani-
maux. Mais est ce-là ce qui se passe dans
l’homme sain? Nous l’ignorons, & peut-
être serons-nous plus portés à croire le
contraire, si nous ne considérons que la
structure anatomique de ces valvules, ou
le mécanisme de leurs fonctions, tels que
la dissection & les physiologistes nous les
représentent.

101. La texture du coeur lui est absolu-
ment propre: elle est à la vérité charnue,
mais d’une densité & d’un aspect qu’on ne
[Seite 53] retrouve dans aucun autre muscle. Il est
composé de plusieurs faisceaux de fibres,
qui se distribuent en rameaux très-nom-
breux, plus ou moins obliques, & affec-
tant des directions tortueuses qu’il est im-
possible de rendre. L’adossement intime de
quelques-unes d’entr’elles, forme la cloison
qui sépare les deux ventricules. Toutes
sont fixées à la base du coeur par des filets
cartilagineux, qui les circonscrivent quatre
à quatre, & qui, en les assujettissant, les dis-
tinguent de celles des sinus. C’est sur-tout
aux recherches de Wolff, que nous devons
ces connoissances(1).

102. Des divisions nerveuses très-molles
pénètrent & parcourent en tout sens ces fi-
bres charnues; mais elles sont couvertes
par un appareil si considérable, de ramifi-
cations artérielles & veineuses nées des
coronaires(2), que leur tissu entier n’a paru
être à Ruisch, qu’un composé de vaisseaux
de ce genre.

103. C’est à sa texture & à la disposi-
tion de ses parties, que le coeur doit l’éga-
lité & la perpétuation de ses mouvemens;
ses oreillettes alternativement avec ses ven-
tricules, ou se resserrent par l’effet de la
[Seite 54] systole, ou se relâchent par celui de la diastole.

104. Cette alternative de contractions
& de dilatations, se soutient dans un tel
ordre, que toutes les fois que les oreillet-
tes se resserrent pour exprimer le sang qui
y a été envoyé par les poumons & les
veines caves, les ventricules s’ouvrent pour
le recevoir. Quand ils sont remplis, ils se
contractent à leur tour pour se décharger
dans leurs troncs artériels; mais en même
temps les oreillettes s’épanouissent, pour
recevoir le sang veineux qui continue à
les aborder.

105. La systole des ventricules que les
battemens du coeur attestent s’achever dans
l’espace d’une tierce, s’opère sur-tout par
le rapprochement de leurs parties latérales
externes, de la cloison moyenne qui les sé-
pare. Cette contraction paroît plus que
suffisante, vu leur figure conique, pour
les vider parfaitement l’un & l’autre.

Cependant le coeur ne se resserre-t-il
que dans ce sens? Son sommet ne se
rapproche-t-il pas aussi de sa base,
comme on l’a plusieurs fois observé dans
des animaux à sang chaud ou froid(1),
[Seite 55] & même dans l’homme vivant(1)?

Il est une expérience triviale qui semble
prouver le contraire. C’est celle par la-
quelle on reconnoît à chaque mouvement
de systole, la pointe de cet organe s’éle-
ver, & heurter les côtes sous la mamelle
gauche; alors il paroît sensiblement s’alon-
ger. Mais qu’est-ce que cette apparence,
& que prouve le mode de ces battemens?
si on considère qu’ils sont l’unique effet
de l’impétuosité du sang, qui, en se préci-
pitant dans les oreillettes & en s’échappant
des ventricules, doit nécessairement soule-
ver la masse du coeur, & la porter contre
cette région costale.

106. La force par laquelle le sang est
chassé dans les vaisseaux artériels, est si
considérable, que chaque systole du coeur
fait une impression sensible sur toutes les
artères, dont le diamètre excède 1/6 d’une
ligne; pourvu toutefois que ces vaisseaux
puissent ou être soumis au tact, ou, ce
qui a lieu dans l’oeil & dans l’oreille in-
terne, faire sentir leurs battemens de toute
[Seite 56] autre manière. On appelle ces battemens la
diastole des artères.

Nous examinerons cependant plus bas,
s’ils ne doivent point être rapportés à une
action qui leur soit propre.

107. Quoi qu’il en soit, l’expérience
démontre que le mouvement des artères
répond exactement à celui du coeur dans
un homme sain, & que leurs oscillations
sont parfaitement synchrones. On a même
observé que dans les cas d’intermittence du
pouls, c’est en même temps que le coeur
& les artères cessent & renouvellent leurs
battemens.

108. Les variétés du pouls sont innom-
brables, à raison sur-tout de la diversité des
âges, & des autres circonstances qui à cha-
que âge déterminent l’état de santé propre
à chaque individu. J’exposerai ici le résultat
de mes observations dans le climat que
j’habite(1).

Chez un enfant nouveau né, c’est-à-
dire, durant les premiers jours qui suivent
sa naissance, il bat environ 140 fois dans
[Seite 57] l’espace d’une minute. Vers la fin de sa pre-
mière année, environ 124 fois. Dans le
cours de la seconde, environ 100 fois.
Durant la troisième, &c. environ 96 fois.
A l’époque où les dents de lait ont coutume
de tomber, environ 86 fois. A l’âge de
puberté, environ 80 fois. A l’âge viril, en-
viron 75 fois. Lorsqu’il a atteint sa soixan-
tième année, environ 60 fois. A l’égard de
ceux qui étoient plus avancés en âge, j’en
ai à peine trouvé deux qui, parvenus à un
même degré de vieillesse, eussent un pouls
égal.

109. Le pouls est en général plus fré-
quent chez les femmes que chez les hom-
mes; il l’est moins chez les sujets d’une
haute taille que chez ceux de basse stature:
je m’en suis assuré en l’examinant sur des
géans & sur des nains.

110. Le pouls varie encore selon l’usage
des choses qu’on appelle communément
non-naturelles: il est plus rare dans les
pays froids: aussi, chez les Groënlandais,
d’ailleurs bien portans, on ne compte que
30 ou 40 battemens par minute(1). Il
[Seite 58] devient plus accéléré après le repas, le coït,
des veilles, un exercice du corps fatigant,
des vives passions de l’ame, &c.

111. Tel est le résultat de nos observa-
tions sur le pouls considéré dans l’état de
santé. Il nous a paru beaucoup plus naturel
de les placer dans cet article où nous trai-
tons du coeur, que dans celui où nous nous
sommes occupés des artères. A la vérité,
c’est dans les artères qu’on a coutume de
l’examiner, mais c’est du coeur qu’il tire son
origine.

Le coeur bat de cette sorte sans aucune
interruption, jusqu’au dernier soupir; &
alors même toutes ses parties ne meurent
pas à la fois. Déjà le côté gauche a fini de
se mouvoir, quand le mouvement se con-
tinue encore dans le ventricule & l’oreillette
droite(1).

[Seite 59]

La raison de cette différence est, qu’après
l’émission du dernier soupir, le sang qui re-
vient par les veines caves, n’a plus d’accès
dans les poumons affaissés; cependant celui
dont ces organes se sont un peu auparavant
déchargés dans le ventricule gauche, en a
été chassé par l’aorte; déjà il a atteint le
sang veineux, & presse son retour; le sang
veineux fuyant devant lui, se précipite dans
l’oreillette droite, il l’heurte avec violence,
& c’est contre ce choc que le côté droit
du coeur lutte quelque temps après la mort
du côté gauche.

112. Cette accumulation du sang dans le
ventricule droit au moment de l’agonie,
donne la raison du vide qu’on observe après
la mort dans les principales artères(1).

[Seite 60]

Weiss &, après lui, Sabbatier(1), rap-
portent à la même cause l’inégale capacité
des ventricules qui s’observe dans toutes les
ouvertures de cadavres adultes.

113. Les mouvemens du coeur sont bor-
nés par le péricarde qui l’embrasse dans tout
son contour, mais assez largement pour ne
le pas gêner(2). On a donné le nom de
péricarde à un sac membraneux, ample, &
d’une figure analogue à celle du coeur(3).
Quelque foible que son tissu paroisse, il
l’emporte de beaucoup par sa solidité, sur
toutes les autres membranes.

Ce qui prouve son importance, c’est
qu’on le trouve dans toutes les classes d’ani-
maux à sang rouge(4). Son existence est
aussi constante que celle du coeur. A peine
[Seite 61] est-il un exemple de coeur humain entiè-
rement privé de cette enveloppe; nous ne
connoissons que celui publié par Dinkler(1).

114. Il est intérieurement humecté par
une vapeur séreuse(2) qu’exhalent les vais-
seaux artériels du coeur, & qui ne paroît
pas différer de celle dont les propres cavités
de cet organe sont enduites. L’une & l’autre
conservent leur caractère séreux dans l’état
de santé; mais un accident inflammatoire
peut les épaissir, & les convertir en une lym-
phe, qui tantôt couvre la surface externe
du coeur d’une infinité de petits filets com-
munément appelés poils, tantôt la fait adhé-
rer avec le péricarde, ou enfin, développe
en eux de vrais polypes.

SECTION DIXIÈME.
Des Forces qui déterminent la circula-
tion du sang.

[Seite 62]

115. Jusqu’a présent nous ne nous
sommes occupés que des organes dans les-
quels le sang est contenu: recherchons,
maintenant à quelles forces doit être rap-
porté son mouvement circulaire. Nous étu-
dierons d’abord celles qui appartiennent au
coeur, ne doutant pas que ce ne soient les
principales, ou celles qui influent le plus
sur le cours du sang; nous passerons ensuite
à celles qui aident l’action de cet organe,
& qu’on dénomme pour cette raison forces
auxiliaires.

116. Il est évident qu’on ne peut sou-
mettre les premières à un calcul exact. Com-
ment déterminer, en effet, & d’une ma-
nière précise, le volume du filet que le coeur
lance à chaque battement, l’étendue que ce
filet parcourt, ou le degré de vîtesse avec
laquelle il circule ensuite? On peut bien
moins encore estimer la force des obstacles
qui, luttant contre le coeur, affoiblissent né-
cessairement son action.

117. Cependant, on les évalue à peu
près, en comparant les résultats que donnent
les calculs les plus probables. Ainsi, en sup-
[Seite 63] posant que le terme moyen du poids de la
masse entière du sang est 33 livres, ou 396
onces; que le pouls bat 75 fois par minute,
ou 4500 fois par heure; & que le ventri-
cule gauche chasse 2 onces de sang à chaque
systole; il s’ensuit que la totalité du sang
passe dans le coeur environ 22 fois & trois-
quarts, toutes les heures. On pourra aussi
estimer la force avec laquelle le sang parvenu
au coeur en est chassé, en considérant avec
quelle impétuosité, & à quelle distance il
jaillit par l’ouverture d’un vaisseau principal
& voisin de cet organe. Je l’ai vu s’élancer
de la carotide d’un sujet adulte, pendant les
premieres systoles, à plus de 5 pieds de
distance(1).

118. Si nous recherchons, maintenant,
d’où vient au coeur une force aussi considé-
[Seite 64] rable & aussi soutenue, nous verrons que
c’est principalement de son irritabilité. Nous
savons déjà que par la durée de cette force
il l’emporte infiniment sur toutes les autres
parties musculaires(1).

Mais quelle est la cause dont l’influence
développe cette irritabilité? La fameuse ex-
périence de Haller prouve que c’est l’abord
du sang dans les cavités du coeur, & son
impression sur leurs parois. Il résulte, en
effet, de cette expérience que nous avons
déjà citée, qu’en détournant le sang de l’un
ou de l’autre des côtés du coeur, on excite
& on conserve la faculté de se contracter
ou de se mouvoir à celui seul vers lequel on
le laisse couler.

119. Le sang étant dans des proportions
convenables de qualité & de quantité, son
action sur le coeur, & la réaction du coeur
sur lui, s’effectuent avec tant de régularité
& de précision, qu’un homme même en re-
pos en a à peine le plus léger sentiment. Si,
au contraire, il est ou trop abondant ou
trop rare, ou, si des corps hétérogènes, tels
que des miasmes morbifiques, un air élasti-
que, des substances vénéneuses ont altéré
sa pureté; dès-lors le coeur éprouve une
agitation ou un affoiblissement qui ne lui
[Seite 65] sont pas naturels, l’ordre de ses mouvemens
n’existe plus, & l’exercice entier de ses fonc-
tions est troublé. On observe même que l’in-
sufflation d’une certaine quantité d’air dans
les veines principales d’un animal mort de-
puis peu, paroît ranimer son coeur, ou du
moins l’exciter de nouveau à se mouvoir.

120. Une grande question a été fort agi-
tée, dans ces derniers temps sur-tout, sur
l’irritabilité du coeur. On demandoit si elle
étoit essentielle à sa texture charnue, ou
s’il n’en jouissoit qu’accidentellement, à la
la faveur de quelques-unes des parties qui
entrent dans sa composition. Ainsi, des au-
teurs distingués la rapportent à la sensibilité
des nerfs. Nous discuterons amplement cette
question en traitant de l’irritabilité muscu-
laire. Il nous suffira d’avertir ici que nous
sommes de plus en plus persuadés que l’ir-
ritabilité est une espèce de force vitale, abso-
lument distincte de la force nerveuse(1).
Nous tenons, cependant, pour également
certain que les nerfs ont une très-grande
influence sur les mouvemens du coeur: d’une
part, la disposition de ceux qu’il reçoit, leur
mollesse, leur situation superficielle, & la
distribution de leurs plexus; de l’autre,
les rapports frappans qui se trouvent entre
[Seite 66] les fonctions que remplit le coeur & la plu-
part de celles qu’exécutent les différens or-
ganes du corps humain, nous paroissent le
démontrer. Nous invitons au moins à con-
sidérer quelle étroite sympathie existe dans
un sujet bien disposé entre les mouvemens
de son coeur & les partions de son ame; ou,
en supposant un état de maladie, entre ce
même organe & l’altération des premières
voies.

121. Le coeur trouve encore dans le mé-
canisme de sa structure, un nouveau moyen
d’opérer la circulation du sang. Lorsque ses
cavités, par leur contraction, ont exprimé le
fluide qu’elles contiennent, elles sont vides;
mais les lois de la dérivation abhorrent cet
état de vacuité, elles appellent la colonne
de sang la plus voisine, non celle que le
coeur vient de chasser, des valvules s’oppo-
sent à son retour, mais celle que les troncs
veineux ont recueillie, & qu’ils y précipitent.

122. Quels sont, maintenant, les autres
organes dont le concours aide la circulation
du sang? Il n’est pas vraisemblable que la
nature ait confié à un seul la plus noble de
toutes les fonctions, celle qui intéresse le
plus tous les autres, celle qui dans les ani-
maux sanguins décide irrévocablement de
leur vie ou de leur mort. Non-seulement
cela n’est pas vraisemblable, mais il est cons-
tant qu’elle a établi des forces secondaires
assez puissantes, & pour aider l’action du
coeur, & pour remplacer en quelque sorte
[Seite 67] son défaut. Ce sont elles qui dirigent le cours
du sang dans ces parties que leur éloignement
du coeur dérobe à son influence; ce sont
elles qui animent le systême veineux du foie,
& la circulation qui se fait dans le placenta;
ce sont elles, à bien plus forte raison, qui
vivifient tout dans ces foetus qu’il n’est pas
fort rare de voir naître sans aucune appa-
rence de coeur &c.(1).

123. Ces forces existent principalement
dans les artères; quoique nous ne puissions
pas démontrer leur maniéré d’agir sur le
sang, il n’en est pas moins certain que sa
circulation dépend infiniment d’elles. Cette
vérité est d’ailleurs confirmée par la grande
analogie qu’elle sont avec le coeur: elles ont
comme lui une tunique musculeuse, comme
lui elles sont essentiellement irritables, &
elles sont entourées de réseaux nerveux
d’une délicatesse inexprimable.

124. Personne n’ignore qu’il est également
donné aux artères de faire éprouver des bat-
temens, & des battemens très-forts. Si, en
croisant les extrémités inférieures, on fait
reposer l’artère poplitée de l’une d’elles sur
le genou de l’autre, la pulsation de ce vais-
seau pourra soulever non-seulement le mem-
bre, mais un poids beaucoup plus considé-
rable. De là vient que depuis très-long-
temps on attribue à ces vaisseaux des mou-
[Seite 68] vemens alternatifs de systole & de diastole
qu’on prétend répondre exactement à ceux
du coeur. Ce n’est pas que cette opinion,
quoiqu’elle paroisse fondée sur le témoignage
des sens, soit incontestable; nous regardons,
au contraire, comme fort douteux si le tres-
saillement
qu’un vaisseau artériel fait éprou-
ver au doigt placé sur lui, si ce tressaillement
doit être rapporté à une force qui lui soit
propre, ou à une impulsion communiquée
par le coeur. Il ne répugne pas que son mou-
vement ne soit autre chose que l’effet con-
tinué de la projection du sang dans l’aorte,
& de son choc contre les parois de ce tronc.

Les recherches faites jusqu’à ce jour, sur
des animaux vivans, & à sang chaud, n’ont
pu éclaircir ce doute. Leur dissection a dé-
couvert des vaisseaux artériels considérables,
tantôt mobiles, & tantôt immobiles(1). On
a eu occasion d’observer dans l’homme vi-
vant des troncs voisins de l’aorte & de l’ar-
tère pulmonaire, privés de tout mouvement;
il est vrai que c’étoit là une espèce de mons-
truosité. Enfin, il est des artères que nous
sentons quelquefois battre très-fortement,
& que l’anatomie nous démontre dans un
état d’inertie presque absolu. Telle est cette
portion de la carotide cérébrale, située dans
le canal de l’os pierreux, &c.

125. Tout bien considéré, nous penche-
[Seite 69] rions à croire que les grandes artères ont un
mouvement de diastole, mais qu’elles le doi-
vent à l’impulsion du sang(1), c’est-à-dire,
que le sang, poussé avec force dans elles,
dilate leurs tuniques, qui ne tardent pas à
revenir sur elles-mêmes pour être de nou-
veau dilatées. Nous penserions encore que
c’est à cette même impulsion du sang qu’il
faut attribuer les mouvemens latéraux qu’on
observe quelquefois dans celles qui, affectant
une marche tortueuse, ne sont pas conte-
nues par un tissu cellulaire trop dense. Mais
nous ne croyons point qu’elles aient un mou-
vement de systole
réel, au moins sensible;
c’est-à-dire, qu’elles puissent vraiment res-
serrer leur diamètre au delà de ses dimen-
sions naturelles, tant que le coeur est sain,
ou peut exercer ses fonctions. Elles ne
jouissent probablement de cette faculté,
que lorsque le coeur manque, ou est privé
de la liberté de ses mouvemens, soit par une
ossification contre nature, soit par toute
[Seite 70] autre affection morbifique. Alors elles le
remplacent, & dirigent seules la circulation
du sang.

126. Quelques physiologistes, Willis,
entr’autres, pensant que les forces du coeur
étoient insuffisantes pour conduire le sang
jusqu’à l’extrémité des artères, & à l’ori-
gine des veines, ont cru qu’il leur parve-
noit au moyen d’un mouvement oscillatoire
propre à ces petits vaisseaux(1); & ils se sont
servis avec succès de ce mouvement pour
expliquer la nature de l’inflammation. Quoi-
que l’oeil le mieux armé ne le puisse saisir,
on ne peut nier qu’il est un grand nombre
de phénomènes physiologiques & patholo-
giques qui paroissent le supposer. Tels sont
ceux qui se rapportent à la chaleur animale,
tels également ceux qui accompagnent les
spasmes fébriles.

127. Il nous reste à examiner comment
le sang revient au coeur par toute la portion
des veines qui s’étend depuis un peu au-delà
de leur origine, jusqu’à ce viscère. On voit
de prime-abord qu’elles ont beaucoup moins
de forces réelles que les autres parties du
systême sanguin, & que la circulation du
[Seite 71] sang est principalement soutenue par l’im-
pulsion du sang artériel, & la disposition de
leurs valvules. Il suffit, pour s’assurer de
l’utilité de ces replis membraneux, de con-
sidérer à quel point sont fréquens dans les
vaisseaux du bas-ventre qui en sont dé-
pourvus, les stases & les engorgemens san-
guins.

Mais les troncs veineux ne jouissent-ils
d’aucune force vitale? Si on en juge par
ceux du foie & du placenta, & par les ex-
périences du célèbre Verschuir, Si on a
égard à la couche musculaire qu’ils admet-
tent, il est probable qu’ils les possèdent à
un certain degré.

128. Dans l’exposé que je viens de
faire des forces, à l’aide desquelles s’effec-
tue la circulation du sang, j’aurois pu par-
ler de ce que peuvent sur ce mouvement,
le poids ou l’attraction, ... la respiration ou
l’action musculaire; ... mais on sent que
ces moyens sont trop généraux & trop
éloignés.

SECTION ONZIÈME.
De la Respiration & de son principal
Effet.

[Seite 72]

129. Il est dans le corps humain deux
organes três-rapprochés du coeur, par leur
position & par les fonctions qu’ils remplis-
sent; ce sont les poumons. Composés d’un
parenchyme spongieux, presque spumeux,
& cependant assez tenace, ils sont fort am-
ples dans un sujet qui a vu le jour, mais
si légers proportionnément à leur volume,
qu’ils surnagent à l’eau(1).

130. Ces organes remplissent les deux
cavités de la poitrine: immédiatement enve-
loppés dans la plèvre qui se réfléchit sur
chacun d’eux en forme de sacs(2), ils se
moulent parfaitement, & à la configuration
[Seite 73] de cette membrane, & à celle des autres
parties que renferme également le thorax.

131. Ils tiennent & sont comme sus-
pendus à la trachée-artére, c’est-à-dire, à un
conduit aérien, formé par la réunion de
trois différentes tuniques: une interne,
constamment humectée par une humeur
muqueuse; une moyenne, nerveuse & très-
sensible; une externe, musculeuse. On
trouve sur la partie antérieure de ce con-
duit, une sérié plus ou moins nombreuse
d’arcs cartilagineux, placés les uns au-des-
sus des autres.

132. Dès que la trachée-artère est par-
venue dans l’intérieur de la poitrine, elle se
partage en deux troncs, appelés bronches;
dont les divisions se multiplient, en raison
de la profondeur à laquelle ils s’enfoncent
dans les lobes & les lobules des poumons.
En même temps, ils cessent d’être cartila-
gineux & musculaires, pour se terminer
en cellules, qui destinées à recevoir &
chasser alternativement l’air que nous res-
pirons, composent presque toute la subs-
tance de l’organe pulmonaire.

133. La forme & la grandeur de ces
cellules varie avec chacune d’elles(1). Ce
sont en général des polyèdres, dont on ne
[Seite 74] peut estimer la capacité(1), que par l’effet
de dilatation que produit une inspiration
forte, sur les poumons d’un adulte. On a
trouve qu’elle égaloit à-peu-près l’étendue
de 60 pouces cubes. Combien leur déve-
loppement seroit plus considérable, si on
les souffloit, après les avoir délivrés de
l’obstacle que leur oppose le resserrement
de la poitrine? Mais, ce n’est pas là l’objet
de nos recherches.

134. Il ne faut pas confondre ces cellu-
les aériennes, avec celles du tissu qui les
entoure & les unit, de ce tissu que nous
avons déjà observé être le lien commun de
toutes nos parties. J’ai vérifié la distinction
qui se trouve entr’elles sur des poumons
humains, sains & récens. J’introduisois de
l’air avec précaution, dans un très-petit
rameau bronchique, il en dilatoit toutes
les cellules, sans passer ni dans le tissu cel-
lulaire, ni dans les cellules bronchiques
voisines, à moins que poussé trop violem-
ment, on le forçât à rompre ces vésicules
si délicates, & à se répandre en tout sens
dans toute la substance des poumons.

135. C’est dans ce tissu cellulaire, qui unit
les cellules aériennes, que se distribuent
les nombreuses divisions des vaisseaux
pulmonaires artériels & veineux. Leurs
[Seite 75] ramifications accompagnent celles des
bronches(1), & après s’être multipliées
à l’infini, elles s’anastomosent, & forment,
par leur réunion, un réseau d’une té-
nuité, d’une délicatesse inexprimable. Les
filets de ce réseau pénétrant de toutes
parts le tissu cellulaire, embrassent, dans
leurs tortuosités, chaque vésicule bron-
chique, & rapprochent tellement la masse
de sang qu’ils contiennent, du volume
de l’air inspiré, que Haller estimoit leur
cloison intermédiaire égaler au plus en
épaisseur la millième partie d’un pouce.

136. De même que chaque division des
bronches se termine en un groupe distinct
de cellules aériennes, de même le systême
vasculeux sanguin se distribue en réseaux
dont les filets sont tellement affectés aux
cellules d’un ordre, qu’on n’en voit
presque aucuns s’anastomoser avec ceux
d’un ordre différent; c’est ce que nous
apprennent, si je ne me trompe, les
observations faites avec le microscope
sur des poumons de serpens & de gre-
nouilles vivantes, des injections très-fines
poussées dans des poumons humains, &
les phénomènes pathologiques qu’offrent
les vomiques & plusieurs autres maladies
semblables, propres à ces organes.

137. Il est une autre classe de vaisseaux que
[Seite 76] nous ne devons pas oublier: ce sont les
vaisseaux lymphatiques, qui couvreur de
leurs filets la tunique commune des pou-
mons, & auxquels appartiennent les glandes
conglobées, qu’on a eu grand tort de con-
fondre avec les glandes bronchiques(1).

138. C’est assez avoir parlé de la structure
des poumons; examinons celle de la ca-
vité qui les renferme. La poitrine ou le
thorax est une espèce de cage osseuse &
cartilagineuse, qui, au mérite de la soli-
dité, joint une facilité singulière à se
prêter aux différens mouvemens que l’exer-
cite de la respiration exige(2). Sa mo-
bilité appartient sur-tout aux six dernières
paires des vraies côtes, dont les mouvemens
sont d’autant plus sensibles, qu’elles sont
placées plus inférieurement, ou que leurs
corps & leurs appendices cartilagineux,
forment un arc plus étendu. Ces cartilages
les unissent de chaque côté avec lés bords
du sternum, par une espèce d’amphiar-
throse.

139. Entre les bords des côtes, on remar-
que deux couches de muscles intercostaux,
[Seite 77] qui agissent parfaitement dans le même
sens, quoique leurs fibres marchent dans
line direction contraire.

A la base de cette cage, le diaphragme se dé-
ploie en forme de voute. Ce muscle important,
qui, pour parler le langage de Haller, tient
après le coeur le premier rang entre toutes
les substances charnues, doit sur-tout aux
nerfs phréniques, ainsi que des expériences
faites sur le vif l’avoient démontré à
Galien(1), les mouvemens par lesquels il
aide la respiration dans la plupart des cir-
constances: il se relâche & se contracte
alternativement & en sens opposés, avec
ceux du bas ventre, principalement avec
les grands & petits obliques & les trans-
verses.

140. Le thorax ainsi disposé dans l’homme
vivant & qui respire, se dilate à chaque
inspiration, & revient à son premier
degré de resserrement à chaque expira-
tion. L’inspiration augmente sa capacité
en deux sens principaux: de l’un de ses
côtés à l’autre, & en en-bas. Ainsi les
côtes sont élevées, leurs bords inférieurs
chassés en dehors, & la voute du dia-
phragme est applanie.

Je n’ai jamais pu vérifier sur aucun
homme sain, respirant librement & sans
effort, s’il étoit vrai, comme on l’a
[Seite 78] avancé, que la partie inférieure du ster-
num fût en même temps portée en avant.

141. Voilà en quoi consiste le mouve-
ment naturel & alternatif du thorax dans un
homme bien portant: il se soutient sans
interruption depuis le premier moment de
sa naissance jusqu’au dernier instant de sa
vie, afin que ses poumons durant cet
intervalle puissent librement se dilater &
se resserrer, aspirer l’air & l’expulser.

142. Il en est de nous comme de tous
les animaux à sang chaud: nous ne pouvons
long-temps retenir l’air que nous avons
inspiré. Obligés de l’expirer peu après,
d’en attirer un nouveau dans nos pou-
mons, de l’en chasser encore, nous ne
cessons de renouveler cet aliment de notre
vie,
comme l’appeloient les Anciens(1).
Quelle heureuse nécessité pour nous!
puisqu’il est démontré que l’air le plus
pur, dès qu’il a parcouru l’organe des-
tiné à le recevoir, est altéré au point
de ne pouvoir servir à une nouvelle
inspiration(2).

[Seite 79]

143. Quelles sont donc les modifications
qu’il y éprouve? Nous les trouverons
dans la décomposition de ses élémens, &
non dans un je ne sais quel défaut
d’élasticité, auquel il étoit si ordinaire de
recourir autrefois. L’air atmosphérique est
peut-être l’assemblage le plus étonnant de
particules élémentaires de toute espèce.
Sans parler de tant de corps hétérogènes
dont il se charge, des semences d’un
très-grand nombre de petites plantes, des
émanations de tous les corps odorans,
d’une multitude de substances pulvéru-
lentes, &c. qui errent en lui; il contient
toujours une masse plus ou moins con-
sidérable de vapeurs aqueuses, & une
quantité indéterminée de matières élec-
trique & magnétique. Quand nous l’épu-
rerions assez pour le dégager entièrement
de cet alliage, il resteroit encore composé
de trois substances aériformes, c’est-à-dire,
de l’air déphlogistiqué (gaz oxigène), de
l’air phlogistiqué (gaz azotique), & de l’air
fixe (gaz acide carbonique). Les proportions
qui se trouvent entre ces divers élémens
varient avec les lieux & les corps orga-
nisés qui les habitent. Toutefois on estime
communément qu’elles donnent la combi-
naison d’un quart d’air déphlogistiqué,
[Seite 80] de onze seizièmes d’air phlogistiqué, &
d’un seizième d’air fixe(1).

144. A chaque inspiration libre & ordi-
naire, un adulte introduit dans ses poumons
environ trente pouces cubes de ce mê-
lange. Le quart de l’air déphlogistiqué est
tellement décomposé, tellement changé
en air phlogistiqué & en air fixe, que
si, après l’avoir inspiré & expiré line se-
conde fois, on le recueille dans un vais-
seau sous lequel soit placé une lumière
ou des charbons ardens, il les éteint
aussitôt. Il dépouille encore la chaux de
l’eau dont elle étoit saturée, & est infi-
niment plus pesant que l’air atmosphé-
rique(2).

[Seite 81]

145. Dégagées par cette décomposition,
les parties ignées de l’air déphlogistiqué(1)
se mêlent probablement(2) avec le sang
artériel, & se répandent avec lui dans
tout le corps. En même temps, la base
de l’air fixe est reportée au ventricule
droit avec le sang veineux, & le phlo-
gistique, pour passer delà dans les pou-
mons, & s’y dépouiller de ce que les
Anciens appeloient son principe suligi-
neux. La différente de couleur qui existe
entre le sang artériel & le sang veineux,
le rouge vif & le rouge foncé que lui
communique alternativement l’air plus ou
[Seite 82] moins pur auquel on l’expose, me pa-
roissent être autant de preuves de cette
opinion.

146. On retrouve ces différences dans le
systême sanguin du foetus; mais elles y
sont moins tranchantes que dans l’homme;
qui a respiré: la raison en est sans doute
que le premier n’a pas encore absorbé
lui-même cette partie la plus pure de l’air
atmosphérique; mais dès qu’il est né,
soit à raison de son passage subit d’un
élément aqueux à un élément opposé,
soit à raison des impressions nouvelles que
produisent sur lui toutes les causes stimu-
lantes qui l’environnent; son corps com-
mence à se mouvoir, sa poitrine à se
dilater, & alors se fait la première ins-
piration. C’est ce premier acte d’inspira-
tion qui appelle le sang dans l’organe
pulmonaire: docile à sa voix, il aban-
donne les vaisseaux ombilicaux, & ne
cesse de se diriger vers la poitrine. L’ex-
piration au contraire, me paroît être
l’heureux produit d’un effort de la nature
pour chasser des poumons l’air inspiré.
Nous avons déjà observé qu’en s’y dé-
composant, il devenoit pour eux un
fardeau qu’ils pouvaient plus soutenir
sans danger.

Cette théorie, si on considère les grands
rapports qui règnent entre la respiration
& la circulation du sang, rapports dé-
montrés même par la fameuse expérience
[Seite 83] de Hook(1), cette théorie, dis-je, me
paroît donner une solution bien plus satis-
faisante au célèbre problème de Harvée(2),
que la plupart des systêmes imaginés par
les physiologistes pour l’expliquer(3).

SECTION DOUZIÈME.
De la Voix & de la Parole.


147. Nous venons d’examiner quel
est le principal usage de la respiration;
nous nous proposons d’expliquer ailleurs
comment elle contribue à commuer le
chyle en sang, & à faire exécuter
presque toutes les fonctions naturelles.
Parcourons ici les autres avantages qu’elle
nous procure. Elle sert d’abord à la for-
mation de la voix, qui appartient à
l’homme né, & naît elle-même des pou-
mons. Aristote l’avoit déjà remarqué:
aussi dit-il quelque part, qu’il n’est que
les animaux qui respirent par les pou-
mons, qui aient de la voix.

La voix est proprement un son formé
dans le larynx par l’air qui s’en échappe;
[Seite 84] c’est cette espèce de couronnement de la
trachée-artère qui en est le vrai siége(1).

148. Le larynx est composé de diffé-
rens cartilages unis entr’eux en forme de
boëte(2) par de nombreux muscles(3)
qui ne gênent en rien, ni la mobilité de
leur ensemble, ni celle qu’exigent de cha-
cun d’eux les variétés de la voix.

149. C’est la partie du larynx appelée
glotte, ou l’orifice du conduit aérien que
couvre l’épiglotte, qui contribue le plus
à former les sons. Je ne doute pas que
l’air chassé des poumons ne devienne so-
nore en se heurtant contre les bords de
cette embouchure.

150. Mais quels changemens de forme,
éprouve cette partie, pour imprimer à la
voix les différentes modulations avec les-
quelles elle se fait entendre? Est ce en
s’accourcissant et s’alongeant tour-à-tour,
ainsi que l’a prétendu Dodart après Galien,
qu’elle produit ces variétés? Ou si elles
sont l’effet du relâchement & du resser-
rement alternatif de ses ligamens, ainsi-
que l’a soutenu Ferrein, qui comparoit la
voix à un instrument à cordes, tandis que
les autres assimiloient son jeu à celui d’un
instrument à vent.

[Seite 85]

Tout bien considéré, nous pensons que
la glotte éprouve ces deux espèces de
modifications; mais nous croyons en
même tems, que leur principal effet est
dû à la tension des ligamens, sur-tout
des ligamens aryténoïdiens inférieurs, qui
sont les cordes vocales de Ferrein.

151. Quelle que soit la nature de la
mobilité de la glotte, une expérience cu-
rieuse démontre qu’elle est soumise à l’in-
fluence des muscles du larynx. On a en
effet pratiqué la ligature, & fait la sec-
tion, soit des nerfs recurrens, soit des
nerfs vagues; &, dans tous ces cas, on
a observé que le résultat de l’opération
étoit, ou la perte entière de la voix, ou
son assoiblissement extrême(1).

152. Ce n’est pas seulement à l’homme
qu’est donné le sifflement; les oiseaux qui
chantent le possèdent en commun avec
lui, à cette différence près, que chez
eux il est l’effet d’un double larynx, au
lieu que chez l’homme il est produit par
le resserrement de ses lèvres, dont il unit
l’action à celle de son larynx(2).

153. Le chant, qui est un composé de la
parole & d’une modulation de la voix,
[Seite 86] me paroît appartenir à l’homme seul. Le
sifflement est naturel aux oiseaux; on est
parvenu à faire prononcer quelques mots
à plusieurs d’entr’eux, & même à des
chiens; mais le chant est resté en partage
à l’homme, & je ne sache pas qu’on ait
jamais réussi à l’apprendre à aucun animal,
tandis qu’il n’est point de nation même bar-
bare, chez laquelle il ne soit en usage(1).

154. La parole est une modification de
la voix, à laquelle concourt principalement
la langue, mais avec elle les lèvres, les
dents, le palais & le nez(2); il est donc
une grande différence entre la parole & la
voix: celle-ci est uniquement formée par
le larynx; la parole, au contraire, suppose
l’action de toutes les parties que nous ve-
nons d’énumérer. Il est vrai qu’il existe
quelques peuples où cette différence est
presque effacée; tels sont les Chinois, dont
le langage équivoque ne peut être expli-
qué que par les inflexions de la voix.

[Seite 87]

La voix est commune aux hommes & aux
brutes, un enfant nouveau-né la possède;
on la trouve chez ceux qui ont été élevés
parmi les bêtes sauvages; il n’est pas jus-
qu’aux sourds & muets qui n’en soient
pourvus; mais la parole est le fruit d’une
raison cultivée & exercée: aussi est-elle
l’apanage de l’homme, à l’exclusion cle
tout ce qui composé avec lui le règne
animal. L’instinct & la voix suffisent aux
animaux; mais l’homme dénué de presque
tout appui sur lequel puisse reposer son
existence, avoit besoin de la raison & de
la parole pour manifester & satisfaire ses
desirs dans l’état social auquel il est destiné.

155. Le mécanisme vraiment admirable
de la parole & dé la prononciation des let-
tres, a voit été éclairé par les essais célè-
bres, mais paradoxaux, de Fr. Metc. de
Helmont.
Il vient d’être complettement dé-
voilé, par les soins & les travaux de J.
Wallis
& de Conr. Amman. Nous adoptons
comme la plus naturelle, la division des let-
tres que nous tenons de ce dernier. Il les
distribue en voyelles, en semi-voyelles & en
consonnes. Il subdivise:

Les voyelles, en simples, a, e, i, y, o, u;
& en mixtes ä, ö, ü.

Les sémi-voyelles, en nazales, m, n, ng*);
& en orales ou linguales, r, l.

[Seite 88]

Les consonnes, en sifflantes, h, g, ch, s,
sch*), f, v, ph; en explosives, k, q, d,
t, b, p; & en doubles, x, z.

156. Nous ne devons pas omettre quel-
ques autres modifications de la voix, que
produisent accidentellement, ou de fortes
passions de l’ame, ou de violentes affec-
tions des organes de la respiration; il en est
même parmi elles, qui paroissent n’appar-
tenir qu’à l’homme: de ce nombre sont le
rire & l’action de pleurer.

157. Plusieurs de ces modifications sont
tellement rapprochées entr’elles, que sou-
vent l’une dégénère en l’autre; il en est aussi
qui affectent plusieurs manières de se pro-
duire, &c.

Le rire, est en général une suite d’expi-
rations courtes & brusques.

L’action de pleurer, se fait par des inspira-
tions profondes, qui bientôt après s’alter-
nent avec des expirations longues & inter-
rompues.

Le soupir, est formé par une longue &
forte inspiration, à la suite de laquelle vient
une expiration, que le gémissement a cou-
tume d’accompagner.

La toux, est une expiration-prompte &
sonore, dépendante d’une longue inspi-
ration.

[Seite 89]

L’éternument, est une expiration plus vio-
lente & presque toujours convulsive; pré-
cédée par une courte & véhémente inspi-
ration.

Le hoquet, est une inspiration bruyante
& très courte, mais en même temps pres-
que convulsive.

Enfin le bâillement, est l’effet d’une ins-
piration longue, lente & pleine, à laquelle
succède presqu’aussitôt, une expiration sem-
blable. Il s’opère par l’écartement simultané
des deux mâchoires, assez large pour per-
mettre à l’air de remplir entièrement la bou-
che, & de s’introduire dans les trompes
d’Eustache. Il est une circonstance assez
remarquable dans cette dernière modifica-
tion de la voix, c’est qu’on est involontai-
rement porté à bâiller, quand on voit bâiller
une autre personne. Au reste, il nous paroît
qu’il faut chercher sa cause, dans le souve-
nir d’un sentiment agréable qu’on desire
éprouver.

SECTION TREIZIÈME.
De la Chaleur animale.


158. L’homme, tous les animaux mam-
maires & les oiseaux, ont une chaleur na-
turelle beaucoup plus considérable que celle
[Seite 90] de l’atmosphère dans laquelle ils vivent.

Mais celle de l’homme est inférieure à celle
des animaux que nous venons de désigner,
à celle sur-tout des oiseaux; puisqu’elle
s’élève chez ceux-ci beaucoup au-dessus du
96e. degré du thermomètre de Fahrenheit*),
qui est le terme moyen auquel dans notre
climat répond celle de l’homme(1).

159. Cet état de chaleur se soutient à-
peu près au même degré dans un homme
sain; soit qu’il habite les régions glacées
du nord, soit qu’il se transporte dans les
contrées les plus méridionales; c’est là une
des grandes prérogatives dont l’ait favorisé
la nature, que son existence ne soit atta-
chée à aucune partie du monde, qu’il puisse
la promener sur toute sa surface, la fixer
indifféremment ou à la baie d’Hudson, qui
voit le mercure se congeler spontanément,
ou à la nouvelle Zemble, malgré l’exces-
sive rigueur du ciel sous lequel elle est si-
tuée, ou sur les bords enflammés du Sé-
néga. Telle n’étoit point l’opinion de Boer-
haave:
il pensoit au contraire que l’homme
ne pouvoit vivre dans un milieu plus chaud
que lui. Mais cette opinion a été assez réfu-
[Seite 91] tée par les observations du célèbre H. Hellis,
autrefois gouverneur de la Géorgie, & par
les nombreuses expériences que plusieurs
physiologistes instruits ont faites avec la
plus sévère exactitude(1).

160. Examinons quel peut être le foyer
de cette chaleur: les Anciens se sont pro-
posé la même question, & y ont répondu
assez singuliérement; mais, à quoi bon rap-
peler le souvenir de leurs erreurs? Parmi
les modernes, les uns la sont dépendre
d’une matière électrique, qu’ils supposent
circuler dans le systême nerveux; les autres
la rapportent au frottement que nécessite
entre les globules du sang, son mouvement
progressif(2); d’autres l’attribuent au frois-
sement de nos parties solides; d’autres
enfin, à d’autres causes qu’il seroit trop
long & inutile de détailler.

161. Il est remarquable que plus les dif-
ficultés s’entassent sur toutes ces hypothèses,
[Seite 92] plus la doctrine qui établit dans les poumons
le foyer de la chaleur animale, & sa cause
dans, la partie déphlogistiquée de l’air que
nous respirons; plus cette doctrine est
simple & concordante avec les phénomènes
de la nature. Nous en devons les élémens
à Jean Mayow(1) que nous avons déjà
cité; mais elle n’a été exposée dans tout
son jour que depuis peu par le célèbre
Crawfort(2).

162. Nous ne pouvons nous refuser à
donner ici un abrégé de sa théorie: elle
se réduit à soumettre la respiration, de
même que la combustion, aux procédés
qu’on nomme phlogistiques; procédés en
vertu desquels le phlogistique. des corps
en est dégagé par l’accès d’un feu libre ou
sensible.

Il est constant, dit cet Auteur, que le
phlogistique & la matière ignée*) sont deux
élémens presqu’inconciliables; & que les
corps sont plus ou moins pourvus de l’un,
en raison de ce qu’ils sont plus ou moins
destitués de l’autre. Ainsi l’air fixe ne con-
tient qu’un soixante-septième du feu qui se
trouve dans un égal poids de l’air atmos-
phérique.

[Seite 93]

L’expérience démontre également qu’il
y a beaucoup plus d’affinité entre le phlo-
gistique & l’air atmosphérique, qu’entre
celui-ci & le feu. Aussi l’air abandonne-t-il
bientôt le feu qui lui étoit uni, pour se
pénétrer du phlogistique.

163. Il suffit de comparer ces principes
avec les phénomènes de la respiration, pour
sentir combien il est vraisemblabe que la
chaleur animale s’obtient par un procédé
analogue. D’où vient, en effet, la grande
différence qui se trouve entre l’air que nous
expirons & celui que nous avions inspiré,
si ce n’est de ce que le premier est dépouillé
de sa partie ignée, & chargé, soit de phlo-
gistique, soit de la base de l’air fixe.

164. Il est donc probable que la partie
ignée de l’air que l’inspiration appelle dans
nos poumons, s’introduit dans les plus pe-
tits vaisseaux sanguins qui ne sont séparés
des vésicules aériennes que par des mem-
branes extrêmement minces; & que, com-
muniquée, par le systême veineux de ces
organes, au systême artériel de l’aorte,
elle se répand avec ce dernier dans toute
l’étendue du corps. Dès lors elle se com-
bine, sur-tout dans les plus petits vaisseaux,
avec le phlogistique qu’elle rencontre par-
tout, & qui, occupant sa place dans le
sang, est reporté au ventricule droit par
les veines caves, & par l’artère pulmo-
naire aux poumons, où, en vertu des loix
d’affinité dont nous avons parlé précédem-
[Seite 94] ment, il s’unit de nouveau avec l’air qui
vient d’être inspiré, se dégage du feu, &
entre une secondé fois dans le sang comme
un nouvel élément.

165. Cet exposé se concilie parfaitement
avec la différence qu’on remarque entre le
sang artériel & le sang veineux; avec l’état
spécifique de l’un & de l’autre(1); enfin
avec ce que nous avons dit plus haut de
l’action des vaisseaux sanguins du dernier
ordre.

166. Il paroît, en effet, que c’est en
raison de l’action excitée ou affoiblie de
ces petits vaisseaux, qu’il se fait une plus
ou moins grande combinaison des particules
ignées errantes dans le corps, avec le phlo-
gistique qui y est en repos; & que la cha-
leur animale qui en résulte, augmente ou
diminue(2).

Tous les phénomènes qui attestent que
la chaleur animale, jugée par le thermo-
mètre, & non par le rapport d’une sen-
sation trompeuse, se soutient presqu’in-
[Seite 95] variablement au même degré; que les
ardeurs de l’été le plus brûlant l’aug-
mentent à peine; que le froid le plus ri-
goureux n’ôte presque rien à son inten-
sité; bien plus, que nos corps sont plus
chauds aussitôt après avoir été plongés dans
une eau froide; tous ces phénomènes pa-
roissent démontrer que l’action des petits
vaisseaux du systême sanguin varie préci-
sément avec les degrés de chaleur du milieu
dans lequel nous sommes placés(1); de
sorte que s’ils sont exposés au froid, ce qui
probablement ajoute à leur ton, ils pro-
curent une plus grande combinaison des
parties ignées avec le phlogistique, & ex-
citent une plus grande chaleur. Si, au con-
traire, ils languissent dans un milieu chaud
& relâchant, ils produisent des effets dia-
métralement opposés.

SECTION QUATORZIÈME.
De la Transpiration cutanée.

[Seite 96]

167. Les fonctions de la peau sont
trop multipliées pour renfermer leur des-
cription dans un seul & même chapitre;
nous préférons renvoyer chacune d’elles
à la classe à laquelle elle appartient natu-
rellement.

Ainsi la peau est l’organe du toucher;
nous la considérerons sous ce rapport en
traitant des fonctions animales. Elle est l’une
des voies par lesquelles se fait la résorbtion;
nous l’examinerons sous cet autre point de
vue qui la rapproche du systême des
vaisseaux lymphatiques, en décrivant les
fonctions naturelles. Elle est le laboratoire
dans lequel s’achève la transpiration insen-
sible;
nous traiterons maintenant de cette
fonction presqu’immédiatement après avoir
développé celle de la respiration, avec la-
quelle elle est si étroitement liée.

168. La peau est un composé de trois
membranes; la plus interne se nomme le
cuir; la seconde, le corps rêticulaire; & la
plus apparente, la surpeau.

169. La surpeau ou l’épiderme est le plus
extérieur des tégumens du corps humain,
celui qui est le plus exposé à l’air, & qui
[Seite 97] en supporte mieux le contact. Il a cela de
commun avec l’émail des dents, la tunique
profonde du conduit aérien, & celle du
tube alimentaire.

170. Rien de plus simple, & néanmoins
rien déplus extraordinaire que sa texture(1).
Dépourvu de vaisseaux, de nerfs & de
pores, à peine organisé, d’une délicatesse
extrême & demi-transparente, il est en
même tems d’une ténacité qui lui fait op-
poser la résistance la plus soutenue à la
macération, & à tous les autres moyens
de corruption.

171. On n’a encore pu éclairer l’obs-
curité de son origine: il est seulement
vraisemblable qu’il est une espèce d’ef-
florescence du corium, auquel il reste
adhérent par une infinité de fibres(2)
[Seite 98] excessivement ténues. Telle aussi l’origine
des bulbes des poils. D’ailleurs l’épiderme
est celle des parties similaires du corps hu-
main qui se régénère le plus facilement.

172. Ce qui nous paroît le plus soli-
dement établir son importance, c’est qu’on
le retrouve dans tous les corps organisés
de l’un & de l’autre règne. Il n’est pas
jusqu’à un embryon de trois mois, chez
lequel on ne le puisse déjà distinguer.

173. Au dessous de l’épiderme on trouve
une membrane très-peu consistante, appelée
réseau de Malpighi(1), parce que cet auteur
est le premier qui en ait conçu une idée
exacte. Elle difflue aisément en une espèce
de mucosité, & il est rare qu’en l’isolant de
l’épiderme & du corium on puisse lui con-
server son intégrité ou sa forme de mem-
brane. On n’a vu réussir cette dissection
que sur des scrotums d’Ethiopiens(2).

174. C’est ce réseau qui donne aux diffé-
rens individus la couleur qui leur est pro-
pre(3). Chez tous le cuir est blanc, ainsi
[Seite 99] que l’épiderme; il n’est que les maures qui
aient celui-ci un peu jaunâtre. Mais le
corps réticulaire est presque aussi diverse-
ment coloré, qu’il y a d’hommes, d’âges
& de climats différens. Il n’est pas jusqu’à
l’état maladif qui ne le modifie(1).

De ces modifications de couleur naissent
les cinq principales variétés qui s’observent
dans l’espèce humaine.

Le blanc plus ou moins clair est commun
aux Européens, aux peuples de l’Asie occi-
dentale, à ceux du nord de l’Afrique, aux
Groënlandais & aux Esquimaux. Ceux qui
habitent la partie méridionale de l’Asie sont
d’un brun tanné tirant sur l’olive. Les
Ethiopiens sont noirs. Les naturels des
autres contrées de l’Amérique sont d’un
rouge cuivré. Enfin, les peuples qui occu-
pent les bords de la Mer Pacifique sont plus
ou moins bruns.

Il en est de ces variétés comme de toutes
celles qui distinguent un homme d’un autre
homme, ou une nation d’une autre nation:
ce sont des nuances à peine perceptibles,
& d’après lesquelles on ne pourroit établir
que des classes & des divisions arbitraires.

175. Le corium que recouvrent l’épiderme
& le réseau muqueux, est une membrane
poreuse, tenace, très extensible, & plus ou
[Seite 100] moins épaisse. Elle est composée de plusieurs
couches de tissu cellulaire, dont les super-
ficielles sont plus denses, & les profondes
plus lâches; celles ci contiennent, excepté
dans quelques régions du corps, un suc
huileux qu’on nomme graisse.

176. Outre les nerfs & les vaisseaux ab-
sorbans
dont nous parlerons ailleurs, il ad-
met un grand nombre de vaisseaux sanguins
qu’une injection heureuse démontre péné-
trer sa superficie externe, & s’y distribuer
en réseaux d’un tissu également serré &
délié.

177. Il renferme encore dans son épais-
seur une multitude innombrable de petites
glandes ou de follicules sébacés qui fournis-
sent à la peau(1) une humeur onctueuse,
limpide, très-pénétrante, & très-difficile à se
déssécher(2). Elle est bien différente de la
fueur, ou de cette vapeur forte qui s’élève
de certaines parties du corps.

178. Enfin toute l’étendue du corium,
si on excepte les paupières, le membre viril,
la paume des mains & la plante des pieds,
est couverte de poils(3) foibles, courts,
& plus ou moins lanugineux. Il est des en-
droits où, destinés à des usages particuliers,
ils sont plus longs; tels sont les cheveux,
[Seite 101] les sourcils, les cils, ceux qui croissent
dans les narines, sur la lèvre supérieure,
sur le menton, sous les aisselles, & aux
parties génitales.

179. Généralement parlant, l’homme est
beaucoup moins velu que la plupart des
quadrupèdes; il est même des peuples qui
le sont moins que d’autres. Sans parler de
leux qui s’arrachent avec soin ou la barbe,
ou le poil de quelqu’autre partie, on en
voit qui sont naturellement dépilés: tels les
Burates & les Tongouses: au contraire,
nous apprenons de voyageurs très-dignes
de foi, que les habitans du Nadigsda, &
les Kurilsques en sont excessivement cou-
verts(1).

180. Les poils ne diffèrent pas moins
entr’eux par leur longueur, leur souplesse,
leur frisure, & sur-tout par leur couleur,
qui répond assez fréquemment à celle des
yeux; mais toutes ces variétés sont indis-
tinctement soumises aux influences de l’âge,
du climat, d’une multitude de causes natu-
relles, ou d’une affection maladive. On sait
ce que sont à cet égard les nègres-blancs.

181. Leur direction n’est pas, à beau-
coup près, la même dans les différens siéges
où ils sont placés. Ils décrivent des spirales
sur le sommet de la tête, ils s’élèvent en
divergeant sur le pubis.; ils vont en sens
[Seite 102] opposés, comme dans le singe satyre, sur
les faces postérieures du bras & de l’avant-
bras.; c’est-à dire qu’ils se dirigent en bas,
depuis l’épaule jusqu’au coude, & en haut,
depuis le carpe jusqu’à la même articulation.
Je ne parle pas ni des cils ni des sourcils.

182. Ils sont implantés dans le corps du
corium, ou plutôt ils naissent de sa couche
profonde, de celle que nous avons observé
abonder en graisse; ils lui tiennent forte-
ment par une racine bulbeuse(1), enve-
loppée de deux membranes: l’une externe,
vasculeuse & ovale; l’autre interne, cylin-
drique, & paroissant se continuer avec l’épi-
derme. C’est dans cette dernière enveloppe
qu’on aperçoit les filets élastiques dont les
poils sont composés; on en compte pour
chacun de cinq à dix.

183. Enfin les poils se nourrissent d’une
huile très-légère, & sont d’une nature pres-
que incorruptible. Nulle autre partie du
corps humain aussi essentiellement électri-
que, nulle autre dont la nutrition & la re-
production soient aussi faciles; ils repoussent
même après leur chûte complette, à moins
qu’une maladie de la peau ne s’y oppose.

[Seite 103]

184. Nous ne considérons pas ici les té-
gumens communs du corps par rapport au
grand nombre de leurs usages; nous ne
voyons présentement en eux que des organes
excréteurs, propres à débarrasser la masse
des liquides, de tout ce qui lui est inutile ou
étranger. Les miasmes qui s’échappent à
travers la peau sous forme d’exanthèmes,
les odeurs de musc, d’ail, &c., auxquelles
elle donne passage, les sueurs, & plusieurs
autres phénomènes semblables, démontrent
qu’elle est appelée à remplir ces fonctions.

185. Elle excrète sur-tout un fluide dont
s’est occupé ex-professo, & le premier, un
auteur doué de grands talens, & dont le
nom méritoit bien d’être donné à l’objet de
ses études, c’est la matière perspirable de Sanc-
torius
(1).

Nous sommes bien éloignés de compren-
dre sous cette dénomination aucune autre
matière excrémentitielle, non pas même la
sueur, que nous regardons comme essen-
tiellement différente(2) de celle qui nous
[Seite 104] occupe: la sueur, en effet, est une humeur
aqueuse, légèrement salée, & qui n’a pres-
que jamais lieu dans un corps sain & en re-
pos. Au contraire, la transpiration insensible
est un fluide aériforme qui s’exhale conti-
nuellement, & a la plus grande analogie
avec la transpiration pulmonaire.

186. Comme celle-ci, elle est chargée
de phlogistique, elle dépouille la chaux de
l’eau avec laquelle elle étoit unie, elle est
incapable d’entretenir la combustion & la
respiration.

187. La perte de cette vapeur dans un
adulte d’une taille & d’un embonpoint ordi-
naire, ne peut être que très-difficilement
soumise à un calcul certain. On ne peut
pas plus l’apprécier au moyen des balances
qui ont été employées depuis Sanctorius pour
équilibrer le corps dans ses différens états,
parce qu’il est de fait que ce fluide n’est pas
la seule matière qui transsude par la peau.
D’ailleurs, il n’est peut-être aucun homme
chez qui cette évacuation se fasse en raison
égale; il est même à cet égard des variétés
de peuples & de familles. Je pourrois citer
en preuve ce que des auteurs très-dignes
de foi nous rapportent de l’odeur particu-
lière de la transpiration des Caraïbes, des
Groënlandais, des Ethiopiens(1), & de
plusieurs autres nations sauvages.

[Seite 105]

188. Si donc nous comparons maintenant
ce que nous avons dit de la texture vascu-
leuse de la peau, de l’analogie qui se trouve
entre la matière perspirale & l’air expiré, &
de l’influence des petits vaisseaux sur la cha-
leur animale; ne paroît-il pas plus que vrai-
semblable que les transpirations pulmonaire
& cutanée diffèrent à peine? que ces deux
fonctions ne sont établies que pour s’en-
tr’aider mutuellement, & l’une compenser
le défaut de l’autre(1)?

189. Il est une infinité de phénomènes,
tant dans l’état pathologique que dans l’état
de santé, qui viennent à l’appui de cette opi-
nion. Je citerai en exemple les différentes
manières d’être du foetus humain, ou des
autres mammaires, & du germe de poulet
fécondé(2). Je citerai également le froid
[Seite 106] particulier dont sont affectées certaines par-
ties du corps chez des animaux à sang chaud,
(l’extrémité du nez chez les chiens), ce
qu’on ne peut rapporter qu’à l’action phlo-
gistique plus foible des vaisseaux qui se dis-
tribuent à ces parties. Lorsqu’au contraire
un état non naturel développe cette action,
on voit bientôt se manifester des phénomè-
nes opposés. C’est ainsi que la paume des
mains des personnes atteintes de fièvre hec-
tique est toujours brûlante. C’est encore,
au moyen des secours de compensation
que se prêtent mutuellement les poumons
& la peau, qu’on explique comment il se
peut qu’un adulte parvenu au dernier degré
de phtisie, ou frappé dans l’organe pulmo-
naire de toute autre espèce de lésion, vive
cependant plusieurs années, cet organe ne
remplissant aucune de ses fonctions(1).

190. Il me paroît enfin que le tube ali-
mentaire,
quoiqu’il soit éminemment appli-
qué à d’autres usages que les organes dont
nous venons de parler, exerce les mêmes
fonctions. Il est la seule partie interne du
corps (les poumons exceptés), où l’air
atmosphérique pénètre. Personne n’ignore
que nous en avalons une quantité très-con-
sidérable, & on sera aussi fortement con-
vaincu qu’il s’y décompose comme dans les
[Seite 107] poumons, si on considère la nature de ce-
lui qui y est renfermé(1). Mais ce qui
donne encore plus de vraisemblance à cette
opinion, c’est la multitude de petits vais-
seaux sanguins qui parcourent la surface
profonde de ce conduit; ils sont peut-être
assez multipliés pour égaler en nombre ceux
qui recouvrent la surface entière du corps.

SECTION QUINZIÈME.
Du Sensorium & des Nerfs.


191. Nous sommes parvenus à la
seconde classe des fonctions du corps hu-
main, aux fonctions animales: on leur a
donné ce nom, parce qu’elles sont l’apa-
nage de tous les animaux, & des seuls
animaux. Ce sont d’ailleurs elles qui, dans
l’homme, contribuent le plus à resserrer
les liens de l’union existante entre son corps
& son ame.

192. Les organes appelés à les remplir
sont principalement, le cerveau, le cer-
velet, la moelle épinière & les nerfs(2).
[Seite 108] Nous réduirons ces quatre parties à deux
classes seulement, dans lesquelles nous en-
tendons renfermer tout ce qui appartient
au systême nerveux, au moins tout ce
qui, dans ce systême, entretient des rap-
ports avec nos facultés intellectuelles. Nous
les appellerons le sensorium & les nerfs.

193. C’est sur cette division que porte
la belle observation de Sommering(1). Il
prétend que, pour bien apprécier le vo-
lume du cerveau, relativement aux fa-
cultés intellectuelles, il saut le comparer
avec le diamètre des nerfs qui en partent,
& non avec la masse de tout le corps; &
appliquant ce principe à l’homme, il ajoute
que son cerveau est d’autant plus considé-
rable, & lui-même d’autant plus doué
d’intelligence, que ses nerfs sont propor-
tionément plus ténue.

194. Le cerveau est contenu dans une
boëte osseuse qu’on appelle le crâne, &
enveloppé de trois membranes connues
sous les noms de dure-mère, d’arachnoïde
& de pie mère.

195. La dure-mère, en revêtant l’intérieur
du crâne, lui tient lieu de périoste interne;
se réfléchissant ensuite sur elle-même, elle
forme différentes cloisons dont les princi-
pales sont la faux & la tente(2). La faux
[Seite 109] divise le cerveau en deux hémisphères, &
le cervelet en deux parties: la tente em-
pêche que les lobes postérieurs du plus
élevé de ces organes, abandonnés à leur
poids, ne surchargent l’autre. La dure-mère
renferme encore dans ses duplicatures, des
veines fort amples, appelées sinus; elle
fortifie leurs parois, & s’oppose à ce que
les parties qui les bornent, n’exercent sur
elles une trop forte compression; les veines
recueillent le sang de tout l’intérieur du
crâne, & le reportent au coeur; on pré-
tend enfin que ce sang a une qualité par-
ticulière(1), & que sa quantité égale au
moins le dixième de sa masse entière.

196. Au-dessous de la dure-mère est une
membrane très-déliée & très-mince, appe-
lée pour cette raison arachnoïde: elle ne re-
çoit aucun vaisseau sanguin, & recouvre
toute la masse du cerveau, sans s’intro-
duire dans les nombreux sillons qui s’y
remarquent.

[Seite 110]

197. Il n’en est pas de même de la
membrane profonde, dénommée par les
Anciens pie-mère. Elle parcourt toutes les
circonvolutions, & s’enfonce dans toutes
les anfractuosités de la substance corticale;
c’est également dans son tissu que se dis-
tribuent les ramifications extrêmement mul-
tipliées des vaisseaux sanguins qui pénètrent
le cerveau; de sorte que, lorsqu’on la sé-
pare de ce viscère, autant sa surface in-
térieure est lisse, autant celle opposée
paroît villeuse; ou plutôt on croit voir
la base d’une mousse hérissée de toutes les
radicules qui la faisoient adhérer à la terre.

198. Le cerveau & le cervelet ne sont
pas des masses uniformément solides; ils
renferment diverses parties de structure &
de formes différentes, dont les usages sont
ignorés. Tels sont les quatre ventricules &
les plexus choroïdes qu’on y remarque.
Nous devons à Monro de connoître plus
particulièrement les communications qui
unissent entr’eux ces espèces de canaux.

199. Les deux principales divisions du
sensorium sont composées, l’une & l’autre,
de deux substances parfaitement distinctes;
la première, de couleur cendrée, est ap-
pelée corticale, quoiqu’elle ne soit pas
toujours la plus extérieure; la seconde est
la substance blanche ou médullaire. Som-
mering
observe qu’il en est une troisième
moins blanche que la précédente, & qu’on
trouve sur-tout dans l’arbre de vie du cer-
[Seite 111] velet, & dans les lobes postérieurs du cer-
veau.

200. Les proportions de quantité entre
ces substances changent avec l’âge. Celle
qui porte le nom de cendrée est beaucoup
plus abondante dans les enfans que dans
les adultes; on n’aperçoit en elle qu’un
nombre infini de vaisseaux tant sanguins
que blancs, tous prodigieusement fins,
dont l’extrémité plus ténue encore, va se
perdre dans la substance médullaire. Celle-
ci, outre ces petits vaisseaux, & un tissu
cellulaire très-délicat, paroît de plus ad-
mettre dans sa composition un parenchyme
pulpeux, dont la texture s’est jusqu’à pré-
sent dérobée à toutes les recherches de la
dioptrique.

201. Le cerveau a un mouvement per-
pétuel, mais lent(1), analogue à celui
de l’organe pulmonaire, en ce sens que
ce viscère s’élève pendant l’expiration, &
s’affaisse pendant l’inspiration(2).

[Seite 112]

202. La moelle alongée se continue
dans le canal flexible du dos, sous le
nom de moelle épinière; elle est enveloppée
des mêmes membranes que le cerveau, &
composée des mêmes substances, avec cette
différence cependant, que la substance cen-
drée en occupe l’extérieur, & la substance
blanche, le dehors.

203. Du cerveau, du cervelet & de la
moelle de l’épine, naissent tous les nerfs, c’est-
à-dire, des cordons plus ou moins blancs,
plus ou moins tendres, qui se distribuent
à presque toutes les parties molles du corps
humain.

204. Il est aujourd’hui démontré par
les expériences de Haller & de plusieurs
autres observateurs estimables, que nous
admettons, dans notre structure, différentes
[Seite 113] parties similaires, où, en effet, le scapel ana-
tomique, & l’oeil en garde contre toute il-
lusion, cherchent vainement des nerfs; où
la chirurgie pratique(1), & les opérations
faites sur le vivant par une main habile(2),
ne trouvent aucune preuve de sensibilité.
[Seite 114] De ce nombre sont le tissu cellulaire par-
faitement isolé, l’épiderme, le réseau mu-
queux, les poils & les ongles, les carti-
lages, les os, leur périoste & la moelle; les
tendons, les aponévroses & les ligamens;
la plupart des membranes larges, telles que
la dure-mère, l’arachnoïde, la plèvre, le
médiastin, le péricarde, le péritoine, la
cornée elle-même, &c.; presque tout ce
qui appartient au systême absorbant; mais
sur-tout le canal thorachique; enfin l’arrière-
faix & le cordon ombilical.

205. La première origine des nerfs
échappe à l’instrument le plus délicat, & à
l’oeil le plus fin; il est même encore incer-
tain si les nerfs qui se distribuent à un côté
du corps, ne partent pas du côté du sen-
sorium opposé. Cette dernière opinion a
en sa faveur des phénomènes pathologiques,
qu’elle seule peut expliquer(1); & Sommering
vient de prouver qu’au moins les nerfs op-
tiques se croisent à leur origine.

[Seite 115]

206. Une continuation de la dure-mère
en forme de gaîne vasculeuse très-mince,
accompagne d’abord la moelle des nerfs;
mais dès qu’ils sont sortis du cerveau ou
du canal de l’épine, ils revêtent un exté-
rieur à eux propre, & qui tranche sen-
siblement avec celui de presque toutes les
autres parties similaires: ils se couvrent,
observe Molinelli, d’une infinité de petits
plis, qui les coupent en travers dans
une direction plus ou moins oblique, &
imitent assez bien les rides d’un ver lom-
brical, ou les anneaux de la trachée-
artère.

207. Certains nerfs, comme les inter-
costaux & ceux de la paire vague, forment
en plusieurs endroits du corps des ganglions,
espèces de noeuds d’un tissu plus compact
& d’une couleur grisâtre tirant un peu sur
le rouge. On ne sait quel est leur usage.
Si nous avions à choisir entre les opinions
qui ont été hasardées à ce sujet, nous
dirions avec Zinn, qu’ils servent à unir
étroitement des filets nerveux appartenans
à différentes branches, & à faire dès-lors
communiquer chacun d’eux avec tous les
autres.

208. Tels sont à peu-près les plexus:
[Seite 116] leur structure étant la même, il paroît qu’on
leur doit attribuer les mêmes usages.

209. La terminaison de la plupart des
nerfs est aussi obscure que leur origine; il
en est un fort petit nombre dont l’extré-
mité s’épanouit en forme de membrane mé-
dullaire: c’est ainsi que le nerf optique
donne naissance à la rétine, & la portion
molle de la septième paire, à la zone qui
parcourt les tortuosités du limaçon. Mais
les dernières ramifications de tous les autres
s’enfoncent dans la profondeur des viscères,
ou dans l’épaisseur des muscles du corium &c.
Elles y prennent un caractère pulpeux, &
se confondent tellement avec la substance
propre de ces parties, qu’il n’est point de
recherches assez heureuses pour les démêler.

SECTION SEIZIÈME.
Des Fonctions du systême nerveux
général.


210. Nous venons d’établir que le sen-
sorium, & les nerfs qui en partent, complet-
tent ce systême si justement regardé comme
le moyen d’union, & le centre des rapports
qui existent entre lés deux parties de nous-
mêmes(1).

[Seite 117]

211. C’est sur-tout avec le cerveau que
l’ame paroît être plus intimement unie. Le
voisinage dans lequel il est de la plupart des
organes des sens, la structure admirable des
parties qui le composent, le trouble que
portent dans les fonctions de l’ame ses affec-
tions maladives, tout concourt à ajouter à
la vraisemblance de cette union.

212. Des physiologistes, se livrant trop
à la vivacité de leur génie, ont été telle-
ment frappés de la forme, ou de la situation
de certaines parties qu’on observe dans ce
viscère, qu’ils n’ont pas hésité à en faire le
siége de l’ame; c’est ainsi que les uns l’ont
placée dans la glande pinéale(1), les autres
dans le cervelet, quelques-uns dans le corps
calleux, d’autres enfin dans le pont de varole.

213. Pour nous, nous ne croyons même
pas que toute l’énergie du systême nerveux
appartienne uniquement à l’ensemble des
parties qui constituent le cerveau; nous
sommes persuadés qu’elle dépend aussi de la
moelle épinière, que chaque nerf a son état
de forces propre, à l’aide desquelles il peut
mouvoir les masses charnues qu’il pénètre,
& que l’un des usages de la gaîne vasculeuse
dont il est revêtu, est d’entretenir cet état
[Seite 118] de forces. Nous avouerons cependant qu’il
est une différence à cet égard, sur-tout
entre l’homme & les animaux à sang froid,
& que chez lui c’est le cerveau qui a la
principale influence.

214. Le systême nerveux a deux grandes
fonctions à remplir: l’une de donner le mou-
vement aux différentes parties du corps, à
celles sur-tout qui sont plus spécialement
soumises à l’empire de la volonté; l’autre,
de distribuer le sentiment, c’est-à-dire, de
transmettre au sensorium les impressions
sensibles dont les corps sont affectés, pour
y exciter une perception.

215. Le sensorium ne reçoit pas seulement
ces impressions: il réagit, & sur les nerfs qui
les lui ont communiquées, & sur plusieurs
autres avec lesquels il se met aussitôt en
rapport: c’est ainsi que la rétine irritée par
la présence de la lumière, agit sur cet or-
gane, & que celui-ci réagit sur l’iris, qu’il
resserre & dilate.

216. Cet effet de réaction me paroît ex-
pliquer d’une manière satisfaisante la plu-
part de ceux que l’imagination ou les plus
vives passions de l’ame produisent sur le
corps humain; les nombreuses sympathies
que le systême nerveux établit en nous;
enfin la prodigieuse influence des nerfs sur
presque toutes les fonctions de l’économie
animale.

217. Il est très-difficile de déterminer
comment le sensorium & les nerfs rem-
[Seite 119] plissent les usages que nous leur avons
attribués; l’observation & les expériences
ont jusqu’à présent éclairé notre marche;
mais ici nous ne sommes plus guidés que
par des conjectures.

218. On peut réduire à deux principales
classes toutes les opinions qui ont été ima-
ginées à ce sujet. Les uns pensent que les
nerfs agissent par un mouvement d’oscil-
lation; les autres rapportent leur action à
un fluide qu’ils supposent circuler en
eux. Mais quelle est la nature de ce fluide?
Nouvelle source de division, de laquelle
sont nés les esprits animaux, une matière
ignée, un fluide électrique, une matière
analogue à celle de l’aimant, &c.

219. Je ne tiens à aucune de ces opi-
nions: je ne puis cependant m’empêcher
d’observer ici que les moyens dont les
fauteurs de l’une se servent pour ruiner
les fondemens de l’autre, sont aussi gros-
siers que les oscillations des nerfs, ou les
fluides qu’on prétend les parcourir, seroient
subtils, s’ils existoient.

220. D’un autre côté, pourquoi se par-
tager entre deux hypothèses qui peuvent se
concilier & se soutenir ensemble? Répu-
gneroit-il donc d’admettre un fluide ner-
veux, qui, ému par des stimulus agissans
sur lui, seroit entraîné dans un mouvement
oscillatoire?

221. Ce qui paroît favoriser le plus
l’existence de ce fluide, c’est la disposition
[Seite 120] du systême nerveux, & la structure du
cerveau, assez rapprochée de celle de plu-
sieurs autres organes sécréteurs. Il ne fau-
droit pas inférer de-là, que la substance
médullaire qui constitue chaque nerf, forme
un tuyau continu; il est évident que le
fluide nerveux peut aussi facilement tra-
verser son tissu, qu’un papier gris, ou
toute autre espèce de filtre. Il faudroit être
bien plus minutieux encore, pour s’occu-
per des différens calculs auxquels on a
tenté de soumettre la vîtesse des esprits
animaux, se portant rapidement aux deux
points extrêmes des conduits nerveux.

222. Les oscillations des nerfs, pourvu
que ce mot ne rende pas l’idée burlesque
d’une corde tendue, mais représente des
vibrations, telles que peut les exécuter la
substance molle & pulpeuse du cerveau;
ces oscillations, dis-je, se concilient parfai-
tement avec un grand nombre de phéno-
mènes pathologiques: il est démontré, par
exemple, que l’ouïe ou la faculté d’enten-
dre, dépend d’un mouvement oscillatoire;
il est au moins probable, quand même on
ne seroit pas entièrement de l’avis de Leon.
Euler,
que la vue tient à une même cause;
il en est à-peu-près ainsi de l’exercice de
tous les autres sens. Ce que le grand New-
ton
avoit seulement conjecturé, l’ingénieux
Hartley est parvenu à le rendre si vrai-
semblable, qu’il en a déduit la première
association de nos idées, & la plupart
[Seite 121] des fonctions que remplirent les facultés
de l’ame.

SECTION DIX-SEPTIÈME.
Des Sens externes en général. Du Toucher en particulier.



223. L’une des fonctions que remplis-
sent les nerfs, est de communiquer au sen-
sorium les impressions que sont sur nous les
objets qui nous environnent; ils emploient
à cet effet nos sens externes; ils les chargent
de veiller à la conservation du corps, &
d’instruire l’ame de tout ce qu’il éprouve.
Nous ne nous occuperons ici que de ceux
qui sont vraiment externes. Il faudroit trop
subtiliser, dit Haller, pour obtenir une
place parmi eux, aux différens stimulus qui
éveillent la faim, ou sollicitent les déjections
alvines, ou nous avertissent de pourvoir à
quelqu’autre besoin.

224. Entre toutes les classes qui se par-
tagent les nombreuses fonctions de l’écono-
nomie animale, il n’en est peut être aucune
susceptible d’autant de variétés que celle-
ci, parce qu’il n’en est pas qui dépende
plus des différentes manières d’être & de
[Seite 122] sentir, soie naturelles, soit acquises(1).

225. Ce n’est pas sans raison que le tou-
cher
occupe le premier rang dans l’exposé
que nous faisons des sens externes; il est
celui que l’homme après sa naissance exerce
le premier, celui dont l’organe a le siége
le plus étendu, celui enfin qui se met en
rapport avec le plus grand nombre d’objets
extérieurs.

226. Il ne nous découvre pas seulement
les qualités tactiles des corps, par exemple,
leur chaleur, leur poids, leur dureté, &c.;
il nous aide encore à saisir leur figure, leur
distance, &c; sur lesquelles les autres sens
s’exercent également.

227. Mais, ce qui ajoute beaucoup à
son mérite, c’est qu’il est en même temps
le moins exposé à l’erreur, & le plus sus-
ceptible de perfection: on a observé la cul-
ture & des soins le mettre en état de sup-
pléer au défaut des autres, au défaut prin-
cipalement de la vue.

228. L’organe qui sert le plus générale-
[Seite 123] ment à ses opérations, est la peau, dont
nous avons déjà fait connoître la structure;
il réside principalement dans les papilles du
corium, ou dans ces houpes pulpeuses que
forment en s’épanouissant les extrémités des
nerfs cutanés; verruqueuses dans certaines
parties du corps, fongueuses dans d’autres,
dans d’autres encore filamenteuses, leur
configuration est aussi variée que leur siége.

229. Les mains sont les principaux ins-
trumens qu’il emploie: aussi la peau dont
elles sont recouvertes, offre des particu-
larités qu’on chercheroit vainement ailleurs.
Si on l’examine dans la paume & sous les
articulations de chaque doigt, on n’y dé-
couvre aucun poil, mais plusieurs sillons
destinés à en faciliter la flexion & le resser-
rement; si on considère celle qui enveloppe
l’extrémité des doigts des pieds & des mains,
moins façonnée au dehors, elle donne
insertion aux ongles; mais intérieurement,
une multitude infinie de linéamens trés-dé-
liés, contournés en spirale, & placés les
uns au dessus des autres, sont tracés sur
toute son étendue.

230. Les ongles sont des lames convexes;
minces & ovalaires, qu’on ne trouve que
dans l’homme, ou un fort petit nombre de
mammaires ayant des mains & un toucher
délicat(1). Ils aident l’action des doigts,
[Seite 124] en soutenant leur extrémité contre l’impres-
sion des corps durs. Leur texture est ana-
logue à celle de la corne; cependant, ils
ressemblent en beaucoup de choses à l’épi-
derme; comme celui-ci, ils recouvrent un
tissu réticulaire(1), qui revêt lui-même
un corium extrêmement adhérent au périoste
de la dernière phalange. Toutes ces parties
sont disposées en forme de filets se diri-
geant dans le sens de leur longueur, & se
terminent en arrière par un bord, qui, sem-
blable dans les mains à une lunule, s’en-
fonce dans un repli de la peau. C’est sur
cette espèce de racine qu’ils croissent cha-
que jour, assez sensiblement pour dépasser
bientôt le niveau de la pulpe digitale, & se
renouveler en entier tous les six mois.

SECTION DIX-HUITIÈME.
Du Goût.


231. La langue & quelques autres parties
de la bouche, telles que le milieu du palais,
l’arrière-bouche, l’intérieur des joues, &
[Seite 125] même les lèvres, nous sont distinguer les
qualités sapides des corps; mais c’est prin-
cipalement dans l’impression que ces qualités
sont sur la langue, que consiste le goût:
les autres parties ne sont guères sensibles
qu’à l’irritation plus forte des substances
âcres & amères.

232. Ce corps, doué d’une sensibilité
si exquise, est très-agile, très-souple, d’une
figure assez inconstante, & d’une texture
charnue qui ne peut être comparée qu’à
celle du coeur.

233. Il s’enveloppe de tégumens assez
semblables aux tégumens communs: une
surpeau lui tient lieu de l’épiderme; au-
dessous d’elle est le réseau de Malpighy(1),
il a plus profondément une membrane ma-
melonnée, dont le tissu diffère à peine de
de celui du corium.

234. Les particularités les plus remar-
quables qui s’y observent, se tirent, l’une
de la nature du liquide qui humecte la sur-
peau; ce n’est plus cette humeur onctueuse
qui lubréfie toute l’habitude du corps; c’est
un mucus particulier, que fournissent le
trou borgne de Meibonius, & quelques
glandes de Morgagny; l’autre résulte dè la
figure des papilles qui sont semées sur toute
[Seite 126] l’étendue de la langue: on les a distribuées
en trois classes, celles appelées coniques,
beaucoup moins nombreuses, occupent la
partie postérieure ou la base, sur laquelle
elles se répandent en forme de croissant; les
pétiolées & les obtuses, dont les degrés de dé-
veloppement sont très-variés, couvrent in-
distinctement toute sa surface, mais plus par-
ticulièrement ses bords & son sommet, où le
sentiment du goût est beaucoup plus vif(1).

235. Il est probable que ces papilles
doivent leur sensibilité aux nombreuses ra-
mifications du nerf lingual, branche de la
cinquième paire. La langue reçoit encore
la neuvième paire, & un rameau de la hui-
tième; mais ceux-ci paroissent plutôt lui
imprimer les mouvemens nécessaires pour
l’exercice de la mastication, de la dégluti-
tion & de la prononciation.

236. Il ne suffit pas à la langue, pour
savourer parfaitement un corps, de s’ap-
pliquer sur lui, il faut qu’elle soit légère-
ment humectée, que ce corps le soit éga-
lement, & de plus qu’il abonde en sels dis-
sous. Si l’une ou l’autre sont desséchés,
elle exercera, il est vrai, sur lui un tou-
cher fort délicat; mais elle ne parviendra
pas à le goûter. On a observé que quand
[Seite 127] elle savoure des substances de haut goût,
les papilles qui occupent sa pointe & ses
bords éprouvent une sorte d’érection.

SECTION DIX-NEUVIÈME.
De l’Odorat.


237. Ce sens précieux nous fait res-
sentir les émanations des corps odorans,
qui, appelées dans les narines par l’acte de
l’inspiration, affectent sur-tout cette portion
de la membrane de Schneider, qui revêt les
deux côtés de la cloison, & la convexité
des cornets.

238. Quoique cette membrane tapisse
tout l’intérieur des fosses nasales(1),
quoiqu’elle se prolonge dans toutes les ca-
vités qui communiquent avec elles, ses
usages ne sont pas par-tout les mêmes. Sa
portion qui recouvre les narines anté-
rieures, semblable à la peau commune, est
couverte de follicules sébacés, & de poils
qui en naissent; celle qui adhère à la cloi-
[Seite 128] son & aux cornets, est fongueuse, & loge
un nombre infini de cryptes glanduleux,
destinés à sécréter une humeur muqueuse;
celle enfin qui se prolonge dans les sinus
frontaux, sphénoïdaux, ethmoïdaux &
maxillaires, est excessivement mince, &
disparoît en quelque sorte sous la multitude
des vaisseaux sanguins, qui y exhalent une
eau aussi légère que celle de la rosée.

239. La principale, pour ne pas dire
l’unique fonction des sinus(1), est de four-
nir cette humeur aqueuse qui, se portant
d’abord dans les trois méats des narines,
se répand ensuite sur tous les siéges que
nous avons assignés à l’odorat, & les en-
tretient dans l’état d’humidité que la sub-
tilité de ce sens exige. Aussi les sinus sont
tellement distribués à l’entour des fosses na-
sales, que, quelle que soit la position de la
tête, il en est toujours qui se vident dans
leur intérieur.

240. La portion fongueuse de la mem-
brane pituitaire, celle où s’exerce sur-tout
l’odorat, reçoit un nombre prodigieux de
vaisseaux sanguins, d’amant plus remar-
quables, qu’il n’en est aucune autre part
dans le corps humain qui fournissent à des
[Seite 129] hémorragies spontanées plus fréquentes.
Elle reçoit encore les nerfs de la première
paire & deux rameaux de la cinquième. La
première distribution paroît être seule la cause
prochaine & immédiate, de son aptitude à
distinguer les odeurs(1); les deux autres
concourent seulement à lui donner cette
sensibilité générale, de laquelle naît l’éter-
nument, &c.

241. Les extrémités des filets de cette
première paire ne se terminent pas en pa-
pilles, comme nous avons remarqué se ter-
miner celles qui se distribuent aux organes du
toucher & du goût, mais en un parenchyme
spongieux, qu’on distingue à peine de la
membrane dans laquelle ils s’épanouissent.

242. Le siége de l’odorat est très resserré
& très-imparfait dans les sujets nouveaux-
nés; les sinus ne sont presque pas formés
chez eux; aussi ne jouissent-ils de ce troi-
sième sens que fort tard, & à mesure que
[Seite 130] leurs narines se développent; il est ensuite
d’autant plus parfait, que les fosses dans les-
quelles il réside, sont plus amples & mieux
configurées(1).

243. Nous devons observer avant de
terminer cet article, qu’il n’est aucun autre
sens externe qui entretienne des rapports
aussi intimes, qui commande même aussi
impérieusement au sensorium & aux sens
internes que celui-ci. Il n’en est aucun qui
ait des appétits propres plus nombreux &
plus décidés, ou dont la manière d’être
affecté, détermine ou réprime plus facile-
ment un sentiment de défaillance. Il n’en est
[Seite 131] aucun susceptible d’impressions plus douces
& plus délicates; c’est pour cette raison
que Rousseau l’a si bien dénommé le sens de
l’imagination.
Enfin, il n’est aucune autre
sensation qui paroisse rappeler des souvenirs
aussi vifs, que celle qui a été transmise à
l’ame par l’effet d’une odeur particulière,
agréable ou désagréable.

SECTION VINGTIÈME.
De l’Ouïe.


244. Le son est produit par le choc des
corps élastiques, & les vibrations de leurs
parties communiquées à l’air environnant.
Pour en avoir la perception, il faut que l’air
ébranlé parvienne à l’oreille externe, espèce
de conque cartilagineuse & mobile chez
quelques sujets; qu’il passe dans le méat
auditif,
constamment lubréfié par une li-
queur jaune & amère; qu’il heurte la mem-
brane du tambour,
obliquement située à l’ex-
trémité de ce conduit, & enchassée dans la
rainure annulaire de l’os des tempes.

[Seite 132]

245. Derrière cette membrane, est l’o-
reille moyenne, ou la caisse du tambour,
disposée en sorte que son fond regarde à
la fois en haut & en dedans. Elle renferme
trois osselets(1), dont le plus extérieur ou
le marteau adhère par son manche à la mem-
brane du tympan, tandis que son apophyse
aiguë qui se porte en avant, répond chez
les adultes au sillon annulaire; & sa tête
arrondie, au corps de l’enclume avec lequel
elle s’articule. L’enclume située à-peu-près
dans le milieu de la caisse, se continue par
l’extrémité de sa plus longue branche, avec
la petite tête que l’étrier étend jusqu’à elle;
enfin, l’étrier reposant par sa base sur la
fenêtre ovale, se dirige vers le vestibule
du labyrinthe, dans lequel le son, après
avoir ébranlé la membrane du tambour,
est introduit par la communication de ces
trois osselets.

246. La trompe d’Eustache, qui part du
fond de l’arrière-branche, arrive dans la caisse
du tambour; la rampe inférieure du limaçon s’y
termineroit également, mais elle est bornée
par une membrane très-mince qui bouche
la fenêtre ronde. Nous ne connoissons pas
encore assez les usages de ces parties.

247. Dans la profondeur du rocher, est
[Seite 133] creusé le labyrinthe, ou l’oreille; interne; &
on remarque dans cette cavité, le vestibule
qui occupe le milieu, les cinq embouchures
des canaux sémi-lunaires placés en arrière;
& la rampe supèrieure du limaçon située en
avant: les canaux & la rampe viennent,
ainsi que la fenêtre ovale, s’ouvrir dans le
vestibule.

248. Le labyrinthe est rempli d’une sèro-
rositè,
que Cotunni dont elle porte le nom,
nous apprend être résorbée par deux ca-
naux, qu’il appelle les aqueducs(1); l’un
des deux, part du vestibule; & l’autre, de la
rampe inférieure.

249. La portion molle de la septième
paire, & sa portion dure qui traverse en-
suite l’aqueduc de Fallope, s’introduisent
dans le conduit acoustique interne, & en-
voient leurs filets médullaires à son fond
cribleux, les partageant entre le vestibule,
les canaux sémi-lunaires, & la base du lima-
çon. Ils se distribuent à ces parties, de ma-
nière à former par leur réunion, des espèces
de bandelettes qui s’étendent entre les deux
lames de la cloison du limaçon.

250. Telle la structure de l’oreille. Ache-
vons d’examiner comment elle perçoit les
sons.

Nous avons vu parvenir cet objet de
l’ouïe à la fenêtre ovale; de-là il se pro-
[Seite 134] page dans le vestibule, où par l’intermède
de la sérositè qui s’y recueille, il ébranle
les nerfs auditifs eux-mêmes, distribués avec
le plus grand art dans les anfractuosités du
labyrinthe.

251. S’il se porte avec trop de violence
contre la membrane & la caisse du tambour,
il trouve bientôt des modérateurs, soit
dans les muscles de l’étrier & du marteau
qui se contractent ou se relâchent à vo-
lonté, soit dans la corde du tympan qui ne
peut être tendue qu’à cet effet entre le
manche du marteau & le pied le plus long
de l’enclume.

SECTION VINGT-UNIÈME.
De la Vue.


252. Les yeux sont les organes de la
vue(1); ils ont presque une forme sphé-
rique, sont mobiles sur eux-mêmes, &
tiennent aux nerfs optiques, comme à des
péduncules, dont l’insertion repondroit à
leur partie postérieure & un peu interne:
que l’imagination suppose un axe qui tra-
verse, non leur milieu, mais celle de leurs
portions latérales qui est la plus rappro-
[Seite 135] chée du nez; c’est à l’extrémité profonde
de cet axe que chaque nerf s’implante.

253. L’un & l’autre oeil est composé
de différentes membranes, & de trois prin-
cipales humeurs, celles-ci assez transpa-
rentes, quoique d’inégale densité, pour
laisser aux rayons lumineux une voie qu’ils
puissent librement parcourir, c’est-à-dire,
pour leur permettre de traverser l’es-
pace entier qui se trouve entre le seg-
ment fenestré qu’on voit saillir extérieu-
rement, & le point diamétralement op-
posé.

254. La plus extérieure de ces mem-
branes est connue sous le nom de scléro-
tique:
dans le contour de l’ouverure qu’elle
forme en avant, est enchassée la cornée
transparente, qui, faite de plusieurs lames,
& plus ou moins convexe, représente sur
l’oeil une petite portion de sphère, placée
sur un globe un peu plus grand.

255. Derrière la sclérotique est une se-
condé membrane parsemée d’un grand
nombre de vaisseaux sanguins, sur-tout
de veines, qui se contournent dans son
épaisseur en sens opposé; on l’appelle
choroïde: ses deux faces sont enduites
d’un vernis noirâtre, beaucoup plus épais
sur sa face concave, où on le prendroit
pour une forte couche du mucus.

256. Plus profondément encore est si-
tuée la rétine, ce prolongement pulpeux
& médullaire que le nerf optique déploie
[Seite 136] sous la sclérotique & la choroïde, après
les avoir percées l’une & l’autre dans leur
partie postérieure.

257. Le bord antérieur de la choroïde
se termine par un ligament celluleux, ap-
pelé cercle ciliaire, dont les usages sont
d’unir très-étroitement le sclérotique avec
la membrane à laquelle il appartient, & de
donner attache à deux autres cercles mem-
braneux, l’iris & les procès ciliaires.

258. L’iris, dont la face profonde,
teinte en brun, porte le nom d’uvée,
flotte derrière la cornée transparente,
entre deux humeurs aqueuses: elle est lé-
gèrement convexe en avant, un peu res-
serrée du côté du nez, & plus large vers
les tempes. Sa texture est incontestable-
ment celluleuse, & ne paroît admettre
aucune fibre charnue; nous croyons donc
avec Zinn, que c’est une membrane exis-
tante par elle-même, & indépendante de
la choroïde. Sa face externe ne présente
pas la même couleur dans tous les sujets;
mais dans tous, à moins qu’un état de
mort ne l’ait affaissée sur elle-même, elle
a un aspect singuliérement floconneux.

259. C’est sur cette face antérieure que
se distribuent les vaisseaux sanguins en-
voyés à l’iris par les artères ciliaires
longues; ils se répandent dans le foetus
sur la membrane pupillaire, dont l’effet est
de maintenir l’iris étendue, dans le temps
où l’accroissement de l’oeil se fait avec le
[Seite 137] plus de rapidité, & de la préparer ainsi
aux mouvemens qu’elle doit exercer dans
la suite. J’ai exposé ceci plus au long
dans un autre ouvrage(1).

A l’époque du septième ou huitième
mois de la grossesse, l’oeil avant déjà ac-
quis un dégré de développement considé-
rable, cette membrane commence à s’en-
trouvrir dans son centre, les arcs elliptiques
de ses vaisseaux se reploient insensiblement
sur eux-mêmes, & viennent former, si je
ne me trompe, l’anneau interne de l’iris; au
moins puis je assurer n’avoir jamais pu le
découvrir avant ce terme.

260. Au-delà de l’iris est le corps ciliaire;
il s’unit au cercle de même nom par son
bord externe qui est fort épais(2), tandis
que son bord interne, beaucoup plus mince,
entoure la capsule du cristallin. Il est éga-
lement teint de ce mucilage brun, dont
nous avons déjà parlé. Sa face antérieure,
qui regarde l’uvée, est striée sur sa face
postérieure qui embrasse le corps vitré; on
distingue environ soixante-dix plis vascu-
leux & floconneux, dont le brillant, l’ordre
& la délicatesse forment l’appareil le plus
[Seite 138] élégant à voir. Ce sont proprement ces
plis qu’on désigne sous le nom de procès
ciliaires.

261. Telles les membranes que nous
avions à décrire: examinons maintenant
les humeurs qu’elles contiennent. La plus
considérable, puisqu’elle seule remplit toute
la partie postérieure de l’oeil, est l’humeur
vitrée;
c’est un amas prodigieux de goutte-
lettes, contenues dans autant de cellules
de la membrane hyaloïde; leur diffusion dans
cette multitude de loges forme un corps
membrano-lymphatique, qui ne sauroit
être mieux comparé qu’à une masse gé-
latineuse.

262. Plus antérieurement est situé le
cristallin, ou ce corps lenticulaire, ren-
fermé & baigné par l’humeur de Morgagny,
dans une capsule avec laquelle s’unit le corps
vitré, après l’avoir entouré de la zone ci-
liaire.
Celui-ci est d’une texture celluleuse
plus serrée que celle du corps vitré, néan-
moins également transparente; il admet si
peu d’eau, que, pressé entre les doigts,
il se résout en une espèce de gluten fort
brillant, mais extrêmement tenace.

263. Le reste de l’intérieur de l’oeil est
occupé par une humeur aqueuse très-limpide:
l’espace qui la contient est divisé en deux
chambres, dont l’une antérieure & plus
grande, s’étend de la cornée à l’iris, &
l’autre postérieure & plus petite, se con-
tinue depuis l’uvée jusqu’au corps ciliaire.

[Seite 139]

264. Voilà ce que sont les yeux, ce
bel ouvrage de la nature, que Pline l’an-
cien appeloit avec raison les parties du
corps les plus précieuses. Aussi rien de ce
qui peut assurer leur conservation, & les
garantir des injures extérieures, n’a été
négligé; ils sont logés dans deux fosses
très-solides, qui embrassent toute leur cir-
conférence; ils sont encore protégés par
les paupières qui s’ouvrent & se ferment
à volonté sur eux.

Deux expansions de la peau forment
ces voiles mobiles; on trouve dans leur
épaisseur plusieurs rangées de follicules
sébacés,
appelées du nom de Meibonius;
on voit leurs bords libres armés de poils
ou cils; ils se terminent enfin par les
cartilages tarses, qui, en les développant,
leur aident à se mouvoir.

La paupière supérieure est de plus cou-
verte par les sourcils, dont l’usage est
d’arrêter la sueur qui coule du front &
de la tête, & de modérer l’impression
sur les yeux, d’une lumière trop vive.

265. Une autre preuve de l’intérêt que
la nature prend à leur conservation, c’est
la source de larmes qu’épanche sur eux
une glande conglomérée, située dans la
partie supérieure & externe de l’orbite.
Les larmes servent à entretenir l’oeil, à
maintenir sa splendeur, & à le nettoyer
de tout corps étranger. Elles sont versées
par des conduits excréteurs très-petits,
[Seite 140] mais si nombreux, qu’ils peuvent, dit-
on, fournir à chacun de ces organes en-
viron deux onces de cette humeur dans
l’intervalle seulement de vingt-quatre heu-
res; elles sont ensuite reprises par les
points lacrymaux, qui, semblables à des
cornes de limaçon, les recueillent, &
s’en déchargent dans le sac lacrymal,
d’où elles coulent dans le méat inférieur
des fosses nasales.

266. Nous ne pouvions nous dispenser
d’entrer dans ces détails sur la structure du
globe de l’oeil; il nous eût été impos-
sible, sans eux, de faire comprendre
comment s’opère la vision. Essayons ac-
tuellement de dévoiler le mécanisme de
cette fonction importante.

Les rayons de lumière qui tombent sur
la cornée & la pénètrent, se réfractent
en raison de sa densité & de sa figure
convexe, & forment un angle plus aigu
que ne l’est celui de quarante-huit
degrés.

Ils subissent un moindre changement de
direction en parcourant l’humeur aqueuse.

Le cristallin les force de nouveau à se
plier davantage, lorsqu’ils se présentent à
lui, après avoir passé la pupille.

Ils se rétablissent un peu en traversant
l’humeur vitrée; cependant ils sont encore
assez rompus pour se rapprocher de la ligne
perpendiculaire, & se diriger ainsi sur la
rétine. C’est sur cette membrane qu’ils
[Seite 141] peignent les images des objets desquels
ils partent; mais ils les peignent selon les
loix de la réfraction, dans une situation
renversée.

267. Ce n’est pas sans raison que l’Au-
teur de toutes choses a établi cette diffé-
rence de densité entre les milieux que la
lumière doit parcourir; elle est le seul
moyen de réunir en un même soyer des
rayons qu’eussent trop fait diverger, &
la réfrangibilité des couleurs, & la figure
des cristallins.

268. On a coutume de demander ici
comment il se peut que nous voyions dans
leur position naturelle, des objets qui se
peignent à nos yeux dans une situation
renversée: il suffit, pour résoudre cette
espèce de problème, de considérer que,
par rapport à nous, toutes les positions
sont relatives, & que les corps ne nous
paroissent renversés qu’autant que nous
les comparons à d’autres qui nous semblent
être droits: si donc tous les corps & le
notre propre affectent sur la rétine une
même position relative, leurs rapports de
position devront être tels que s’ils nous
étoient en effet représentés droits, &,
par ce moyen, notre ame, à qui l’image
des objets & la sensation qu’ils excitent,
sont en même temps transmis, est sûre-
ment à l’abri de toute erreur.

269. Mais ce ne sont pas là les seules
conditions requises pour la perfection de
[Seite 142] la vue; il en est plusieurs autres que le
Créateur a prévu devoir être remplies;
aussi a-t-il assigné à la plupart des parties
qui composent nos yeux, des usages dif-
férens.

Il faut d’abord une quantité de lumière
déterminée. Trop grande, la vue est
éblouie; trop foible, les objets restent
dans l’obscurité. Examinons si nos organes
ne sont pas disposés de manière à admettre
plus ou moins de rayons lumineux, selon
que la lumière est plus ou moins vive,
& comment est absorbé l’excès de celle-ci,
qui seroit nuisible à la vision.

270. C’est l’iris qui mesure la quantité
de rayons qui doivent entrer dans l’oeil;
la mobilité de cette membrane lui permet
de s’accommoder exactement à l’état de
la lumière, & à la distance des objets:
si l’une est trop vive ou les autres trop
rapprochés, en se développant, elle res-
serre la pupille; elle la dilate, au con-
traire, en se repliant, si la lumière est
trop foible ou les objets trop éloignés.

Les physiologistes, pour expliquer ce
mouvement, le supposent déterminé par
des fibres musculaires, qu’ils créent dans
l’iris, ou le rapportent aux divers degrés
de force avec lesquels le sang agit contre
ses vaisseaux. Pour nous, nous rejetons
également l’une & l’autre de ces hypo-
thèses. Il nous paroît beaucoup plus na-
turel d’en chercher la cause prochaine dans
[Seite 143] la vie propre de l’iris, & la cause éloignée
dans la réaction du sensorium contre cette
membrane.

271. L’excès de la lumière est absorbé
par l’enduit noirâtre qui teint la choroïde,
l’uvée & le corps ciliaire. Nous ne sommes
pas seulement convaincus que cette hu-
meur contribue ainsi à faciliter l’action de
voir, nous n’en sommes pas seulement con-
vaincus par la dissection des yeux de plu-
sieurs espèces d’animaux, mais sur-tout par
l’état de la vue des nègres blancs, que le
défaut de cette couleur rend très foibles, &
extrêmement sensibles à l’impression de la
lumière(1).

272. Il est encore nécessaire que le foyer
dans lequel se rassemblent les rayons réfrac-
tés, ne soit placé ni trop en avant, ni trop
au-delà de la rétine, mais précisément sur
elle. Le premier vice de conformation est
celui des myopes, dont la cornée & le cris-
tallin sont trop convexes. Le second est
celui des presbytes, chez qui ces mêmes
organes sont trop applatis.

273. Une suffit pas à l’oeil d’être bien
conformé, pour distinguer avec une facilité
égale les objets plus ou moins rapprochés
de lui; il faut de plus qu’il puisse s’accom-
moder lui-même à leurs degrés de distance.
[Seite 144] Nous pensons que les muscles droits,
comprimant le globe, lui procurent en
grande partie cet avantage; entr’autres rai-
sons qui nous portent à le croire, nous
citons de préférence celle que nous four-
nissent la structure particulière & l’éton-
nante souplesse de la sclérotique des pho-
ques groenlandaises; la nature leur a accordé
une vue plus parfaite, parce qu’étant am-
phybies, elles l’exercent tour-à-tour dans
des milieux d’une densité absolument diffé-
rente.

274. Nous devons à ces mêmes muscles
le mouvement presque perpétuel, mais in-
sensible, qui dirige nos yeux vers les objets
environnans, & les fixe sur celui qui nous
présente plus d’intérêt.

Quoique toute la rétine soit fort sensi-
ble, il est quelques points de son étendue
où les rayons lumineux ne produisent au-
cun effet. La fameuse expérience de M.
Mariotte(1) démontre que la vision ne se
fait pas en elle, à l’endroit de l’insertion du
nerf optique(2), auquel aboutit le vérita-
ble axe de l’oeil.

[Seite 145]

Il est constant, d’autre part, que c’est
dans celui qui répond au centre de la cor-
née, & auquel se termine l’axe imaginaire.

Ce n’est cependant pas à dire, ainsi que
l’observe Kaestner contre Boerhaave, que
l’oeil étant immobile, on ne voie distincte-
ment qu’un seul point d’un objet; & que
pour embrasser toute son étendue, il faille
successivement promener l’axe de cet organe
sur toutes ses parties; nous éprouvons au
contraire chaque jour, que dès qu’un objet
nous frappe, nous en avons aussitôt la sen-
sation une & entière.

275. L’habitude de diriger promptement
notre vue vers un point déterminé, est
l’ouvrage du temps & de l’exercice; ce fait
est assez prouvé par l’exemple de ceux qui,
nés aveugles, acquièrent la vue lorsqu’ils
sont parvenus à un âge adulte; ou par celui
des enfans du premier âge qui n’obtiennent
cette facilité qu’aux environs du troisieme
mois après leur naissance.

276. Quoique l’on voie des deux yeux,
on ne voit point les objets doubles, autre
effet de l’usage & de l’habitude: aussi les
nouveaux nés paroissent-ils diplopes; aussi,
lorsque certaines maladies des yeux se sont
accompagnées de ce défaut, un nouvel
exercice le corrige.

[Seite 146]

277. M. Jurine pense que la force des
deux yeux réunie, ne l’emporte que d’un
treizième sur celle d’un oeil exercé séparé-
ment; bien plus, il y a long-temps que
le fameux peintre Leon. Davinci a observé
que pour mieux juger la distance d’un objet,
il ne le falloit considérer que d’un oeil.

278. Il est difficile de déterminer jusqu’à
quel degré de petitesse un corps est per-
ceptible. Tout ce que nous savons, c’est
qu’en général, l’angle de la vision doit ex-
céder un peu l’étendue de trente-quatre
secondes. Tob. Mayer qui a établi ce prin-
cipe sur de fort belles expériences, prouve
en même temps, que la perfection de notre
vue consiste sur-tout, en ce que ce point
physique varie à peine, quelle que soit la
lumière qui nous éclaire; nous voyons en
effet presqu’aussi nettement, & à la clarté
du soleil le plus brillant, & à la lueur
d’un pâle flambeau.

279. On peut inférer de-là, que quoique
certains objets ne peignent sur la rétine
qu’une image infiniment petite, il est ce-
pendant des circonstances où leur impres-
sion sur elle est allez forte, pour y demeu-
rer gravée, lors même qu’ils ne sont plus
présens.

SECTION VINGT-DEUXIÈME.
Des Sens internes, & des autres Facultés
de l’Ame
(1).

[Seite 147]

280. Les sens externes dont nous ve-
nons de donner la description, ne se bor-
nent pas à entretenir des relations physiques
avec les êtres extérieurs; ils communiquent
encore avec la plus noble partie de nous-
mêmes, l’amé; & développent en elle tout
le systême de ses idées. Il n’est rien, d’après
cet adage philosophique très-connu, il n’est
rien dans notre entendement, qui n’ait d’a-
bord affecté nos sens.

281. Mais, quel usage sera l’ame des
idées que lui suggèrent les sens, si elle n’a
des facultés propres à les saisir & à les
conserver? Elle les possède en effet; &
quoique celles-ci diffèrent essentiellement
des forces vitales que nous avons vu être
l’apanage exclusif des corps, le systême
nerveux leur fait mutuellement contracter
une union si intime, que de cette union
résultent tous les rapports qui lient le corps
& l’ame.

[Seite 148]

282. L’entendement est la première de ces
facultés; il n’est cependant pas la plus no-
ble: ses fonctions se réduisent, à saisir les
impressions que les sens éprouvent & trans-
mettent à l’ame.

283. A cette faculté succède l’attention,
dont les devoirs sont bien plus importans;
elle fixe l’ame sur l’idée qui lui a été pré-
sentée, & la force en quelque sorte à ne
s’occuper que d’elle.

284. Il en est deux autres qu’on appelle
sens internes; leur fonction est de conserver
les idées déjà reçues, de les reproduire avec
plus de force, & de les associer entr’elles.
Telles sont la mémoire & l’imagination: l’une
se borne à recevoir & à retenir des signes
arbitraires; l’autre les peint & leur ajoute
de nouveaux traits: l’imagination s’attache
de préférence aux idées les plus propres à
exciter des sentimens de plaisir ou d’ennui.

285. De ces différentes manières d’être
affecté, dont l’une agréable & l’autre désa-
gréable, naissent le desir & l’aversion, &
même toutes les déterminations de la volonté.

286. C’est encore l’imagination qui dé-
veloppe les affections de l’ame, ou cette mul-
titude de mouvemens intérieurs qui se plient
à la différence des tempéramens, mais qui
momentanément influent avec tant de force
sur la plupart des fonctions corporelles. Il
n’en est presqu’aucune qui n’ait quelque
action, ou sur le mouvement du coeur,
ou sur l’appétit des alimens, ou sur le mode
[Seite 149] de leur digestion; c’est ainsi que nous voyons
la honte exciter la rougeur, l’amour ou la
haine maîtriser les fonctions sexuelles, la
colère s’exercer sur la sécrétion de la
bile, &c.

L’examen de ce qu’elles peuvent sur nos
corps, les a sait diviser en deux classes
générales: les unes, comme la joie, l’a-
mour, l’espérance, la colère, &c. excitent
le mouvement de nos parties; les autres au
contraire, l’affoiblissent; telles la crainte,
la tristesse, la nostalgie & quelques desirs
semblables, la terreur, l’envie, &c.

287. Toutes les facultés de l’ame dont
nous venons de parler, sont communes à
l’homme & à tous les autres animaux; nous
ne différons d’eux à cet égard, qu’en ce
que nous les possédons dans un plus haut
degré de perfection. Quel est en effet,
parmi les brutes, celle qui a une mémoire
aussi sûre & aussi étendue, une imagination
aussi vive, & des passions aussi véhémentes?

288. Mais ce qui distingue essentielle-
ment l’homme, c’est que seul il a l’usage
de la raison. A l’aide de cette prérogative,
il compare ses idées, il s’en forme d’abs-
traites, il dirige presqu’à volonté les fa-
cultés de son ame.

La nature, au lieu de la raison, a donné
l’instinct aux autres animaux. C’est un mou-
vement aveugle & involontaire, qui les
pousse vers les actes à l’exercice desquels
ils sont appelés. On pourroit dire de l’homme
[Seite 150] qu’il en est absolument libre, s’il n’étoit
soumis à l’empire de l’amour.

289. On sent déjà combien grande est
la différence qui se trouve entre la raison
humaine & l’instinct des animaux. L’ins-
tinct est une faculté innée; l’usage de
la raison ne s’acquiert que par l’éduca-
tion & la culture. L’instinct n’est suscep-
tible d’aucun degré de perfection; le dé-
veloppement de la raison ne connoît point
de bornes. L’instinct de chaque animal est
subordonné à son genre de vie, au climat
qu’il habite, &c. L’homme, au contraire,
habitant de l’univers entier, n’est lié à
aucune manière de vivre: l’homme a des
desirs infinis que sa raison lui permet de
satisfaire, & ceux de l’animal sont bornés
à l’insuffisance de son instinct.

Il est un autre privilège que nous de-
vons encore à la raison, c’est l’usage de
la parole; il n’est que nous qui en soyons
doués; la voix seulement est le partage
des autres animaux.

SECTION VINGT-TROISIÈME.
Des Actions du corps qui sont soumises
à l’empire de la volonté.

[Seite 151]

290. Les nerfs sont les organes du
sentiment & du mouvement: nous les
avons déjà considérés sous le premier
point de vue, il nous reste à les étudier
sous le second.

291. Nous distinguerons les mouvemens
de toutes les parties du corps, en mou-
vemens volontaires, & en mouvemens
involontaires: les battemens réguliers du
coeur, le mouvement péristaltique des
intestins & de quelques autres viscères,
appartiennent à cette dernière classe; nous
rangerons dans la première l’action du très-
grand nombre des muscles. Mais à la-
quelle rapporter la respiration, l’éternue-
roent, la tension de la membrane du tam-
bour, &c. que les uns soumettent, & les
autres enlèvent à l’empire de la volonté?

292. En réfléchissant davantage sur la
nature de cette division, on voit qu’elle
s’entoure de difficultés très-graves, & de
plus, qu’il est à peine possible de mar-
quer une ligne de séparation entre les deux
classes qu’elle embrasse. D’une part, il est
[Seite 152] très-peu de fonctions sur lesquelles on
puisse dire que la volonté n’influe aucu-
nement, sur-tout si l’on associe à la vo-
lonté l’imagination & les passions de l’ame.
De l’autre, combien de mouvemens mus-
culaires, qui, essentiellement dépendans
de la volonté, ne sont toutefois déter-
minés que par la force de l’habitude? En
général, cette force entre pour beaucoup
dans presque tous les mouvemens des ani-
maux.

293. Parmi les mouvemens musculaires,
subordonnés à l’empire de la volonté, il
en est qui s’exécutent, non-seulement à
son insu, mais encore malgré elle. C’est
ainsi qu’il nous arrive, malgré nous, de
clignotter les yeux lorsque nous en voyons
approcher les doigts d’un ami, que nous sa-
vons ne les devoir pas toucher; c’est ainsi
que la plupart des hommes ne peuvent flé-
chir le petit doigt, sans fléchir en même
temps le doigt annulaire. Il n’arrive pas
moins souvent, que nos membres se meuvent
lorsque nous dormons d’un profond som-
meil, & se meuvent à notre insu.

Dans cette même classe de mouvemens
soumis aux loix de la volonté, il en est
qui obéissent le plus communément à ses
ordres, mais qui s’y refusent dans certains
cas. On peut éprouver sur soi-même com-
bien il est difficile de mouvoir à la fois,
dans deux sens circulaires opposés, les
extrémités supérieures & inférieures d’un
[Seite 153] même côté. Ces mouvemens & plusieurs
autres sont séparément d’une exécution
très-facile: pourquoi donc sont-ils presque
impossibles, quand on se propose de les
exercer concurremment(1)?

294. A l’égard des mouvemens qui sont
étrangers au domaine de la volonté, je
n’en connois aucun plus indépendant d’elle
que ceux de contraction de l’uterus, à
l’époque de l’enfantement. Les battemens
du coeur ne le sont pas aussi rigoureuse-
ment: on rapporte l’histoire d’un Capitaine
Anglais qui pouvoit les suspendre à son
gré, ainsi que les diastoles de ses différens
vaisseaux artériels. Ce sait est d’autant plus
digne de foi, qu’il a eu pour témoins ocu-
laires les fameux Baynard & Cheynes. L’ac-
tion de ruminer prouve assez que celle de
l’estomac peut être volontaire; or, j’ai
connu un sujet en qui elle étoit aussi fa-
cile que dans les animaux qui empruntent
de cette fonction leur appellation caracté-
ristique. Les mouvemens de l’iris sont in-
volontaires dans presque tous les hommes;
je tiens cependant de témoins fort graves
l’observation d’un particulier qui soumettoit
aisément cette membrane à certains efforts,
qui, en conséquence, pouvoit, à un jour
très-foible, resserrer aussi étroitement sa
[Seite 154] pupille, que si elle eût été amenée à ce
degré de contraction par l’impression de la
lumière la plus vive.

Il en est de même de plusieurs autres
mouvemens, dont il est possible de
vaincre l’indépendance, à l’aide sur-tout
de l’attention & de l’imagination; j’ai vu
plusieurs personnes pouvoir, à chaque ins-
tant, s’exciter à un frissonnement spasmo-
dique général, en se rappelant l’idée de
quelques sensations désagréables.

295. On devroit peut-être chercher
l’explication de ces divers faits dans la
réaction du sensorium stimulé par l’ima-
gination; celle-ci, en effet, dans plusieurs
circonstances, n’agit pas moins puissamment
sur lui qu’un stimulus réel. Il est même,
dans l’économie animale, un grand nombre
de phénomènes, dont on ne sauroit rendre
d’autre raison: telles sont la plupart des
causes qui déterminent l’érection du mem-
bre viril.

296. Au reste, les mouvemens volon-
taires sont les caractères principaux, qui
distinguent le règne animal du règne vé-
gétal: on les retrouve chez tous les ani-
maux, & il n’est aucune plante dans la-
quelle on puisse même les soupçonner.

297. Ils sont encore pour nous le té-
moignage le plus frappant de l’harmonie
qui règne entre le corps & l’ame; il suf-
fit, pour sentir cette vérité, de réfléchir
un peu sur l’étonnante promptitude avec
[Seite 155] laquelle se meuvent les doigts d’un habile
joueur d’instrumens, ou les organes de
la voix d’une personne qui parle.

SECTION VINGT-QUATRIÈME.
De Mouvement musculaire.


298. Les muscles sont les organes im-
médiats de la plupart de nos mouvemens;
ils forment la masse la plus volumineuse des
parties similaires.

299. On les distingue de toutes les autres
par leur structure, & par le genre de force
vitale qui leur est propre.

300. Ils sont composés de fibres char-
nues d’un rouge pâle, disposées en fais-
ceaux très-compactes; ces faisceaux se
divisent en d’autres plus petits, ceux-ci
en de plus petits encore, & les derniers
en fibres & en fibrilles dont la continuité
échappe à la vue.

301. Chaque muscle est renfermé dans
une gaîne cellulaire, qui, pénétrant sa
propre substance, & s’introduisant entre
toutes les parties qui le composent, forme
une enveloppe particulière aux faisceaux
les plus considérables, à ceux qui le sont
moins enfin aux fibres & aux fibrilles
elles mêmes.

[Seite 156]

302. Leur tissu est parsemé d’une infi-
nité de vaisseaux sanguins & de filets
nerveux, dont les uns dégénèrent en une
pulpe imperceptible, qui se confond avec
les fibres musculaires; & les autres se di-
visent en un si grand nombre de petites
ramifications, que la chair des muscles en
paroît uniquement composée: ce sont ces
derniers qui le saturent de sang, & lui
donnent sa couleur rouge: on lui rend,
par une longue macération, celle qui lui
est naturelle.

303. La plupart des muscles se ter-
minent par des tendons qui sont égale-
ment des parties fibreuses, mais d’une na-
ture que la couleur, le tissu(1), l’élasti-
cité attestent, au premier coup d’oeil, être
essentiellement différente. C’est donc à
grand tort que des physiologistes ont
soutenu que les fibres tendineuses étoient
la continuation des fibres musculaires. Ils
avoient sans doute été induits en erreur
par la comparaison des muscles d’un adulte
[Seite 157] avec ceux d’un enfant, qui semble, il est
vrai, prouver que la fibre musculaire de-
vient tendineuse avec l’âge.

304. Un second caractère qui appartient
aux muscles, exclusivement à toute autre
partie du corps, c’est l’irritabilité hallé-
riénne
(1), que nous avons déjà définie &
distinguée de la contractilité, mais que nous
allons exposer ici dans un plus grand
jour.

305. L’irritabilité est une force essentiel-
lement propre aux muscles: elle est com-
mune à tous; cependant tous ne la possé-
dent pas au même degré; ils en sont doués
en raison de la supériorité qu’ils ont les uns
sur les autres.

Les muscles creux dont les usages se rap-
portent aux fonctions vitales & naturelles,
tiennent le premier rang; on distingue parmi
eux le coeur, qui jouit sur-tout dans sa
surface interne, de l’irritabilité la plus vive
& la plus soutenue. On remarque ensuite
[Seite 158] le canal intestinal, & principalement les
intestins grêles, qui dans les animaux à
sang chaud, se contractent quelquefois sous
le contact d’un stimulus irritant, lors même
que la vie du coeur est complettement
éteinte. Après eux vient l’estomac, & après
celui-ci la vessie.

A cet ordre de muscles, succèdent ceux
qui servent à la respiration; tels sont le
diaphragme, les intercostaux, & le trian-
gulaire du sternum: tous les autres mus-
cles forment une troisième classe, & jouis-
sent d’une irritabilité à peu près égale.

On retrouve l’irritabilité dans les artè-
res, mais elle y est plus foible; les troncs
veineux contenus dans la poitrine en sont
également doués; elle est incomparable-
ment moindre dans les autres veines, si
toutefois elle y existe réellement.

306. Le grand Haller, dont l’autorité
est d’un si grand poids en cette matière,
me paroît l’avoir accordée trop légèrement
à plusieurs autres parties; les expériences
que j’ai faites sur elles, m’ont, il est vrai,
prouvé qu’elles étoient contractiles; mais
aucune ne m’y a fait découvrir la plus lé-
gère trace d’irritabilité. De ce nombre sont
les vaisseaux lactés, les glandes, la vési-
cule du fiel, l’utérus, le dartos & la verge.

Je ne vois pas sur quel fondement, d’au-
tres auteurs jugent irritables l’iris, la sur-
face externe des poumons, &c. Elles me
semblent ne devoir pas plus prétendre à
[Seite 159] cette propriété, que les tégumens com-
muns, les membranes du cerveau, la plèvre,
le péritoine, le périoste, la membrane mé-
dullaire, les tendons, les aponévroses, &
tous les organes composés de tissu cellu-
laire; ou que le foie, la rate, les reins, le
cerveau, la moelle épinière, les nerfs, &
tous les viscères dont la substance est un
parenchyme à eux-propre. L’irritabilité
n’appartient qu’à la fibre musculaire: ces
parties étant privées de l’une, ne sauroient
posséder l’autre.

307. De même qu’on a vu des physio-
logistes confondre l’irritabilité musculaire
avec la contractilitè du tissu celluleux, de
même il s’en est trouvé, dans ces derniers
temps sur-tout, auxquels il plaisoit ne la
pas distinguer de la force nerveuse(1). Nous
avouons que l’action des muscles dépend
beaucoup de l’impression des nerfs; nous
avouons encore qu’il n’est aucune portion
charnue quelque ténue qu’on la suppose,
qui ne reçoive plus ou moins de filets ner-
veux; mais suit il de-là que l’irritabilité
ne soit pas une force particulière, une
force aussi distincte de celle qui appartient
aux nerfs, que de celle qui est propre au
[Seite 160] tissu cellulaire? Et s’il n’en est pas ainsi,
pourquoi ne trouvons-nous l’irritabilité
dans aucune des parties qui ne sont pas
charnues, quoiqu’elles soient d’ailleurs
abondamment pourvues de nerfs, par exem-
ple dans le corium? pourquoi, d’un autre
côté, ne voyons-nous se produire les vé-
ritables effets de cette propriété, que dans
la substance musculaire?

Nous pourrions alléguer plusieurs autres
preuves; nous pourrions au moins faire ob-
server qu’il n’existe aucune proportion entre
la force d’irritabilité dont une partie jouit,
& les distributions nerveuses qu’elle admet;
mais il nous suffit pour motiver notre opi-
nion, des deux premières raisons que nous
avons données: si on les examine de bonne-
foi, & l’une en rapport avec l’autre, elles
sont péremptoires & sans replique.

308. Si on demande quelle part ont les
nerfs au mouvement des muscles, nous
répondrons qu’ils y influent comme causes
éloignées ou excitantes, mais non comme
causes efficientes ou prochaines, ce qui est
le propre de l’irritabilité, ou de cette force
essentielle à la fibre charnue. Ainsi, les
passions de l’ame agissant sur le sensorium,
celui-ci réagit sur les nerfs du coeur, de
manière à y développer l’irritabilité qui pro-
duit la palpitation ou les autres mouvemens
dont cet organe est capable. Ainsi, la volonté
agissant sur le sensorium, celui-ci réagit
sur les nerfs du bras, qui excitent l’irritabilité
à opérer le mouvement musculaire.

[Seite 161]

309. Cette distinction entre les causes
éloignées & prochaines de l’action des mus-
cles, s’accorde parfaitement avec les ob-
servations qu’on a si souvent répétées, sur
les suites de la section ou de la ligature
des nerfs: les parties auxquelles elles se
distribuent, sont aussitôt frappées de para-
lysie; cependant elles conservent encore
très-long-temps après, leur force d’irri-
tabilité.

310. On sait que le sang dont les mus-
cles sont pénétrés aide leur action; mais
on ignore quelle est précisément sur eux
la nature de son influence. Tout ce que
l’expérience de Stenon apprend, c’est que la
ligature de l’aorte ventrale dans un animal
vivant, anéantit presqu’aussitôt le mouve-
ment des extrémités inférieures(1).

311. Outre les forces naturelles aux mus-
cles dont nous venons de parler, forces
communes à tous, il en est de propres à
chacun d’eux, & en quelque sorte acquises;
Elles naissent de leur figure, de leur situa-
tion, &c.; & répondent précisément aux
effets qu’elles doivent produire.

312. C’est ici sur-tout que s’applique la
[Seite 162] division des muscles en creux & en solides.
Nous ne nous occuperons maintenant que
de ces derniers, qui seuls se rapportent aux
fonctions animales, & sont véritablement
soumis a l’empire de la volonté: au con-
traire, nous avons déjà vu que les mus-
cles creux ne lui obéissent qu’accidentelle-
ment, & appartiennent aux fonctions ou
vitales ou naturelles.

313. Les muscles solides offrent des va-
riétés sans nombre: je ne parle pas de celles
qui naissent de leur étendue; il en est assez
d’autres plus importantes que fournissent,
ou la disposition de leurs saisceaux, ou la
direction de leurs fibres, ou les rapports de
leur portion charnue avec leur portion ten-
dineuse, ou le mode de leur insertion & de
leur marche, &c.

314. La figure de la plupart imite celle
d’un fuseau plus ou moins oblong: plus
épais à leur partie moyenne, moins à leurs
extrémités, ils se terminent par des espèces
de cordons tendineux qui ne sont ni con-
tractiles, ni irritables, mais agissent sur les
os auxquels ils s’attachent, comme des le-
viers qu’on appliqueroit sur eux pour les
mouvoir.

315. De même qu’il en est fort peu
qui, à l’exemple du très-large du col, man-
quent de tendons; de même on n’en trouve
presque pas qui ne fixent leurs attaches sur
des parties dures. Tels cependant celui que
nous venons de nommer le cremaster, l’azy-
[Seite 163] gos de la luette; & la plupart de ceux qui
meuvent le globe de l’oeil.

316. Les usages des muscles se divisent
comme leurs forces, en usages communs
& en usages propres.

317. Les premiers ont pour cause im-
médiate l’irritabilité, & appartiennent à
tous; ils consistent dans le raccourcisse-
ment des fibres charnues, qui ne devien-
nent pas seulement plus courtes, mais plus
rigides, moins égales & presqu’angulcuses.
La fameuse expérience de Glisson(1),
semble prouver qu’en même temps elles
se détuméfient un peu(2).

Nous ne tenterons pas, avec les frères
Bernoulli & quelques autres médecins-ma-
thématiciens, de déterminer jusqu’à quel
degré ils se raccourcissent; le résultat de
nos calculs seroit trop peu exact, à raison
des différences qui se trouvent, soit entre
les muscles creux & les muscles solides,
soit entre ces derniers eux mêmes.

318. Les usages propres des muscles
[Seite 164] varient avec leurs forces propres, & ne
peuvent être soumis à aucune loi géné-
rale. Celle même qu’on a coutume d’éta-
blir, en disant qu’un muscle entraîne dans
son action la partie la plus mobile à la-
quelle il s’insère, vers l’autre qui l’est
moins, est sujette, ainsi que l’a remarqué
le sage Winslou, à plusieurs exceptions. Il
se peut, par exemple, que la partie la
moins fixe soit affermie dans sa position
par les efforts réunis de plusieurs autres
muscles, & devienne momentanément la
plus stable.

Par une raison opposée, si l’action des
muscles fléchisseurs paroît ordinairement
l’emporter sur celle des extenseurs; leurs
antagonistes; si, dans l’état d’un repos
parfait, les bras, les doigts, &c., affectent
naturellement une demi-flexion, ce n’est pas
uniquement la contraction des fléchisseurs
qui la produit, c’est aussi le relâchement
volontaire des muscles extenseurs, avec
lesquels la force des premiers se combine.

319. A ces considérations, il en faut
ajouter une qui se tire du mécanisme par-
ticulier de chacune de ces portions char-
nues, mécanisme exactement approprié aux
usages qu’elles doivent remplir(1).

Il est encore d’autres circonstances, qui,
indépendantes de leur figure, ne favorisent
[Seite 165] pas moins leur action: tels sont les liga-
mens annulaires qui ceignent plusieurs
muscles, la graisse qui en enveloppe un
beaucoup plus grand nombre, l’humeur
lymphatique qui les lubréfie tous, &, ce
que nous aurions dû observer avant tout,
la conformation du squelette, la disposi-
tion des éminences, & la structure des
articulations. Il est même des os entiers,
la rotule, par exemple, ou les os sésa-
moïdes, que la nature semble n’avoir
formés que pour aider le mouvement
musculaire.

320. C’est ainsi que se compense, ou
du moins se diminue la déperdition des
forces, suite nécessaire de la stature du
corps & de l’arrangement de ses parties;
car il est évident que les puissances em-
ployées à le mouvoir, perdent d’autant
plus de leur effet, qu’elles s’attachent aux
os sous un angle plus aigu, ou plus près
du centre du mouvement; & que le con-
traire auroit lieu, si elles se fixoient à
une plus grande distance, ou sous un
angle plus obtus.

321. Quoi qu’il en soit, les muscles,
dont on porte le nombre à environ 450
& même au-delà dans quelques individus,
procurent à nos corps deux avantages de
la plus grande importance: ils réunissent,
à une grande agilité qui les rend capables
de toute espèce de mouvement, une force
qui les met en état de soutenir les travaux
[Seite 166] les plus pénibles. Il est vrai que nous ne
jouissons de ces avantages qu’avec le temps;
il faut que les muscles, ainsi que les os,
parviennent au degré de perfection que
donne l’adolescence, & qu’un exercice
fréquemment répété aide leur dévelop-
pement. On jugera mieux combien l’exer-
cice ajoute à leur force & à leur sou-
plesse, si on considère ce que peuvent
les danseurs de corde, les sauteurs, les
coureurs, les athlètes, les porte-faix, &
les sauvages; ou si, remontant à des
siècles plus reculés, on se rappelle ce
que l’histoire nous apprend de la vigueur
des hommes qui vivoient dans les temps
héroïques.

SECTION VINGT-CINQUIÈME.
Du Sommeil.


322. L’action soutenue du systême
nerveux appelle le repos; le sentiment &
le mouvement, fatigués par l’agitation du
jour, ont besoin de se délasser dans le
calme & le silence de la nuit: il est né-
cessaire que le sommeil, l’image la plus na-
turelle de la mort, en réparant leurs forces,
renouvelle leur vie.

323. Le sommeil est une fonction pé-
riodique qui fait en quelque sorte cesser
[Seite 167] l’action de l’ame sur le corps, & celle du
corps sur l’ame. Les phénomènes dont il
s’accompagne seroient la plus forte preuve
qu’on pourroit alléguer en faveur de l’exis-
tence d’un fluide nerveux.

324. Il s’annonce par l’affoiblissement
graduel des sens externes, et par le re-
lâchement de la plupart des muscles sou-
mis à l’empire de la volonté, sur-tout des
muscles longs; le sang veineux s’accumule
vers le coeur; on bâille pour soulager le
mal-aise qui en résulte; enfin une espèce
de délire momentané transporte du sein
de la veille dans les bras du sommeil.

325. Alors toutes les fonctions animales
sont suspendues, & presque toutes les autres
sont ralenties; le pouls est plus lent, la cha-
leur animale moins forte, la transpiration in-
sensible, plus rare; la digestion plus difficile,
& les excrétions (quelques pollutions noc-
turnes à part) sont supprimées.

326. On aperçoit d’abord quelles sont les
principales causes éloignées du sommeil, sans
recourir aux narcotiques; on sent combien
sont propres à l’appeler l’affoiblissement des
forces animales produit par des exercices
fatigans ou de longues veilles; l’empire de
la coutume que favorisent les ténèbres, le
silence, le repos, &c.; l’impression douce
& constante de quelques sensations exté-
rieures, telles que le murmure d’un ruis-
seau, l’aspect d’une moisson agitée par le
zéphir; des alimens pris depuis peu, un
[Seite 168] froid extérieur très-vif(1), enfin tout ce
qui peut détourner le sang du cerveau,
comme les bains de pieds, les purgatifs,
des pertes de sang abondantes, &c.

327. Ces dernières causes éloignées du
sommeil nous conduisent à celles qui in-
fluent prochainement sur lui; car, tout bien
considéré, il nous paroît être l’effet d’une
diminution dans la quantité du sang qui
porte au cerveau. J’en trouve la preuve
dans un phénomène très-intéressant que
j’ai cité plus haut, comme l’ayant moi
même observé sur un sujet vivant. Je voyois
son cerveau s’affaisser toutes les fois & pen-
dant tout le temps qu’il accordoit au som-
meil; je le voyois, au contraire, dans
l’état de veille, enflé par le sang qui y
affluoit. L’insomnie qui accompagne les
congestions sanguines vers la tête, fournit
une autre preuve à cette opinion.

328. La durée du sommeil est différente
selon l’âge, les dispositions du corps, le
tempérament, &c. On peut seulement dire
en général qu’un sommeil trop prolongé est
ou un signe de foiblesse qu’on remarque
fréquemment dans les enfans & les vieil-
[Seite 169] lards, ou une grande cause d’engourdisse-
ment & de démence(1).

329. Quand on passe du sommeil à la
veille, on éprouve à-peu-près les mêmes
symptômes qui déjà avoient précédé le pas-
sage de la veille au sommeil; on bâille,
on étend les membres, les sens sont en-
core troublés, &c.

330. Les causes du réveil sont néces
sairement opposées à celles qui déterminent
le sommeil; sa cause prochaine est donc
le retour d’une plus grande quantité de sang
au cerveau; & ses causes éloignées, outre
l’habitude qui est la principale, embrassent
tous les stimulus propres à émouvoir nos
sens, soit qu’ils agissent au dehors de nous,
soit qu’ils produisent leurs effets dans l’inté-
rieur de nos corps, tel est le besoin d’uriner
qu’excite la plénitude de la vessie; soit enfin
qu’ils affectent le systême nerveux par l’en-
tremise de l’imagination, & alors ce sont les
songes.

331. On désigne par ce mot, des jeux
de l’imagination, qui reproduit des percep-
tions de l’ame, & s’exerce diversement sur
elles. Je n’en ai jamais observé aucune appa-
rence dans les jeunes enfans, avant qu’ils
[Seite 170] eussent atteint le troisième mois de leur âge;
il est aussi des exemples d’adultes qui assurent
n’avoir jamais fait aucun songe(1).

Les longes sont ordinairement des idées
confuses & très-désordonnées; quelquefois
cependant ils semblent avoir été inspirés par
la raison: en général, ils dépendent de la dis-
position du corps. C’est ainsi que les songes
lubriques naissent souvent d’une surabon-
dance de liqueur séminale; les songes fati-
gans, d’un embarras dans les voles de la
digestion, &c. On cite l’exemple d’un
homme auquel ses amis pouvoient suggé-
rer les songes qu’ils souhaitoient, en l’en-
tretenant doucement, durant son sommeil,
sur telle ou telle autre matière. Mais cet
état n’est pas réellement le sommeil; il tient
le milieu entre la veille & lui, & se rap-
proche beaucoup du noctambulisme. Lock
& quelques autres ont cru que tous les
songes attestoient un état mixte semblable.

SECTION VINGT-SIXIÈME.
De la Nourriture & de l’Appétit.

[Seite 171]

332. De même que les forces animales
se rétablissent par le sommeil, de même les
pertes que le corps éprouve dans les élémens
de sa substance, & l’état de ses forces natu-
relles, sont réparées par la nourriture.

333. La nature nous invite, & souvent
nous force à employer ce moyen répara-
teur, soit en attachant du plaisir à l’usage
qu’on en fait, soit en punissant par le sup-
plice insupportable de la faim & de la soif
celui qui le néglige.

334. Il est des auteurs qui expliquent la
sensation de la faim par le resserrement de
l’estomac sur lui-même, & le frottement
mutuel de ses rides dénuées du fluide vis-
queux qui précédemment les lubréfioit; il
en est d’autres qui rapportent avec plus de
raison cet effet, non-seulement à l’afflux
plus abondant des humeurs qui ont coutume
de se verser dans cet organe, comme la sa-
live, le suc pancréatique & la bile; mais,
sur-tout à l’acrimonie que ces humeurs con-
tractent dès qu’elles manquent d’alimens sur
lesquels elles puissent s’exercer(1).

[Seite 172]

335. La soif paroît être causée par le sen-
timent d’une sécheresse très-fatigante de la
bouche, de l’arrière bouche, & de l’oeso-
phage, & de plus par l’impression irritante
que sont sur ces parties les parcelles âcres
& salines qui se dégagent des alimens.

336. Le besoin de manger & de boire
n’est pas le même dans tous les hommes; il
est plus ou moins pressant selon l’âge, les
dispositions du corps, & l’habitude de le sa-
tisfaire: cependant il est généralement vrai
qu’un adulte bien portant & sensé, qui n’est
ni le jouet d’un délire fanatique, ni le sujet
d’une autre affection non naturelle, ne peut
passer à jeun un seul jour sans éprouver un
affoiblissement considérable de ses forces,
ou plus d’une semaine sans courir un danger
de mort(1).

[Seite 173]

337. Quoique le sentiment de la soit soit
peut-être plus difficile à supporter que la
faim, il influe cependant beaucoup moins
sur la vie & sur la santé: nous voyons non-
seulement plusieurs espèces d’animaux à sang
chaud, tels que les souris, les cailles, &c.,
ne pas ressentir le besoin de boire, mais des
hommes s’abstenir de tout liquide, & néan-
moins vivre très-long-temps sains & vigou-
reux.

338. On a beaucoup disputé sur le genre
de nourriture le plus convenable à l’homme,
sur celui des deux principaux règnes, végé-
tal ou animal, auquel sa structure & sa
destination exigeoient qu’il donnât la pré-
férence.

339. Rousseau, pour prouver que l’homme
est essentiellement herbivore, après avoir
fait valoir la figure de ses dents, & la lon-
gueur de ses intestins, a principalement in-
sisté sur ce que la femme ne portoit ordinai-
rement qu’un enfant, quoiqu’elle fût pour-
vue de deux mamelles. On peut ajouter à
ces différentes preuves celles que fournissent
[Seite 174] les exemples de rumination qu’on a observés
en quelques sujets; car il est démontré que
la rumination n’a lieu que chez les herbi-
vores.

Ceux, au contraire, qui avec Helvétius
pensent que l’homme est essentiellement car-
nivore, allèguent la briéveté de son intes-
tin coecum, & quelques autres argumens
semblables.

340. Il nous paroît résulter d’un examen
plus réfléchi que l’homme n’est de sa nature
borné à aucune classe d’alimens, mais appelé
à user indistinctement des uns & des autres.
La disposition de ses dents, sur-tout des mo-
laires, & la forme de ses intestins, lui sont
tenir une espèce de milieu entre les animaux
carnaciers & ceux qui paissent; la struc-
ture de l’articulation qui chez lui unit la
mâchoire inférieure avec l’os des tempes,
lui assure le même avantage.

341. D’ailleurs, si on a égard au privi-
lège dont jouit l’homme de pouvoir seul
habiter indifféremment toutes les parties de
la terre, ne devra-t-on pas regarder comme
conséquent à cette faculté, que la nature ne
l’ait point assujetti à aucune classe d’alimens?
Il est des régions qui ne peuvent lui fournir
commodément que l’une ou l’autre.

342. Nous pensons donc qu’il est celui
de tous les animaux connus, qui peut mettre
le plus de latitude dans le choix de sa nour-
riture. Il peut non-seulement la chercher
dans l’un & l’autre règne, & varier à l’in-
[Seite 175] fini l’apprêt des mets qu’il en tire; mais aussi
entretenir sa vigueur & sa santé par l’usage
d’un seul, & du plus simple aliment. Com-
bien d’hommes, même aujourd’hui, qui ne
se nourrissent que de végétaux, de pommes-
de-terre, de châtaignes, de dattes, &c. Il
est très-vraisemblable que les premiers habi-
tans du monde n’ont vécu que de fruits, de
légumes, de racines & de grains. Les Mau-
res errans se bornent presque uniquement à
la gomme du Sénégal(1); les peuples du
Kamtschatka, & une infinité d’autres qui
habitent des rivages, ne vivent que de pois-
sons. En Europe même les Morlaques ne
mangent que de la viande(2); il est plu-
sieurs sociétés de sauvages qui la mangent
crue; on sait, à n’en pas douter, que les
Samoiëdes(3), les Esquimaux(4), & quel-
ques autres nations de l’Amérique septen-
trionale, la dévoroient également sans autre
préparation(5).

On ne trouve pas moins de variétés à
l’égard des liquides chez les différens peu-
ples; les habitans de plusieurs isles qui sont
[Seite 176] situées entre les tropiques, ou sur les bords
de la Mer Pacifique, manquent totalement
d’eau douce, & boivent le lait que leur four-
nit le coco; il en est d’autres qui n’usent que
de l’eau de la mer. Nous pourrions citer
une multitude d’autres particularités en ce
genre, qui démontrent sensiblement que
l’homme est parfaitement omnivore.

SECTION VINGT-SEPTIÈME.
De la Mastication & de la Déglutition.



343. C’est sur-tout la mâchoire infé-
rieure qui sert à la mastication des alimens
solides: elle est, ainsi que la supérieure,
garnie de trois sortes de dents.

On appelle incisives les quatre antérieu-
res, qui, dans la plupart(1), des hommes
[Seite 177] sont taillées en forme de ciseau, & destinées
à rompre les substances livrées à leur action.
On a donné le nom de canines à celles qui
sont placées à leur suite; elles ont une
figure conique, & servent à diviser les ali-
mens plus durs. On trouve enfin plus pro-
fondément les dents molaires, dont la figure
est planiforme, & la grosseur successive-
ment plus considérable; elles ont pour usage
de broyer les substances que les dents incisi-
ves & canines ont rompues ou déchirées.

344. L’articulation de la mâchoire infé-
rieure avec les os des tempes, tient de l’ar-
throdie & du ginglime. Au moyen de cette
articulation & des deux cartilages ménisques
qu’elle renferme, l’os maxillaire inférieur
se porte en tout sens, avec une force &
une facilité égales.

C’est principalement le muscle digastri-
que qui abaisse la mâchoire & fait ouvrir
la bouche; il est aidé dans son action par
le concours des geniohyoïdiens & des milo-
hyoïdiens. Lorsque nous voulons mordre
ou rompre un corps dur, les massétères &
les crotaphites la relèvent, & la rappro-
chent fortement du maxillaire supérieur; les
[Seite 178] ptérigoïdiens internes & externes la portent
vers l’un & l’autre côté; les ptérigoïdiens
externes la sont de plus saillir en avant.

345. Les alimens étant introduits dans
la bouche, ils y sont retenus par les mus-
cles buccinateurs, & par l’extrême mobi-
lité de la langue; toutes ces parties s’accor-
dent à les diriger vers les dents, & à les
repousser de nouveau entr’elles, lorsqu’ils
en sont chassés par l’attrition.

346. Pendant que nous mangeons, la
salive se sépare; c’est une humeur très-
fluide & légèrement savonneuse, qui con-
tient un peu de terre(1). La langue, qui en
est continuellement humectée, la trouve
insipide, quoiqu’elle soit salée. Elle est en
même temps antiseptique & résolutive, &
fait promptement fermenter les substances
végétales(2), mais plus promptement en-
core les substances farineuses.

347. Des glandes conglomérées, situées
sur les côtés & en dedans de la mâchoire,
la filtrent dedans la bouche. Les principales
[Seite 179] sont les parotides, sur-tout remarquables
en ce qu’elles sont le siége de métastases
très-fréquentes: elles versent cette humeur
par le canal de stenon, vis-à-vis l’intervalle
de la secondé & troisième dent molaire su-
périeure. Celle que fournissent les glandes
sous-maxillaires, arrive dans la bouche par
le conduit de Warton; celle enfin que sé-
crétent les sub-linguales, glandes beaucoup
plus petites que les précédentes, coulent par
les conduits de Rivin.

348. L’excrétion de la salive est augmen-
tée, soit par les stimulus qui agissent sur les
organes dans lesquels elle se prépare, soit
par la pression mécanique qu’exercent sur
eux les parties qui les environnent. Nuck
prétend, mais sans motiver son opinion,
que l’espace de douze heures en fournit une
livre entière(1).

Ce sont principalement les extrémités
articulaires de l’os maxillaire inférieur, qui
compriment les glandes parotides pendant
l’acte de la mastication; & l’humeur dont
elles déterminent par cette compression un
flux plus abondant, aide à ramollir les corps
durs que les dents s’efforcent d’atténuer.
Les stimulus qui concourent à augmenter
cet écoulement, sont enveloppés dans les
[Seite 180] substances âcres dont nous nous nourrissons,
& sont dissous par l’humeur salivaire à me-
sure qu’elle coule. L’imagination peut pro-
duire le même effet: aussi remarque-t-on,
que le vif desir d’un mets fait venir la salive
à la bouche.

349. Presque tout le contour de la bou-
che contribue à augmenter la quantité de
ce suc; non seulement les petites glandes
des lèvres, des joues & de la langue four-
nissent un mucus qui se mêle avec lui, mais
il se combine encore avec le fluide vapo-
reux qu’exhalent toutes les parties molles
de cette cavité.

350. Ce mélange, à l’aide de la mastica-
tion, pénètre les alimens, les convertit en
une pâte très-molle, les dispose à passer
dans l’oesophage, & leur fait subir une pré-
paration qui est fort utile pour accomplir la
digestion(1).

351. A l’acte de la mastication succède
celui de la déglutition. Quoique le méca-
nisme de celle-ci paroisse très-composé,
& qu’il dépende en effet du jeu simultané
d’un grand nombre de parties différentes,
[Seite 181] on peut, les réduire au court exposé que
nous en allons faire. La langue se rac-
courcit, s’enfle, &, en se roidissant,
présente au bol alimentaire une espèce
d’excavation, dans laquelle elle le reçoit
pour le conduire vers l’isthme du gosier.
Il y est à peine parvenu; qu’il rencontre
l’ouverture infundibuliforme & très dilatée
du pharinx: un effort qu’on peut regarder
comme un exemple notable de force propre,
l’y introduit brusquement; alors les trois
muscles constricteurs, entrant en action,
s’en emparent & le précipitent dans l’oeso-
phage. Toutes ces opérations se succèdent
avec une rapidité qui ne permet presque
pas de les distinguer les unes des autres.

352. La nature emploie différens moyens
pour ouvrir & assurer cette voie aux subs-
tances qui doivent la parcourir. L’os hyoïde
dirige les mouvemens de la langue si impor-
tans pour la déglutition. Le voile du palais,
au milieu duquel est suspendue la luette,
est tendu en forme d’arcade par des muscles
particuliers, & s’oppose à ce que les alimens
pénètrent dans les narines postérieures, ou
dans les trompes d’Eustache. Enfin la glotte
est protégée par la langue; au même mo-
ment où nous nous efforçons d’avaler,
appelée en bas & en arrière, elle étend
sa base sur le larynx qu’un même effort
porte en haut & en avant; elle recouvre
ainsi son orifice supérieur, qui, d’ailleurs
très-resserré & voile par l’épiglotte, ne peut
[Seite 182] être plus sûrement à l’abri de l’introduction
de toute substance hétérogène.

353. Ce qui facilite encore beaucoup
la déglutition, c’est la mucosité abondante
qui enduit & lubrésie toute l’étendue des
voies dans lesquelles elle s’opère. Cette
mucosité n’est pas seulement fournie par
les organes excréteurs dont nous avons
déjà parlé, mais de plus, par les amyg-
dales, & par une multitude innombrable
de cryptes glanduleux, dont est parsemé
l’intérieur du pharinx.

354. C’est dans l’oesophage que se ter-
mine la déglutition, & que passent les ali-
mens immédiatement avant d’entrer dans
l’estomac. On appelle de ce nom un con-
duit musculeux, étroit & fort solide, mais
en même temps souple & susceptible d’une
grande dilatation. Il est extrêmement sen-
sible, & composé de trois tuniques, qui
ne diffèrent que par leur épaisseur, de celles
qui constituent le reste du tube alimentaire.

L’extérieure est charnue, & on observe
que ses fibres sont rangées sur deux plans
différens; les unes se dirigent dans le sens
de sa longueur, les autres le coupent en
travers. La tunique moyenne est appelée
nerveuse: un tissu cellulaire très-lâche
l’unit à celles entre lesquelles elle est pla-
cée; l’interne est enduite d’un mucus très-
abondant, qui la rend singuliérement lisse
& polie.

355. L’oesophage se met en action dès
[Seite 183] qu’il sent une liqueur ou un corps solide
pénétrer sa cavité; il s’ouvre d’abord
à lui; mais bientôt il se resserre supé-
rieurement, pour le faire descendre plus
bas: il se dilate ainsi & se contracte alter-
nativement jusqu’à ce qu’il l’ait conduit au-
dessous de l’anneau du diaphragme, & dans
intérieur de l’estomac(1).

SECTION VINGT-HUITIÈME.
De la Digestion.


356. C’est dans l’estomac que se fait la
principale digestion: il n’est aucun viscère
dont l’existence soit plus constante dans tous
les animaux; il n’est également aucune por-
tion du canal alimentaire sur laquelle il n’ait
une prééminence marquée.

357. L’estomac humain forme une espèce
d’outre assez ample dans un adulte pour pou-
voir contenir même au delà de trois livres
d’eau. Il a deux ouvertures, l’une supé-
[Seite 184] rieure qu’on appelle l’orifice cardiaque, & l’au-
tre inférieure à laquelle on a donné le nom
de pylore. La première est située à gauche,
& communique avec l’oesophage; ou plutôt
elle est la continuation de ce canal cylindri-
que & plissé qui, en ce point, se dirige un
peu obliquement, & se dilate assez pour
former l’estomac. La secondé est à droite;
elle est plus resserrée que la précédente, &
descend dans l’intestin duodénum.

358. La situation du ventricule change à
raison de sa vacuité ou de sa plénitude: lors-
qu’il est vide, sa grande courbure regarde
en bas, & le pylore s’élevant, forme un an-
gle avec le duodenum: quand il est plein,
sa grande courbure se porte en devant, le
pylore se continue dans une ligne à peu près
droite avec le duodenum, & le cardia se
fléchissant, forme un angle avec l’oesophage.

359. L’estomac est composé de quatre
principales tuniques séparées les unes des
autres par trois couches cellulaires. L’ex-
terne
est une production du péritoine, qui
non seulement enveloppe ce viscère, mais
revêt presque toute l’étendue du tube intes-
tinal, & se continue avec les épiploons.
Elle recouvre une couche celluleuse, au-
dessous de laquelle est la tunique musculaire,
d’autant plus remarquable, que c’est en elle
que réside l’irritabilité de l’estomac, & la
cause de son mouvement péristaltique. On
distingue dans le tissu de cette secondé tuni-
que trois plans de fibres charnues: les unes
[Seite 185] sont longitudinales, les autres perpendicu-
laires, & les troisièmes obliques. Leur direc-
tion & leur distribution sont soumises à tant
de variétés, qu’il est presque impossible de
rien déterminer à leur égard. La troisième
tunique est celle qu’on appelle nerveuse; elle
mérite bien peu ce nom, puisqu’elle n’est
autre chose qu’un tissu cellulaire plus dense,
dont les deux surfaces plus lâches s’unissent
l’une avec la tunique musculaire, & l’autre
avec la tunique veloutée. Elle est d’ailleurs
si ferme & si épaisse, qu’on l’a regardée
comme celle qui constituoit particulière-
ment l’estomac. Enfin la tunique la plus
intérieure a été non moins abusivement
appelée tunique villeuse ou veloutée; elle
est poreuse, très-molle & presque spon-
gieuse; elle forme un assez grand nombre
de rides, qui lui donnent une circonférence
beaucoup plus étendue qu’aux trois autres.
On y distingue plusieurs cellules très-petites,
qui ne ressemblent pas mal à celles, il est vrai,
plus grandes, qu’on observe chez les ani-
maux ruminans(1). La surface interne de
cette dernière membrane est enduite d’un
mucus, que paroissent lui fournir des
cryptes glanduleux très-perceptibles, sur-
tout aux environs du pylore.

360. L’estomac reçoit un nombre pro-
digieux de nerfs; c’est indubitablement à
[Seite 186] leur multitude qu’il faut rapporter, & son
extrême sensibilité, & l’étonnante sympathie
qui existe entre lui & presque toutes les
autres fonctions du corps. A raison de sa
sensibilité, il n’est aucune espèce de sti-
mulus qui ne l’affecte vivement; le froid,
les substances qui s’y introduisent, les hu-
meurs qui y séjournent, tout fait sur lui
une impression marquée(1). Il en est
de même de ses rapports sympathiques;
ils sont tels qu’il ressent toutes les passions
de l’ame, & que l’ame participe à toutes
ses affections(2).

361. Il n’est pas moins abondamment
pourvu de vaisseaux sanguins, & ce sont
vraisemblablement les nombreuses ramifi-
cations de ses artères, qui, en serpentant
dans son tissu celluleux, versent le suc
gastrique
dont son intérieur est constam-
ment abreuvé.

362. Ce suc ne paroît différer de la sa-
live, d’après les expériences du célèbre
abbé Spallanzani(3), qu’en ce qu’il n’ex-
[Seite 187] cite point de fermentation: d’ailleurs il a
le même caractère savonneux; c’est un puis-
sant anti-septique(1), & l’un des plus forts
dissolvans(2); il résout même le lait caillé
dans l’estomac.

363. Aussi est il le principal agent de
la digestion: lorsque les alimens ont été
bien mâchés, & parfaitement détrempés
par la salive, il ne tarde pas à les décom-
poser, & à les convertir en cette matière
pultacée, connue sous le nom de chymus(3).

364. L’une des forces qui concourt le
plus à exécuter cette importante fonction,
est le mouvement péristaltique du ventricule:
son effet est d’entretenir la pâte alimen-
taire dans un état de froissement & d’agi-
tation continuelle. Cependant, quelle que
soit son influence sur la digestion, elle
[Seite 188] n’est point telle que l’ont cru quelques
médecins-mathématiciens, & il s’en faut
bien plus encore qu’elle l’opère seule,
ainsi que d’autres l’ont avancé.

365. L’action des muscles du bas ventre,
& la chaleur que concentrent dans l’esto-
mac les vaisseaux & les organes qui l’en-
tourent, y contribuent encore. Autrefois on
rapportoit uniquement la digestion à cette
dernière cause, & on disoit que les alimens
étoient dénaturés par une faculté concoctrice.

366. Comme la digestion dépend en même
temps des différens degrés d’action des forces
digestives, de la quantité & de la qualité des
alimens qu’on a pris, de leur mastication
plus ou moins exacte, & d’un grand nombre
d’autres circonstances semblables, il n’est
pas possible de déterminer l’espace de temps
qu’elle exige.

On sait seulement que, dans un homme
bien portant, un estomac vigoureux ne
cesse pas d’agir sur les substances diges-
tibles qu’il renferme, jusqu’à ce qu’il les
ait toutes réduites en une pâte également
molle & fluide; que le temps qui lui est
nécessaire pour opérer ce changement,
varie avec les alimens qui en sont l’ob-
jet; qu’il y parvient cependant dans l’es-
pace de trois à six heures, à compter du
moment du repas. Cet intervalle lui suffit
& pour les élaborer convenablement, &
pour les faire insensiblement passer par le
pylore.

[Seite 189]

367. Le pylore est un repli circulaire,
bien différent de la multitude de ceux qu’on
observe sur la surface interne de l’estomac,
& que nous avons déjà désignés sous le nom
de rides. Il est beaucoup plus considérable,
& appartient autant à la tunique nerveuse,
qu’à la tunique veloutée; il reçoit même
quelques fibres de la tunique musculaire.
On le voit descendre en forme de cône ou
d’entonnoir dans l’intestin duodenum, qui
l’embrasse à-peu-près comme le vagin em-
brasse le col de la matrice(1).

SECTION VINGT-NEUVIÈME.
Du Suc pancréatique.


368. Les alimens chassés de l’estomac,
ayant franchi le pylore, s’introduisent peu-
à-peu dans le duodenum. Cette portion du
tube alimentaire, quoique fort courte, mé-
rite d’être observée, à raison des usages
essentiels qu’elle remplit; c’est en elle sur-
[Seite 190] tout que se prépare le chyle, qui doit en-
suite porter la nourriture à toutes les par-
ties du corps; c’est en elle que se versent
les différentes humeurs qui concourent à
la chylification.

369. Les principales d’entre ces humeurs
sont la bile & le suc pancréatique; occu-
pons-nous d’abord de ce dernier, qui, par
sa nature & ses effets, a une si grande ana-
logie avec la salive & le suc gastrique.

370. Quoiqu’on ne puisse que très-diffi-
cilement l’obtenir pur d’un animal sain, on
est parvenu à le soumettre à des recherches
plus exactes qu’on ne l’avoit fait précé-
demment; & à l’aide de ces recherches,
on n’a encore découvert presqu’aucune dif-
férence entre la salive & lui. Nous ne renou-
vellerions pas le souvenir des erreurs de
Fran. Silvius, de Regn. de Graaf, de Flor.
Schuyl
& de plusieurs autres physiologistes
qui lui supposoient une acidité capable de
fermenter avec la bile; ils ont été assez vic-
torieusement combattus par les Pechlin, les
Swammerdam, les Brunner, &c.(1); mais
elles nous procurent une occasion d’obser-
ver à quels dangers expose la médecine
pratique, lorsqu’elle n’est point basée sur
une saine physiologie.

371. Ce suc est fourni par le pancréas,
[Seite 191] c’est-à dire, par celle de toutes les glandes
conglobées la plus considérable, & la plus
ressemblante aux glandes salivaires. Comme
elles, le pancréas donne naissance à plusieurs
petits canaux excréteurs, qui insensiblement
se réunissent en un seul(1), appelé canal
de Wirsung, parce que cet auteur est le
premier qui l’ait découvert, ou du moins
qui l’ait démontré sur l’homme(2). Celui-
ci s’avance vers le duodenum, s’ouvre
dans son intérieur, & y distille sans cesse
le suc pancréatique.

372. Il paroît que l’excrétion de cette
humeur est déterminée par les mêmes cau-
ses que celle de la salive; d’une part, par
la pression qu’exerce sur le corps glandu-
leux qui le sépare, l’estomac dans son état
de plénitude; de l’autre, par l’irritation
dont l’affectent, & la pulpe alimentaire en-
core crue après avoir dépassé le pylore, &
la bile dont le canal se termine au même
endroit que celui du pancréas.

373. Ses usages(3) sont sans doute de
coopérer à la dissolution du chymus, lors
sur-tout qu’il a été mal digéré dans le ven-
tricule; de l’assimiler de plus en plus à notre
substance, & de le préparer à se convertir
en un vrai chyle.

SECTION TRENTIÈME.
De la Bile.

[Seite 192]

374. L’organe secréteur de la bile
est le foie(1); nul viscère, dans l’homme,
dans le foetus sur-tout, plus pesant & plus
volumineux; nul plus important, puisqu’on
le trouve chez tous les animaux à sang
chaud, & que son existence est aussi in-
variable que celle du coeur.

375. La substance du foie est telle, que
le premier coup-d’oeil suffit pour la distin-
guer de toute autre: c’est un parenchyme pul-
peux & d’un rouge plus ou moins brun, que
parcourent des nerfs sans nombre(2), des
vaisseaux lymphatiques non moins multipliés
sur l’une & l’autre de ses deux faces, & des
conduits biliaires qui tirent leur origine d’une
infinité de vaisseaux sanguins, la plupart très-
considérables. Nous nous arrêterons un mo-
ment sur les différens ordres de ces derniers.

[Seite 193]

376. La veine porte qui diffère à tant d’égards
du systême veineux entier, s’offre la première
à notre examen: son tronc, formé par le con-
cours de toutes celles qui se distribuent dans
le bas-ventre, & recouvert d’une enveloppe
celluleuse nommée capsule de Glisson, aborde
à peine la substance du foie, qu’il se divise
de nouveau en rameaux & en ramifications
d’une ténuité extrême. C’est pour cette raison
que Galien l’avoit comparé à un arbre qui
étend ses racines dans le bas-ventre, & ses
branches dans l’intérieur du foie(1).

377. Il est un autre ordre de vaisseaux
dont l’usage est de porter le sang à ce même
organe; il appartient à l’artère hépatique;
celle-ci tire communément son origine de
la coeliaque; &, quoique ses divisions em-
brassent la totalité du foie, elle n’est pas,
à beaucoup près, ni si développée, ni aussi
abondante en rameaux que la veine porte.

378. Les extrémités de l’une & de l’autre
dégénèrent en très-petites veines, qui, se
réunissant insensiblement, forment enfin des
troncs veineux, & vont se perdre dans la
veine cave inférieure.

379. Ce sont ces extrémités que Malpighi,
trompé par les diverses agglomérations
[Seite 194] qu’elles forment en s’abouchant avec celles
de la veine cave, avoit cru être des petits
corps glanduleux, creux, hexagones, &
remplissans l’office d’organes secréteurs.

380. Ils le remplissent en effet; car c’est
d’eux que naissent les pores biliaires, ou ces
conduits excessivement ténus qui séparent
la bile du sang, & la conduisent hors du
foie par le canal hépatique.

381. Ici on demande quels sont préci-
sément les vaisseaux qui fournissent la bile;
est-ce le systême artériel, ou la veine porte?

L’analogie répond en faveur de l’artère
hépatique; mais des recherches plus exactes
rapportent cette sécrétion, sinon en totalité,
au moins quant à la plus grande partie, au
systême veineux. Et, en effet, le caractère
de la bile a bien plus de rapports avec
le sang noir & chargé de phlogistique
qui circule dans ce dernier ordre de vais-
seaux, qu’avec le sang vermeil & ardent,
que la coeliaque puise immédiatement dans
l’aorte pour le transmettre au foie.

L’argument que l’analogie nous oppose
n’est pas à beaucoup près sans réplique:
on observe d’abord que, si la veine porte
imite la distribution d’une artère, elle peut
également en remplir les fonctions secré-
toires. On observe de plus que l’analogie
qui se trouve entre le foie & les pou-
mons, est toute pour l’opinion que nous
avons adoptée. Les premiers reçoivent deux
fortes de vaisseaux; les grands vaisseaux
[Seite 195] pulmonaires, uniquement affectés aux fonc-
tions que ces organes remplissent; & l’ar-
tère bronchiale, dont l’office est de leur
porter la nourriture; tels le foie & les
usages des vaisseaux qu’il admet. Peut-être
l’artère hépatique contribue-t-elle aussi à la
sécrétion de la bile; mais ce n’est qu’ac-
cidentellement & en bien peu de chose.

382. La bile hépatique coule lentement,
& d’une manière continue dans le conduit
du même nom. Si l’intestin duodenum est
vide, elle s’y verse par le canal choledoque;
s’il est rempli, elle gagne le canal cystique
qui la dépose pour quelque temps dans la
vésicule du fiel. On l’appelle en ce cas, bile
cystique
(1).

383. La vésicule du fiel est une poche
oblongue & de figure pyriforme, qui
adhère à la face concave du foie; elle est
composée de trois membranes. L’externe est
une production du péritoine, & ne la re-
couvre qu’en partie. La moyenne, connue
sous le nom de nerveuse, entre également
dans la composition de l’estomac, des in-
[Seite 196] testins & de la vessie urinaire; pour leur
communiquer ainsi qù’à la vésicule du fiel,
le ton & la force donc ils jouissent. Enfin,
l’interne diffère à peine de celle qui tapisse
l’intérieur du ventricule; elle est couverte
de petits vaisseaux sanguins, extrêmement
rugueuse, & présente dans toute son éten-
due des aréoles ou des mailles singuliére-
ment remarquables.

384. On divise la vésicule du fiel en
corps & en col. Le col, dont la forme
imite celle d’un cône, se termine par le
canal cystique, se replie plusieurs fois sur
lui-même dans l’espace qu’il parcourt; &
se trouve intérieurement pourvu de quel-
ques valvules falciformes.

385. Dans son corps séjourne la bile qui
s’y est accumulée, jusqu’à ce qu’une direc-
tion déclive, ou la situation du corps ren-
versé, en facilite l’écoulement; ou jusqu’à
ce qu’elle en soit exprimée par la compres-
sion qu’exercent sur elle le jejunum, l’ilèon
& même le colon transverse, quand il
donne passage à des matières excrémenti-
tielles.

A ces causes de l’excrétion de l’humeur
bilieuse, on peut ajouter l’action de diffé-
rens stimulus sur le duodenum, & celle de
la vésicule sur elle-même. Il est prouvé par
des phénomènes pathologiques, & par des
expériences faites sur des animaux vivans,
que quoiqu’elle ne soit pas irritable, elle a
une très-grande force de contractilité; or,
[Seite 197] cette contractilité, lors sur-tout qu’elle est
aiguillonnée par la présence de la bile,
pourroit-elle ne pas aider son excrétion?

386. La bile hépatique & la bile cysti-
que diffèrent peu l’une de l’autre; on
remarque cependant que la seconde est plus
épaisse, plus consistante & plus amère que
la première; elle doit incontestablement ces
propriétés à son séjour dans la vésicule, &
à la dissipation de ses parties les plus fluides.

387. Comme il est peu d’humeur plus
importante, & dont on se soit plus occupé
depuis environ vingt ans, nous consacre-
rons le reste de cet article à discuter sa
nature & ses usages; nous parlerons sur-
tout de la bile cystique, soit parce qu’elle
est plus parfaite, soit parce qu’elle est plus
à la portée de nos recherches.

388. Extraite du cadavre récent d’un
adulte sain, elle a une consistance visqueuse,
sa couleur est d’un brun verdâtre, elle est
inodore, & beaucoup moins amère que
celle des autres animaux.

389. Quoique ses parties constituantes
soient intimement unies, il n’est pas fort
difficile de la décomposer; & alors on voit
qu’elles ont une sorte d’analogie avec les
élémens du sang.

On y trouve d’abord un véhicule aqueux
que des auteurs modernes ont comparé à
l’humeur de la salive; mais qui nous paroît
se rapprocher beaucoup plus de la vapeur
qui s’élève du sang, & même sous quel-
[Seite 198] ques rapports, du sérum qu’il fournit; on
en sépare ensuite plusieurs flocons mucila-
gineux & blanchâtres, assez semblables à la
lymphe; enfin, elle abonde en un principe
phlogistique qu’elle tient du sang de la vei-
ne-porte, qu’on sait en être surchargé(1).

390. C’est à ce principe, qu’il est bien
plus aisé de saisir dans l’extrait de bile dessé-
ché, ou dans les calculs biliaires(2), puis-
qu’il suffit de les présenter au feu pour les
enflammer; c’est, dis-je, à ce principe qu’il
faut rapporter les qualités spécifiques de
cette humeur, sa couleur, sa faveur, &c.;
& la plupart des propriétés dont nous allons
voir qu’elle est douée.

391. Il n’en est pas de la bile comme du
savon, qui sympathise indifféremment avec
l’huile & avec l’eau, qui rend même ces
deux fluides miscibles l’un avec l’autre; de-
puis les belles expériences de Schröder, il
est très peu des physiologistes qui adoptent
[Seite 199] cette erreur de Boerhaave(1); on sait au
contraire, qu’elle désunit ces élémens quand
elle les trouve combinés: d’ailleurs, elle
n’est ni acide, ni alkaline, & résiste égale-
ment à la fermentation & à la putréfaction.

392. Ce que nous venons de dire prouve
assez combien la bile est utile pour consom-
mer la digestion; c’est sur le chymus que
l’estomac exprime dans le duodenum, &
que le suc pancréatique y humecte, qu’elle
agit. Elle en sépare le chyle, & précipite
son résidu, à mesure qu’il s’introduit dans
les intestins grêles. Elle se divise elle même
en deux parties; l’une phlogistique qui pé-
nètre ce résidu, le colore & l’accompagne
dans toute l’étendue des voies alvines;
l’autre séreuse, qui, si je ne me trompe,
retourne au sang avec le chyle. C’est ainsi
que le superflu du phlogistique dont il im-
porte au sang d’être débarrassé, est déposé
dans le foie, pour y servir à la confection
d’une humeur particulière & essentielle, &
de-là, être rejeté avec les excrémens dès
qu’il cesse d’être utile.

La bile sert encore à dégager des ali-
mens, l’air fixe qui y est contenu; elle
promène enfin sur toute la longueur du
tube intestinal, un stimulus qui excite &
entretient son mouvement péristaltique.

[Seite 200]

Nous passons sous silence plusieurs autres
usages qu’on lui attribue communément,
mais qui ne nous paroissent pas fondés: par
exemple, nous avons peine à croire que
dans l’état de santé, & lorsque l’estomac
est vide, elle y reflue pour y développer
le sentiment de la faim.

SECTION TRENTE-UNIÈME.
Des Usages de la Rate.


393. La rate, située au côté gauche, à
l’opposite du foie, est très-rapprochée de
ce viscère par la communication de ses
vaisseaux & l’affinité de ses fonctions. Sa
figure est généralement oblongue, mais elle
s’accommode quelquefois à celle des organes
qui l’avoisinent; & ce n’est pas la seule
variété qu’elle présente, puisqu’elle n’est
même pas constamment une.

394. On lui observe une couleur livide,
une consistance molle, friable & extrême-
ment facile à diviser. Aussi est-elle envelop-
pée de deux membranes, dont l’une interne
lui est propre, & l’autre superficielle paroît
lui venir de l’épiploon.

395. Sa position & son volume ne sont
pas plus constans que sa forme; ils varient
sur-tout avec l’état de l’estomac: quand ce-
[Seite 201] lui-ci est vide, elle est gorgée de sang, &
dans une direction presque perpendiculaire;
quand il est plein, la compression qu’il
exerce sur elle la détuméfie; & son déve-
loppement lui fait prendre une situation
presque transversale. Elle suit encore les
mouvemens doux & uniformes du dia-
phragme, dans la respiration.

396. On croyoit autrefois que son tissu
étoit celluleux, & on l’assimiloit à celui
des corps caverneux de la verge. Des re-
cherches plus exactes ont réprouvé cette
opinion(1), & démontré que la rate n’est
presque composée que de vaisseaux san-
guins, si considérables proportionnellement
à son volume, & en même temps si nom-
breux, qu’il n’est aucune autre partie du
corps humain pourvue d’autant de sang.

397. L’artère splénique dont Wintrin-
gham
a prouvé que les tuniques réunissoient
une force étonnante à une ténuité extrême,
se partage en une infinité de ramifications
qui se terminent par des espèces de houp-
pes pulpeuses. Ces houppes donnent nais-
sance à de petites veines linéaires, qui
forment insensiblement des troncs fort am-
ples, & susceptibles par leur laxité de le
devenir plus encore.

398. Cet appareil vraiment extraordi-
[Seite 202] naire de vaisseaux sanguins, est soutenu
par un tissu celluleux assez rare, duquel
partent les vaisseaux lymphatiques(1).On
les voit de-là se répandre principalement
sur la face obtuse de ce viscère, & y pro-
duire leurs troncs entre les deux membra-
nes dont nous avons parlé.

399. Cette texture lâche & imbue d’un
sang qui circule avec peine, se concilie fort
bien avec ce que nous avons précédemment
dit de son état de turgescence; elle paroît
même répandre quelques lumières, si on
considère en même temps la nature des or-
ganes qui l’environnent, elle paroît, dis-je,
répandre quelques lumières sur l’obscurité
des usages auxquels celui-ci est consacré.

400. Le sang que l’on trouve dans la
rate, est un sang dissous, très-fluide, &
qui se coagule difficilement; il a une cou-
leur livide, sombre, & telle à-peu-près
que le sang d’un foetus. Toutes ces circons-
tances n’indiquent-elles pas qu’il est sur-
chargé de phlogistique? Mais je m’en suis
convaincu par une expérience facile, &
dont le résultat ne laisse aucun doute. J’ai
divisé par morceaux une rate fraîche, &
[Seite 203] les ayant exposés à un air déphlogistiqué,
je les ai bientôt vu prendre une couleur
vermeille; l’air au contraire, se dépouilloit
sensiblement de son principe igné, & se
chargeoit en proportion du phlogistique
que lui communiquoient les parties avec
lesquelles je l’avois mis en contact.

401. Si à ces considérations on ajoute
que la rate est le seul organe qui n’ait point
de canal excréteur, & qu’elle ne commu-
nique qu’avec le foie par ses vaisseaux san-
guins, peut-on ne pas conclure que son
usage est de fournir au foie la principale
matière de la bile, c’est-à-dire, la partie
phlogistiquée de cette humeur?

402. Une observation importante qui
vient à l’appui de cette opinion, & qui
date de temps fort reculés, c’est que, si
on fait l’extirpation de la rate sur un animal
vivant, dès-lors la bile cystique de cet
animal devient pâle, on n’y retrouve pres-
que plus de phlogistique; & sa partie
lymphatique se convertit en une infinité de
petits grumeaux.

SECTION TRENTE-DEUXIÈME.
Des Usages de l’Épiploon.

[Seite 204]

403. L’Épiploon gastro-colique, ou
le grand épiploon, ainsi appelé pour le
distinguer d’un autre plus petit auquel on
a donné le nom de gastro-hépathique, est
une production du péritoine que fournit
l’enveloppe du ventricule.

404. Le péritoine se continue dans toute
la cavité du bas ventre, & recouvre cha-
cune des parties qui y sont renfermées;
mais il ne les recouvre pas toutes de la
même minière: il en est au devant des-
quelles il n’est que tendu, ou dont il voile
seulement une face; tels sont les reins, le
rectum, la vessie; tels aussi, sous un cer-
tain rapport, le pancréas & la vésicule du
fiel. Il en est d’autres qu’il investit dans la
plus grande partie de leur étendue, parce
qu’ils font une faillie plus élevée dans l’in-
térieur de l’abdomen: ce sont le foie, la
rate, l’estomac, l’uterus, & les testicules
avant qu’ils soient descendus dans le scro-
tum. Il embrasse encore différemment le
tube intestinal, c’est-à-dire, toute la lon-
gueur de ce conduit, le rectum excepté.
Il se déploie largement sur lui, cerne son
[Seite 205] contour presque entier, & le tient comme
suspendu aux expansions dont il l’accom-
pagne. Nous appelons mésentère la por-
tion de cet épanouissement qui soutient les
intestins grêles, & mésocolon, celle qui
adhère aux gros intestins.

405. Les ligamens larges de la matrice
sont une autre expansion du péritoine; mais
la plus vaste & la plus remarquable est l’épi-
ploon. On nomme ainsi une espèce de sac,
ample, vide & extrêmement mince, qui
descend de la grande courbure de l’esto-
mac, se développe au devant des intestins,
sur-tout des intestins grêles, s’applique exac-
tement aux tortuosités de leur surface ex-
terne, & remplit les intervalles qu’ils laissent
entr’eux.

406. Les vaisseaux sanguins qui se distri-
buent à l’épiploon, s’y accompagnent de
bandes graisseuses qui s’entrecroisent en
différens points, mais ne forment aucun
tissu régulier; on les voit s’accroître dans
les personnes qui ont beaucoup d’embon-
point, jusqu’à devenir une masse incom-
mode & même dangereuse. L’épiploon en-
tier chez elles paroît imbu de graisse.

407. Plusieurs physiologistes, Haller
entr’autres, ont cru que cette membrane
aidoit à la préparation de la bile, en trans-
mettant au foie, par voie de resorption,
le suc gras & onctueux dont elle est chargée.
Cette opinion me paroît au moins fort dou-
teuse: je suis persuadé que la bile saine ne
[Seite 206] contient rien d’adipeux, & jamais il ne m’a
été possible de découvrir les pores absorbans
dont parle Malpighi; je les ai vainement
cherchés dans des grenouilles, où cet auteur
dit les avoir observés, & plus vainement
encore dans des cadaves humains.

408. L’idée la plus satisfaisante, & qui
est unanimement adoptée sur l’usage de
l’épiploon, c’est qu’il sert à lubréfier les in-
testins, à entretenir leur souplesse, & à faci-
liter leur mouvement perpétuel; tel est aussi
l’usage des appendices du colon & du rec-
tum: il sert de plus à empêcher les adhé-
rences que les intestins pourroient con-
tracter avec le péritoine, ce qui jetteroit le
plus grand trouble dans les fonctions que
remplissent les premières voies.

409. Nous sommes bien éloignés de
penser avec le vulgaire, qu’il est encore
destiné à garantir des impressions du froid(1).
Et comment produiroit il cet effet dans
l’homme sain, puisqu’il n’y est jamais
chargé de graisse? Cependant sa structure
singulière, celle sur-tout du gastro-hépa-
tique, nous fait présumer qu’il a un autre
[Seite 207] usage, peut-être même essentiel, que nous
ignorons, & que l’anatomie comparée
pourra nous apprendre dans la suite.

SECTION TRENTE-TROISIÈME.
Des Fonctions des Intestins.


410. Le canal intestinal que voile l’épi-
ploon, & dans lequel se porte la pulpe
alimentaire pour y être élaborée & y subit
les derniers changemens, se divise en deux
portions; celle des intestins grêles, & celle
des gros intestins.

411. La portion des intestins grêles(1)
se subdivise en trois autres, que l’on dé-
signe sous les noms de duodenum, jejunum
& iléon.

La première est ainsi appelée à raison de
sa longueur qu’on a cru être de douze
pouces. La seconde, parce que, dans les
ouvertures de cadavres récens, elle paroît
vide & affaissée sur elle-même. Alors,
en effet, s’étant déjà débarrassée de la
partie excrémentitielle des alimens, & de
l’air fixe qu’ils contenoient, elle n’est plus
[Seite 208] occupée que par leur suc pultacé, dont la
présence est à peine sensible: au contraire,
l’iléon, dans lequel l’air & les matières se
sont arrêtés, est boursouflé & distendu au
point d’offrir en quelque sorte le volume &
la forme des gros intestins. Au reste, on
l’appelle ainsi à raison de son étendue &
de ses nombreuses circonvolutions.

412. Les tuniques des intestins grêles
sont à peu près semblables à celles de
l’estomac. L’externe est une continuation
du mésentère; la musculeuse est composée
de deux plans de fibres; les extérieures
sont longitudinales, entrecoupées, & plus
multipliées vers le côté qui tient au mé-
sentère; les intérieures sont annulaires, ou
plutôt fulciformes; elles tendent à resserrer
le diamètre des intestins, tandis que les
autres diminuent leur longueur. C’est dans
la réunion de tous ces fibres que réside
l’irritabilité si vive & si soutenue du con-
duit qu’elles forment. La tunique nerveuse
n’est autre chose qu’une couche de tissu
cellulaire, qu’il est sur-tout facile, en y
introduisant de l’air, de disséquer & de
résoudre en une espèce de tissu écumeux;
c’est sur elle que se dessinent les élégantes
ramifications des vaisseaux fournis par les
mésaraïques(1); c’est elle en même temps
qui donne aux intestins la solidité & la
[Seite 209] force que nous lui avons déjà reconnues,
en décrivant l’estomac. Enfin, la tunique
profonde porte le nom de tunique villeuse;
mais elle le porte à bien plus juste titre
qu’aucune autre portion du tube alimen-
taire. Unie avec la tunique nerveuse, elle
forme une grande quantité de replis, ou de
valvules rugueuses & rentrant les unes
dans les autres, qui, vues dans des intestins
soufflés & desséchés, représentent une lon-
gue suite d’arcs de cercles. On les appelle
valvules de Kerkring.

413. Ces villosités, dont la surface in-
terne de cette membrane est entièrement
couverte, & dont Lieberkunh(1) le pre-
mier a décrit avec quelque exactitude la
structure vasculeuse, ressemblent, quand
elles ne contiennent point de chyle, à des
petits sacs d’un tissu mol & spongieux,
flottans dans la cavité des intestins; mais
quand ils se sont abreuvés de cette humeur
laiteuse que l’absorption y introduit, on
croiroit voir des prolongemens charnus
d’une consistance & d’une forme totalement
différentes.

414. Leur base est entourée d’un nom-
bre très considérable de follicules glanduleux,
qui, adhérant sur-tout à la tunique ner-
veuse, viennent s’ouvrir dans le conduit
[Seite 210] intestinal, par autant de pores excessive-
ment étroits, & y versent leur mucus
dont son intérieur est constamment enduit.

On a fait trois ordres différens de ces
petites glandes; les premières ou celles de
Brunner, sont les plus apparentes: on pré-
tend qu’elles sont séparées les unes des au-
tres, & qu’elles occupent sur-tout cette
partie qui est immédiatement au dessous du
pylore. Les secondes, ou celles de Payer,
sont plus petites, & fort rapprochées en-
tr’elles; on fixe principalement leur siége
vers l’extrémité des intestins grêles qui ré-
pond à la valvule du colon. Les dernières
portent le nom de Liebercunh; elles sont
plus petites encore, & on en compte envi-
ron huit autour de chaque villosité.

Je ne vois point sur quoi est fondée cette
division de glandes muqueuses; & si je ne
me trompe, les deux premiers ordres tels
qu’on les a dépeints, sont le produit d’un
état maladif. Je les ai fréquemment cherchées
dans des intestins grêles sains; j’ai soumis à
mes recherches des sujets de tout âge; &
aucun ne m’en a jamais offert les plus sim-
ples apparences. Lorsqu’au contraire, j’ai
fouillé dans des bas-ventres altérés, j’ai tou-
jours vu le canal intestinal couvert dans
toute son étendue de papilles fongueuses(1)
[Seite 211] semblables à ces glandes. Tantôt elles étoient
vaguement disséminées sur certains points,
& tantôt accumulées sur d’autres: d’où je
conclus qu’il n’est que le troisième ordre,
ou celles de Liebercunh, qui existent vérita-
blement: elles sont très petites, d’un vo-
lume & d’une forme à-peu-près égaux à un
grain de millet. On les distingue avec autant
de facilité sur les revers de la tunique vil-
leuse, qu’on les remarque peu sur sa face
interne.

415. Leur usage est le même que celui
des cryptes glanduleux que nous avons
observés dans l’estomac. Il est démontré, en-
tr’autres expériences, par celles de Pechlin,
qu’elles versent dans la cavité intestinale
un suc nommé pour cette raison, suc enté-
rique.
Je ne déterminerai pas quelle est sa
nature, la physiologie s’en est trop peu
occupée; il est cependant probable qu’il a
une grande analogie avec le suc gastrique.
J’ignore également en quelle quantité il se
sécrète; je crois néanmoins qu’Haller s’est
trompé, en la portant jusqu’à huit livres
dans l’intervalle de vingt-quatre heures.

416. On observe dans les intestins grê-
les, un mouvement péristaltique, plus actif
encore que dans le ventricule; plusieurs
causes peuvent le déterminer, mais sur-
tout la présence de la pulpe alimentaire.

Irrités par son abord, les intestins exer-
cent sur elle des contractions vagues &
onduleuses, dont l’effet est de les chasser
[Seite 212] de haut en bas. Il est aussi un mouvement
anti-péristaltique qui les repousse de bas en
haut; mais celui-ci a rarement lieu dans
un homme bien portant; & lorsqu’il existe,
ce n’est que d’une manière foible & momen-
tanée.

417. Telles sont les principales forces
qui agissent sur le chymus: elles concou-
rent avec les humeurs qui le pénètrent, à
l’altérer & à lui faire subir tous les degrés
de changement que la nutrition exige. D’a
bord, elles le transmettent au jejunum,
sous une forme plus fluide, & dans un
état d’amalgame parfait; c’est une bouillie
dont la couleur tire sur le gris, & dont
l’odeur est légèrement aigre; de-là, elles
le conduisent dans l’iléon, où l’humeur
bilieuse le divise en deux portions; en une
matière crasse, d’un brun jaunâtre(1), &
[Seite 213] nauséabonde; & en un vrai chyle qu’on
voit surnager à cette espèce de lie. Nous
examinerons bientôt, comment le chyle est
absorbé, & par quels vaisseaux: que devient
la matière qui en a été séparée?

418. Elle s’épaissit de plus en plus dans
le long trajet que l’iléon lui fait parcourir;
arrivée à son extrémité, où un mucus abon-
dant favorise sa marche, elle passe la valvule
du colon, & entre dans les gros intestins.

419. Cette valvule qu’on pourroit ap-
peler du nom de Fallope(1) qui l’a décou-
[Seite 214] verte, est une prolongation de l’iléon, qui
s’invagine dans l’embouchure de la seconde
portion du tube intestinal. Elle est fendue
dans son milieu, & ses extrémités abou-
tissent à une ride très élevée, différente des
autres replis, en ce que non-seulement les
tuniques nerveuse & veloutée concourent
à sa formation, mais de plus la tunique
musculaire. Les usages de cette valvule
sont d’empêcher que les matières renfer-
mées dans les intestins grêles ne se pré-
cipitent confusément dans ceux qui leur
succèdent, &, y étant parvenues, ne re-
fluent vers l’iléon.

420. La portion des gros intestins se
divise en trois autres, de même que celle
dont nous venons de nous occuper. La
première porte le nom de coecum, & n’est
autre chose qu’un ample cul de sac, au-
quel adhère un appendice vermiforme, dont
on ignore l’usage dans les adultes(1), &
[Seite 215] où se recueillent peu-à-peu les matières fé-
cales, jusqu’à ce que, réunies, le moment
de leur excrétion soit arrivé.

421. Ce n’est pas seulement par l’am-
plitude de leur diamètre, que les gros
intestins diffèrent des petits; on trouve
encore dans leurs parois beaucoup plus
d’épaisseur & de force; on observe de
plus, dans leur tunique musculaire, une
particularité qui leur est absolument pro-
pre; les fibres longitudinales de cette tu-
nique se rassemblent, excepté à l’extrémité
du rectum, en trois bandelettes ou liga-
mens, qui, moins longs que cette portion
intestinale, la raccourcissent, & la font pa-
roître comme bosselée. Enfin leur tunique
profonde n’est point aussi veloutée que
dans les intestins grêles, & en cela res-
semble mieux à celle du ventricule.

422. Il paroît que dans cette seconde
division du tube alimentaire, le mouve-
ment péristaltique est moins fort que dans
la précédente; mais ce défaut est ample-
ment réparé par la pression beaucoup plus
considérable que les muscles de l’abdomen
exercent sur elle, & principalement sur
toute l’étendue du colon.

423. Conséquemment à ces dispositions,
[Seite 216] les matières fécales sont lentement pous-
sées vers le rectum qui les accumule, jus-
qu’à ce que leur quantité & l’irritation
qui en résulte, avertissent de la nécessité
de les rendre.

Il est à observer qu’on ne trouve au-
cun repli transversal à l’extrémité de cet
intestin, & qu’elle est lubréfiée par une
surabondance extraordinaire de mucus. Sans
doute la nature s’est en cela proposé de fa-
ciliter la sortie des excrémens.

Mais ce qui la détermine bien plus puis-
samment, c’est l’action du diaphragme &
des muscles du bas ventre, qui chasse ces
matières en en-bas, avec assez de force pour
vaincre la résistance & du coccix & des deux
sphincters de l’anus. Ces sphincters sont deux
trousseaux de fibres musculaires, qui, en-
tourant les deux lèvres du bord inférieur
du rectum, le resserrent ou le relâchent se-
lon le besoin. Ils le relâchent pour donner
passage aux excrémens; mais lorsque ceux-
ci ont été expulsés, ils se contractent,
l’anus est relevé par les muscles qui lui
sont propres, l’action des autres parties
cesse, & tout rentre dans le premier état.

SECTION TRENTE-QUATRIÈME.
Des Fonctions du Systême absor-
bant
(1).

[Seite 217]

424. Le chyle que nous avons vu se
séparer dans l’iléon, des matières excré-
mentitielles, est évidemment un composé
de différentes humeurs: il n’est pas moins
certain que les humeurs habituellement
secrétées en nous, telles que la salive,
le suc gastrique, la liqueur du pancréas,
le suc intestinal, la bile, &c., quoiqu’on
ne puisse assigner les proportions dans les-
quelles elles s’épanchent sur la pulpe ali-
mentaire, il n’est pas moins certain, dis-
je, qu’elles contribuent beaucoup plus à
ta composition du chyle, que les substances
dont nous nous nourrissons. Il nous reste
donc à examiner comment il se peut que ces
substances de nature si différente, se con-
vertissent en un fluide homogène, parfai-
tement semblable à lui-même, & exac-
tement accommodé à notre organisation
animale.

425. Considérons d’abord quelles voies
[Seite 218] ce fluide parcourt pour se rendre des in-
testins à la masse du sang. Ces voies cons-
tituent une partie du systême absorbant,
& on les connoît sous le nom de vais-
seaux lactés. Les vaisseaux lymphatiques,
les glandes conglobées, & le canal thora-
chique, sont les trois autres parties de ce
systême. Nous allons traiter séparément
de chacune d’elles.

426. On ne doute pas que les vaisseaux
lactés partent des villosités de la tuni-
que profonde des intestins; mais en nais-
sent-ils? ou s’ils ne communiquent avec
elles que par un tissu celluleux intermé-
diaire? Je ne sache pas que personne,
jusqu’à présent, ait pu mieux que moi
remonter à leur origine, ou les ait vus
plus distinctement sortir de ces villosités:
j’ai distingué le tronc petit, mais assez re-
marquable, qui leur donne naissance; &
je conjecture aisément comment ils re-
prennent le chyle que les villosités re-
cueillent dans le tissu cellulaire environ-
nant. Tel est le fruit d’une observation
que j’ai fréquemment répétée sur de jeunes
chiens, auxquels, à l’imitation de Littre, je
faisois donner des alimens teints avec l’in-
digo, une ou deux heures avant de les
soumettre à mes expériences.

427. Les troncs de ces vaisseaux par-
courent ordinairement l’espace de quelques
pouces sur la surface & entre les tuniques
des intestins; ils vont & reviennent, sont
[Seite 219] plusieurs tours & détours, & enfin s’in-
troduisent dans le mésentère.

428. Dans le mésentère, ils s’abouchent
avec les glandes mésaraïques qui y sont
dispersées; les unes plus petites & fabi-
formes, sont plus rapprochées des intes-
tins; les autres plus volumineuses & plus
multipliées, avoisinent davantage le réser-
voir du chyle.

429. Toutes ne semblent être autre
chose qu’une continuation des vaisseaux
lactés, étroitement roulés sur eux-mêmes,
& traversés par un grand nombre de vais-
seaux sanguins. Le but de cette disposition
est sans doute de retarder la marche du
chyle, afin qu’il ait le temps de se per-
fectionner & de s’assimiler à la nature ani-
male, avant d’entrer dans le canal thora-
chique, & delà dans le torrent de la grande
circulation.

430. On demande si les gros intestins
ont aussi des vaisseaux lactés? Les effets
des lavemens nutritifs, enivrans & médi-
camenteux, la sécheresse & la dureté que
le séjour fait acquérir aux matières fécales,
semblent d’abord le prouver; mais lorqu’on
pèse avec plus d’attention ces phénomènes,
on voit bientôt combien peu ils sont con-
cluans. D’ailleurs une expérience certaine
ne nous permet point de ne les pas rap-
porter à l’action des vaisseaux lymphatiques
qui, extrêmement multipliés dans les gros
intestins, ont une structure à-peu-près sem-
[Seite 220] blable à celle des vaisseaux lactés, & des
fonctions en quelque sorte communes(1).

431. On propose une autre question plus
importante, & dont la solution est en même
temps plus difficile. Il s’agit de savoir si tout
le chyle qui se sépare dans les intestins grêles,
est porté au sang par la seule voie des vais-
seaux lactés, ou s’il suit quelqu’autre route
pour y parvenir.

Il faut avouer que la plupart des moyens
dont on se sert pour établir qu’une partie du
chyle est absorbée par les veines, sont bien
foibles. Aussi, depuis long-temps, on a ré-
futé l’assertion de Ruisch qui prétendoit que,
dans un âge avancé, l’astriction & l’endur-
cissement des glandes mésaraïques les ren-
doient inhabiles à remplir leurs fonctions.
On a également démontré que c’étoit à tort
qu’on avoit donné le nom d’obstruction aux
engorgemens ou aux autres affections de ces
glandes, puisque même alors elles étoient
ordinairement perméables, & livroient pas-
sage au mercure. D’un autre côté, que
prouve pour les fonctions animées d’un
corps vivant, la transsudation d’une eau
tiède à travers les parois des veines mé-
saraïques d’un cadavre? Que prouve encore
[Seite 221] l’usage du tube à deux pieds & à deux bran-
ches, que Liebercunh avoit imaginé pour
défendre cette opinion? A l’égard de ce
qu’on assure avoir vu couler un véritable
chyle dans les veines mésaraïques, ce pré-
tendu fait demande des recherches & une
confirmation ultérieures; &, jusqu’à pré-
sent, je n’en suis pas moins persuadé que
ces vaisseaux ne contiennent rien de plus
qu’un sang très-phlogistiqué, destiné à la
sécrétion de la bile(1).

[Seite 222]

432. Les derniers vaisseaux lactés &
plusieurs troncs des vaisseaux lymphati-
ques, viennent aboutir au réservoir du chyle,
ou à la citerne lombaire; c’est ainsi qu’on
appelle la partie la plus basse, mais la
plus ample, du conduit thorachique, ou du
canal de Pecquet.

433. C’est un canal membraneux, mince,
cependant assez fort, dont la marche est
plus ou moins flexueuse, dont la direction &
la division sont soumises à des variétés éton-
nantes. Egalement privé de fibres charnues
& de filets nerveux, pourvu d’un grand
nombre de valvules, il monte le long du
corps des vertèbres, parvient à la hauteur
environ de la septième du col; où, dépas-
sant un peu la veine sous clavière gauche,
il se recourbe & s’abouche avec elle, au
moyen d’une valvule très-remarquable dont
il est muni en ce point.

434. Les causes de la circulation du
chyle, soit dans ce conduit, soit dans les
vaisseaux lactés, sont principalement leur
[Seite 223] action propre, l’action des vaisseaux arté-
riels voisins, la distribution des valvules
qu’on remarque en eux, & la continuité du
mouvement imprimé à cette liqueur.

435. Ce n’est pas précisément pour em-
pêcher l’introduction du sang dans le canal
thorachique, que son orifice supérieur est
fermé par des valvules; c’est plutôt pour
modifier le passage du chyle, de son inté-
rieur dans la veine sous-clavière, & le con-
traindre à ne s’y distiller que goutte à
goutte. Elles s’opposent ainsi à ce qu’une
trop grande abondance d’un chyle récem-
ment formé, en se précipitant dans les
vaisseaux sanguins, ne vienne trop forte-
ment stimuler les parois internes du coeur,
& faire sur cet organe une irruption fati-
gante; car le chyle récent est chargé d’é-
lémens hétérogènes, que les vaisseaux lactés
ont recueillis dans les premières voies, &
les vaisseaux lymphatiques dans tout le reste
du corps.

436. Ces derniers, qui forment la troi-
sième partie du systême absorbant, & qui
par leur structure & par leurs usages ont
une si grande analogie avec les vaisseaux
lactés, étendent leur domaine beaucoup
plus loin, puisqu’ils embrassent le corps
presqu’entier(1). On observe cependant,
[Seite 224] qu’ils naissent sur-tout des tégumens com-
muns, de la plèvre & du péritoine, de la
surface des viscères contenus dans la poi-
trine & le bas-ventre.

437. Ils paroissent se comporter à leur
origine, comme les vaisseaux lactés dans
les intestins; c’est-à dire, que chacune de
leurs radicules aspire & se pénètre des
vapeurs qui s’échappent du tissu cellulaire
environnant.

438. Ils ont un plus ou moins grand
nombre de valvules, qui sont rangées deux
à deux dans leur intérieur; ils aboutissent
presque tous à différentes glandes conglo-
bées: les plus rapprochés, s’anastomosent
entr’eux; ceux qui se répandent sur des
viscères, tels que les poumons & le foie,
s’y entre-croisent en forme de réseaux.

439. La circulation de la lymphe s’opère
en eux, à l’aide de tous les moyens que
nous avons indiqués en traitant des vais-
seaux chylifères; mais elle est principale-
ment due à la force de contractilité, à la
souplesse & à la solidité de leurs tuniques
(on peut juger de celle-ci par le poids de
mercure qu’elles soutiennent dans certaines
préparations anatomiques), & à l’action
des muscles qui s’exerçant sur eux d’une
[Seite 225] infinité de manières, dans les différentes
parties, dans les extrémités sur-tout aux-
quelles ils se distribuent, ajoutent considé-
rablement à leur ton.

440. On a beaucoup disputé dans ces
derniers temps, sur leur terminaison: les
uns pensent que tous aboutissent au canal
thorachique, de même que tous les vais-
seaux sanguins se terminent aux veines-
caves; il en est d’autres, qui croient devoir
éloigner de ce point de réunion au moins
les vaisseaux du bras droit & ceux du même
côté du col, pour les conduire dans la veine
sous-clavière droite; d’autres prétendent
que plusieurs se continuent avec des vais-
seaux sanguins, dans les glandes conglo-
bées; d’autres enfin, & leur opinion n’est
pas dépourvue de toute vraisemblance,
d’autres enfin soutiennent qu’il est des
voies particulières, ouvertes par les vaisseaux
lymphatiques, entre le tube intestinal & les
organes urinaires.

441. Il est aisé de conclure de ce que
les vaisseaux lymphatiques se répandent sur
toute l’étendue du corps, & de ce qu’ils
pompent principalement à sa surface ex-
terne, tous les fluides étrangers(1) avec
[Seite 226] lesquels elle est en contact, combien la
nature de la lymphe doit être peu sembla-
ble à elle-même; les ouvertures de cada-
vres en fournissent une nouvelle preuve.
Elles démontrent une différence essentielle
entre l’humeur que contiennent les vais-
seaux absorbans du foie ou de la rate, &
celle qui circule dans les mêmes vaisseaux
de l’utérus.

442. Mais les glandes conglobées font
disparoître ces différences, & c’est là le
principal usage de cette quatrième partie
du systême absorbant. Soit en retardant la
marche de la lymphe, soit peut-être en la
combinant avec un nouveau fluide, qui
leur est fourni par des vaisseaux artériels,
elles l’animalisent de plus en plus, & la
dépouillent de ce caractère de crudité(1),
dont l’impression trop stimulante seroit à
redouter pour le coeur.

[Seite 227]

443. Ces glandes, d’ailleurs, en quelque
partie du corps qu’on les considère, celles
qui sont vaguement dispersées sur son éten-
due, & celles que rassemblent ou le creux
de l’aisselle, ou le pli de l’aîne, ne diffè-
rent aucunement des mésaraïques dont nous
avons déjà parlé; elles ont la même struc-
ture, elles admettent un égal nombre de
vaisseaux sanguins, & sont exposées aux
mêmes affections maladives.

SECTION TRENTE-CINQUIÈME.
De la Sanguification.


444. Il est presqu’inutile d’avertir que
nous entendons par ce mot, la conversion
du chyle en sang, & la manière dont l’une
de ces deux humeurs ne cesse de réparer
les pertes que l’autre ne cesse d’éprouver.

445. On peut ranger sous trois classes
les différentes humeurs qui se produisent
dans le corps humain; & de cette distribu-
tion naissent les humeurs crues, le sang, &
les humeurs excrémentitielles. Le sang tient
le milieu entre les deux autres; il est en
même temps la source de toutes les sécré-
tions, & le confluent dans lequel toutes les
ramifications du systême absorbant se dé-
chargent.

[Seite 228]

446. Le sang étant une liqueur parfaite-
ment une, & dissemblable de toute autre hu-
meur; on doit supposer qu’il existe diffé-
rens moyens, à l’aide desquels les fluides
hétérogènes que le conduit thorachique
verse dans ses canaux, lui sont soumis &
assimilés.

447. Tel l’effet que produisent d’abord
les tortuosités nombreuses que les vaisseaux
lactés & lymphatiques affectent, soit dans
les glandes du mésentère, soit dans les au-
tres glandes conglobées: elles commencent
à donner aux humeurs qui les parcourent
un caractère animal.

448. Une grande partie de la lymphe
qui se jette avec le chyle dans le canal tho-
rachique, & delà dans la sous-clavière
gauche, doit avoir bientôt revêtu ce carac-
tère; puisqu’ayant été puisée dans la subs-
tance des viscères, ou des autres parties
molles, elle rentre dans la masse du sang,
presqu’aussitôt après en avoir été séparée.

449. L’écoulement du chyle qui se fait
lentement & par gouttes, au moyen de la
valvule qui termine supérieurement le con-
duit de Pecquet, contribue beaucoup à le
mêler avec le sang.

450. La structure interne du coeur, hé-
rissée de petits muscles papillaires, qui ne
cessent d’agiter le liquide que cet organe
renferme, ajoute à la perfection de ce
mélange.

451. L’organisation des poumons, leur
[Seite 229] jeu égal & soutenu, qu’entretiennent les
mouvemens successifs de la respiration,
concourent encore & de la manière la plus
efficace, à combiner intimement ces deux
humeurs pendant le séjour qu’elles y font.

452. Enfin, la circulation du sang dans
toutes les autres parties du corps, con-
somme ce grand oeuvre de la sanguifica-
tion; les mêmes forces déterminent l’une &
l’autre, & parmi ces forces, on ne doit pas
oublier l’action musculaire.

453. Quoique les principes du chyle &
du sang soient à-peu-près les mêmes, quoi-
qu’un grand nombre de causes très-puis-
santes se réunissent pour changer l’un en
l’autre, on assure communément que ce
n’est qu’après l’intervalle de plusieurs heu-
res, que le chyle se dépouille de sa couleur
lactée, & prend la nature du sang. Entr’au-
tres preuves de cette assertion, on cite ce
phénomène pathologique, que souvent une
saignée faite plusieurs heures après la diges-
tion, donne avec du sang un chyle pur.

Je l’ai quelquefois observé ce phéno-
mène, mais c’étoit dans des cas où un état
évidemment inflammatoire s’étoit opposé à
l’assimilation du chyle; & je ne vois pas
ce qu’on en peut conclure pour un état
sain, qui est le seul objet de la physio-
logie.


SECTION TRENTE-SIXIÈME.
De la Nutrition.

[Seite 230]

454. Outre la fonction de répandre
dans le corps le principe igné, & d’en rap-
porter le phlogistique qu’il y rencontre, le
sang a encore pour usages indispensables &
essentiels, de distribuer la nourriture à tou-
tes nos parties; & de fournir à nos organes
sécréteurs l’humeur particulière qu’ils en
séparent. Le premier de ces deux usages,
ou la nutrition, doit seul fixer ici notre
examen.

455. La nutrition est un privilège dont
la nature a gratifié tous les corps organi-
ques, & par lequels elle a voulu les distin-
guer sensiblement des automates ou des
machines fabriquées par la main des hom-
mes. Quel est en effet, l’artiste qui ait
jamais pu donner à son ouvrage la faculté
de croître, de se fortifier, de se perfection-
ner de plus en plus, de se conserver par
ses propres forces, enfin de rémédier cha-
que jour, & lui-même, aux diverses alté-
rations qu’il ne cesse de subir?

456. Tels sont les avantages que nous
procure la nutrition, & les admirables effets
qu’elle opère en nous. C’est sous ses heureux
[Seite 231] auspices que dès le premier moment de
notre existence nous croissons, nous nous
fortifions, nous réparons dans notre corps,
jusqu’à ce que nous ayions rendu le dernier
soupir, les pertes que le jeu de nos orga-
nes & les influences extérieures concourent
à nous faire éprouver.

457. Mais quelles sont en nous les par-
ties qui, susceptibles de destruction, ont
besoin d’être réparées? Nos solides, sont-ils
dans ce cas(1)? ou, si nous devons croire
avec quelques physiologistes recommanda-
bles(2), qu’une fois formés & parvenus
au terme de leur accroissement, ils se sou-
tiennent dans un état d’intégrité parfaite?

458. Il n’est pas de doute, que plusieurs
de nos parties solides & similaires, telles
que l’épiderme & les ongles, se détruisent
& se renouvellent insensiblement. Il n’est pas
moins constant que les os perdent & se
nourrissent. Je pourrois alléguer en faveur
de cette opinion plusieurs expériences très-
connues; mais elle est suffisamment établie,
& par le changement de couleur qu’éprou-
vent les os des animaux nourris avec de la
garence, & par l’espèce d’altération dont
[Seite 232] le grand âge frappe les os plats, sur-tout
les os du crâne.

459. Il me semble d’ailleurs, & généra-
lement parlant, que les parties solides, en
qui existe la faculté de se nourrir, ont en
même temps, & jusqu’à un certain point,
la faculté de se reproduire. Il ne leur est pas
seulement donné de pouvoir réparer les
pertes insensibles & naturelles qu’elles subis-
sent chaque jour, mais encore celles plus
conséquentes & accidentelles, que des lé-
sions extérieures, par exemple, des plaies,
peuvent leur faire éprouver. C’est ainsi,
que nous voyons se régénérer & se rétablir
dans son premier état, la substance détruite,
soit des os, soit de quelques autres parties
dont nous venons de parler.

460. Je pense aussi, & je le conclus de
différentes expériences faites à ce sujet,
que chez l’homme & les autres animaux à
sang chaud, cette force réproductive n’existe
dans presqu’aucune des parties solides &
similaires, qui jouissent de la contractilité &
d’une autre espèce de force vitale; c’est-à-
dire, ou de l’irritabilité, ou de la sensibilité,
ou de la vie-propre
(1).

[Seite 233]

461. Quelles que soient ces parties,
elles ont pour base constante, un paren-
chyme toujours le même. La seule modifi-
cation qu’elles éprouvent, leur vient pen-
dant que la nutrition se fait, de la turges-
cence de leurs interstices celluleux, que pénè-
tre la lymphe plastique du sang; ou si la
nutrition se fait mal, ces mêmes interstices
ne recevant pas une assez grande quantité
de cette humeur, s’affaissent sur eux-
mêmes, & mentent l’amaigrissement de la
partie qu’ils concourent à former.

462. La lymphe, dont nous avons suffi-
samment prouvé l’importance au commen-
cement de cet ouvrage, que nous avons
vu ailleurs se répandre dans presque toute
l’étendue du corps par la voie des vaisseaux
sanguins, que nous savons enfin avoir la
plus forte tendance à se convertir en tissu
cellulaire; la lymphe, dis-je, paroît être
la matière principale de la nutrition.

463. C’est principalement à l’époque de
l’accroissement du corps, qu’elle est déter-
minée par des forces particulières à s’épan-
cher des derniers vaisseaux sanguins dans
le tissu auquel ils aboutissent; à s’y dis-
tribuer convenablement, & à s’assimiler,
en quelque sorte, à chaque espèce de pa-
renchyme. Ces forces ne sont vraisembla-
[Seite 234] blement autre chose que les loix de l’affi-
nité, qui rapprochent des parties similaires
les élémens de même nature; & cet effort
de formation, qui, en faisant à nos parties
une juste application de la matière élémen-
taire dont elles ont besoin, arrête la con-
figuration précise que les molécules de cette
matière doivent prendre.

464. C’est à ces mêmes forces, si je ne
me trompe, qu’il faut rapporter la nutri-
tion des parties similaires que leur position
éloigne du torrent de la circulation; par
exemple, des ongles, des poils, &c.: quoi-
qu’ils ne paroissent recevoir aucun vaisseau
sanguin, on les voit constamment naître,
croître, se nourrir & même se reproduire,
s’il arrive qu’un accident les ait détruits.

465. Nous venons d’exposer comment
se fait la nutrition en général; mais nous
n’avons pas décrit ses nombreuses variétés.
C’est d’elle, ou plutôt c’est de la manière
plus ou moins serrée, plus ou moins lâche,
avec laquelle les molécules nutritives s’in-
corporent à nous, que dépendent la den-
sité & la mollesse de nos parties similaires,
& conséquemment les variétés de pesan-
teur qui se trouvent entre chaque corps.
On fait qu’à cet égard, il existe des na-
tions entières qui diffèrent autant des au-
tres nations, qu’un homme peut différer
d’un autre homme; il me suffira de citer
en exemple certains peuples septentrionaux,
tels que les Burates & les Jakutes, assez con-
nus par l’étonnante légéreté de leurs corps.

SECTION TRENTE-SEPTIÈME.
Des Sécrétions.

[Seite 235]

466. Le suc nourricier n’est pas la seule
humeur qui se sépare du sang; il en est
plusieurs autres dont il se décharge égale-
ment, & qui font la matière des différentes
secrétions. Les connoissances physiologiques
ne sont pas à cet égard fort avancées, & ce
n’est pas sans raison que Haller & plusieurs
autres se plaignent de l’obscurité dont ces
fonctions s’entourent.

467. On observe tant de variétés dans
les humeurs qui se sécrètent en nous, &
en même temps elles paroissent avoir tant
d’affinité entr’elles, qu’on ne peut même
pas les classer, si ce n’est d’une manière
arbitraire. Si cependant on veut ne les con-
sidérer qu’en général, & à raison du plus
ou moins de changement qu’elles subissent
dans les organes secrétoires, il paroît qu’on
peut les distribuer dans l’ordre suivant:

1°. Le lait, qui n’est en quelque sorte
qu’un chyle rendu à son premier état, ou
qui se sépare du sang tel à-peu-près qu’il
étoit avant de se combiner avec lui. 2°. Les
humeurs aqueuses; nous rapportons à cette
classe celles des yeux, les larmes, la sueur,
les vapeurs que renferment les interstices du
[Seite 236] tissu cellulaire, ainsi que les capacités de la
poitrine & du bas-ventre; la liqueur du pé-
ricarde, celle que recueillent les ventricules
du cerveau, ou celles dont sont arrosés les
sinus pituitaires: nous rapportons encore à
cette même classe l’urine, quoiqu’elle ait
évidemment un caractère particulier. 3°. Les
humeurs salivaires qui servent à la mastica-
tion, à la digestion & à la chylification;
celles-ci paroissent déjà beaucoup plus com-
posées que les précédentes. 4°. Les humeurs
muqueuses
qui enduisent les cavités de la
plupart des viscères consacrés à l’exercice
des fonctions soit naturelles, soit génitales;
ou l’intérieur de tout le conduit aérien, de-
puis l’orifice externe des fosses nasales jus-
qu’à l’extrémité inférieure de la trachée-
artère. Il paroît y avoir bien peu de dif-
férence entre les humeurs qui forment cette
quatrième classe, & le mucus qui se trouve
dans l’intérieur de l’oeil, ou sous l’épiderme,
dans l’épaisseur des tégumens communs.
5°. Les humeurs adipeuses; elles comprennent,
outre la graisse proprement dite, la moelle
des os, l’humeur sébacée de la peau, &
le cérumen des oreilles; elles comprennent
encore cette autre humeur sébacée qui se
sécrète tant au-dessus du gland chez l’homme,
que dans le vagin chez la femme, & celle que
les glandes de Meibonius fournissent aux pau-
pières. 6°. Les humeurs gélatineuses; telles
sont la liqueur de l’amnios, & la synovie,
dont il est cependant vrai qu’on ne con-
[Seite 237] noit pas parfaitement le caractère. On n’est
pas plus instruit sur la nature de l’humeur
anonyme qui s’échappe de l’uterus dans le
moment de l’acte vénérien; on ignore éga-
lement ce que sont la liqueur qui, durant
les premiers mois après la conception, sé-
pare le chorion de l’amnios; celle que ren-
ferme la vésicule ombilicale de l’embryon;
& celle qui se trouve entre les trois vais-
seaux sanguins du cordon ombilical. 7°. Les
humeurs séreuses ou albumineuses; à cette
classe appartiennent seulement l’humeur de
Graaf contenue dans les ovaires, & la
liqueur de la glande prostate. 8°. La li-
queur séminale;
celle-ci paroît avoir un ca-
ractère particulier qui la distingue essen-
tiellement de toute autre. 9°. Il en est de
même de la bile.

468. Il est évident que ce ne sont pas
les mêmes organes qui sécrètent ces diffé-
rentes humeurs, & que le mécanisme de
leurs sécrétions n’est pas uniforme: il est
extrêmement simple pour les unes, & fort
composé pour les autres.

469. Le plus simple consiste dans une
espèce de transsudation qui se fait de l’hu-
meur sécrétée au travers des tuniques ar-
térielles; on pense que c’est ainsi que se
sépare du sang la graisse, la moelle, &
peut-être même les sucs gastrique & in-
testinal.

470. Les sécrétions plus composées
s’opèrent dans des corps organiques aux-
[Seite 238] quels on a donné le nom de glandes: on
étend cette dénomination aux follicules &
aux cryptes qui se remarquent, par exemple,
dans l’arrière-bouche; on nomme encore
ainsi tous les corps, même les plus simples,
qui ont une conformation analogue. Ce-
pendant on est convenu de n’appeler glandes
secrétoires ou conglomérées, pour les distin-
guer des glandes lymphatiques ou conglo-
bées,
que celles qui, comme le pancréas,
les salivaires, les lacrymales & les mam-
maires, ont un conduit excréteur, & sont
formées de l’assemblage de plusieurs autres,
ou au moins de la réunion de plusieurs
lobes, qui se sous-divisent en lobules & en
grains presqu’à l’infini.

Quelle est la structure interne de ces
lobes & lobules? Cette question a été un
germe de discorde entre les physiologistes.
Malpighi pensoit que les plus petits d’entre
ceux qui sont perceptibles à nos sens, ne
différoient aucunement des glandes mu-
queuses simples, ou des cryptes; il les
appeloit des grains creux. Ruisch, au con-
traire, soutenoit que ces prétendus grains
creux n’étoient autre chose qu’un amas
de vaisseaux sanguins roulés sur eux-
mêmes. Il faut avouer que les diffé-
rentes préparations anatomiques, les in-
jections très-fines, l’oeil même, armé d’une
forte loupe, déposent ouvertement en sa-
veur de cette opinion.

471. Si on fait abstraction du paren-
[Seite 239] chyme propre aux viscères sécréteurs, il
en est quelques-uns, tels que le foie &
les reins, dont la structure ne paroît pas
fort différente de celle des glandes con-
glomérées; il semble même que l’une ré-
pande un certain jour sur l’autre. Consi-
dérons en effet les reins; on y aperçoit
bien distinctement les pelotons de Ruisch,
ou les grains de Malpighi; on voit dans
leur substance corticale, des artérioles ca-
pillaires donner naissance à des ramifications
encore plus ténues, qui se terminent par des
globules vasculeux & suspendus à ces ra-
mifications, comme des grains de raisin le
sont à leurs pédicules. De ces grains vas-
culeux s’échappent d’abord des vaisseaux
sécréteurs très-petits & décolorés, & en-
suite des radicules veineuses, dont l’usage
est de recueillir le sang, après qu’il a
fourni la matière de la sécrétion propre
aux reins, & de le porter aux troncs de
leur ordre.

472. Il est d’autres organes secréteurs
qui ont une structure absolument différente:
tels sont les testicules, dont la substance est
uniquement faite d’un nombre prodigieux de
petits vaisseaux fort longs & très-étroite-
ment roulés sur eux-mêmes.

473. Mais examinons quelles sont les
causes des secrétions, ou comment il se
fait que telle espèce d’humeur se sépare
précisément dans tel organe: la théorie
entière de ces fonctions ne présente cer-
[Seite 240] tainement rien de plus obscur & de plus
difficile à expliquer.

474. Il est hors de doute que c’est dans
la construction profonde des organes secré-
teurs qu’il faut chercher ces causes, c’est-
à-dire, soit dans la distribution & la di-
rection des vaisseaux sanguins qui séparent
ces humeurs, soit dans la nature du pa-
renchyme de ces viscères, tellement propre
à chacun d’eux, que le premier coup-d’oeil
en distingue la plupart, de toute autre par-
tie organisée.

475. Il est au moins vraisemblable, &
nous avons essayé de l’établir ailleurs, que
de même que chaque organe a un paren-
chyme particulier,
de même il a une vie
propre
ou une force vitale distincte de toutes
les autres forces communes, de la contrac-
tilité, de l’irritabilité, & de la sensibilité.

476. Il faut encore admettre que le sys-
tême absorbant contribue beaucoup au mé-
canisme des sécrétions. C’est lui qui aspire
dans chaque viscère, & fait rentrer dans le
torrent de la circulation l’espèce de liqueur
analogue à l’humeur que tel organe doit
secréter: ainsi il absorbe la bile dans le
foie, & le sperme dans les testicules.

Delà résulte, pour chaque sécrétion,
un cercle perpétuel de l’humeur qui en est
la matière: ses élémens, puisés dans les
organes où elle se depose, sont portés à
la masse du sang; & le sang, en circulant,
les reporte à ces mêmes organes, qui, en
[Seite 241] vertu des loix de l’affinité, s’unissent avec
ce qui leur est homogène, se les appro-
prient de nouveau.

477. Il est aussi quelques humeurs à la
sécrétion desquelles concourt immédiate-
ment la qualité du sang qui les fournit;
c’est ainsi qu’on voit la bile découler de la
veine porte, dont le sang, dès son origine,
est excessivement chargé de phlogistique.

478. Je passe sous silence plusieurs autres
moyens que la nature emploie pour opérer
quelques sécrétions en particulier. Telles
sont la congestion & la dérivation qu’elle
fait évidemment servir à la séparation du
lait.

479. Les sécrétions étant faites, on
remarque cette différence entre les hu-
meurs qui en sont le produit, que les
unes se rendent aussitôt aux parties aux-
quelles elles sont destinées, & où elles ont
des usages à remplir, tandis que les autres,
avant d’être excrétées, sont déposées dans
des réservoirs où elles séjournent, & achè-
vent en quelque sorte de se perfectionner.
Du nombre de ces dernières sont le lait
qui s’accumule dans ses conduits, l’urine, la
bile & la semence, que des vessies particu-
lières recueillent, &, sous un certain rap-
port, la sérosité que contiennent dans les
ovaires les vésicules de Graaf.


SECTION TRENTE-HUITIÈME.
De l’Urine.

[Seite 242]

480. Outre les sucs nourriciers, &
les humeurs qu’une destination particulière
fait séjourner en nous, le sang fournit des
liqueurs secondaires, qui, inutiles, en doi-
vent être expulsées; on les appelle les ex-
crémens de la seconde coction: l’une est le
fluide qui s’exhale par la transpiration, l’autre
est l’urine que filtrent les reins. Nous avons
déjà parlé de la première.

481. Les reins sont des viscères situés
dans la région supérieure des lombes, de
l’un & de l’autre côté de l’épine, & derrière
le péritoine. On en compte ordinairement
deux, ayant chacun deux faces un peu ap-
platies; mais leur figure & leur nombre
varient plus que dans aucun autre viscère
du corps humain(1). Ils sont suspendus
[Seite 243] aux vaisseaux émulgens, dont l’ampleur est
proportionnée à leur volume, & suppor-
tés par un tissu cellulaire éxtrêmement
graisseux.

482. Une membrane vasculeuse, à eux
propre, les revêt, & réunit, sur-tout
dans le premier âge de la vie, plusieurs
lobules(1) qui présentent chacun, au
rapport de Ferrein, de 70 à 80 rayons de
fibres charnues: Ferrein appeloit ces rayons
des pyramides blanches.

483. Si on les divise par leur convexité,
ou plutôt si on les déchire en ce sens, on
y distingue deux substances; l’une exté-
rieure ou corticale, & l’autre interne ou
médullaire. Toutes deux sont abondamment
pourvues de vaisseaux sanguins artériels &
veineux; mais on remarque de plus dans
la première, des tuyaux blancs très-dé-
liés(2), destinés à sécréter l’urine; &
[Seite 244] dans la seconds, des tuyaux à-peu-près
semblables, dont l’usage est de la déposer.
Les conduits sécrétoires naissent, comme
nous l’avons déjà dit dans la section précé-
dente, des pelotons que forment les ramifi-
cations artérielles, dont les nombreuses ag-
glomérations constituent la plus grande par-
tie de la substance corticale. Ils sont faciles
à distinguer, à raison de leur marche tor-
tueuse, des vaisseaux efférens, ou des petits
tubes de Bellini, auxquels ils aboutissent:
ceux-ci vont en ligne droite, de la subs-
tance corticale à la substance médullaire
qu’ils composent presqu’entière; ils se réu-
nissent ensuite, & se terminent en papilles
percées de plusieurs trous.

484. Ces papilles, dont le nombre ré-
pond ordinairement à celui des lobes de
chaque rein, reçoivent l’urine que les vais-
seaux sécrétoires & efférens conduisent
jusqu’à elles, & la déposent dans des ca-
lices
infundibuliformes, qui la versent à
leur tour dans un bassinet commun.

485. Les bassinets se continuent avec
les uretères, c’est-à-dire, avec des canaux
membraneux très-sensibles, enduits inté-
rieurement de mucosité, susceptibles d’une
grande dilatation, plus ou moins amples
[Seite 245] dans les différentes parties de leur étendue,
qui se rendent à la partie postérieure &
inférieure de la vessie. Ils ne percent pas
aussitôt cet organe, mais rampent oblique-
ment entre ses membranes musculaire &
nerveuse, plus épaisses en ce point, &
viennent s’ouvrir dans sa cavité beaucoup
au dessous du lieu se leur insertion. Cette
disposition tient lieu de valvule, & em-
pêche que l’urine filtrée dans la vessie ne
puisse refluer vers les uretères(1).

486. Enfin la vessie est une espèce de
poche, qui, dans un adulte, peut ordi-
nairement contenir deux livres d’urine. Son
fond, qui, dans le foetus, donne naissance à
l’ouraque(2), & sa face postérieure, sont
recouverts par le péritoine; ses autres en-
veloppes diffèrent à peine de celles du
ventricule. La plus externe ou sa mem-
brane musculeuse, est composée de plu-
sieurs bandelettes charnues, interrompues
dans leur longueur, dont les unes longi-
tudinales, les autres obliques, les autres
perpendiculaires, embrassent la vessie, en
[Seite 246] se croisant dans toutes sortes de direc-
tions. Elles ont une force contractile
si considérable, qu’on a nommé leur tissu
la membrane expulsive de l’urine. On a
donné le nom de sphincter à celles non
moins irrégulières quant à leur origine,
leur direction & leur figure, qui se ras-
semblent à l’entour du col de cet organe.
C’est à sa membrane nerveuse que la vessie
doit sa principale force. La plus profonde,
que l’on dit être une continuation de l’épi-
derme, est couverte, sur-tout près de son
col, d’une mucosité singuliérement abon-
dante(1).

487. Telles sont les voies connues ou-
vertes à l’urine; mais il est vraisemblable
que d’autres canaux plus secrets la con-
duisent directement des intestins à la vessie.
En considérant avec quelle promptitude les
boissons arrivent dans ce réservoir com-
mun, & combien elles retiennent de la cou-
leur & de l’odeur des alimens, on ne peut
se persuader qu’elles circulent toutes dans la
longue étendue des vaisseaux chylifères &
sanguins: d’ailleurs nous lisons qu’on a vu
surnager à l’urine des particules huileuses,
[Seite 247] introduites par un clystère dans le rectum
très peu auparavant: d’une autre part, on
sait combien sont multipliées les anasto-
moses entre les vaisseaux lymphatiques des
reins & des intestins: enfin des expériences
faites sur des animaux vivans prouvent
que, quoiqu’on eût fait la ligature des
uretères, & vidé l’urine que contenoit
la vessie, cependant, trois heures après,
on en retrouvoit dans cet organe. Il
n’avoit pu la recevoir des uretères, puis-
qu’on voyoit la portion de ce fluide qui
s’y étoit rendue, parvenir plutôt à di-
later excessivement leurs parois, qu’à for-
cer l’obstacle né de la ligature.

488. L’urine accumulée dans la vessie,
l’irrite par sa présence, & demande à être
évacuée; c’est par l’urètre qu’elle prend
son écoulement au dehors. Nous décrirons
ce canal en exposant les fonctions relatives
aux différens sexes, parce qu’il diffère lui-
même dans l’un & dans l’autre.

489. Pour arriver dans ce canal, il lui
est préalablement nécessaire de vaincre la
résistance que lui oppose la constriction du
sphincter. Elle la surmonte en effet, à l’aide
de la membrane musculaire qui se contracte
sur elle, des muscles du bas ventre & du
diaphragme qui entrent en action; enfin,
dans les hommes, des muscles accélérateurs
qui, en pressant l’urètre, en expulsent jus-
qu’aux dernières gouttes.

[Seite 248]

490. Il est assez difficile de déterminer
la nature de l’urine, tant elle présente de
différences(1), à raison de l’âge, de la sai-
son, de la qualité des alimens, du temps
plus ou moins long depuis lequel on a
mangé ou bu, &c. Si cependant on la con-
sidère en général, telle que la rend un
homme sain, peu après un sommeil paisi-
ble; c’est un fluide aqueux, d’une odeur
fade, & d’une couleur citrine, qui contient
entr’autres élémens, des parties salines &
des parties terreuses(2), dont les propor-
tions varient avec les individus. Parmi ces
dernières, on distingue ordinairement une
terre calcaire, qui rencontrant par fois des
noyaux calculeux dans les voies urinaires,
s’incruste à leur surface, & forme des pierres
plus ou moins considérables(3).

A l’égard des sels, on observe que celui
qui est connu sous les noms de sel essentiel,
sel natif, sel microcosmique, sel fusible, sel
[Seite 249] perlé,
&c.(1); donne en bien plus grande
quantité qu’aucune autre partie du corps
humain, le fameux acide phosphorique uni
à l’alkali volatil.

SECTION TRENTE-NEUVIÈME.
De la Difference des Sexes en général.


491. Toutes les fonctions du corps
humain que nous avons décrites jusqu’à
présent, sont, à quelques différences près,
communes à l’un & à l’autre sexe; celles
que nous allons exposer n’appartiennent
qu’à l’un des deux; & sont appelées par
cette raison fonctions sexuelles. Il nous pa-
roît indispensable de faire précéder leur
discussion, par quelques notions générales.

492. Chaque sexe a sa manière d’être,
son habitude propre & caractéristique; plus
ou moins sensible dans les sujets nés, on la
saisit à peine, au moins de prime-abord,
dans quelques foetus; il en est même, dont
les parties génitales externes paroissent équi-
voques, si on ne les examine fort attenti-
vement: d’une part, le clitoris prolongé,
[Seite 250] peut simuler une verge; de l’autre, le
scrotum peu marqué, ne fait apercevoir
aucune différence assez frappante(1).

493. Cette habitude se marque fort peu
dans l’enfance; l’adolescence la développe
insensiblement: alors, la configuration gé-
nérale du corps féminin, sa mollesse, sa
texture plus délicate, la briéveté de sa
taille, comparée avec les formes énergiques
& musculeuses du corps de l’homme, les
distinguent manifestement & au premier
coup-d’oeil(2).

494. Cette différence n’existe pas seule-
ment dans les parties extérieures, on la
retrouve dans les parties dures les plus pro-
fondément situées. Les os, dans les femmes,
toutes choses égales d’ailleurs, sont plus
légers & plus ronds; ceux dont la forme est
cylindrique, ont moins de diamètre; &
ceux à figure plate, sont plus minces. Je
ne me propose pas d’appliquer cette remar-
que à chacun des os en particulier; mais on
[Seite 251] peut la faire principalement sur ceux de la
poitrine & du bassin, sur les clavicules &
les fémurs(1).

495. Leurs parties molles sont également
plus lâches & plus souples; la nature les
prépare ainsi à l’état de distension que doi-
vent nécessiter les circonstances de la gros-
sesse; leur peau est plus douce, & la cou-
che graisseuse étendue sous elle, la rend
infiniment plus blanche. Leur chevelure est
ordinairement plus longue: mais d’un autre
côté, les parties qui chez l’homme sont
très-velues, ou sont dépourvues de poils
chez elles, telles que le menton & la
poitrine, ou enfin sont à peine recouvertes
d’un simple duvet; telles sont les extré-
mités supérieures & inférieures.

496. On observe encore qu’elles ont,
généralement parlant, le pouls plus fré-
quent, la partie supérieure de la poitrine
plus mobile, l’os hyoïde plus petit, le la-
rynx plus resserré, & par conséquent la
voix moins pleine.

497. Si on les considère relativement à
leurs fonctions animales, leur systême ner-
veux est plus mobile, leur irritabilité plus
exquise, & leur ame plus facilement émue.

498. A l’égard de leurs fonctions natu-
relles, elles ont besoin de moins de nourri-
[Seite 252] ture; leur corps se développe plus promp-
tement; & elles parviennent plutôt aux
époques de la puberté & de l’adolescence.

499. Mais ce qui distingue essentiellement
l’homme de la femme, ce sont les fonctions
génitales qu’ils ont à remplir: par l’exercice
de ces fonctions, ils concourent à pro-
duire un être de leur espèce; mais l’un le
féconde, & l’autre le conçoit. Examinons
séparément ces deux moyens de notre
reproduction.

SECTION QUARANTIÈME.
Des Fonctions génitales de l’homme.


500. La liqueur génitale est préparée
dans les testicules, c’est-à-dire, dans ces
deux corps glanduleux qui sont suspendus
aux cordons spermatiques, & renfermés dans
le scrotum. On distingue en eux, outre les
branches lymphatiques, dont le nombre est
prodigieusement multiplié, trois principaux
ordres de vaisseaux: les artères spermatiques,
naissant pour l’ordinaire de l’aorte ven-
trale, & considérées, eu égard à l’étroi-
tesse de leur calibre, comme les plus lon-
gues du corps humain; les canaux déférens,
qui portent aux vésicules séminales la se-
mence que leur a fournie le vaisseau arté-
riel dont nous venons de parler; & les
[Seite 253] veines spermatiques, qui constituent le plexus
pampiniforme,
& versent le résidu du sang
dans les veines cave & émulgente.

501. Ce n’est pas à toute époque de la
vie, que les testicules sont contenus dans
le scrotum: dans le foetus éloigné du terme
de la naissance, ils occupent un siége bien
différent. Haller est le premier qui ait fait
l’histoire raisonnée de leurs changemens de
lieu & de position; d’autres l’ont tentée
après lui, & l’ont différemment écrite: pour
nous, il nous suffira d’en donner une no-
tice succincte, telle que la nature nous l’a
offerte dans un très-grand nombre d’em-
bryons que nous avons disséqués.

502. A l’ouverture du bas-ventre d’un
foetus récemment développé, on aperçoit
à l’une & à l’autre aîne, vers l’anneau que
forment les muscles obliques, une ouver-
ture très-étroite pratiquée dans le péritoine,
qui se prolonge en bas, à travers l’anneau,
& hors la cavité abdominale, en forme de
petit sac celluleux & boursoufflé, dont le
fond regarde le scrotum. C’est là l’enve-
loppe que la nature a destinée au testicule.

503. Vers le bord postérieur de cette
ouverture, on remarque une autre expan-
sion du péritoine; mais celle-ci se dirige
en haut, en se repliant sur elle-même dans
le sens de sa longueur: elle représente un
cône renversé, dont la base qui regarde le
bord inférieur du rein, est surmontée par
une espèce de globe, auquel adhèrent le
[Seite 254] testicule & l’épididyme. On croiroit voir au
premier coup-d’oeil, une petite baie fixée
à son pétiole, & flottante ainsi que le foie
& la rate, dans la cavité du bas-ventre.

504. Derrière le péritoine, qui, à cet
âge, est très-mince & presque transparent,
on voit ramper les vaisseaux dont est com-
posé le cordon spermatique. L’artère & la
veine spermatique descendent sur les côtés
de l’épine du dos; le canal déférent, plus en
dedans, se dirige vers le col de la vessie:
les uns & les autres se perdent dans le repli
du péritoine dont nous venons de parler,
& de là, dans la propre substance du tes-
ticule.

505. A l’époque environ du milieu de
la grossesse, les testicules descendent un
peu, & traînant après eux le prolongement
conique auquel ils sont unis, ils se rappro-
chent insensiblement de l’ouverture que
forme le péritoine près de l’anneau; ils
arrivent ainsi presqu’à l’entrée du détroit
qui la fait communiquer avec le sac par
lequel elle se termine.

506. Le foetus étant parvenu au terme
où les testicules se disposent à passer dans
le scrotum, l’ouverture destinée à les rece-
voir se dilate: alors ils la franchissent ainsi
que l’anneau, le détroit, & tout ce qui les
séparoit du sac dans lequel ils se précipi-
tent. Aussitôt, toute communication entre
ce sac & la cavité du bas-ventre est inter-
ceptée; les voies qui conduisent de l’une à
[Seite 255] l’autre, s’oblitèrent à un point, qu’il est
presqu’impossible de les reconnoître, même
dans l’âge de l’enfance.

507. Autant la marche des testicules
est lente dans l’intérieur de l’abdomen,
autant leur issue de celui-ci est brusque
& rapide(1); aussi est-il très-rare qu’on
les puisse surprendre dans cette dernière
position. Cela ne m’est arrivé qu’une fois.
Je disséquai un jumeau, & j’eus le bon-
heur de saisir son testicule droit au mo-
ment où, engagé dans le détroit, il étoit
sur le point de tomber du bas-ventre dans
le sac qui s’ouvre au-dessous de lui; déjà
le testicule gauche avoit parcouru cet es-
pace; déjà même l’ouverture abdominale
qui lui avoit donné passage, étoit étroite-
ment fermée.

508. On ne peut fixer le temps où les
testicules échappent ainsi au lieu de leur
premier séjour; il paroît seulement que
c’est aux environs du dernier mois de la
grossesse; cependant il n’est pas fort ex-
traordinaire de les trouver chez des nou-
veaux-nés(2), ou dans le bas-ventre ou
[Seite 256] à la partie supérieure de l’aîne(1); &
même, généralement parlant, ce n’est
qu’après avoir occupé quelque temps ce
second siége, qu’ils l’abandonnent pour
passer, avec le sac qui leur est adhérent,
dans l’intérieur du scrotum.

509. Tel est le mouvement progressif
qui porte les testicules de la région lom-
baire dans les bourses. Nous l’avons dé-
crit sur des observations exactes & fré-
quemment répétées: examinons de quelles
causes, ou de quelles forces il dépend.

Je suis de plus en plus persuadé qu’il n’est
déterminé par aucune de celles qu’on lui
assigne communément. L’action du muscle
crémaster, celle du diaphragme, & la con-
tractilité de ce tissu cellulo-tendineux qui
adhère aux différentes expansions du péri-
toine, & qu’on nomme le gouvernail de
Hunter,
sont évidemment dans l’impossi-
bilité de conduire ces organes au-delà du
détroit. Il n’est qu’une force vitale propre
qui puisse donner une raison satisfaisante
de ce phénomène unique en son genre,
& le plus remarquable dans l’économie ani-
male entière.

510. Les testicules arrivés à leur desti-
nation, sont renfermés sous plusieurs en-
[Seite 257] velopes, que l’on a coutume de diviser en
commune & en propres. La première est le
scrotum, ou un prolongement de la peau
fort mince, sous lequel est étendue une
légère couche de graisse(1). Il diffère du
reste des tégumens communs par le grand
nombre de rugosités qu’il présente, & par
sa facilité extraordinaire à se contracter ou
à se relâcher. On observe que c’est durant
l’acte vénérien, ou quand il est saisi par
le froid, qu’il est le plus susceptible de
contraction.

511. Immédiatement au-dessous du scro-
tum se trouve la plus externe des tuniques
propres, le dartos: elle jouit d’une force
de contractilité si grande, que les célèbres
Winslou & Haller l’ont prise pour un muscle
cutané.

512. Plus profondément on rencontre un
tissu cellulaire fort abondant, & derrière lui
trois sortes de tuniques vaginales, dont le fa-
meux Neubaver(2) nous a donné la descrip-
tion la plus exacte: l’une, commune au testi-
cule & à son cordon, reçoit l’épanouisse-
[Seite 258] ment des fibres éparses du muscle crémaster;
les deux autres, propres au cordon sperma-
tique ou au testicule, les revêtent sépa-
rément: la dernière est encore unie, au
moins le plus souvent, par son fond àvec
la tunique commune, & contient, ainsi
que le péricarde, une humeur séreuse dont
l’usage est de la lubréfier.

513. Les opinions sont partagées sur
l’origine de ces tuniques; il nous paroît
qu’il est facile de la découvrir, en se rap-
pelant la description qui a été faite de la
descente des testicules. La tunique commune
est cette même portion du péritoine que
nous avons dit se prolonger en forme de
sac; celle propre au testicule est cette espèce
de bulle qui, élevée au-dessus du cône, en-
veloppe ce corps glanduleux dès le premier
moment de sa formation; celle enfin propre
au cordon spermatique
est cette autre expan-
sion du péritoine qui, en se repliant, forme
le cône lui-même.

514. Il est encore une tunique destinée
à recouvrir le testicule; c’est la tunique
albuginée. Elle sert proprement d’écorce à la
substance pulpeuse de cet organe, c’est-à-
dire, à un composé de vaisseaux sanguins
& de vaisseaux sécrétoires(1), longs en-
viron d’une palme, qui, se détachant de
[Seite 259] la tunique albuginée, se contournent sur
eux-mêmes, & forment plusieurs petits
lobes. Les vaisseaux sécrétoires portent la
semence, par le réseau vasculeux de Haller,
& par les conduits efférens de Graaf, au
sommet des cônes, qui couronnent la tête
de l’épididyme.

515. On appelle épididyme un tube long
d’environ 30 pieds, situé sur le bord supé-
rieur du testicule. Son extrémité, qu’on
regarde comme sa tête, se divise en une
vingtaine de cônes fort distincts; son extré-
mité inférieure ou sa queue donne naissance
au canal déférent.

516. L’un & l’autre de ces canaux
montent vers le col de la vessie, se rap-
prochent mutuellement sous la glande pros-
tate; &, après s’être un peu recourbés en
arrière, s’épanouissent en vésicules sémi-
nales qui s’ouvrent dans le canal de l’urètre,
postérieurement au verumontanum, par deux
pores excréteurs.

517. Ces vésicules occupent la partie in-
férieure & postérieure de la vessie; elles sont
entourées d’un tissu graisseux fort abondant,
& représentent deux petits intestins inéga-
lement bosselés, & surmontés d’un grand
nombre d’appendices aveugles. Les mem-
branes qui les forment, ressemblent beau-
coup à celles de la vésicule du fiel: l’une
très-forte, est du genre des tuniques ner-
veuses; l’autre interne & plus foible, est
couverte de petites fosses, &, en quelques
[Seite 260] endroits, de petites éminences, qui la rap-
prochent plus encore de celle qui revêt le
col de la vessie; on diroit que sa surface
est divisée en plusieurs cellules.

518. C’est dans toute l’étendue des voies
que nous avons parcourues jusqu’à présent,
que se prépare & coule la liqueur seminale dès
le commencement de l’âge de puberté. Cette
liqueur aussi peu abondante qu’elle est plus
précieuse, est d’un blanc de lait tirant sur
le jaune; elle a une odeur particulière, un
caractère de viscosité qui la rapproche des
mucilages animaux, & un poids supérieur
à celui de toutes les autres humeurs qui
se sécrètent dans le corps humain.

519. Elle a encore cela de particulier,
ainsi que l’observa Louis Ham en 1677,
qu’elle contient un nombre infini d’animal-
cules microscopiques
du genre des animalcula
infusoria
(1). On a remarqué que leur figure
varioit avec les différentes espèces d’ani-
maux; mais qu’ils étoient chez l’homme, de
même que chez l’âne, oblongs & caudés.
Ils ne se trouvent, dit-on, que dans la
semence vraiment prolifique, & sont pres-
que, sous ce rapport, une assurance de fé-
condité. Je dis sous ce rapport, car il est
[Seite 261] aujourd’hui démontré que ce n’est pas en
eux que la fécondité réside, & sur-tout,
qu’ils ne sont point les rudimens de l’em-
bryon que les fonctions génitales déve-
loppent(1).

520. Cette liqueur déposée dans les vési-
cules, y séjourne jusqu’à ce qu’une éjacu-
lation l’en expulse; & durant son séjour,
elle y éprouve les mêmes modifications que
la bile dans la vésicule qui lui est propre;
c’est-à-dire, que sa partie la plus fluide y
étant absorbée, elle s’épaissit & se concentre
de plus en plus.

521. De même que la substance des tes-
ticules, & les cordons auxquels ces orga-
nes sont suspendus, admettent un grand
nombre de vaisseaux lymphatiques qui, en
reportant au sang une humeur chargée de
sperme, préparent une nouvelle sécrétion
de semence; de même, les vésicules sémi-
nales sont abondamment pourvues de sem-
blables vaisseaux, qui rendent cette liqueur
infiniment plus active, en séparant d’elle
une sérosité superflue.

522. Mais je pense que là se bornent
leurs usages: je ne crois donc point qu’il
se fasse aucune absorption de vraie semence
dans les vésicules séminales d’un homme
[Seite 262] sain; je crois moins encore, qu’une por-
tion de cette liqueur est reportée dans les
veines circonvoisines; enfin, je nie absolu-
ment que l’effet de cette résorption, eût-
elle lieu, sût de modérer en eux l’ardeur
des feux de l’amour. Il paroît, au contraire,
en considérant les phénomènes que présen-
tent les animaux qui ne sont en chaleur
qu’à certaines époques, & en comparant
leur état de fureur passager, avec l’état
d’apathie soutenu des animaux mutilés; il
paroît, dis-je, que c’est l’absorption qui
développe en eux cet excès de vivacité.

523. La nature a autrement pourvu à
ce qu’il ne se fît pas dans l’homme une
trop grande accumulation de semence; & je
ne sache pas qu’elle se soit également com-
portée envers aucun autre animal: elle le
décharge de ce superflu incommode, par
des pollutions nocturnes qu’elle rend plus ou
moins fréquentes, en raison du tempéra-
ment de celui qui les éprouve. On peut
donc regarder ces pollutions comme des
excrétions naturelles à l’homme.

524. Quelle que soit la cause d’une
excrétion de liqueur séminale, elle ne par-
vient jamais au dehors dans son état de
pureté; la prostate, corps glanduleux,
épais, solide, très-considérable, & situé
entre les vésicules séminales & le bulbe de
l’urètre, fournit en même temps une autre
liqueur peu différente du blanc d’oeuf, &
la mêle avec la semence. L’une & l’autre
[Seite 263] parfaitement combinées, sont éjaculées par
le canal de l’urètre; on ignore comment
elles s’y introduisent, à moins que ce ne
soit par le sinus de la caroncule séminale,
dont l’orifice moyen s’ouvre dans ce canal,
entre les deux pores des vésicules(1).

525. L’urètre, est un canal qui verse au
dehors trois humeurs différentes; la se-
mence, la liqueur de la prostate, & l’urine.
Son intérieur est humecté par un mucus
que fournissent de nombreuses lacunes;
extérieurement, il est entouré d’un tissu
spongieux qui l’accompagne presque de l’une
à l’autre de les extrémités; enfin, au dessus
de lui, sont étendus deux corps fort épais,
dont le volume constitue la plus grande
partie de la verge; on les appelle corps
caverneux.

Le gland, est la dernière partie du mem-
bre viril: il est recouvert par une peau
très fine, également souple, & absolument
privée de graisse, qui se repliant au delà
de sa couronne, vient former le prépuce.
Elle est aussi libre sur le contour de ce
corps oblong, que les paupières sur le globe
de l’oeil; elle admet dans son repli un grand
nombre de tubercules, nommés glandes de
Littre, qui sécrètent, ainsi que celles de Mei-
bonius,
une humeur extrêmement grasse(2).

[Seite 264]

526. Conséquemment à sa structure, la
verge a la faculté de se tuméfier, se roidir
& s’étendre; ou, pour le dire en un seul
mot, d’entrer en érection. Cet effet est dé-
terminé par une congestion sanguine très-
abondante, qui se forme tout-à-coup dans
les corps caverneux; le reflux du sang la
fait aussitôt cesser, & rend le membre à
son premier état.

527. Cet état de souplesse donne à sa
longueur les courbures d’une S romaine; il
est aussi favorable à l’excrétion de l’urine,
qu’il l’est peu à l’émission de la semence: la
raison en est, que la naissance de l’urètre
forme alors un angle aigu avec les pores
des vésicules séminales.

528. En même temps que la verge com-
mence à se tuméfier, la prostate fournit
l’humeur qui porte son nom. Rarement
[Seite 265] celle-ci coule avec l’urine, elle s’échappe
fréquemment seule, mais le plus souvent
elle fort avec la liqueur séminale. La nature
a voulu combiner ainsi ces deux fluides,
soit que l’un albumineux & plus coulant,
dût servir de véhicule à l’autre, & faciliter
son éjaculation, soit que tous deux à leur
manière contribuent à la génération.

529. L’accumulation de la semence dans
les vésicules séminales, & l’instinct sexuel
provoquent l’éjaculation; elle s’opère en-
suite à l’aide de l’érection, qui, en inter-
ceptant le cours de l’urine, facilite celui
de la semence, de la contraction spasmo-
dique des vésicules séminales, de l’action
convulsive des releveurs de l’anus & des
accélerateurs de l’urine; enfin, des secous-
ses agréables & momentanées, mais acca-
blantes & presque épileptiques, de tout le
systême nerveux.

SECTION QUARANTE-UNIÈME.
Des Fonctions génitales de la femme
en général.


530. L’usage des parties génitales de
l’homme est de porter l’humeur prolifique
dans celles de la femme, destinées à la re-
cevoir. De cette seule destination, naît une
grande différence entr’elles; il en est cepen-
[Seite 266] dant quelques-unes, dont l’organisation est
fort rapprochée: c’est ainsi qu’au dessous
du pubis, & dans la commissure supérieure
des grandes lèvres, on trouve chez la
femme, le clitoris qui ne diffère de la verge
qu’en ce qu’il est moins gros, & que séparé
de l’urètre, il est imperforé. On l’a vu
retenir dans des adultes, ce volume extra-
ordinaire qu’il présente quelquefois dans le
foetus; & il est probable que ce vice de
conformation a au moins multiplié les her-
maphrodites. D’ailleurs, semblable à la
verge, des corps caverneux le composent,
l’érection le gonfle & le roidit, un prépuce
le recouvre; & il fournit une humeur ana-
logue à celle qui se sécrète au dessus du
gland de l’homme(1).

531. Du clitoris, ou plutôt de son
prépuce, descendent les nymphes, dont le
développement quelquefois excessif(2) a
[Seite 267] fourni le sujet d’un conte ridicule(1).
Elles jouissent, ainsi que le clitoris, de
la plus vive sensibilité, & semblent di-
riger au dehors le filet d’urine que verse
l’urètre. Ce conduit est fort court chez les
femmes; son embouchure, presque cachée
entre les petites lèvres, est ornée de cils
dans quelques sujets dont la conformation
est plus exacte(2).

532. Au-dessous du méat urinaire se pré-
sente l’entrée du vagin. Différens cryptes
glanduleux, tels que les lacunes de l’urètre
de Graaf, & les orifices des prostates de
Bartholin, placés dans son contour, épan-
chent un mucus extrêmement onctueux(3).

533. Cette entrée est voilée par l’hymen,
production membraneuse dont la présence
[Seite 268] est un signe de virginité(1). Je ne sache
pas qu’aucune autre espèce en soit pour-
vue; on ignore également quels sont ses
usages physiques. Lorsque cette membrane
a été détruite par l’acte vénérien, ou par
quelque autre cause violente, ses débris
se replient sur eux-mêmes, & se changent
en caroncules myrtiformes, dont le nombre
varie.

534. Delà le vagin se porte entre la vessie
& le rectum; son extrémité inférieure est
embrassée par un parenchyme cellulaire ex-
trêmement vasculeux, & par un muscle
auquel son siége & ses usages ont fait
donner le nom de constricteur du vagin.
Son intérieur est tapissé par une mem-
brane très-lâche, chargée d’un grand
nombre de rides, dont les plus remar-
quables, distribuées en deux colonnes,
occupent les unes sa partie antérieure,
& les autres sa partie postérieure. Elles
distillent dans la cavité du vagin le mucus
qui l’humecte constamment.

535. Au-dessus de l’ouverture supérieure
du vagin est la matrice, que des ligamens
larges, fixés à droite & à gauche, main-
tiennent suspendue. C’est dans cette ou-
[Seite 269] verture qu’elle engage son col, ou plutôt
ce prolongement cylindrique, percé par
un canal étroit fort rugueux, dont les
deux orifices, & principalement l’interne,
sont enduits d’un mucilage visqueux.

536. La substance de la matrice est un
parenchyme épais & serré, que parcou-
rent, en se contournant sur eux-mêmes,
un grand nombre de vaisseaux artériels,
& de veines dans lesquelles on ne trouve
point de valvules. Elle admet sans doute
des vaisseaux lymphatiques; & ce qui
prouve combien sont multipliées ses dis-
tributions nerveuses, c’est la sympathie
qui existe entr’elle & la plupart des autres
parties du corps(1).

537. A l’extérieur, elle est recouverte
par le péritoine; intérieurement, elle est
tapissée par une membrane mince & spon-
gieuse, que les physiologistes assurent être,
les uns, un assemblage de vaisseaux blancs;
& d’autres, un tissu de vaisseaux lympha-
tiques. Quoi qu’il en soit, cette membrane
est peu étendue, puisque la cavité dont elle
revêt principalement le fond, est elle-même
très bornée.

[Seite 270]

538. Mais quelle est la substance dont le
corps de la matrice est composé? Sans pré-
tendre ouvertement prononcer sur sa tex-
ture musculeuse, que les uns lui attribuent,
& que d’autres lui contestent; je puis affir-
mer avoir fait des recherches très-multi-
pliées sur cet organe, soit préparé, soit
récemment extirpé de cadavres frais, soit
dans son état de vacuité, soit développé par
la grossesse; & n’être jamais parvenu à y
découvrir aucune trace de fibres charnues.
Chaque jour, au contraire, me persuade
davantage, qu’elle n’a point d’irritabilité,
mais une vie propre singuliérement active.
C’est à cette vie propre, & non aux forces
vitales communes, que je rapporte ses dif-
férens mouvemens, & plus particulière-
ment encore, les admirables fonctions qu’elle
exerce. Cet exercice avoit tellement frappé
les anciens, qu’ils avoient coutume d’appe-
ler l’utérus, un animal contenu dans un autre
animal.

539. Des parties supérieures & latérales
du fond de la matrice, naissent les trompes
de Fallope; c’est-à-dire, deux canaux
étroits, tortueux, & d’un tissu qui ne dif-
fère de celui du vagin, qu’en ce que, lisse
& uni dans son intérieur, il admet quelques
légères fibres musculaires.

540. Ces canaux se logent dès leur nais-
sance dans la duplicature supérieure des
ligamens larges; ils suivent leur direction,
[Seite 271] s’élargissent à mesure qu’ils s’éloignent de
la matrice, & se terminent par une ouver-
ture assez évasée, dont la circonférence est
ornée de franges, ou de digitations distri-
buées avec un art infini. L’usage de ces
franges, est de se tuméfier ainsi que les
trompes de Fallope, pendant l’orgasme vé-
nérien, & d’embrasser plus étroitement les
ovaires vers lesquels elles s’inclinent.

541. Avant Sténon, on regardoit les
ovaires, comme de véritables testicules:
ce sont deux corps ovalaires qui, sous une
enveloppe très-ferme & presque tendineuse,
renferment un tissu cellulaire fort serré,
dans lequel on trouve environ quinze vési-
cules appelées les oeufs de Graaf. Ces vési-
cules sont remplies d’une sérosité jaunâtre
& albumineuse, qui se coagule de même
que le blanc d’oeuf, quand on plonge un
ovaire récent dans l’eau bouillante.

542. Il paroît que cette humeur n’est
point une simple lymphe, mais une liqueur
essentielle à la conception, qui se perfec-
tionne insensiblement durant le cours de
l’âge de puberté, qui en même temps cher-
che à se faire jour à travers l’enveloppe de
l’ovaire, parvient enfin à la rompre, & s’in-
troduit dans la trompe de Fallope.

543. Il est une autre liqueur bien dif-
férente de celle-ci, que les anciens appe-
loient fort abusivement la semence de la
femme.
Nous savons qu’en effet elle est
[Seite 272] excrétée durant l’acte vénérien; mais quelle
est sa source, sa nature & ses usages?
est-elle commune à toutes les femmes?
nous l’ignorons absolument(1).

SECTION QUARANTE-DEUXIÈME.
Du Flux menstruel.


544. Il est une fonction importante que
la matrice est fréquemment obligée de rem-
plir; c’est une espèce de tribut qu’elle doit
[Seite 273] acquitter chaque mois, durant le cours
d’environ trente années. La femme est le seul
être auquel la nature l’ait imposé(1); &
c’est pour cette raison, que Pline l’appeloit
l’animal seul menstruel. Elle y est soumise
en quelque contrée qu’elle habite(2); &
[Seite 274] tel est même l’un des principaux signes de la
fécondité.

545. L’époque à laquelle l’exercice de
cette fonction devient indispensable, est,
ordinairement dans notre climat, celle de
la quinzième année des femmes(1). Elles
éprouvent, un peu auparavant, les diffé-
rens symptômés qui caractérisent un état
pléthorique: une congestion sanguine me-
nace leur poitrine, des tiraillemens incom-
modes affectent leurs lombes, un sentiment
de lassitude accable leurs extrémités in-
férieures, &c. Dès lors paroît, pour la
première fois, un écoulement très-peu
coloré, qui devient insensiblement plus
rouge, & enfin se produit avec tous les
signes d’un véritable sang(2). Il se sou-
tient modérément pendant quelques jours,
& fait disparoître toutes les incommodités
qui étoient survenues avant lui.

546. Quatre semaines se sont à peine
écoulées, qu’il reparoît de nouveau sous
la dernière forme qu’il avoit, c’est-à-dire,
sous celle d’un écoulement vraiment san-
[Seite 275] guin; il continue durant environ six jours,
quelquefois plus, d’autres fois moins; &,
durant cet intervalle, fait perdre à une
femme bien portante, de huit à seize onces
de sang.

547. Il est communément interrompu pen-
dant la grossesse & l’alaitement; il cesse pour
l’ordinaire trente ans après s’être mani-
festé, c’est-à-dire, dans notre climat, à
l’âge d’environ quarante-cinq ans.

548. L’opinion de ceux qui rapportent
la matière de cet écoulement aux vaisseaux
de la matrice, est beaucoup plus vraisem-
blable que celle des physiologistes qui ne
la font remonter qu’au vagin. Vainement
ils disent qu’on a vu le flux menstruel se
soutenir avec la grossesse, ou dans des cas
d’imperforation, de renversement & de chûte
de la matrice: tout ce que ces exemples nous
semblent prouver, c’est que la nature fait
quelquefois des efforts heureux & salutaires
pour débarrasser par une autre voie les vais-
seaux engorgés de la matrice. D’ailleurs,
sans faire valoir le but que la nature paroît
s’être proposé en établissant cette hémor-
ragie périodique, de préparer l’uterus à l’état
de grossesse, & de le rendre plus apte à nour-
rir le foetus qui doit lui être confié, nous pou-
vons citer une infinité d’ouvertures de ca-
davres, qui nous ont montré dans des
femmes surprises par la mort à l’époque de
leurs maladies, l’intérieur de la matrice dis-
tillant encore le sang menstruel. Ces mêmes
[Seite 276] raisons nous portent à croire que ce sang est
plutôt fourni par le systême artériel que par
le systême veineux.

549. On n’a pas été plus d’accord sur les
causes qui le déterminent avec tant de ré-
gularité, & durant ce si long espace d’années.
Les difficultés nombreuses dont elles s’en-
tourent, ne permettent pas de pousser les
recherches au delà de ce qui est probable:
en conséquence, nous regardons comme
cause prochaine de ce flux une espèce de
pléthore locale qui se forme & se renou-
velle dans la matrice; le grand nombre de
vaisseaux sanguins dont elle est pourvue,
& les symptômes précurseurs de l’appari-
tion des règles, viennent à l’appui de cette
opinion Nous trouvons ensuite ses causes
éloignées,
soit dans la situation perpendicu-
laire qui distingue en quelque sorte l’es-
pèce humaine de toutes les classes d’ani-
maux, soit dans la nature du parenchyme
qui compose l’uterus, & dans la vie propre
dont il jouit.

Nous ne tenterons point d’éclairer par
de vaines hypothèses son caractère de pé-
riodicité; nous préférons avouer notre igno-
rance à cet égard. On sait d’ailleurs que tous
les phénomènes périodiques qui se déve-
loppent dans les animaux sains ou malades,
& dont les bornes depassent celles d’un jour &
une nuit,
sont autant de mystères dans l’or-
dre naturel qu’il ne nous est pas donné de
pénétrer.

SECTION QUARANTE-TROISIÈME.
Du Lait.

[Seite 277]

550. On observe que les mamelles, ou,
comme les appelle Favorin, ces sources sa-
crées, nourricières du genre humain, sont
liées avec l’uterus de la manière la plus
intime. L’un & l’autre de ces organes n’ont
aucune fonction à remplir dans l’enfance;
ils commencent à exercer celles qui leur
sont propres à la même époque de la vie;
ils continuent depuis lors à les faire con-
courir ou alterner; enfin ils les cessent en
même temps. C’est ainsi que les mamelles
se développent à l’âge de puberté dès la
première apparition des règles; c’est ainsi
qu’elles se tuméfient de nouveau, & se
remplissent de lait pendant la grossesse; que
le flux menstruel cesse pendant l’alaitement;
& que les lochies sont plus abondantes quand
l’alaitement n’a pas lieu: enfin c’est ainsi que
le même âge qui supprime irrévocablement
les maladies, dessèche à la fois & condamne
à une inaction totale, & l’uterus & les ma-
melles. Ces faits constans prouvent assez
quelle sympathie existe entre ces organes;
nous passons sous silence un grand nom-
bre de phénomènes pathologiques qui la
démontrent également, & qu’offrent à
[Seite 278] l’observation les différentes anomalies des
menstrues.

551. L’existence de cette sympathie ne
surprendra pas, si on considère que toutes
les causes qui établissent des rapports entre
les différentes parties de nous-mêmes, &
que nous avons assignées ailleurs, se réu-
nissent pour lier, dans la femme, l’abdo-
men & la poitrine.

552. De tout temps on a beaucoup fait
valoir, pour expliquer ce phénomène, les
anastomoses des artères mammaires in-
ternes, & des artères épigastriques. Sans
doute, elles n’en sont pas l’unique cause;
mais on sera persuadé qu’elles y influent
puissamment, ou du moins on regardera
comme très-probable qu’elles entretiennent
cet accord, si on examine quel change-
ment l’artère épigastrique éprouve dans
son diamètre durant le temps de la gros-
sesse & celui de l’alaitement.

553. L’uterus & les mamelles ont en-
core l’un & l’autre une affinité singulière
avec le chyle; ils l’appellent à eux, sur-
tout durant le temps de la grossesse, &
le convertissent chacun à leurs propres
usages.

554. Les mamelles chez les femmes sont
composées, ainsi que le placenta, d’un
assemblage de masses glanduleuses, sépa-
rées en forme de lobes par de nombreux
fillons, & enveloppées d’un tissu cellulaire
très-graisseux. La graisse qui abonde dans
[Seite 279] leur partie antérieure, est beaucoup plus
ferme, & recouverte d’une peau extrême-
ment délicate.

555. Chacun de ces lobes se divise en
d’autres plus petits, & ceux-ci se résolvent
en des espèces de grains auxquels s’im-
plantent les radicules des conduits lactés,
dont l’usage est de puiser l’humeur chy-
leuse dans les dernières divisions de l’ar-
tère mammaire interne.

556. Ces radicules se réunissent insen-
siblement en vaisseaux plus considérables,
& enfin en autant de troncs principaux que
la masse solide de chaque mamelle a de
lobes. On en compte au moins quinze,
qui deviennent fort larges en différens
points, mais qu’on ne voit aucune part
s’anastomoser entr’eux.

557. Ils se terminent par des tuyaux
excrétoires fort petits qu’un tissu cellu-
laire mince rassemble vers la papille; celle-
ci réunit de plus un grand nombre de vais-
seaux sanguins & de nerfs, qui la rendent
d’un sentiment si exquis, que le plus léger
contact d’un corps étranger suffit pour lui
faire éprouver une sorte d’érection.

558. Autour de la papille se voit l’aréole;
la couleur(1) plus ou moins vive de
[Seite 280] l’une & de l’autre leur est communiquée
par le réseau que recouvre l’épiderme. On
distingue sur cette dernière plusieurs folli-
cules sébacés, & même les orifices de
quelques conduits lactifères.

559. Tels sont les organes dans lesquels
se sépare le lait de la femme, ou ce suc
blanc, aqueux, un peu gras, doux & su-
cré, qui ne diffère de celui qu’on obtient
des animaux mammaires domestiques, qu’en
ce que les acides ne le coagulent pas comme
le leur, & qu’on n’y trouve aucune par-
tie d’alcali volatil.

560. Traité avec l’esprit de vin, il offre
les mêmes principes que celui des animaux
dont nous venons de parler: outre la va-
peur aqueuse
qu’il exhale lorsqu’il est en-
core chaud, on voit se séparer de sa partie
caseuse,
le serum qui contient le sucre de
lait, ou un acide saccarin combiné avec
de la terre calcaire, & quelques parties
huileuses & muqueuses; en même temps
surnage le suc butireux, qu’on prétend être
un composé de globules dont le diamètre
est si indéterminé, qu’il varie de 1/200 à 1/100
de ligne.

561. L’analogie qui se trouve entre le
chyle & le sang, & sur-tout entre ces
deux liqueurs & le lait, porte au moins
à croire que cette dernière humeur est
une espèce de chyle extrait du sang, ou
séparé de sa masse, avant qu’il se fût par-
faitement assimilé à elle. Ce qui confirme
[Seite 281] cette opinion, c’est qu’il retient la plupart
des qualités des alimens, ainsi qu’on l’ob-
serve fréquemment chez les nourrices; c’est
de plus, que durant la grossesse, & peu
après l’enfantement, il a toutes les appa-
rences d’un vrai chyle.

562. Il est d’abord fort aqueux; com-
ment se fait-il qu’il devient insensiblement
plus épais & plus gras? Il paroît que ce
changement de consistance est principale-
ment opéré par les vaisseaux lymphatiques,
qu’on sait être très-multipliés dans les ma-
melles. Ils absorbent d’autant plus de sa
partie séreuse, que l’alaitement est plus
soutenu; & ils reportent ces particules
dans le torrent du sang, pour y être la
matière d’une nouvelle sécrétion.

563. Aussitôt après l’accouchement, le
lait se dirige abondamment vers les ma-
melles. Si la mère nourrir, cette fluxion
est entretenue par la succion de l’enfant,
& elle a coutume de se soutenir jusqu’à
ce que, cessant d’alaiter, la femme éprouve
de nouveau ses maladies. On a vu la sé-
crétion du lait avoir lieu dans des filles
qui certainement n’avoient pas été déflo-
rées, dans des enfans nouveaux-nés de l’un
& l’autre sexe, & même dans des hom-
mes(1). On l’a vue se faire également
[Seite 282] chez des adultes mâles de la classe des
autres animaux mammaires(1).

564. La trop grande abondance de lait
provoque son excrétion; elle le détermine
quelquefois même à refluer spontanément:
ce sont plus ordinairement la succion ou
de légères pressions faites sur le sein, qui
l’appellent ainsi au dehors.

SECTION QUARANTE-QUATRIÈME.
De la Conception & de la Grossesse.


565. Nous sommes enfin parvenus à
la destination des parties génitales de l’un
& de l’autre sexe. Leur structure montre
assez que leur auteur s’est proposé, en les
formant, la conception & la propagation
du genre humain. Exposons d’abord les
phénomènes que présente ce grand oeuvre,
cet oeuvre vraiment divin; nous exami-
nerons ensuite quelles sont les forces aux-
quelles il convient de les rapporter.

566. Avant tout, il est à observer que
[Seite 283] l’espèce humaine est la seule parmi les mam-
maires, & presque la seule dans la multi-
tude des autres animaux, qui puisse égale-
ment se livrer au sentiment de l’amour dans
toutes les saisons de l’année(1).

567. Quand une femme a permis à un
homme de l’approcher, quand l’un & l’au-
tre sont embrasés de ces feux dont l’uni-
versalité & l’ardeur n’admettent aucune
comparaison; dès-lors, si je ne me trompe,
l’uterus frappé d’un orgasme inflamma-
toire(2), animé par sa vie propre, aspire
en quelque sorte la semence épanchée par
l’homme(3), & répand lui-même une espèce
de liqueur séminale, dès-lors les trompes de
Fallope, se roidissent & se tendent, les
[Seite 284] morceaux frangés s’appliquent aux ovaires,
l’une des vésicules de Graaf s’ouvre, & la
gouttelette albugineuse qu’elle renfermoit,
s’échappant, pénètre l’orifice de la trompe,
qui le conduit jusques dans la cavité de la
matrice.

568. Bientôt après l’issue de cette hu-
meur albugineuse, les lèvres externes de la
plaie qui lui a ouvert une voie au dehors,
se cicatrisent, & la membrane vasculeuse
qui la contenoit, se change en un corps
jaune.
Ce corps, dans lequel on trouve une
cavité dès le commencement de sa forma-
tion, m’a paru rempli d’une lymphe plasti-
que, que le temps durcit, & ressemble à
un noyau charnu, dont l’écorce épaisse est
parsemée de vaisseaux sanguins.

569. La matrice subit aussi quelques chan-
gemens dans l’état de grossesse: le canal
pratiqué dans son col se resserre extrême-
ment, sur-tout vers son orifice supérieur;
d’où il resulte qu’une superfétation est im-
possible dans l’ordre naturel(1).

570. Sa membrane interne est recou-
[Seite 285] verte par une croûte inflammatoire, ou
par la membrane caduque de Hunter(1),
qui est le produit d’une lymphe analogue à
celle du corps jaune. Deux feuillets compo-
sent cette membrane: l’un, épais, s’étend
à toute la surface interne de la matrice,
les embouchures de son col & de ses trom-
pes exceptées; l’autre, plus mince, s’applique
à la superficie de l’oeuf, dès qu’il a com-
mencé à se développer, & à s’unir au feuil-
let externe. On l’appelle membrane caduque
réfléchie.

571. Il est évident que l’oeuf est formé
antérieurement à l’embryon, puisqu’il est
destiné à le recevoir; & que celui-ci ne
date au plutôt que de la fin de la seconde
semaine après la conception. Je doute fort
qu’on ait jamais observé aucune trace de
son organisation avant cette époque.

572. Deux autres membranes propres
environnent l’oeuf fécondé; la première,
dans laquelle on ne découvre aucun vaisseau
sanguin, est le chorion des modernes. Sa sur-
[Seite 286] face extérieure est presqu’entiérement cou-
verte, dès le principe de son développe-
ment, de petits floccons noueux qui lui ont
mérité les épithètes de moussue ou de feuil-
lue.
C’est au moyen de ces floccons, élé-
mens de la partie foetale du placenta, que
l’oeuf s’attache comme par autant de raci-
nes, à la membrane caduque. Au dessous
du chorion est l’amnios, membrane très-
mince, quoique forte; elle est également
dépourvue de vaisseaux sanguins(1).

573. L’étendue de l’une & de l’autre dif-
fère singuliérement entr’elles, durant les
premières semaines. Le chorion représente
une grande vessie; & l’amnios, une vésicule
infiniment plus petite, qui contenue dans la
précédente, lui adhère par les points qui ré-
pondent environ au centre de sa surface floc-
coneuse. L’intervalle qui les sépare dans les
autres points, renferme une eau légère &
fort limpide, dont on ne connoît pas la
source, mais qui se dissipe bientôt. Elle
disparoît insensiblement, & dès les premiers
mois, à mesure que l’amnios dont l’accrois-
sement est très-rapide, se rapproche en
étendue du développement du chorion.

[Seite 287]

574. La cavité que forme l’amnios, ren-
ferme dès le commencement de sa forma-
tion, jusqu’à la dernière heure de l’accou-
chement, une liqueur aqueuse, jaunâtre,
presqu’inodore, douce, & légèrement salée:
des physiologistes l’ont comparée au blanc
d’oeuf, & ont cru qu’elle étoit destinée à
nourrir le foetus; mais un examen plus
attentif n’a pas tardé à faire connoître leur
erreur. On ignore encore d’où elle coule
dans cette membrane; on ne peut supposer
qu’elle vienne du foetus, ni qu’elle soit
fournie par le cordon ombilical, puisqu’on
l’a trouvée dans des faux germes, où la
dissection ne découvroit les traces d’aucun
être animé.

On observe que sa quantité est en raison
inverse du développement de l’embryon;
c’est-à-dire, qu’elle diminue à proportion
que celui-ci croît. C’est ce qui nous sait
conjecturer que son principal usage est bien
plus de garantir des injures externes le
corps tendre du foetus, que de lui fournir
un aliment. Quelquefois, il est vrai, on a
trouvé une petite quantité de cette eau
renfermée dans le ventricule du foetus; mais
ce cas s’est présenté si rarement, que dès-là
même il doit être regardé comme une aber-
ration de la nature.

Je pourrois opposer à ceux qui dé-
fendent l’opinion contraire, les exem-
ples de plusieurs foetus vraiment acépha-
[Seite 288] les(1); je pourrois diriger contr’eux
plusieurs autres argumens en ce genre;
mais il me suffit de leur faire considérer
combien le systême lacté est impropre à la
chylification; combien il est languissant &
peu développé, dans ceux même dont l’ac-
croissement est le plus complet.

575. Semblable à un fruit soutenu par
son pétiole, l’embryon suspendu au cordon
ombilical, nage & exerce ses mouvemens
dans cette liqueur, depuis environ la troi-
sième semaine après la conception; c’est à cette
époque qu’il commence à se développer(2).
On ne croiroit d’abord voir qu’une petite
sève, ou un très-petit rein; insensiblement
on apperçoit se faire l’ébauche de ses ex-
trémités, & enfin se marquer les traits de
la face(3).

576. Selon l’ordre naturel, la femme ne
conçoit & ne met au monde qu’un enfant
à chaque grossesse: il n’est cependant pas
fort extraordinaire de lui voir produire des
jumeaux.

[Seite 289]

Sussmilch a calculé que ce dernier cas,
comparé au précédent, étoit en raison d’un
à soixante-dix(1). On observe que lorsque
plusieurs enfans naissent d’un même accou-
chement, ils sont tous enveloppés dans le
même chorion, mais qu’ils ont chacun un
amnios propre(2).

577. C’est au moyen du cordon ombi-
lical, & du placenta dans lequel il s’épa-
nouit, que l’embryon communique avec
sa mère.

578. Ce cordon paroît exister dès les
premiers temps du sujet auquel il se ter-
mine: il est susceptible de variétés sans
nombre quant à sa longueur, son épais-
seur, ses nodosités variqueuses, & son
insertion au placenta. En général, il est
composé de trois vaisseaux sanguins con-
tournés en spirale, d’une veine qui se di-
rige vers le foie du foetus, & de deux
artères qui naissent des iliaques internes.
On remarque entre ces vaisseaux des cloi-
sons fort inégales; intérieurement, ils of-
frent des petits noeuds ou des espèces de
valvules,
appelées du nom d’Oboken; ils sont
[Seite 290] d’ailleurs unis par un tissu cellulaire imbu
d’une humeur gélatineuse assez limpide, &
recouverts par une membrane qui se con-
tinue avec l’amnios.

579. Du fond de la vessie s’élève un
quatrième vaisseau nommé ouraque, lequel,
se dirigeant entre les artères ombilicales,
vient ajouter à l’épaisseur du cordon. Chez
l’homme, il n’est perceptible que dans un
espace fort court; il disparoît ensuite tout-
à-coup. Chez les autres animaux mam-
maires, il se termine à l’allantoïde, poche
membraneuse, dont on ne doute plus au-
jourd’hui que le foetus ne soit dépourvu,
à moins qu’on ne veuille appeler ainsi la
vésicule ombilicale, autre poche membra-
neuse, dont l’usage est fort incertain, &
la durée très-courte. On trouve quelquefois
celle-ci dans les oeufs humains, entre le
chorion & l’amnios. Isbr. de Diemerbroek
est, si je ne me trompe, le premier qui l’ait
observée; ce n’est qu’après lui qu’Albinus
& Zinn en ont fait mention. Mais dans
ces derniers temps, elle a été trop fré-
quemment observée, & les observations
se rapportent trop uniformement aux trois
premiers mois de la conception, pour
qu’on la regarde comme une monstruo-
sité, ou le jeu du hasard, ou le produit
d’un accident maladif(1).

[Seite 291]

580. Les vaisseaux qui forment le cor-
don ombilical, se terminent au placenta,
que nous avons déjà vu naître de la sur-
face externe du chorion, implantée dans
la membrane caduque épaisse. Le placenta
est donc formé de deux substances diffé-
rentes; l’une utérine, lui est fournie par
la membrane caduque, & constitue son
parenchyme spongieux; l’autre foetale, lui
est communiquée par les vaisseaux ombi-
licaux qui se distribuent au chorion.

Cependant l’accroissement de l’oeuf se
continue; mais il se fait avec d’autant plus
de lenteur, que le développement de la
partie glabre du chorion l’emporte plus sur
celui de sa partie moussue. En conséquence,
le placenta est plus grand, par rapport
au foetus, dans le commencement de la
[Seite 292] grossesse, que vers sa fin; il paroît presque
n’acquérir qu’en épaisseur & en densité: sa
face externe est sillonnée & tuberculeuse;
celle, au contraire, qui s’applique à l’am-
nios, est lisse & unie. On ne peut rien
déterminer sur ses degrés d’ampleur ou
d’épaisseur, sur sa figure & ses adhérences
avec l’uterus; néanmoins c’est par son
fond qu’il a coutume de s’unir avec cet
organe; &, généralement parlant, il n’est
ni sensible, ni véritablement irritable.

581. Quoiqu’il soit unanimement re-
connu que le placenta est la principale
voie par laquelle la nourriture est portée
au foetus, on est fort peu d’accord, aujour-
d’hui sur-tout, sur sa vraie manière d’être,
& ses différens rapports tant avec le foetus,
qu’avec la matrice. Pour nous, nous pen-
sons qu’il n’y a aucune anastomose entre
les vaisseaux sanguins de l’uterus, & ceux
du cordon ombilical; mais que le sang
artériel de la mère s’épanche continuelle-
ment sur la partie du placenta qui naît
de la membrane caduque épaisse; que là
il est repris & porté au cordon par les
radicules de la veine ombilicale, qui se
distribuent sur la face moussue du chorion:
après avoir circulé dans le foetus, il re-
vient par les artères ombilicales qui le
versent sur le parenchyme du placenta,
où les radicules veineuses de sa partie
utérine l’absorbent & le rendent à l’uterus.

Ce mode de circulation explique pour-
[Seite 293] quoi on n’est jamais parvenu à pénétrer
dans les vaisseaux utérins par les om-
bilicaux, ou dans les vaisseaux ombili-
caux par les utérins. Il donne encore la
raison de la discordance qui se trouve
entre les battemens du pouls de la mère
& ceux du pouls de l’enfant, avant même
que l’accouchement terminé ait détruit les
rapports qui unissent l’un à l’autre. En-
fin il répond à ce que nous avons observé
ailleurs sur la différence essentielle que pré-
sente le sang de ces deux êtres, qui ce-
pendant ne paroissent avoir qu’une même
vie(1).

Nous regardons encore comme très-
probable qu’une portion du chyle mater-
nel est communiquée au foetus avec le
sang qu’il reçoit. Outre que ce sang n’est
pas toujours également pur, & qu’il roule
avec lui, durant quelques heures après
le repas, un chyle non encore parfaite-
ment assimilé, il est de fait, & nous
l’avons démontré plus haut, qu’il y a la
plus grande affinité entre la matrice d’une
part, & de l’autre, le chyle & le lait.
Il est en même temps des observations
[Seite 294] sans nombre, qui attestent la présence d’un
suc laiteux dans le placenta(1).

582. Il est des modifications nécessaires
que la matrice elle-même éprouve en
même temps que le foetus & ses mem-
branes se développent. Non-seulement elle
devient plus spacieuse, change de figure
& de situation; mais elle semble offrir
une texture différente. Et comment se
pourroit-il, en effet, que ses vaisseaux
& le parenchyme qui les unit, ne fussent
pas altérés par la congestion abondante &
soutenue qui se fait en elle? Ses vaisseaux
perdent chaque jour de leur direction tor-
tueuse; chaque jour ils se dilatent davan-
tage; les veines principalement s’amplifient
à un point que plusieurs anatomistes les
ont prises pour des sinus. Son parenchyme
devient aussi plus lâche & moins épais;
le défaut d’épaisseur & de consistance est
moins frappant dans son fond, où il est
compensé par la dilatation des vaisseaux,
& la force vitale qui y réside. Cependant
on y retrouve encore, sur-tout après la
mort, une sorte de mollesse qui contraste
sensiblement avec la fermeté dont il jouit
hors l’état de grossesse. Arantius a fort
bien observé que son tissu est alors comme
feuilleté.

[Seite 295]

Nous allons exposer les autres change-
mens que la matrice éprouve, & ceux
qui affectent successivement, soit le foetus,
soit l’oeuf destiné à le contenir, en par-
courant les dix mois lunaires, espace dans
lequel se circonscrit ordinairement le cours
de la grossesse.

583. Dès les premiers temps, ainsi que
nous venons de le noter, cet organe se
gonfle & se tuméfie; devenu plus volu-
mineux & plus lourd, il pèse davantage
sur la partie supérieure du vagin: cepen-
dant il conserve sa forme primitive durant
les trois premiers mois, à cette différence
près, que son fond se voûte un peu plus,
la paroi intérieure de son corps se porte
plus en avant, & sa cavité, précédem-
ment très-étroite & presque triangulaire,
s’arrondit légèrement pour s’accommo-
der à la figure de l’oeuf. Celui-ci, dont
la grosseur, vers la fin du premier mois,
égale celle d’un oeuf de pigeon, & dont
les membranes sont isolées les unes des
autres, dès la fin du troisième a atteint
le volume d’un oeuf d’oie, & n’admet plus
aucun intervalle, soit entre les deux mem-
branes caduques, soit entre le chorion &
l’amnios. L’amnios contient une liqueur
fort abondante proportionnellement à la
petitesse du corps de l’embryon, qui, à
peine semblable à une très-jeune souris,
nage dans cette liqueur inconsidérément
& au hasard.

[Seite 296]

584. A l’époque du quatrième mois,
la matrice est presque ronde, son col
s’amollit, diminue en longueur, & s’ef-
face presqu’entiérement; ou plutôt, en se
distendant, elle s’élève, & passe du petit
bassin dans le grand. Les trompes se portent
également en haut, & deviennent plus grosses
& plus longues; elles embrassent si étroite-
ment les parties latérales de l’uterus, qu’elles
paroissent ne les abandonner que dans la
moitié de leur étendue, & s’avancer jus-
qu’à sa partie moyenne. Ce sont proba-
blement ces apparences qui ont donné lieu
à l’erreur sur l’accroissement prodigieux
du fond de la matrice.

A la même époque, le foetus a acquis
un volume dont les proportions com-
mencent à répondre à celles de l’oeuf. Il
commence lui-même à prendre une situa-
tion plus fixe & plus déterminée, & la
conserve jusqu’aux approches de l’accou-
chement. Sa tête est inclinée, sa face re-
garde les lombes de sa mère, &, pour
l’ordinaire, se dirige un peu plus vers le
côté gauche.

585. Dans le milieu de la grossesse,
l’uterus a pris un tel accroissement, que
son fond est à-peu-près situé entre le pu-
bis & l’ombilic, & fait sensiblement proé-
miner en dehors cette partie de l’abdomen.

Les mouvemens du foetus se font alors
ressentir beaucoup plus distinctement; on
a coutume de dire, pour exprimer son
[Seite 297] état de force & de vigueur, qu’il com-
mence à vivre. Au reste, il est fort dif-
ficile de déterminer le moment précis au-
quel répond ce phénomène.

586. Durant les cinq autres mois lu-
naires, la matrice & le foetus achèvent de
se développer. Aux environs du sixième
mois, elle atteint le nombril par son fond.
Elle le dépasse au huitième, & s’approche
du creux de l’estomac. En même temps
son col diminue, s’applanit & s’efface réel-
lement.

587. Vers le dixième mois, & le terme
de l’accouchement étant proche, on trouve
onze pouces d’étendue à son diamètre lon-
gitudinal, & un peu au-delà de neuf au
transversal. Alors, entraînée par son pro-
pre poids, elle descend de nouveau; son
orifice se dilate peu-à-peu, & s’épanouit
orbiculairement dans le vagin: les deux
membranes caduques, celle sur-tout qui
est réfléchie, s’étant progressivement dis-
tendues durant le cours des mois précé-
dens, ne présentent plus qu’une espèce de
réseau traversé par de courtes fibres blan-
châtres. Le placenta a neuf pouces de dia-
mètre, un pouce d’épaisseur, & pèse en
totalité au-delà d’une livre. Le cordon
ombilical a plus d’un pied et demi de
longueur. Le foetus a environ vingt pou-
ces de hauteur, & pèse à-peu-près sept
livres. La quantité de la liqueur de l’am-
[Seite 298] nios ne sauroit être soumise à une esti-
mation précise; cependant, en général,
& lorsque le foetus est vigoureux, on en
trouve à peine une livre.

SECTION QUARANTE-CINQUIÈME.
De la Force de formation.


588. Après avoir exposé les phéno-
mènes de la conception, & les changemens
que l’observation nous démontre être intro-
duits par la grossesse dans le foetus & la
matrice, il paroît convenable d’examiner
en vertu de quelles forces s’opère le grand
ouvrage de la génération.

589. Il est des auteurs, d’ailleurs recom-
mandables, qui ont en quelque sorte anéanti
cet ouvrage: ils pensent que le genre hu-
main entier créé en même temps, a été dé-
posé en germe dans les parties génitales de
l’un ou de l’autre de nos premiers auteurs,
pour être insensiblement développé avec la
durée des siècles. Les fauteurs de cette
opinion ne diffèrent entr’eux, qu’en ce
qu’ils prétendent, les uns, que l’animal est
tout formé dans la semence du père(1), &
[Seite 299] les autres, qu’il est contenu dans les ovai-
res de la mère(1).

590. Le défaut d’un systême plus satis-
faisant, & l’autorité de ceux qui défendent
celui-ci, me le firent d’abord adopter; mais
un examen plus sévère des phénomènes de
la génération n’a pas tardé à me décou-
vrir mon erreur, & à me la faire aban-
donner.

591. Depuis lors, je me suis chaque
jour de plus en plus convaincu qu’il est
dans tous les corps organiques une force
particulière aussi ancienne & aussi durable
qu’eux, en vertu de laquelle ils révêtent par
la Génération, la forme qui leur con-
vient, la conservent par la Nutrition, &
si elle est altérée, la réparent autant que possi-
ble par la Reproduction.
Pour la distin-
[Seite 300] guer des autres forces vitales, je l’ai appelée
force de Formation(1). J’ai ainsi désigné
d’une manière abstraite, non la cause des
phénomènes dont je voulois donner une
idée, mais l’effet soutenu de leur durée &
de leur universalité. Nous employons à-peu-
près de la même manière les termes d’attrac-
tion
ou de gravitation, pour exprimer des
forces, dont les causes sont encore enséve-
lies dans les plus profondes ténèbres.

592. D’après cela, il me paroît vrai-
semblable que les différentes liqueurs de
l’homme & de la femme, rassemblées par
le coït dans la cavité utérine, se mêlent,
s’assimilent entr’elles & se murissent. Parve-
nues à un degré suffisant de maturité, la
force de formation s’empare d’elles, & les
transforme partie en enveloppe ou en oeuf,
& partie en corps animé ou en embryon.
De là vient sans doute, qu’avec toutes les
ressources de la dioptrique, science élevée
aujourd’hui à son dernier degré de perfec-
tion, nous ne pouvons découvrir dans la
matrice, durant l’intervalle des deux pre-
mières semaines, qu’un amas d’humeurs
uniformes; & qu’aux environs de la troi-
sième semaine, nous y appercevons pres-
[Seite 301] que tout-à-coup, un corps à la vérité très
petit, mais déjà remarquable.

593. Tous les ouvrages de la nature sont
empreints du sceau de cette force de for-
mation, & on ne trouve aucune part des
vestiges de germes pré-existans. Considérons
les nuages qui flottent dans le vague des
airs, ils ont une figure particulière; le
torrent électrique se répand sous des formes
déterminées; le règne minéral lui-même nous
offre des cristaux métalliques, qui ne diffè-
rent des corps organisés que par le privilège
de la vie; je me contenterai de citer en
exemple, la forme de cristallisation que
donne la première fusion du cuivre, ou
les belles apparences de fougère que prend
quelquefois l’argent natif.

594. Les deux autres règnes nous four-
nissent des exemples bien plus frappans:
nous y observons des corps dont le déve-
loppement assez considérable est si évident,
& la propagation si prompte, qu’il est en
quelque sorte possible de les suivre de l’oeil;
seuls, ils suffisent pour exclure tous les
germes pré-existans. Telle est parmi les vé-
gétaux, la conferve de fontaine, & parmi les
animaux, l’hydre verte.

595. Je dépasserois les bornes de cet
ouvrage élémentaire, si je produisois ici la
multitude de preuves que la nature elle-
même accumule, pour rendre plus sensi-
ble l’influence de la force de formation
sur le travail de la génération. J’en expo-
[Seite 302] serai seulement quelques-unes, & en peu
de mots, qu’il suffira de méditer attentive-
ment pour être convaincu(1).

596. Ici se présente d’abord le résultat
de certaines observations faites sur des ani-
maux issus de différentes espèces: elles nous
apprennent que dans ceux qui naissent suc-
cessivement, & durant plusieurs généra-
tions, de différens mâles d’une même espèce,
la forme maternelle s’affoiblit, s’altère,
enfin est presque totalement remplacée par
la configuration propre à l’espèce du père.
De même, celle-ci peut être ramenée pres-
qu’entièrement, & par une voie semblable,
à celle de la femelle.

597. Il est également de fait, que quel-
ques espèces d’animaux, principalement les
porcs, donnent très-fréquemment des mons-
tres
dans l’état de domesticité; tandis que
leur variété primitive, abandonnée à elle-
même, dans les forêts, en offre à peine un
très-petit nombre d’exemples. Ce fait est si
parlant, que les défenseurs du développe-
ment des germes sont forcés de recon-
noître, au moins dans quelques-uns de ces
cas, une organisation successive.

598. Ne devroient-ils pas aussi l’admettre
dans ceux où l’on voit devenir héréditaires,
& revêtir le caractère de la nature, non-
seulement des monstruosités de naissance
[Seite 303] mais encore, ou des mutilations accidentel-
les, ou des difformités introduites par la
main des hommes?

599. Une observation qu’il importe de
faire, c’est que les phénomènes de la repro-
duction
considérés en général, s’expliquent
infiniment mieux par la force de formation,
que par la pré-existence des germes; c’est
que plusieurs d’entre ces phénomènes, pris
séparément, ne peuvent aucunement se
concilier avec cette dernière hypothèse.
Comment, par exemple, expliqueroit-on
jamais la reproduction des ongles sur la
phalange moyenne des doigts, après la chûte
de la troisième(1)?

600. Nous opposerons enfin, qu’on re-
marque quelquefois des parties vraiment
organisées naître hors l’état naturel & à
la suite d’un accident maladif. C’est ainsi que
la nature réparatrice, & non la pré-existence
des germes, remplit par des os Wormiens,
l’écartement immense des fontanelles que
détermine l’hydrocéphale interne.

601. Il résulte de la discussion que nous
venons de faire, que le systême des germes
pré-existans ne peut lui-même se soutenir
sans la force de formation; & que ses défen-
seurs sont obligés de l’accorder à la semence
virile, outre la force excitante, par laquelle
ils tâchent d’expliquer son influence. Il n’en
[Seite 304] est pas de même de notre doctrine; elle
n’emprunte rien, elle se suffit parfaitement
pour rendre raison de tous les phénomènes
de la génération. A quoi tient-il donc qu’on
l’adopte seule? & pourquoi multiplier les
êtres sans nécessité?

SECTION QUARANTE-SIXIÈME.
De l’Accouchement & de ses suites.


602. Le foetus, à l’aide des forces que
nous venons d’examiner, étant parvenu au
terme de son accroissement, demande à voir
la lumière.

603. L’époque à laquelle répond dans
l’état naturel ce terme critique, qui est celui
de l’accouchement, est la fin du dixième mois
lunaire; c’est-à-dire, la trente-neuvième
ou la quarantième semaine après la con-
ception(1).

[Seite 305]

604. La femme éprouve alors un besoin
d’accoucher, qui l’emporte infiniment sur
toutes les autres nécessités naturelles, &
n’est soumis à aucun ordre de la volonté.

605. Quelle peut être la cause excitante
d’une révolution si absolue & si prompte?
Sans nous égarer dans les différens sys-
têmes que les physiologistes ont imaginés
à ce sujet, nous la trouverons, je pense,
plus sûrement dans la loi éternelle de la
nature; loi aussi inexplicable que la plu-
part des autres phénomènes périodiques,
que la métamorphose des insectes, que la
marche des fièvres exanthématiques, que
la nature des crises, &c.

Ce n’est cependant pas sans raison qu’on
a comparé l’oeuf humain, parvenu à son
état de développement, aux fruits du règne
végétal, qui, étant parfaitement mûrs,
se détachent spontanément de l’arbre au-
quel ils étoient suspendus, parce que dès
lors leurs vaisseaux nourriciers se resserrent
& se dessèchent. On a effectivement ob-
servé que le placenta se resserroit peu-à-
peu, à mesure que le terme de l’accou-
chement approchoit, & se préparoit ainsi
à se séparer de la matrice.

A l’égard de la distension extrême de
cet organe, & de plusieurs autres causes
auxquelles la plupart rapportent l’expulsion
du foetus, elles sont assez réfutées par le
raisonnement, & par une foule d’exemples
de conceptions extra utérines. Il est de sait,
[Seite 306] dans ces conceptions non-naturelles, soit
qu’elles aient lieu dans les trompes, soit
qu’elles se soient effectuées dans les ovaires,
que la matrice incontestablement vide, ne
laisse pas d’éprouver les douleurs ordinaires,
à l’époque de l’expiration des dix mois(1).

606. Une cause excitante ne suffit pas
pour déterminer l’accouchement; la seule
considération du foetus & du viscère dans
lequel il est contenu, fait bientôt conce-
voir la nécessité des causes efficientes.

Parmi ces dernières, je suis persuadé
qu’on ne trouvera celle communément
appelée prochaine, que dans la vie propre
de l’uterus. Les efforts de la respiration,
le concours du nerf intercostal, & de tout
le reste du systême nerveux, sont les prin-
cipales d’entre celles qu’on nomme éloignées.

607. Les phénomènes de l’enfantement,
se succédant dans un ordre réglé, ont été
distingués par les accoucheurs, selon les
temps qu’ils ont coutume de parcourir: les
modernes en comptent quatre.

608. Dans le premier temps, la femme
éprouve des douleurs qui se font particu-
liérement ressentir depuis les reins jusques
vers le col de la matrice; elles ne diffèrent
de celles qui accompagnent le cours entier
du travail, que parce qu’elles sont plus
[Seite 307] légères & moins fréquentes. On les appelle
douleurs qui présagent l’enfantement. En même
temps, l’orifice de la matrice commence à
se dilater, le ventre tombe, le besoin d’uri-
ner presse, les parties génitales sont lâches,
tuméfiées, & laissent échapper au-dehors
une grande quantité de matières muqueuses.

609. Dans le second temps, les douleurs
augmentent; on les appelle douleurs qui pré-
parent
à l’enfantement. Alors le segment in-
férieur des enveloppes de l’oeuf est chassé
hors l’orifice de la matrice dans le vagin.

610. Dans le troisième, les douleurs sont
encore plus fortes, & prennent le nom
de douleurs de l’enfantement. La matrice, à
cette époque, descend davantage, se con-
tracte sur le foetus avec plus de violence;
& comprimant ainsi la poche qui renfermoit
les eaux, la force à se rompre.

611. Dans le quatrième & dernier temps,
lés douleurs sont si fortes, qu’on leur a
donné le nom de conquassantes. On voit alors
au milieu des efforts redoublés de la mère,
efforts(1) qui pour l’ordinaire s’accom-
[Seite 308] pagnent d’horripilation, de grincement des
dents, de tremblement des genoux; on
voit dis-je, paroître la tète de l’enfant.
Communément son sommet venant appuyer
contre l’arcade du pubis, elle fait une de-
mi-révolution sur ce point fixe, présente
la face, & surgit ainsi à la lumière, à tra-
vers des flots de sang.

612. Le corps ne tarde pas à suivre la
tête, & peu après lui, viennent ordinai-
rement les secondines ou l’arrière-faix. Une
nouvelle douleur se fait ressentir; mais elle
est beaucoup moins vive: on voit égale-
ment paroître une nouvelle hémorragie,
que fournit cette partie de l’uterus à la-
quelle la membrane caduque épaisse faisoit
adhérer le placenta.

613. L’accouchement étant terminé, la
matrice se resserre insensiblement, & se ré-
[Seite 309] tablit presque dans l’état où elle étoit avant
la conception(1).

614. Dès-lors, & durant environ la pre-
mière semaine, les lochies coulent: on
appelle de ce nom un écoulement sembla-
ble au flux menstruel, mais plus abondant,
à moins que la mère n’allaite. Cet écoule-
ment se décolore un peu vers le quatrième
jour; ce n’est plus enfin qu’une sérosité
blanchâtre.

Avec les lochies, la matrice se décharge
des restes de la membrane caduque; elle
acheve ainsi de remplir les fonctions que
lui avoit imposée la grossesse; & se repose,
jusqu’à l’époque du retour des menstrues,
ou d’une nouvelle conception.

SECTION QUARANTE-SEPTIÈME.
Des Différences qui existent entre un
foetus & un sujet qui a vu le jour
(1).

[Seite 310]

615. Ce que nous avons déjà dit de
l’espèce de vie qui anime le foetus flottant
dans les eaux au milieu desquelles il est
renfermé, doit aisément faire pressentir la
différence qui se trouve entre les fonctions
que son économie remplit à cette époque,
& celles qui s’exécutent en lui, lorsque
né, il devient en quelque sorte maître de
lui-même, par la jouissance de toutes ses fa-
cultés. Nous allons parcourir les principaux
points de cette différence.

616. D’abord la circulation du sang(2)
n’est plus la même dans un sujet qui, ayant
déjà respiré, subsiste par lui-même, & celui
qui, n’ayant pas encore exercé ses poumons,
vit par l’union que le cordon ombilical lui
fait contracter avec sa mère.

617. Dans celui-ci, le sang vient du
[Seite 311] placenta; il coule dans la veine ombili-
cale, se porte vers le foie, & s’épanche
dans le sinus de la veine porte. Les divi-
sions de ce vaisseau en distribuent une
partie à la propre substance du foie, tan-
dis que l’autre, remontant en ligne droite
par le conduit veineux d’Arantius, se jette
dans la veine cave inférieure. Au reste,
ces deux canaux ne sont ouverts à la cir-
culation que jusqu’à la section du cordon
ombilical; alors la veine de ce nom se
transforme en ligament.

618. Parvenu de la veine cave infé-
rieure au ventricule droit, le sang ne peut
pénétrer les poumons que la respiration n’a
pas développés; il prend une autre voie
qui le conduit, par la valvule d’Eustache,
& le trou ovale, dans l’oreillette gauche
du coeur.

619. On a ainsi appelé cette valvule du
nom de celui qui l’a découverte: sa figure
imite celle d’un croissant, & elle répond
à l’ouverture de la veine cave inférieure.
Ordinairement on la voit s’effacer peu-à-
peu dans l’âge adulte; mais, dans le foetus,
elle dirige le sang qui arrive de toute la
capacité du bas-ventre, vers le trou ovale
pratiqué dans la cloison qui sépare les oreil-
lettes.

620. L’usage de ce trou(1) est de con-
[Seite 312] duire à l’oreillette gauche, durant chacun
de ses mouvemens de diastole, la plus grande
partie du sang qu’a recueilli la veine cave
inférieure. Les mouvemens de systole pour-
roient le faire refluer; mais le développe-
ment d’une large valvule sémi-lunaire s’y
oppose. Ceci n’a lieu que dans le premier
âge de la vie; bientôt la valvule sémi-
lunaire se resserre par degrés sur le trou
ovale, & le bouche enfin complettement;
bientôt, d’une autre part, la valvule
d’Eustache se dessèche aussi, décroît, &
s’efface plus ou moins.

621. Le sang que dépose dans l’oreil-
lette droite sur-tout, la veine cave supé-
rieure, ne peut s’introduire qu’en très-
petite quantité dans les poumons du foe-
tus, affaissés sur eux-mêmes; aussi est-il
repris dans le tronc de l’artère pulmon-
naire, par le canal artériel(1), qui, le
détournant des poumons, le verse direc-
tement dans la crosse de l’aorte. Ce canal
s’oblitère encore dès les premières semaines
après la naissance, & se change en un li-
gament solide.

622. Accumulé dans le tronc de l’aorte,
[Seite 313] le sang se dirige en grande partie vers les
artères ombilicales, & retourne à la mère
qui l’avoit elle-même fourni. Ces artères,
placées sur l’un & l’autre côté de l’ou-
raque, deviennent également des cordons
solides peu après la naissance.

623. Les poumons n’ayant presqu’aucune
fonction à remplir dans le foetus, présen-
tent un aspect bien différent de celui qu’ils
offrent après avoir aspiré l’air vital. Ils sont
livides, moins volumineux, plus compacts,
& spécifiquement plus pesans. Si on les
plonge récens & non soufflés, dans une
suffisante quantité d’eau, ils vont au fond;
tandis que ceux d’un enfant qui a respiré,
toute autre circonstance non-naturelle à
part, surnagent(1).

Il paroît que le lobe droit est le premier
qui reçoit l’air. Nous ne répéterons pas
ici ce que nous avons dit ailleurs du mé-
canisme de la respiration.

624. Nous passerons également sous
silence tout ce qui a rapport à la nutrition
du foetus: ce que nous avons précédem-
ment observé sur cette fonction en géné-
ral, fait assez comprendre que le tube ali-
mentaire & le systême lacté, étant chez
[Seite 314] lui dans une inaction entière, se compor-
tent bien différemment que dans l’homme-
né. Les gros intestins, par exemple, dif-
fèrent à peine des intestins grêles durant
les premiers mois; ce n’est que depuis le
cinquième, que, distendus par le méco-
nium, ils commencent à mériter le nom
qu’ils portent.

625. On appelle méconium une saburre
d’un brun verdâtre, qui paroît être un
résidu des humeurs récrémentitielles, &
principalement de la bile du foetus. Ce
qui nous porte à l’attribuer sur-tout à la
bile, c’est qu’elle ne s’observe qu’à l’é-
poque où la sécrétion de cette liqueur se
fait, & que les monstres dans lesquels on
ne trouve point de foie, ont les intestins
remplis, au lieu de méconium, d’une mu-
cosité blanchâtre.

626. La forme du coecum est encore dif-
férente, à cet âge(1), de celle qu’il a
constamment dans la suite, & il se con-
tinue en ligne directe avec son appendice
vermiforme.

627. J’omets les autres variétés propres
au foetus, qui ont été indiquées en diffé-
rens endroits de cet ouvrage; celles, par
exemple, qui naissent de l’ouraque, de la
membrane pupillaire, & de la descente des
[Seite 315] testicules. Il en est d’autres que je renvoie
au chapitre suivant. Il en est d’autres en-
fin, dont je ne parlerai pas, parce qu’elles
sont trop peu importantes.

628. Mais ici se présentent trois organes
dont nous ne pouvons nous dispenser de faire
mention, quoique nous ignorions également,
malgré toutes les recherches anatomiques
dont ils ont été l’objet, & ce qu’ils sont,
& ce à quoi ils servent. On présume seu-
lement que leur développement étant plus
considérable dans le foetus, ils sont, à cet
âge, d’une plus grande utilité. Nous igno-
rons aussi pourquoi on les appelle du nom
de glandes, puisque leur parenchyme n’est
rien moins que glanduleux, & qu’ils ne
laissent appercevoir, dans leur texture,
aucun conduit excréteur.

629. Le premier de ces organes est la
glande tyroïde. On la trouve à la partie an-
térieure du larynx, sur le cartilage dont elle
porte le nom. Elle est composée de deux
lobes, & a la forme d’un croissant. Dans
le foetus, elle renferme une humeur lym-
phatique abondante; dans un âge plus
avancé, chaque jour elle se dessèche da-
vantage(1).

[Seite 316]

630. Le second est le thymus. Ce corps,
dont le parenchyme est blanc & fort
mou, se partage aussi en deux lobes, l’un
& l’autre ordinairement creux. Il est placé
sous la partie supérieure du sternum; mais,
dans le foetus, chez qui il est très-volumi-
neux & rempli d’une humeur laiteuse, on
le voit fréquemment s’élever de chaque
côté jusqu’au col. Dans l’âge adulte, il
décroît chaque jour, quelquefois même il
disparoît totalement aux approches de la
vieillesse.

631. Les derniers sont les reins succen-
tauriaux,
ou les glandes sur rénales, ou
les capsules atrabilaires. Situés au-dessous
du diaphragme, & sur le bord supérieur
des reins, ils contiennent une liqueur d’un
jaune brun chez les adultes, & rougeâtre
dans le foetus. A ce dernier âge, ils sont
en même temps plus gros & moins rap-
prochés des reins.

SECTION QUARANTE-HUITIÈME.
De l’Accroissement, de l’État, & du
Décroissement de l’homme.

[Seite 317]

632. Il ne nous reste plus, après avoir
parcouru toutes les fonctions de l’économie
animale, qu’à considérer l’homme lui-même
fournissant sa carrière, & arrivant, à tra-
vers différentes époques plus ou moins no-
tables, du terme de la naissance à celui de
la mort.

633. La première époque de sa vie ré-
pond à-peu-près à la troisième semaine
après sa conception: le foetus alors com-
mence à se développer; alors son existence
est très-foible, il ne paroît vivre qu’à la
manière des végétaux.

Vers la quatrième semaine, la circulation
du sang,
& le mouvement du coeur s’établis-
sent: c’est là un fait démontré par l’ob-
servation; on a réellement vu le coeur se
mouvoir dans des embryons de cet âge:
aussi, depuis Aristote, qui avoit distingué
ses battemens dans un germe de poulet,
on connoît cet organe sous le nom de
point saillant.

634. Aux environs de la septième ou
de la huitième semaine, déjà l’ossature est
[Seite 318] ébauchée(1), on aperçoit les petites no-
dosités que forme le suc osseux, dans les
clavicules, les côtes, les vertèbres, les os
longs des extrémités, la plupart de ceux de
la face, & dans la mâchoire inférieure.
On voit ce même suc s’épancher plus lar-
gement, pour constituer les os plats, &
tisser en quelque sorte, d’abord le frontal
& l’occipital, puis les pariétaux.

En général, l’accroissement de tout sujet
né où à naître, est d’autant plus rapide
que l’individu touche de plus près à l’épo-
que de sa formation; il se fait au contraire,
avec d’autant plus de lenteur que ce terme
est plus éloigné.

[Seite 319]

635. Le foetus donne manifestement des
signes de vie, aux environs du milieu de la
grossesse; & quelques sécrétions, celles par
exemple, de la graisse & de la bile, com-
mencent à se faire.

636. Peu après, sa chevelure croît, ses
ongles naissent, sa membrane pupillaire s’en-
tr’ouvre, & dans les sujets mâles, les testi-
cules
échappent à la cavité abdominale.

637. Lorsqu’il a vu la lumière, de nou-
veaux changemens différens de ceux que
nous avons précédemment observés, vien-
nent modifier son habitude extérieure: sa
face se dépouille du léger duvet dont elle
étoit couverte; les rides qui sillonnoient
son corps disparoissent; ses fesses se pro-
noncent, & dérobent presque à la vue le
contour de l’anus, &c.

638. Il apprend bientôt à exercer les
facultés de son ame; son entendement, son
attention, sa mémoire, sa volonté, &c.
se développent insensiblement; & dès-lors,
il éprouve un moindre besoin de dormir.

639. En même temps, les organes affec-
tés à ses sens externes se forment, & achè-
vent de se perfectionner: je parle sur-tout,
du conduit auditif, des fosses nasales, des
sourcils, de l’arcade sourcillère, &c.

640. Vers ce même temps, les os du
crâne contractent entr’eux une union plus
étroite, & les fontanelles se bouchent peu
à peu. Parvenu enfin au huitième mois de
[Seite 320] son âge, l’éruption des premières dents tente
de se faire.

641. Dès lors l’enfant peut être sevré;
ce n’est pas pour blesser le sein de sa mère,
que la nature arme l’une & l’autre de ses
mâchoires; c’est pour le mettre en état
de rompre & de broyer des alimens so-
lides.

642. Sur la fin de sa première année,
ses extrémités inférieures commencent à
le pouvoir supporter, & à lui permettre
cette situation perpendiculaire, l’une des
grandes prérogatives dont jouisse l’espèce
humaine.

643. C’est ainsi qu’il devient, chaque
jour, plus indépendant de tout secours
étranger; il en dépend bien moins,
quand, formé à l’exercice de la parole,
son ame peut confier à sa langue les idées
qu’elle est à portée de concevoir.

644. Arrivé à la septième année de son
âge, ses dents de lait tombent, & trente-
deux nouvelles remplacent successivement
les vingt premières.

645. Cet âge est celui de la mémoire:
elle a une aptitude singulière à retenir les
signes qui lui sont transmis, jusqu’aux
approches de la quinzième année; alors,
dominée par l’imagination, elle cesse d’être
aussi heureuse.

646. La nature fait sagement concourir
le règne de l’imagination avec l’époque de
la puberté: à l’aide de cette faculté, elle
[Seite 321] dispose insensiblement les sujets des deux
sexes aux grands changemens que doit in-
troduire dans leur économie entière, l’exer-
cice des fonctions qui leur sont propres.

647. Chez les jeunes filles, les seins se
forment; chez les jeunes garçons, le menton
se couvre de quelques poils encore foibles;
chez les uns & les autres, se marquent
successivement tous les caractères de l’ado-
lescence. Les premières commencent à payer
à la nature le tribut menstruel qu’elle leur a
imposé; ceux-ci deviennent propres à four-
nir la liqueur séminale; en même temps, leur
barbe(1) s’épaissit, & leur voix prend un
ton de gravité vraiment remarquable. C’est
alors que le langage de la nature se fait
entendre à leurs coeurs, & que l’instinct
sexuel
les avertit que, parvenus à la fleur
de leur âge, ils peuvent satisfaire les voeux
de l’amour.

648. Il est difficile d’assigner un terme
précis à l’âge de puberté: soumis à l’in-
[Seite 322] fluence des climats & des tempéramens(1),
il varie avec eux. Cependant on observe en
général que les femmes sont un peu plus
précoces que les hommes: elles sont nubiles
dès l’âge de quinze ans; ceux-ci, au con-
traire, ne le sont qu’aux environs de leur
vingtième année(2).

649. Bientôt cesse l’accroissement du corps,
dont les degrés ne varient pas moins, suivant
les individus, les familles & les peuples(3).

650. Vers ce même temps, les épiphyses,
ou ces éminences qui n’étoient que surajou-
tées aux corps des différens os, s’unissent
& se confondent avec eux.

[Seite 323]

651. Ici commence l’âge viril, cet âge
qui constitue la plus grande & la plus belle
partie de la vie humaine: ses attributs sont,
d’une part, la vigueur & la force; de l’autre,
la maturité du jugement.

652. A l’âge viril succède la vieillesse:
elle s’annonce, chez la femme, par la sup-
pression des règles; chez l’homme, par une
certaine difficulté à goûter les jouissances
de l’amour; chez l’un & l’autre, par un
état de sécheresse, qui augmente chaque
jour, & une diminution déjà sensible des
forces vitales.

653. La vieillesse une fois survenue,
s’accompagne de l’affoiblissement progressif
de tous les sens internes & externes, du be-
soin de dormir, d’un engourdissement géné-
ral, de la blancheur & de la chûte des poils,
de la perte des dents, d’une telle foiblesse,
que le col semble se refuser à soutenir le
poids de la tête, & les extrémités inférieures
à supporter le tronc; les os eux-mêmes se
frappent d’une espèce d’émaciation(1).

654. C’est ainsi que nous parvenons au
terme de notre carrière physiologique, à
la mort sans maladie. Si on rappelle ce que
nous avons dit jusqu’à présent, il sera aisé
d’entrevoir les causes naturelles(2) de cet
[Seite 324] état, contre lequel viennent échouer toutes
les ressources de la médecine.

655. Pour achever le tableau de la vie
humaine, il nous reste à observer les phé-
nomènes
indicateurs de sa fin. Quand l’homme
touche à sa dernière heure, le froid s’empare
de ses extrémités, ses yeux deviennent ter-
nes, son pouls est petit, & de plus en plus
intermittent; enfin sa respiration, toujours
plus rare, cesse par une dernière, mais
puissante expiration. L’inspection du coeur
sur les animaux a fait voir que le ventri-
cule & l’oreillette du côté droit conser-
voient plus long-temps leurs mouvemens,
que l’oreillette & le ventricule du côté
gauche, & que ces parties mouroient les
dernières.

656. On juge qu’un homme est mort,
par la froideur & la rigidité de ses mem-
bres, par l’odeur cadavéreuse que son corps
exhale, par la flaccidité de la cornée, en-
fin par le relâchement des sphincters de
l’anus; l’ensemble de ces signes ne laisse au-
cun doute sur son état; & ce seroit sans
raison qu’on diroit avec Pline, après les
[Seite 325] avoir reconnus, qu’on ne doit pas encore
croire à la mort d’un homme(1).

657. Nous disions précédemment qu’il
est fort difficile d’assigner un terme à la
puberté; il ne l’est pas moins de fixer les
bornes naturelles de la vie. Ce que j’ai ob-
servé le plus constamment, en comparant
plusieurs tableaux nécrologiques, c’est qu’en
général un assez grand nombre de vieil-
lards, en Europe, parviennent à l’âge de
84 ans, & que très-peu vivent au-delà.

658. D’ailleurs, quoique la foiblesse de
l’enfance, l’intempérance des adultes, les
maladies graves, & les accidens fâcheux
qui surviennent à tout âge, soient fré-
quemment des occasions de mort, quoique
sur mille sujets qui ont reçu la vie, il y
en ait à peine 70 ou 80 qui la perdent
de décrépitude; si cependant on consi-
dère sa durée(2) en général, si on la com-
pare avec celle des autres animaux mam-
maires connus, on concevra bientôt, qu’il
n’est pas de plainte plus injuste, après
les reproches que font quelques sophistes
à son auteur, sur les misères dont elle s’ac-
compagne, qu’il n’est pas de plainte plus in-
juste que celle qui a pour objet sa brièveté.

FIN.

Appendix A TABLE DES SECTIONS
DE CET OUVRAGE.

[Seite 326]

Fin de la Table.

Appendix B FAUTES NOTABLES.


Page 16, note (1), ligne 2: sanguins,
lisez veineux.

Page 225, ligne 20: aux, lisez par les.

Page 264, à la note, ligne 8: circoncis,
lisez incirconcis.


De l’Imprimerie de J. Roger,
rue Confort, N°. 90.

[interleaf] [interleaf] [interleaf] [binding_verso]
Notes
(1).
[[V]]

Préf. institut. medic. Leyd. 1717.

(2).
[[V]]

Préf. prim. lin. physiol. Gotting. 1747.

(1).
[Seite VII]

Nous avons cru pouvoir en supprimer
quelques-unes, nous apercevant dès la
troisième feuille d’impression, que, jointes
aux notes, dont il nous paroissoit quelque-
fois nécessaire d’accompagner le texte de
l’auteur, elles surchargeoient l’ouvrage.
Note du trad.

(1).
[Seite VIII]

Ici, nous avons retranché un para-
graphe entier, dans lequel l’auteur ne par-
toit que des gravures dont il a orné son
ouvrage. On ne les retrouvera point dans
cette traduction, soit pour n’en pas aug-
menter le prix, soit parce qu’elles sont géné-
ralement connues; soit enfin parce que
nous pensons que la nature seule peut con-
venablement démontrer les objets qu’elles
représentent. Note du trad.

(1).
[Seite 1]

Ainsi s’explique l’auteur du Livre VI des
Epid., communément attribué à Hyppocrate:
‘“L’examen des parties qui entrent dans la compo-
sition de nos corps, en découvre certaines qui sont
contenues dans d’autres; & d’autres qui sont violem-
ment agitées en nous.
”’ C’est ce passage célèbre qui
a donné lieu à l’ouvrage de Boerhaave, intitulé:
Impetum faciens dictum Hypocrati per corpus consen-
tiens.
L.B. 1745.

(1).
[Seite 2]

Chr. Andr. Koch, de proportions solidorum
ad fluida.
Gott. 1737.

(1).
[Seite 4]

Nous observerons ailleurs, que l’amnios
est vraiment pourvu de vaisseaux sanguins. Note du
traducteur.

(2).
[Seite 4]

Chez l’homme, les quadrupèdes, & les oi-
seaux, il est plus chaud que l’atmosphère environ-
nant; chez les poissons & les reptiles, il a un degré
de chaleur à-peu-près égal à celui du milieu qu’ils
habitent: de-là cette distinction générale entre ani-
maux à sang chaud & animaux à sang froid. Note
du traducteur.

(1).
[Seite 6]

Gu. Porner, experimenta de albuminis ovorum
& seri sanguinis convenientia.
Leips. 1754.

*).
[Seite 6]

52e. de Réaumur.

(2).
[Seite 6]

Voyez nuove osservaz. ed esperienze sul sangue,
&c.; de Moscati, dans scelta di opusc. interessanti.
Mil. T. XVI.

(1).
[Seite 7]

La propriété la plus singulière du sérum, dit
Mr. Fourcroy, & qui mérite le plus de fixer l’at-
tention des médecins, est celle de devenir concret
par l’action du feu & des acides. Sa disposition ex-
trême à la putridité, dont parle ici Blumenbach,
n’est pas moins digne de les occuper: elle est telle,
qu’elle n’a pas encore laissé le temps de déterminer,
si cette liqueur passoit à l’acide avant de devenir alka-
line. Note du traduct.

(2).
[Seite 7]

Transact. philos. T. LXVI. part. 1.

(1).
[Seite 9]

J.M. Della Torre, nuove osservaz. intorno la
storia nat.
Nap. 1768. Nuove osservaz microscop. lb.
1776.

C.H. Kaestlin; s’est convaincu par les expériences
mêmes de Latour, que son opinion n’étoit fondée
que sur une illusion de dioptrique.

(2).
[Seite 9]

Transact. philosoph. T. LXIII. p. 11.

(3).
[Seite 9]

Chr. Reichel. De sanguine ejusque motu expe-
rimenta.
Leips. 1767.

(1).
[Seite 10]

La chymie moderne parle un langage bien plus
raisonnable. Elle appelle l’air déphlogistiqué, gaz oxi-
gène ou air vital; l’air fixe, gaz acide carbonique; &
l’air inflammable, gaz hydrogène. Elle caractérise
ainsi tous les objets dont elle s’occupe. Note du trad.

(2).
[Seite 10]

On remarque de plus, que dans les pâles cou-
leurs,
maladie ou la partie rouge du sang est presque
totalement décolorée, les remèdes qui réussissent le
mieux sont tirés des préparations ferrugineuses. Note
du traduct.

(1).
[Seite 11]

On ne sait point encore quelle différence in-
time existe entre ces deux humeurs: néanmoins, il
est évident que la lymphe est une substance plus ani-
malisée que le sérum, & qu’elle fait la base fibreuse
de tout le systême musculaire. Note du trad.

(1).
[Seite 12]

Ruisch. Thes. anat. VII. & thes. 1.

*).
[Seite 12]

Membrana caduca seu decidua.

(1).
[Seite 13]

Comment. societ. scient. Gotting. T. VIII.

(1).
[Seite 14]

J’ai parlé de ces expériences dans la bibliotheque
de médecine.
T. 1.

(2).
[Seite 14]

Gaubius Spec. exhibens ideam generalem solida-
rum corp. h. partium.
L.B. 1725.

Voyez aussi Boerhaave sur ce sujet, dans nov. comm.
acad. Petropol.
T. IV.

(1).
[Seite 15]

‘“Il s’en faut de beaucoup, dit Haller, que les
propriétés de l’air nous soient connues. Nous savons
cependant, que c’est une espèce de gluten, qui unit
entr’eux les élémens de tous les corps solides. Aussi,
n’en est-il aucun dont on n’en sépare en le décompo-
sant; on en trouve dans les métaux, dans les os, la
pierre, la brique, les sels, &c.”’ De corp. hum.
functionibus.
T. III.

(1).
[Seite 16]

On donne le nom de Parenchyme, à un com-
posé de vaisseaux artériels & veineux, qui se termi-
nent le plus souvent par les origines d’un ou de plu-
sieurs conduits sécrétoires. Les fibres, au contraire,
sont des filamens déliés & pleins, qui par leur entre-
croisement forment différens tissus. Note du trad.

(2).
[Seite 16]

Dav. Chr Schrobinger (préf. de Haller), de
telae cellulosae in fàbricâ corp. h. dignitate.
Gott.
1748. Bordeu, Rech. sur le tissu muqueux, Par.
1791.

(1).
[Seite 18]

On sait avec quelle facilité l’air, l’eau, le
pus, &c., se frayent une route à travers ses cel-
lules, & passent ainsi plus ou moins rapidement,
de l’une des régions du corps à l’autre. Note du trad.

(1).
[Seite 19]

Si on veut appeler vaisseaux du tissu cellu-
laire, ces petits interstices dans lesquels se logent les
fluides qu’il résorbe; j’accorde à Hunter, que ce
tissu est composé de vaisseaux, ainsi que toutes les
autres parties du corps. Mais, si on entend par ce
mot, des conduits cylindriques semblables à ceux que
l’on nomme, anatomiquement parlant, vaisseaux; les
recherches exactes que j’ai faites, armé d’un micros-
cope, & prévenu contre toute illusion d’optique, me
forcent à penser différemment.

(1).
[Seite 20]

Hunter est d’une opinion différente. Voyez
Médical observ. and inquiries. T. II.

(2).
[Seite 20]

J’ai trouvé cette motte on ne peut plus par-
faitement circonscrite, dans le cadavre de la femelle
d’un singe. Elle l’étoit au point, qu’après avoir ex-
posé ce cadavre au froid, je pus l’en détacher en
masse dans sa totalité absolue.

(3).
[Seite 20]

G. Xav. Jansen, pingued. anim. consideratio
physiol.
& pathologica. L.B. 1784.

(1).
[Seite 21]

Joach. Brandis, comm. de oleorum unguinos.
naturâ.
Gott. 1785.

(2).
[Seite 21]

Joach. Rhades, de sero sang. h. aliisque li-
quidis anim.
Gott. 1753.

Dav. Knape, de acido ping. animalis. Ib. 1754.

Laur. Crell., voyez Chemisches, journal 1778; p. 1.

(1).
[Seite 22]

L’un de ses grands usages, selon M. Macquer
est d’absorber les acides surabondans dans le corps
humain, lorsque la nature ne peut s’en débarrasser
autrement. Note du trad.

(2).
[Seite 22]

Il est probable que les infectes dépourvus de
[Seite 23] sang, (*) tirent leur principale nourriture de leur
propre graisse, qui chez eux est très-abondante.
Voyez Lyonnet, tr. anat. de la chenille qui ronge
le bois de saule.

(*) Les autres animaux ne paroissent s’en nour-
rir, que lorsqu’ils sont forcés à une longue absti-
nence, ou atteints de maladies qui mettent obstacle
à la production du suc nourricier. On voit alors ceux
qui sont fort gras, résister beaucoup plus long temps
que ceux qui sont très-ma gres. Note du trad.

(1).
[Seite 23]

Gualt. Forsten Verschiur, de recent. medico-
rum, &c. meritis in phoenom. & effect. principii quod
vitam animal. constituit indagandis.
Gron. 1781.

Math. Van-Geun, de eo quod vitam constituit in
corp. anim.
Groning. 1758.

Theod. Van-der-Kemp, de vitâ & vivific. materiae
hum. corpus constituentis.
Edimb. 1782.

(1).
[Seite 24]

J. Henr. Schulze, de elasticitatis effect. in
mach. humanâ.
On trouve ce traité dans la collection
anat. de Haller. T. III.

(1).
[Seite 27]

Cette observation est plus que douteuse: on
eût pu citer avec bien plus d’assurance le resserrement:
de cette membrane, soit après l’accouchement, soit
après l’évacuation des eaux, dans un cas d’hydropisie.
Note du trad.

(1).
[Seite 29]

Dan. Langhans, de consensu partium corp. h.
Gott. 1749.

(1).
[Seite 30]

Ce seroit peut-être ici le lieu de combattre le
préjugé qui fonde sur l’empire de l’imagination une
[Seite 31] sympathie de la mère au foetus. Il n’est pas étonnant
de voir les femmes qui durant leur grossesse ont
tant d’envies ou de craintes bizarres, trouver dans
les taches que portent leurs enfans, des ressemblan-
ces avec ce qu’elles ont désiré ou appréhendé. Mais
falloit-il que des hommes instruits autorisassent de leur
nom l’erreur où elles tombent! Quel rapport entre
les affections morales de l’une, & les impressions
physiques qui se marquent sur le corps de l’autre?
M. Petit, de Lyon, envisage ce phénomène sous un
point de vue bien plus philosophique: il compare
le foetus à un nouvel organe, dont les diverses alté-
rations peuvent influer sur les goûts de la mère,
& susciter en elle des symptômes particuliers; de
même que l’on voit chaque jour en nous, l’état ma-
ladif de l’un ou de l’autre de nos viscères, nous
faire appéter telle espèce d’aliment ou de boisson, &
peindre à l’homme de l’art exercé, la nature du dé-
sordre qui s’y est introduit. Note du trad.

(1).
[Seite 32]

G. Fr. Ad. Gerresheim, de sanitate cuivis
homini propriâ.
L.B. 1764.

(1).
[Seite 33]

Ceux parmi les anciens qui n’avoient égard
qu’aux qualités appelées élémentaires, les divisoient
en chaud, froid, sec & humide. Ils nommoient
complexion tempérée, celle qui ne laissoit sensible-
ment dominer aucun de ces principes; tempérament
simple, celui qui ne paroissoit résulter que de l’un
d’entr’eux; & constitution mixte, cet état où deux
principes prédominoient sur les deux autres. Cette
dernière division nous ramène à celle que notre au-
teur a adoptée. On reconnoît la dominance du
froid & de l’humide, dans le tempérament phlegma-
tique;
celle de l’humide & du chaud, dans le tem-
pérament sanguin; celle du chaud & du sec, dans
le tempérament bilieux; celle enfin du sec & du
froid, dans le tempérament mélancolique. Note du
trad.

(1).
[Seite 36]

L’infortuné Servet, & le célèbre André Cae-
salpin,
sont ceux qui ont paru s’approcher le plus
de la connoissance de ce phénomène. Qu’il nous soit
permis de citer ici le peu de mots qu’on trouve
à ce sujet, dans une dissertation physiologique insé-
rée par le premier dans le fameux ouvrage qui lui
fut alors si funeste, & qui est aujourd’hui si rare.
Il a pour titre: Christianismi restitutio, &c. On y
lit, Liv. VIII, entr’autres choses qui se rapportent
au Saint-Esprit: ‘“Vitalis est spiritus qui per anas-
tomoses ab arteriis communicatur venis, in quibus di-
citur naturalis
”’.

Caesalpin a au moins reconnu dans les vaisseaux
sanguins, une structure qui empêchoit au sang de
revenir sur ses pas. Voyez, quaestion. medicarum,
I. II. quaest. 17. ‘“De venis ultrà vinculum intumes-
centibus non citrà
”’.

(1).
[Seite 37]

Exercit. anat. de motu cordis & sanguinis in
animalibus.
Francf.

(2).
[Seite 37]

Rien n’est plus commode pour démontrer la
circulation du sang dans les grenouilles, que la ma-
chine de Liebercunh.

Pour la démontrer dans des animaux à sang chaud,
en peut employer des germes de poulets fécondés,
les examinant le quatrième ou cinquième jour de
l’incubation, avec un microscope simple, tel que
celui de Lyonnet.

(3).
[Seite 37]

G. Remus, Experimenta circà circulationem
sang. instituta.
Gott. 1752.

Haller, expérienc. anat. sur la circulation du sang.
Comm. societ. Gotting. T. IV.

Et sur le même sujet, operum minor. T.I.

Laz. Spallanzani, de fenomeni della circolazione,
&c. Moden. 1773.

(1).
[Seite 39]

Ger. Van-Swieten, de arteriae fabricâ & effi-
caciâ in corp. hum.
L.B. 1725.

(1).
[Seite 40]

Consultez sur le nombre & les différences de
ces tuniques.

Alex. Monro: med. essays and observat. Vol. II.

Delasône, mem. de l’acad. des sciences de Paris,
an. 1756.

G.S. Albinus, annot. acad. L. IV.

Vinc. Malacarne, della observaz. in chirurgiâ.
Turin. 1784.

(2).
[Seite 40]

Elles ont avant tout une tunique membra-
neuse; mais celle-ci ne les enveloppe qu’en quel-
ques points de leur étendue. C’est ainsi qu’en, sor-
tant du coeur, en parcourant la poitrine & le bas-
ventre, elles sont entourées par le péricarde, la
plèvre & le péritoine. L’usage de ces tuniques ac-
cessoires est sans doute de fortifier ces vaisseaux,
dans les endroits où ils sont le plus exposés à l’im-
pulsion du sang. Note du trad.

(3).
[Seite 40]

F. Ruisch. Respons. ad. p. problematicam. III.
& thes. anat. IV.

(1).
[Seite 42]

Voyez Kemp L.C., pag. 51.

(1).
[Seite 45]

Rien de plus propre à induire en erreur sur le
diamètre des veines, que les préparations anatomi-
ques auxquelles on les soumet. Leurs parois très-
lâches, cèdent aisément à la force des injections qui
les pénètrent, & se distendent infiniment au-delà de
ce que comporte leur état naturel. Note du trad.

(1).
[Seite 46]

Plusieurs en empruntent une troisième, des
membranes qui tapissent les grandes cavités qu’elles
parcourent. C’est ainsi qu’elles s’enveloppent de la
plèvre dans la poitrine, & du péritoine dans le bas-
ventre. Note du trad.

(1).
[Seite 48]

G. Cowper, myotomia reformata, Lond. 1724.

Ray. Wieussens, traité nouveau de la structure du
coeur.
Toul. 1715.

Senac, traité de la structure du coeur, de son ac-
tion & de ses maladies.
Par. 1777.

Rob. Perceval, tentam. physiologicum de corde.
Edimb. 1780.

(1).
[Seite 49]

Voyez sur l’orifice de la grande veine coro-
naire, Fr. Wolff, dans act. acad. scient. Petrop.
an. 1777.

Et P. Tabarrani, dans atti di siena. T. VI.

(2).
[Seite 49]

Ach. Mieg. Specim. II. obser. botanicarum, &c.
Basse. 1776.

(1).
[Seite 50]

Eustache, Tab. VIII & XVI.

Santorini, Tab. posth. IX.

(2).
[Seite 50]

Eustache, Tab. XVI.

(1).
(2).
[Seite 51]

Ibid.

Morgagni, adversar. anat. I. Tab. IV. – San-
torini, L.C.

(1).
[Seite 52]

Ainsi pensent Weitbrech & quelques autres,
parmi lesquels on distingue Fel. Fontana. Celui-ci a
tenté d’établir son opinion dans un ouvrage intitulé:
Ricerche filosofiche supra la fisica animale. Flor. 1775.

Haller a victorieusement répondu à toutes ses
objections, & plus récemment Hebenstreit, qui a
traduit son ouvrage en langue vulgaire.

(1).
[Seite 53]

Voyez act. acad. scient. Petropol., sur-tout les
années 1780 & 1781. On y traite sort bien de la
texture cartilagineuse du coeur, des filets cartilagi-
neo-osseux, & de leur distribution à la base du coeur.

(2).
[Seite 53]

Ruisch., thes. anat. IV, Tab. III.

(1).
[Seite 54]

Je n’ai ouvert aucun animal, qui m’ait offert
plus clairement ce phénomène, que le serpent d’eau
ou le serpent à collier. Cette espèce est très-com-
mune dans les forêts voisines de notre ville; je m’en
procurois quelquefois qui avoient quatre pieds de
longueur, & les disséquant vifs, j’apercevois facile-
ment leur coeur s’étendre au moins de deux lignes
à chaque diastole.

(1).
[Seite 55]

Je suis néanmoins convaincu que le raccour-
cissement du coeur à chaque systole, ne lui est pas
indispensablement nécessaire. Entr’autres motifs, sur
lesquels repose ma conviction, je puis citer un coeur
de canard, dont m’a fait présent mon ami Michel.
Parfaitement ossifié de sa base à son sommet, seu-
lement charnu dans ses parties latérales, il ne pou-
voit que se resserrer, & ce resserrement lui suffisoit
pour exprimer de son intérieur le sang qui y étoit
contenu,

(1).
[Seite 56]

Mes observations ne diffèrent presque pas de
celles que Heberden a faites en Angleterre (*). On
les trouve consignées dans médical transact. T. II.

(*) Elles se rapportent aussi, à fort peu de chose
près, à celles qui ont été suivies en France. Pour
trouver des différences plus marquées, il faut
opposer entr’eux des climats, où la température
varie d’un beaucoup plus grand nombre de degrés.
Note du trad.

(1).
[Seite 57]

Cette observation se concilie fort bien, avec
la lenteur qu’offre le pouls des animaux qui passent
l’hiver dans un état d’engourdissement soutenu. C’est
ainsi qu’on compte jusqu’à 150 battemens par mi-
nute, durant le cours de l’été, dans le pouls du
mulot; & à peine 50 durant l’hiver, pendant le
même espace de temps. Sulzer, naturgesch. des hams-
ters.

(1).
[Seite 58]

Il arrive quelquefois que le ventricule droit,
surchargé par une congestion extraordinaire de sang
veineux, le paralyse avant le gauche; je l’observai
il y a peu, en faisant l’ouverture d’un lapin vivant.
D’abord les battemens de son coeur furent très-dé-
sordonnés, ce qui n’est pas étonnant dans un animal
aussi craintif; bientôt les ventricules se contractoient
à peine une fois, quand les oreillettes avoient déjà
subi quatre mouvemens de systole; enfin, le ventri-
cule droit cessa de battre, & le gauche continuoit
à se mouvoir. Huit minutes s’étant écoulées ainsi, je
coupai le coeur dont la partie gauche s’agitoit en-
core, je le plongeai dans l’eau froide, & l’ayant
nettoyé de tout le sang qu’il renfermoit, ce côté
devint également immobile. Trois minutes après,
je plaçai la paume de ma main chaude sur cet or-
[Seite 59] gane qui ne donnoit plus aucun signe d’irritabilité;
alors le ventricule gauche reprit ses mouvemens &
les conserva durant plusieurs minutes, quoique le
droit & les deux oreillettes demeurassent absolument
immobiles.

La célèbre expérience que fit Haller, pour trans-
porter au ventricule gauche la prérogative d’être
l’ultimum moriens, expérience qui consiste dans la
ligature des deux veines caves, & la section de
l’artère pulmonaire d’un animal vivant, se rapporte
au chapitre suivant.

(1).
[Seite 59]

On pardonne aisément à la physiologie du
siècle d’Erasistrate, d’avoir erré sur la cause de ce
phénomène. Mais comment se peut-il, que de notre
temps il ait existé un homme qui n’ait pas rougi
de renouveler cette erreur, & de la défendre avec
l’opiniâtreté la plus soutenue? entr’autres ouvrages
écrits pour la réfuter, on peut consulter Moscati:
Osservaz. ed esper. sul sangue fluido è rapresso, &c.
Mil. 1783.

(1).
[Seite 60]

Sabbatier, mém. sur l’inégale capac. du coeur, &c.
Par. 1772.

(2).
[Seite 60]

Après la mort, le péricarde a beaucoup plus
d’étendue que le coeur n’a de volume; sans doute,
parce que celui-ci est alors vide du sang qui le
tuméfioit précédemment.

Il est plus que probable que dans l’état de vie,
les proportions sont plus exactes. Le coeur ne laisse
pas d’être également libre dans ses mouvemens,
soit parce que le péricarde se prête à sa dilata-
tion, soit parce que ce viscère ne remplit ses ca-
vités que les unes après les autres. Note du trad.

(3).
[Seite 60]

Haller, elem. phis. T.I.

(4).
[Seite 60]

Il est étonnant de voir combien les anato-
mistes sont divisés sur l’existence du péricarde dans
le porc-épic. Les uns, parmi lesquels on compte Lan-
cisy, Haller,
&c. la nient absolument; les autres,
tels que Blasius, Peyer, Harder & surtout Oct. Toz-
[Seite 61] zetti, la défendent avec non moins d’ardeur. Duverney
a pris le milieu entre ces deux opinions extrêmes;
jl pense que dans cet animal le médiastin en fait
l’office. Quant à moi, j’ai toujours observé dans
cette espèce, un péricarde très-mince & fort irré-
gulier que formoit une expansion du médiastin; quel-
quefois même il étoit si ténu, qu’il méritoit à peine
le nom de péricarde.

(1).
[Seite 61]

Sandifort, natuur-en-genees-kundige bibliot.
T. II.

(2).
[Seite 61]

La quantité de cette humeur est un nouveau
sujet de division entre les anatomistes. Il est vrai
qu’ordinairement elle est très-abondante, parce
qu’ordinairement les recherches sont faites sur des
sujets malades ou languissans, ou morts depuis un
trop long intervalle. Mais, lorsqu’on ouvre des ani-
maux sains, & récemment tués, on n’en trouve que
ce qu’il faut pour lubréfier les parties sur lesquelles
elle se dépose. Note du trad.

(1).
[Seite 63]

Hales, pour mesurer la hauteur à laquelle
peut s’élever le sang chassé par les vaisseaux arté-
riels, leurs adapta de longs tubes de verre, pro-
pres à recevoir ce fluide selon la direction de son
jet. Cette expérience & toutes celles qu’a imaginées
ce grand homme, vraiment né pour éclairer la phy-
siologie, sont très-belles. Cependant, si on veut les
faite servir a l’estimation des forces du coeur, il
faut avoir égard au poids de la colonne de sang,
qui renfermée dans le tube, porte sur le ventricule
gauche & le surcharge, &c. Hales estimoit s’éle-
ver à sept pieds & demi de haut le sang jaillissant
d’une carotide humaine; il donnoit quinze pouces
quarrés à la surface du ventricule gauche; il cal-
culoit en conséquence, que la colonne qui pesoit sur
le ventricule, égaloit environ cinquante-une livres.
Statical essais. T. II. Lond. 1733.

(1).
[Seite 64]

Voyez ind. lit. Gott. dans lequel Haller ré-
pond aux objections de Fontana, qui ne disputoit
pas au coeur cette propriété, mais la resserroit dans
des bornes trop étroites.

(1).
[Seite 65]

Une grande preuve que cette force n’est pas
la cause principale des mouvemens du coeur, c’est
qu’il se contracte encore, après avoir été séparé du
corps & divisé par morceaux. Note du trad.

(1).
[Seite 67]

Car. Wern. Curti, de monstro hum. cum in-
fante gemel.
L.B. 1762.

(1).
[Seite 68]

De Lamure, recherches sur la cause de la puls.
des art.
, &c. Montp. 1769.

(1).
[Seite 69]

Une expérience bien connue, paroît démon-
trer que le sang n’agit pas sur les artères comme
stimulant. Si, après avoir ouvert selon sa longueur
une artère principale, on y insère un tuyau mince,
& d’un calibre à peu près égal, les pulsations se
soutiennent dans toute l’étendue de cette portion,
quoiqu’elle ne soit plus soumise à l’impression du
sang. Elles s’éteignent au contraire dans toute la
portion inférieure, quoiqu’elle continue à diriger
immédiatement le cours du sang, si on fait une
étroite ligature sur celle qui renferme le tuyau. Note
du trad.

(1).
[Seite 70]

Il est constant que le coeur n’est pas la seule
cause du mouvement des humeurs, & que chaque
partie du systême vasculaire a ses forces propres
& indépendantes. Si on fait la ligature des gros vais-
seaux, la circulation du sang se soutient dans les
petits, à-peu-près comme dans l’état ordinaire. Note
du trad.

(1).
[Seite 72]

Malpighy est le premier qui ait exactement
décrit la texture des poumons. Voyez ses lettres à
Borely.

Hildebrant a recueilli une excellente notice de ces
viscères, dans de très-bonnes sources. diss. de pulm.
Gott. 1783.

(2).
[Seite 72]

On sait quelle éclatante victoire Haller a
remportée sur Hamberger, qui s’obstinoit à défendre
soit l’élasticité de l’air contenu dans la poitrine, soit
l’antagonisme des muscles intercostaux internes &
externes.

(1).
[Seite 73]

Keil qui appliquoit à tout son génie mathé-
matique, en comptoit dans chaque poumon plus de
1744000000.

(1).
[Seite 74]

Lieberkunh, non moins outré que Keil, esti-
moit la superficie des cellules aériennes des pou-
mons, égale à 1500 pieds quarrés.

(1).
[Seite 75]

Eustache, Tab. XXVI.

(1).
[Seite 76]

Portal, mém. de l’acad. des sciences de Paris.
an. 1780.

(2).
[Seite 76]

Ce n’est que dans le siécle passé, qu’on a
commencé à découvrir le vrai mécanisme des mou-
vemens du thorax.

Swammerdam, tract. de resp. usuque pulmonum.
L.B. 1677.

(1).
[Seite 77]

L. VIII. cap. 8. Mais tout l’ouvrage est trop
précieux pour ne le pas lire en entier.

(1).
[Seite 78]

Une preuve de l’antiquité de cette dénomina-
tion, se tire du livre de flatibus, attribué à Hipo-
crate.
Quel qu’en soit l’auteur, on y distingue trois
sortes d’alimens nécessaires à l’homme, l’eau, les
solides & l’air; & on regarde ce dernier, désigné
sous le nom de pabulum vitae, comme le plus im-
portant, parce qu’on n’en sauroit être privé durant
le plus court intervalle, sans courir un danger im-
minent de mort.

(2).
[Seite 78]

Description of the pyramids in Aegipt. Lond.
[Seite 79] 1646. On trouve dans cet ouvrage, les détails de la
dispute qui s’engagea entre Harvée & Gréaves prof.
d’astron., sur la nécessité de renouveler l’air vital.

(1).
[Seite 80]

L’air fixe & l’air phlog. ne paroissent différer
entr’eux que du plus au moins. Kirwan appelle air
fixe, celui qui n’a que ce qu’il lui faut de phlogisti-
que; & air phlogistique, celui qui abonde en phlo-
gistique. Je suis convaincu de l’exactitude de cette
distinction, par les expériences de Jachtenberg, mon
collègue & mon ami.

(2).
[Seite 80]

Pour éprouver combien de fois un animal
pouvoit respirer une quantité donnée d’un même
air, je fis choisir trois chiens également forts & vi-
goureux J’adaptai à la trachée-artère ouverte du
premier, une vessie contenant environ vingt pouces
cubes d’air déphlogistiqué; il périt en quatorze minu-
tés. Je plaçai au second la même vessie, mais rem-
plie d’air atmosphériqué; il périt en six minutes. Je
l’attachai enfin au troisième, après l’avoir remplie
d’air phlogistiqué; celui-ci ne vécut que quatre minu-
tes. Je chassai ensuite cet air phlogistique dans un ré-
cipient convenable, où il produisit les effets dont
j’ai parlé dans le texte.

[Seite 81]

J’ai décrit & fait graver les instrumens dont je
me sers pour ces expériences, dans bibliot. medix.

(1).
[Seite 81]

Une grande partie de ces phénomènes dont
la physique & la physiologie se sont si avantageu-
sement servis, l’une pour éclairer sa théorie sur les
airs artificiels, l’autre pour expliquer le mécanisme
de la respiration, étoient déjà connus il y a plus de
cent ans, d’un célèbre médecin, J. Mayow, dont j’ai
lu & relu avec le plus grand plaisir, le traité inti-
tule: De sal-nitro & spiritu nitro-aereo.

(2).
[Seite 81]

Il n’est plus seulement probable, mais dé-
montré que la partie la plus pure de l’air atmos-
phérique, introduite dans l’organe pulmonaire, y est
absorbée par le sang; qu’elle y absorbe ensuite elle-
même un principe charboneux, l’acide charboni-
que; & se combine avec l’air inflammable, l’hy-
drogène. Ce n’est qu’après avoir été ainsi dénaturée,
qu’elle est rejetée par l’expiration. Il est également
démontré qu’un autre usage de la respiration consiste
à faire passer dans le sang, & avec lui dans tous
les organes, une partie de la chaleur de l’air vital.
Note du trad.

(1).
[Seite 83]

Elle appartient plus à Vesale qu’a Hook, mais
celui-ci l’a renouvelée & perfectionnée.

(2).
[Seite 83]

Harvey, exerc. de gener. animal. Lond. 1651.

(3).
[Seite 83]

Daoustenc, de respiratione. Lyon, 1743.

(1).
[Seite 84]

Fabr. d’Aquapendente, de visione, voce &
auditu.
Pad. 1603.

(2).
[Seite 84]

Eustache, Tab. XLII.

(3).
[Seite 84]

Albinus Tab. muscul. Tab. X, XI & XII.

(1).
[Seite 85]

Vicq d’Azir, mém. de l’acad. des sciences de
Paris.
an. 1779.

(2).
[Seite 85]

L’exemple des peuples les plus incultes,
prouve que le larynx de l’homme est assez flexible
pour rendre tous les sons des différent animaux.

(1).
[Seite 86]

Il l’est chez les Ethiopiens, les Groenlandais,
les habitans du Canada, de la Californie, du Kams-
cat, &c. J’ai entre mes mains des témoignages de
voyageurs très-dignes de foi, si nombreux, que je
ne puis ne pas regarder comme un paradoxe l’asser-
tion de Rousseau, avançant dans son dictionnaire de
musique, que le chant n’est pas naturel à l’homme.

(2).
[Seite 86]

Les lèvres concourant tellement à l’articula-
tion des mots, que la seule inspection de leurs mou-
vemens peut suppléer au défaut de l’oreille. C’est
ainsi qu’en exerçant les yeux des sourds & des
muets de naissance, on leur apprend à entendre &
à parler. Note du trad.

*).
[Seite 87]

La langue français n’admet pas cette der-
nière.

*).
[Seite 88]

La réunion de ces trois lettres lui est éga-
lement étrangère.

*).
[Seite 90]

32e. de Réaumur.

(1).
[Seite 90]

Il est évident que nous ne considérons pas ici
les animaux qui dorment pendant l’hiver, dans
leur état de sommeil; la plupart des fonctions de leur
économie étant alors ou suspendues ou très-languis-
santes, leur chaleur naturelle est plus qu’attiédie.

(1).
[Seite 91]

La chaleur de l’été, même en Europe, ex-
cède quelquefois le degré de la chaleur humaine.
C’est ce que j’ai éprouvé le 3 août 1783, vers le
midi, étant alors dans le canton de Lucerne, avec_...
Schngder de Wartensec. Nous vîmes le mercure du
thermomètre de Fahreinhet, quoique placé à l’ombre,
s’élever au-dessus du centième degré; & cependant
il n’atteignoit que le quatre-vingt-dix septième, lors-
que je l’appliquois sur le corps humain.

(2).
[Seite 91]

Cette opinion de Boerhaave, vient de trouver
un nouveau défenseur dans Crell. Voyez sa traduc-
tion des dissertations de Dobson & Blagden. Helmst.
1778.

(1).
[Seite 92]

Il y a dix-sept siécles que déjà Galien en
avoit jeté les fondemens. Note du trad.

(2).
[Seite 92]

Consultez les Lovoisier, les Fourcroy, les
Chaptal, &c.; & jugez Crawford. Note du trad.

*).
[Seite 92]

Le calorique.

(1).
[Seite 94]

On estime que la différence des degrés de
chaleur, entre le sang veineux & le sang artériel,
est de dix à onze et demi; Galien l’avoit déjà ob-
servé; car il dit en plusieurs endroits de ses ouvra-
ges, que le ventricule gauche du coeur est plus chaud
que le droit.

(2).
[Seite 94]

De Haën, a vu chez différens sujets la cha-
leur naturelle se soutenir, quoique le mouvement
des artères fût éteint; ou s’éteindre elle-même, quoi-
que la force du pouls se soutînt. Note du trad.

(1).
[Seite 95]

Le fait est, que la quantité de chaleur pro-
duite, est d’autant plus grande que le froid relatif
de l’atmosphère est plus considérable.

Au contraire, dans les climats très-chauds, on
observe que le thermomètre baisse, lorsqu’il est ap-
pliqué sur l’homme. Note du trad.

(1).
[Seite 97]

L’épiderme beaucoup plus épais de certains
grands animaux, est composé de fibres, qui par leur
direction verticale imitent la texture d’un agaric. Sa
surface interne paroît être poreuse, & reçoit un
grand nombre de filets comme de soie, que lui en-
voie la peau étendue sous elle. On voit sensiblement
cette disposition dans les tégumens préparés de la
baleine du Groenland. On l’observe aussi quelquefois
chez des sujets affectés de certaines maladies cuta-
nées. Edwards’s cite l’exemple d’un Anglais qu’on
appeloit Porc-Epic, à raison d’une affection de la
peau qui étoit héréditaire dans sa famille. Mais,
pour prendre une idée de cette texture de l’epi-
derme, il suffit de considérer celle des durillons qui
se forment aux doigts des pieds, ou des callosités
dont le talon des adultes, ou de ceux qui marchent
nuds-pieds, est recouvert.

(2).
[Seite 97]

G. Hunter, médical. obs. and inquir. T. II.
[Seite 98] Mais je ne saurois admettre, avec lui, que ces
fibrilles sont les vaisseaux excréteurs de la matière de
la transpiration insensible.

(1).
[Seite 98]

Malpighi, Tetras anat. épistolar. Boul. 1665.

(2).
[Seite 98]

Mon ami Sommering, est le premier qui ait
tenté cette espèce de dissection, & je lui dois une
préparation en ce genre, qui ne contribue pas peu à
orner ma collection anatomique.

(3).
[Seite 98]

Albinus, diss. de sede & causâ color. aeth., &c.
L.B. 1737.

(1).
[Seite 99]

J’ai déjà traité de ces variétés dans mon ou-
vrage de gen. hum. variet. nativâ.

(1).
[Seite 100]

I. Ludwig, de humore cutem inungente. Leips.
1748.

(2).
[Seite 100]

Lyonnet, lettre à M. Lecat.

(3).
[Seite 100]

Witthoff, de pilo hum. Duisb. 1750.

(1).
[Seite 101]

King, voyage to the pacific ocean, &c.T. III.

(1).
[Seite 102]

Ce qui me fait croire que leur bulbe sert plus
à leur insertion qu’à leur nutrition, c’est que les
touffes de poils qu’on trouve dans les mélicéris ou les
stéatomes de l’épiploon, & sur-tout dans les ovaires,
manquant de bulbes, ne sont point plantés, mais
seulement contenus dans cette espèce de suif ou de
miel.

(1).
[Seite 103]

Ars. Sanctor. Sanctor, de staticâ medicinâ aph.
Ven. 1624.

Boerhaave préféroit l’édition originale de ce célè-
bre ouvrage, même aux aphorismes d’Hypocrate.

(2).
[Seite 103]

Je ne sais trop sur quoi notre auteur se fonde
pour établir cette différence. Jusqu’à ce que la chy-
mie ait prononcé entre nous, j’appellerai transpira-
tion
l’évacuation qui se fait par la peau sous forme
insensible; & sueur, celle qui s’en échappe sous forme
sensible. Note du trad.

(1).
[Seite 104]

L’odeur que transpirent les Ethiopiens, & sur-
[Seite 105] tout les Angolois, est vraiment particulière. J’ai eu
plusieurs fois occasion de l’observer sur des sujets
d’âge & de sexe différens.

(1).
[Seite 105]

Ce dernier caractère étant une preuve d’ana-
logie, on en a conclu, que la transpiration cuta-
née & l’urine, étoient deux fluides de même nature.
Note du trad.

(2).
[Seite 105]

La chaleur animale est entretenue dans les pre-
miers par la mère, à laquelle ils sont unis au moyen
du placenta; elle leur transmet le feu vital, & reçoit
d’eux le sang phlogistiqué. Ils n’ont donc besoin ni
de respirer, ni de transpirer; il n’en est pas de même
du poulet, quoique ces deux fonctions ne lui soient
pas plus nécessaires. La mère, en le couvant, lui com-
munique le feu vital; & le phlogistique, à l’approche
de cette matière ignée, se dégage, & s’échappe par
les pores de la coquille, qu’on sait être fort péné-
trable, & susceptible de transpiration, sur-tout quand
on l’expose à un certain degré de chaleur.

(1).
[Seite 106]

Tacconi a conservé la mémoire d’un exemple
en ce genre vraiment remarquable, dans comm. insti-
tut. bonon.
T. VI.

(1).
[Seite 107]

J.B.V. Helmont, écrivain de mérite, quoi-
que paradoxal, pensoit déjà ainsi, de flatibus. 1682.

(2).
[Seite 107]

Eustache, Tab. XVIII.

Vicq-d’Azir, mém. de l’acad. des sciences de Paris,
& planches anat.

(1).
[Seite 108]

Dissert. de basi enceph. Gott. 1778.

(2).
[Seite 108]

On observe dans plusieurs espèces d’animaux
mammaires, une lamine osseuse placée entre les deux
[Seite 109] feuillets de la tente. C’est à tort que Chéselden avance
qu’on ne la trouve que dans les ferae; je l’ai vu moi-
même dans des chevaux & des phoques, &c. Mais
quel est son usage? Je suis bien loin de croire à celui
qu’on lui attribue communément, & de penser avec
Nihell, que propre aux mammaires légers & bon-
dissans, elle est destinée à protéger leur cervelet;
puisqu’elle existe dans l’ours & autres animaux aussi
pesans, puisqu’au contraire le chamois, très-vite à la
course, en manque.

(1).
[Seite 109]

Taube, de sanguinis ad cereb. tendentis indole.
Gott. 1747.

(1).
[Seite 111]

C’est à M. Schlichting, que nous devons la
première description exacte des mouvemens du cer-
veau. Voyez ses mém. présentés à l’acad. des sciences
de Paris,
T.I.

Haller en a éclairé les causes par un grand nom-
bre d’observations. Voyez experim. circa motum ce-
rebri,
&c. de Walstorf son disciple.

(2).
[Seite 111]

Je désirois depuis long-temps trouver l’occa-
sion d’observer le mouvement du cerveau sur un
adulte; elle s’est enfin présentée à moi. Un jeune
homme de dix-huit ans étoit tombé de fort haut sur
le front, avant d’avoir atteint sa cinquième année;
[Seite 112] l’effet de sa chûte fut une fracture au côté gauche de
la suture coronaire, avec brisement des os & perte
de substance très-considérable. Quand je le vis, la
plaie étoit cicatrisée, mais au dessous de la cica-
trice, on sentoit une fosse immense, plus profonde
encore quand il dormoit, ou lorsqu’après avoir ins-
piré, il retenoit son haleine; elle s’applanissoit dans
l’état de veille, & même se changeoit en une tumeur
fort volumineuse, quand il faisoit une grande expi-
ration. On observoit de plus dans le fond de cette
fosse, un battement très-marqué, & parfaitement
synchrone aux autres battemens du systême artériel,
tel sans doute, que ceux qui en avoient imposé à
Petriole, Vandelle, & autres adversaires de Haller,
pour le mouvement du cerveau. Je crois devoir ajou-
ter à cette observation, qu’un autre effet de la lésion
qui a voit affecté le côté gauche, fut une hémiplégie
du côté droit.

(1).
[Seite 113]

Parmi les nombreux témoignages qu’on allègue
de part & d’autre, pour établir ou nier la sensibilité
des tendons, & de quelques autres parties blessées. je
pense qu’il faut faire un bien plus grand cas des té-
moignages négatifs que des positifs; parce qu’il n’est
rien de si illusoire que le jugement d’un malade
sur le siége de sa douleur. Sans parler d’un grand
nombre de sujets qui la rapportent à un membre
amputé, il n’est pas rare de voir des malades, se
plaindre d’une douleur très-long-temps fixée en un
point déterminé delà tête, où cependant la dissection
ne reconnoissoit après leur mort aucune cause capa-
ble de produire cet effet: on la trouvoit au con-
traire, dans l’affection chronique d’une partie très-
éloignée. De-là je conclus, combien peu on doit se
fonder sur les témoignages de la plupart de ceux
qui, infectés d’un vice syphilitique, se plaignent sans
cesse d’une douleur qu ils prétendent ressentir dans
les os; tandis que l’expérience atteste qu’ils sont in-
sensibles, ainsi que la moelle, sur laquelle j’ai vu ap-
pliquer en vain tous les moyens d’irritation possibles,
& les malades interrogés répondre n’éprouver au-
cun sentiment de douleur.

(2).
[Seite 113]

Je suis chaque jour plus convaincu que ce n’est
qu’après avoir multiplié les précautions, réitéré les
essais, & varié les sujets de recherches, qu’on peut
tirer des inductions physiologiques des expériences
faites sur des animaux vivans. J’ai voulu éprouver la
sensibilité de la moelle, sur différentes espèces de
quadrupèdes & d’oiseaux; & il s’en faut de beau-
coup que mes observations aient été concordantes.
A la vérité, la plupart d’entr’eux supportoient la
destruction totale de cette humeur graisseuse, sans
donner aucun signe de douleur; mais plusieurs,
[Seite 114] quoique traités de la même manière, entroient en
convulsions, & poussoient des cris horribles, au
seul contact de l’instrument. J’ignore si ces témoigna-
ges de sensibilité étoient excités dans ceux-ci, par
le souvenir des douleurs qu’ils venoient d’éprouver,
ou si des douleurs plus vives avoient aboli le sen-
timent dans les premiers.

(1).
[Seite 114]

On pourroit encore dire que les forces toni-
ques uniformément distribuées sur toute l’étendue du
cerveau, maintiennent un état d’équilibre entre ses
deux hémisphères mais que cet équilibre étant
rompu par une cause de lésion, le côté blessé, trop
[Seite 115] affoibli pour modérer le ton de l’autre, lui permet
de se contracter, de comprimer l’origine des nerfs, &
de décider une paralysie dans la région qu’il domine.
Note du trad.

(1).
[Seite 116]

Tissot, traité des nerfs, &c. &c.

(1).
[Seite 117]

L’état graveleux de la glande pinéale, ob-
servé chez quelques maniaques, paroissoit être une
preuve en faveur de l’hypothèse de Descartes; mais
une observation plus soutenue a découvert en elle
les mêmes degrés d’altération dans des sujets très-
sains, quoique fort jeunes.

(1).
[Seite 122]

Il est des personnes dont les sens, d’ailleurs
excellens, sont presque nuls pour certains objets
extrêmement sensibles. J’ai connu un Anglais,
non moins recommandable par leur subtilité, que
par les rares qualités de son esprit: il avoit sur-tout
un odorat très-fin, & ne prenoit point de tabac;
cependant les fleurs du réséda odorant ne fitent jamais
aucune impression sur lui. C’est ainsi que plusieurs
personnes, avec une fort bonne vue, ne distinguent
point telle ou telle couleur.

(1).
[Seite 123]

Tels sont plus particulièrement les singes, les
[Seite 124] babouins, la plupart dès cercopithèques, & quel-
ques autres animaux quadrumanes, dont les extrémités
des doigts sont très molles, & empreintes des mêmes
linéamens que celles des doigts de l’homme.

(1).
[Seite 124]

Ce tissu est noir chez les Ethiopiens.

(1).
[Seite 125]

J’ai ordinairement remarqué que ce tissu étoit
bigarré, même sur la langue & dans l’arrière-bouche
des chiens & des brebis dont la peau commune étoit
tachée de diverses couleurs.

(1).
[Seite 126]

Voyez la belle description de la langue d’un,
homme vivant, faite par Haller, & insérée dans le
dict. encycl.

(1).
[Seite 127]

Le petit ouvrage de Schneider, de osse cribri-
formi,
&c., fait véritablement époque dans l’histoire
de la physiologie; non-seulement parce que c’est le
seul traité ou les fonctions de l’odorat soient bien ex-
posées, mais aussi parce qu’il combat l’erreur des
Anciens, qui regardoient le nez comme l’émonctoire
du cerveau.

(1).
[Seite 128]

J’ai prouvé ailleurs par des argumens tirés de
l’ostéogénie, de l’anatomie composée, & de plusieurs
phénomènes pathologiques, que les sinus étoient affec-
tés à l’odorat; & très-peu, si toutefois ils le sont,
à la voix & à la parole. Prolus. de sinibus front.

(1).
[Seite 129]

Loder, dans observ. tum. skirr., &c., décrit
une anosmie, suite de la compression des nerfs de la
première paire. On pourroit lui opposer l’observa-
tion de Mery, qui a vu l’odorat se soutenir avec une
altération prodigieuse de ces mêmes nerfs. Mais ce
qui me porte à les regarder comme les principaux
instrumens de ces sens, c’est l’étude de l’anatomie
comparée. J’ai constamment vu que dans tous les
animaux dont l’odorat est très-fin, v.g., l’éléphant,
l’ours, le chien, les bissulques ruminans, l’héris-
son &c. la lame horizontale de l’os cribleux étoit
plus ample, & les canaux qui y sont pratiqués, beau-
coup plus nombreux.

(1).
[Seite 130]

Chez l’homme & chez tous les animaux mam-
maires, le développement des fosses nasales, est en
raison de la subtilité de l’odorat. Voici quelques faits
qui, comparés avec ceux de la note précédente, ne
laissent aucun doute à cet égard. Ils sont tirés de
peuples sauvages, dont on sait que l’odorat l’emporte
de beaucoup sur le nôtre.

J’ai dans ma collection des différentes variétés de
crânes humains, celui d’un chef d’Indiens de l’amé-
rique septentrionale, qui fut décapité il y a environ
trente ans à Philadelphie. Michaélis l’en apporta &
m’en fit présent. Le développement de les fosses
nasales est vraiment prodigieux. Les cornets moyens
ressemblent à des ampoules dont on auroit largement
distendu les parois, en y introduisant une grande
quantité d’air. Ils renferment des sinus particuliers
déjà observés par Santorini, mais tels, qu’on n’en a
jamais vu d’aussi vastes. J’ai encore trois crânes d’E-
thiopiens qui offrent la même singularité: quoique
ces trois pièces diffèrent beaucoup entr’elles, on
remarque dans les narines un égal degré d’amplitude.
Sommering a fait la même observation sur d’autres
sujets de cette contrée.

[Seite 131]

Ces phénomènes de structure s’accordent parfaite-
ment avec ce que nous apprennent sur la subtilité de
l’odorat des sauvages, des témoins vraiment dignes
de soi.

(1).
[Seite 132]

J’ai prouvé dans un traité d’ostéologie, que
le quatrième qu’on avoit admis depuis Silvius, &
qu’on avoit appelé os lenticulaire, ne se trouve point
dans les adultes bien conformés.

(1).
[Seite 133]

Ce sont les diverticulae de Meckel.

(1).
[Seite 134]

Linn, descript. anat. oculi hum. Gott. 1755.

(1).
[Seite 137]

Comm. soc. scient. Gott. T. VII.

(2).
[Seite 137]

C’est dans l’épaisseur de ce bord que se dirige
le canal circulaire chez les animaux bissulques.

Fontana est le premier qui l’ait observé, dans son
ouvrage sur le venin de la vipère; mais Adolphe
Murray
en a donné une description beaucoup plus
exacte, dans nov. act. Uspsal. T. III.

(1).
[Seite 143]

J’ai traité ce point physiologique fort au long
dans mon ouvrage, de generis hum. variet. nativâ, &
dans ma dissertation de oculis leucaethiopum.

(1).
[Seite 144]

M. Mariotte pensoit que l’organe immédiat de
la vue, n’étoit point la rétine, mais la choroïde.
L’observation a prouvé contre lui: ce n’est point la
choroïde qui est affectée dans la goutte sereine, ce
sont les nerfs optiques, ou plutôt la rétine, qui en
est une expansion. Note du trad.

(2).
[Seite 144]

Je parle ici de l’oeil humain; car il est des
[Seite 145] animaux tels que la phoque & le porc-épic, chez
qui le nerf optique s’implantant dans le centre du
globe, on ne peut distinguer l’axe réel de l’axe imagi-
naire.

(1).
[Seite 147]

Consultez les oeuvres de Bonnet, & principa-
lement son essai de psychologie.

(1).
[Seite 153]

Winslou, mém. de l’acad. des sciences de Paris.
1739.

(1).
[Seite 156]

Les tendons différent beaucoup moins des
muscles par leur tissu, que par leurs propriétés
particulières; cependant, quoique les fibres tendi-
neuses ne paroissent être ni élastiques, ni irritables,
ni contractiles, &c. Je ne sais trop, s’il est aussi évi-
demment démontré que le pense notre auteur,
qu’elles ne sont point une continuation des fibres
musculaires. Ne se pourroit-il pas que, vraiment
douées des mêmes propriétés, on ne pût les saisir
en elles, à raison de leur texture plus dure, plus
sèche & plus serrée? Note du trad.

(1).
[Seite 157]

Si nous surnommons ainsi l’irritabilité, ce n’est
pas que Haller, cette brillante lumière de l’école de
Gottingue, l’ait le premier découverte; puisque très-
souvent il citoit lui-même en sa faveur, l’autorité
de ceux qui, depuis Glisson jusqu’à lui, l’avoient pro-
fessée. Mais il est véritablement le premier qui se
soit pénétré de son importance, qui l’ait cherchée
dans l’animal lui-même; & sur-tout qui ait dévoilé
ses relations intimes avec notre économie entière.
Ce surnom la distingue encore de l’irritabilité de
Gaubius, ou plutôt du surcroît de sensibilité qu’un
état maladif introduit dans nos solides.

(1).
[Seite 159]

C’est ici principalement que se rapportent les
fameuses disputes qui se sont élevées sur l’action des
nerfs, relative au mouvement du coeur; sur la ma-
nière dont l’opium affecte le coeur & le systême
nerveux, &c.

(1).
[Seite 161]

Si on lie toute autre artère, la perte du mou-
vement dans le muscle auquel elle se distribue, n’est
pas à beaucoup près si prompte. La raison de cette
différence, est que la ligature de l’aorte inférieure
suspend la circulation du sang, non-seulement vers
les extrémités, mais aussi vers la moelle de l’épine.
Note du trad.

(1).
[Seite 163]

Jon. Goddard avoit déjà proposé cette expé-
rience à la soc. des scienc. de Londres.

(2).
[Seite 163]

L’expérience de Glisson ou de Goddard, con-
siste à tenir un membre plongé dans un vase d’eau,
& à faire alternativement contracter & relâcher les
puissances musculaires destinées à le mouvoir; le
fluide baisse pendant leur contraction; il s’élève au
contraire, lorsqu’elles se relâchent. Cette expérience,
sans être démonstrative, semble en effet, prouver
que l’érat de contraction d’un muscle ôte quelque
chose à son volume. Note du trad.

(1).
[Seite 164]

Borelli, de motu animalium. Rom. 1680.

(1).
[Seite 168]

On ne sauroit croire, si une expérience
l’attestoit trop souvent, combien il est dangereux
de céder à l’assoupissement qui saisit & subjugue en
quelque sorte les personnes exposées à un froid
très-vif. La mort dont il s’accompagne, est à la vérité
fort douce, mais elle est inévitable.

(1).
[Seite 169]

On a vu des personnes dormir pendant pin-
sieurs jours consécutifs, & ce long sommeil se renou-
veler périodiquement durant plusieurs années; mais
cet état extraordinaire étoit véritablement ou le signe
ou l’effet d’une maladie. Note du trad.

(1).
[Seite 170]

Ce qu’il y i de plus étonnant, c’est que parmi
ces adultes, on compte des hommes doués de l’ima-
gination la plus vive. Tel fut le grand Goth. Ephr.
Lessing.
Et moi-même, j’ai connu une femme ro-
buste & très-spirituelle, qui étoit dans ce cas.

(1).
[Seite 171]

Ce qui prouve assez sensiblement l’afflux &
[Seite 172] l’acrimonie de ces humeurs dans le temps de la faim,
c’est qu’en effet, on sent alors une grande quantité
de salive âcre se porter à la bouche; jamais le be-
soin de cracher n’est plus pressant, que lorsqu’on
éprouve celui de manger. On voit chez les animaux
qui ont passé un très-long temps sans le pouvoir satis-
faire, une humeur spumeuse inonder leurs lèvres &
ronger leurs gencives; ils périssent ensuite avec tous
les symptômes de la rage. Au reste, pour adoucir les
impressions que fait sur l’estomac l’acrimonie des sucs
gastriques, il n’est pas nécessaire de lui envoyer des
substances vraiment nourrissantes; des boissons abon-
dantes suffisent; & on a vu des adultes subsister long
temps en ne buvant que de l’eau. Note du trad.

(1).
[Seite 172]

Je crois qu’il est des exemples contre nature,
de personnes qui ont vécu un beaucoup plus long-
temps sans manger; mais je doute sort qu’ils soient
aussi nombreux & aussi extraordinaires qu’on le pense.
[Seite 173] Cette ville nous fournit il y a quelques années celui
d’une jeune fille qui, disoit-on, avoit passé sept ans sans
prendre aucune espèce de nourriture; elle fut frappée
de mort subite, on fit l’ouverture de son cadavre, &
fouillant dans les voies alimentaires, on se convain-
quit qu’elle étoit morte d’une indigestion. De nou-
veaux renseignemens confirmèrent alors, non-seule-
ment qu elle mangeoit, mais qu’elle se livroit chaque
jour à tous les excès de la débauche. Note du trad.

(1).
[Seite 175]

Adanson, mém. de l’acad. des sciences de Paris,
an. 1778.

(2).
[Seite 175]

Pigate, reflessioni sul vitto pitagorico. Feltri.
1751.

(3).
[Seite 175]

De Klingstaedt, mém. sur les Samoïedes, &c.
1762.

(4).
[Seite 175]

Kalm, de esquimaux, gente americana. 1756.

(5).
[Seite 175]

Winter, princip. navig. of the english nation.
T. III.

(1).
[Seite 176]

Je dis dans la plupart; car, sans parler de
quelques exemples particuliers que fournissent diffé-
rens sujets, j’ai trouvé dans plusieurs crânes de mo-
mies, ces premières dents épaisses, obtuses, cou-
ronnées, en un mot, presqu’absolument semblables
aux dents molaires. Mais comme les crânes sur les-
quels on observe cette particularité ont en même
temps dans la figure cette forme tranchée, cette phy-
sionomie vraiment caractéristique des anciens Egyp-
tiens, telles que nous les retrouvons dans leurs ido-
les, leurs sarcophages & leurs antiques statues; n’est-
[Seite 177] il pas au moins probable que cette forme de dents
propre à ces peuples, étoit en quelque sorte une
marque de famille, à l’aide de laquelle on pourroit
discerner aujourd’hui les vraies momies de celles qui
ont été préparées dans des temps postérieurs? J’ai
donné plus de développement à cette idée dans
Gottingisch. magaz., an 1780.

(1).
[Seite 178]

Le tartre qui s’amasse autour des dents, & les
calculs qui se forment sous la langue, ne sont autre
chose qu’un dépôt de ces particules terreuses.

(2).
[Seite 178]

La connoissance de cette propriété avoit fait
imaginer à des peuples sauvages, la préparation de
différentes liqueurs vraiment capables d’enivrer, avec-
des racines qu’ils soumettoient auparavant à une lon-
gue & forte mastication. Les habitans du Brésil em-
ployoient à cet effet les racines du manihot; &
ceux du bord de la mer pacifique, les racines du
polvre methysticus.

(1).
[Seite 179]

Différentes expériences attestent qu’une plaie
faite à l’un des canaux salivaires, fournit seule pen-
dant un repas fort court, plusieurs onces de salive.
Note du trad.

(1).
[Seite 180]

On remarque, il est vrai, que la digestion n’est
facile qu’autant que les alimens ont été détrempés
par une suffisante quantité de salive; mais en quoi
consiste la faculté digestive de cette liqueur? Pringle
croyoit que c’étoit en excitant un commencement de
putridité dans les alimens; on est revenu de cette
erreur, & c’est le seul pas vers la vérité, qu’on
ait pu faire. Note du trad.

(1).
[Seite 183]

Ce qui prouve encore que c’est aux contrac-
tions de l’oesophage, & non au poids des alimens,
qu’il faut rapporter la déglutition, c’est qu’il est
également possible d’avaler, le corps étant non-seu-
lement placé dans une situation horizontale, mais
renversé & posé perpendiculairement sur la tête.
Note du trad.

(1).
[Seite 185]

Buffon, hist. nat. T. IV.

(1).
[Seite 186]

Il est cependant l’organe qui s’accoutume le
mieux à supporter les poisons les plus actifs; pourvu
qu’on ne les lui administre que par degrés; on peut
lui en confier impunément la plus haute dose: celle
par laquelle on commence, quoiqu’infiniment petite,
le fatigue toujours plus qu’aucune autre: les dernières,
quoique extrêmement fortes, sont à peine sensation
sur lui. Note du trad.

(2).
[Seite 186]

Rahn., mirum inter caput & visc. abdom. com-
mercium,
Gott. 1771.

(3).
[Seite 186]

On peut consulter l’édition de ses oeuvres pu-
[Seite 187] bliée à Genêve en 1783; & la préface de Senebier,
qui rapporte les expériences de M. Gosse, sur la
propriété émétique de l’air atmosphérique, & sur
l’action dissolvante du suc gastrique.

(1).
[Seite 187]

M. Spallanzani a éprouvé qu’il rappeloit même
à leur première intégrité les substances corrompues.
Il a avalé des tubes de bois remplis de viandes gâ-
tées & fétides; ces tubes sortis de son corps, lui
ont offert un résidu parfaitement renouvelé. M. Ju-
rine
l’a appliqué sur des ulcères putrides, & s’est éga-
lement convaincu de sa propriété anti-septique. Note
du trad.

(2).
[Seite 187]

Il agit indistinctement sur toutes les substances
qui lui sont confiées, ne marquant pas plus de pré-
férence pour les végétaux que pour les animaux;
attaquant même les corps métalliques. Note du trad.

(3).
[Seite 187]

Il paroît agir après la mort sur le ventricule
lui-même; le surprenant sans action & sans force.
Il commence à le macérer & à le dissoudre.

(1).
[Seite 189]

L’usage du pylore est de livrer passage aux
alimens dans le duodenum, & de s’opposer à leur
retour dans l’estomac; sa résistance à leur issue,
intervertit l’ordre des mouvemens que cet organe
exerce sur eux; ils se font dans un sens diamétrale-
ment opposé, deviennent anti-péristaltiques, & déter-
minent le vomissement. Note du trad.

(1).
[Seite 190]

Brunner, experim. nova circa pancreas. Amst.
1783.

(1).
[Seite 191]

Figura ductus cujusdam, &c.A.J.G. Wir-
sung. Pad. 1642.

(2).
[Seite 191]

Ce fut en 1642.

(3).
[Seite 191]

Ils sont fort peu connus: tout ce que l’expé-
[Seite 192] rience a appris de ce suc, c’est qu’il se sépare en
très-grande quantité, sans être d’une nécessité indis-
pensable. Note du trad.

(1).
[Seite 192]

Eustache, Tab. XI.

(2).
[Seite 192]

Ils sont très petits relativement au volume du
foie: de-là vient sans doute le peu de sensibilité de
cet organe. Note du trad.

(1).
[Seite 193]

Il suit de cette courte description, que la
veine-porte n’ayant aucun rapport direct avec le
coeur, la circulation qui se fait en elle doit être
excessivement lente; & la lenteur, la cause de la
plupart des maladies qui affectent le foie. Note du
trad.

(1).
[Seite 195]

Dans le boeuf & quelques autres animaux,
on trouve de plus les conduits hepato-cystiques, dont
l’usage est également de transmettre la bile, du foie à
la vésicule. C’est au moins sans fondement (*), que
des physiologistes ont prétendu qu’ils existoient aussi
dans l’homme.

(*) Il est de fait que la vésicule ne laisse pas de
se remplir, quoique le canal cystique soit obstrué.
Note du trad.

(1).
[Seite 198]

Elle admet encore un sel huileux dont on ne
connoît pas la nature, & un arôme particulier qui
lui communique une odeur fort analogue à celle du
musc. Note du trad.

(2).
[Seite 198]

Quoique ces concrétions soient très-variées,
à raison de leur figure, de leur crystallisation, &c;
toutes celles que j’ai examinées, & la ville de Got-
tingue m’en a procuré un très grand nombre, avoient
cela de commun, qu’elles étoient extrêmement in-
flammables, & que leur texture ressembloit en quel-
que sorte à celle du sperme de baleine.

(1).
[Seite 199]

Cette prétendue erreur est aujourd’hui une vé-
rité chymique. Note du trad.

(1).
[Seite 201]

Lobstein, diss. nonnulla de liene sistens. Harb.
1774.

(1).
[Seite 202]

Voyez dans l’ouvrage posthume de Hewson,
intitulé: Experimental inquiries, &c. l’opinion sin-
gulière, mais en même temps paradoxale, que cet
auteur célèbre a émise sur les fonctions de la rate,
dont il prenoit les vaisseaux lymphatiques pour des
conduits excréteurs.

(1).
[Seite 206]

On connoît cependant l’observation de Galien,
sur un sujet auquel il avoit extirpé une portion con-
sidérable de l’épiploon; ce malade, après sa guérison,
éprouvoit un froid très-sensible dans toute la région
abdominale. & étoit obligé de la tenir chaudement
couverte. Note du trad.

(1).
[Seite 207]

Albinus, specimen anat. exhibens novam ten.
hom. intest. description.
L.B. 1724.

(1).
[Seite 208]

Eustache, Tab. XXVII.

(1).
[Seite 209]

Cet auteur en comptoit environ 500,000 dans
l’étendue des intestins grêles.

(1).
[Seite 210]

Elles ressembloient parfaitement à ces tubercu-
les que Sheldon prenoit pour de petites ampoules
remplies de chyle.

(1).
[Seite 212]

Nous avons déjà dit que c’est l’humeur bi-
lieuse qui donne aux matières fécales la teinte obs-
cure qu’elles présentent. On ne peut point distinguer
sa véritable couleur dans le jejunum, parce que
n’ayant encore souffert aucune décomposition, il est
impossible de la discerner elle-même du chymus avec
lequel elle s’est parfaitement combinée. Mais lorsque
par les progrès de la digestion, sa division en deux
parties a été opérée, lorsque sa partie la plus grossière
se concentre & se précipite avec les excrémens,
cette couleur devient apparente, & se communique
aux matières dont elle subit le sort.

Wolff donne une autre raison de ce phénomène:
il pense qu’une nouvelle portion de bile, une por-
tion différente de celle qui circule dans le canal cho-
ledoque, s’exhale de la vésicule du fiel, pénètre dans
[Seite 213] l’extrémité du jejunum, & se répand sur les matières
qui y sont contenues, sans jamais se mêler avec elles,
conséquemment sans perdre sa couleur.

Nous ne sommes point de cet avis, soit parce que
l’exposé que nous venons de faire nous paroît beau-
coup plus satisfaisant, soit parce que nous ne croyons
point que la vésicule permette dans l’état de vie &
de santé, la transsudation à travers ses parois, de la
bile qu’elle renferme, & sa diffusion dans l’intérieur
de la portion intestinale voisine. Il est vrai que les
ouvertures de cadavres faites quelques heures ou
quelques jours après la mort, nous offrent un phé-
nomène à-peu-près semblable; parce qu’alors la
vésicule du fiel sans action & sans forces, ne peut
plus retenir le fluide qui y est contenu; mais, qu’on
ouvre un sujet au moment où il expire, & l’état des
parties se présentera sous un aspect bien différent.

(1).
[Seite 213]

On fait combien les opinions sont partagées sur
l’auteur auquel appartient la découverte de cette val-
vule. Pour moi, je suis persuadé que son existence
étoit parfaitement connue de Fallope, long-temps avant
qu’eussent paru aucuns de ceux qui en ont parlé. Ma
certitude repose sur un manuscrit appartenant à la
bibliothèque de notre société, & dans lequel Fallope
traitant entr’autres choses de l’anatomie du singe,
[Seite 214] s’explique ainsi: ‘“Coeci usus est in simiis ne regur-
gitet cibus ad partes superiores cùm prona ince-
dunt: quodque hic usus sit, signum est, quia si in
rectum aqua immittatur, aut flatus, perveniet in coe-
cum, non transgredietur autem crassa. At, si supe-
riùs immittatur, pertransiet. Ratio est, quia ad
insertionem ilei plicae, sunt duae quae in inflatione
& repletione comprimuntur ut in corde fit, & pro-
hibent regressum, undè nec clysteria possunt pervenire
ad partes illas, & pertransire; ita ut eficiantur per
vomitum in homine, nisi debilibus & morbo existen-
tibus intestinis
”’.

(1).
[Seite 214]

Il est probable qu’il sécrète & verse dans le
coecum, une humeur muqueuse propre à modérer la
[Seite 215] vive impression que feroient sur lui les matières qui
s’y accumulent. Il est au moins de fait, qu’on le
trouve toujours rempli de cette humeur. Note du
trad.

(1).
[Seite 217]

Hewson’s Experimental inquiries into the lym-
phat. system.
Lond. 1774.

(1).
[Seite 220]

De même que les vaisseaux lymphatiques ab-
sorbent dans les gros intestins le suc nutritif qui s’y
porte, de même les vaisseaux lactés aspirent dans les
intestins grêles, lorsqu’ils n’y trouvent plus de
chyle, l’humeur de la lymphe qui y surabonde.

(1).
[Seite 221]

Il est une fort belle expérience qui, de pre-
mier abord paroît favoriser l’hypothèse que nous
rejetons. J’en dois la connoissance à Caldan. Voici
comment elle se pratique: on ouvre un agneau
ou un chevreau, aussitôt après lui avoir donné une
abondante nourriture, & on fait sur lui deux liga-
tures très-serrées; la première, autour du vaisseau
qui dans cet animal tient lieu de la sous-clavière
gauche; la seconde, autour du mésentère à sa nais-
sance, près les vertèbres lombaires; dès-lors, tous
les vaisseaux lactés & lymphatiques compris entre
ces deux ligatures deviennent singuliérement appa-
rens; il en est de même des vaisseaux lymphatiques
qui partent des extrémités inférieures & des vaisseaux
lactés qui se répandent sur le mésentère, entre l’in-
testin & le point de la ligature; mais ces derniers
presqu’aussitôt se désemplissent & disparoissent.

Cette expérience, disions-nous, paroît favoriser
l’opinion de nos adversaires; cependant, si on réflé-
chit un peu plus sur le phénomène qui en resulte,
on sent bientôt, que c’est moins à la retraite du
chyle dans les veines, qu’il faut rapporter sa cause,
qu’au mouvement rétrograde de ce suc dans la cavité
des intestins. C’est par ce mouvement, que Darwin
vient d’expliquer avec succès plusieurs phénomènes
pathologiques. On ne seroit pas fondé à nous oppo-
ser la résistance des valvules; il est de fait non-seu-
[Seite 222] lement, qu’elle n’est pas insurmontable, mais que ces
replis se développent très-imparfaitement, & n’em-
pêchent point au mercure qu’on introduit dans les
vaisseaux lactés, de se porter du haut de leurs troncs,
à l’extrémité de leurs radicules. (*)

(*) Il est une autre expérience évidemment plus
décisive: si, après avoir rempli une portion d’intes-
tin grêle d’un fluide coloré, & étroitement lié les
deux bouts de cette portion, on comprime sur son
milieu; le fluide s’introduit dans les vaisseaux lactés,
& ne passe aucunement dans les veines. Note du trad.

(1).
[Seite 223]

On n’en a point encore découvert dans le cer-
veau; & si l’analogie prouve que ce viscère n’en est
[Seite 224] pas totalement destitué: la difficulté qu’ont à s’y ré-
soudre les différentes collections de fluides non na-
turelles, démontre qu’ils y sont extrêmement rares.
Note du trad.

(1).
[Seite 225]

Ils absorbent tous les fluides qui se présentent
à eux, non-seulement au dedans de nous, la séro-
sité, le sang, le lait, la graisse, la bile, l’urine, le
pus, &c., non-seulement au dehors, toutes les pré-
[Seite 226] parations liquides qu’il est possible de concevoir;
mais encore, soit au dedans soit au dehors, le fluide
aérien. Note du trad.

(1).
[Seite 226]

Quand on considère, d’une part, les divers
moyens que la nature emploie, pour élaborer con-
venablement les produits de la résorption, avant de
permettre leur mélange avec le sang; & de l’autre
côté, les accidens affreux de palpitations, convul-
sions, &c. que développe la plus petite quantité d’un
fluide étranger, même doux, poussé dans le torrent
de la circulation avec une seringue; il paroît démontré
que les veines n’absorbent jamais aucune autre humeur
que le sang; & que toute absorption d’un liquide hété-
rogène, quoi qu’Haller en ait pensé, appartient au
systême lymphatique.

(1).
[Seite 231]

Jean Bernoulli estime que, de cette conti-
nuité de pertes & de réparations insensibles, dans nos
parties solides, résulte le renouvellement entier du
corps, tous les trois ans au plus tard.

(2).
[Seite 231]

Kemme, beurtheilung eines beweises für die
immatérialität der seele aus der medicin.
Hal. 1776.

(1).
[Seite 232]

Voici comment raisonne Haller, pour prouver
que les parties molles dont nous parlons, réparent
les pertes qu’elles éprouvent. ‘“Si les os & les dents
se renouvellent, si leurs premiers élémens se dissipent
& sont remplacés par de nouveaux, ne devons-nous
pas croire que le même renouvellement a lieu dans tou-

[Seite 233] tes les autres parties d’une texture moins ferme?”’
J’avoue que je ne sens point la force de ce raison-
nement, ainsi proposé d’une manière générale.

(1).
[Seite 242]

Je ne répéterai pas ici, après tous les physio-
logistes, les observations de Blasius, de Fallope, &c.
sur la figure & le nombre des reins; elles sont con-
nues: mais je ne puis taire un fait qui m’est propre.
Je fis l’an passé l’ouverture du cadavre d’un adulte de
cette ville, pour examiner chez lui l’intérieur du ven-
tricule, dans lequel je soupçonnois un corps étranger.
Cet adulte n’avoit qu’un rein, situé transversalement
sur les premières vertèbres lombaires; son volume
[Seite 243] surpassoit celui d’un poing; ses deux faces étoient
convexes, & ses bords divisés en deux lèvres, par
un sillon égal & continu. Rien de particulier dans sa
structure interne, si ce n’est plus de développement
que dans l’état naturel. Je ne trouvai également
qu’un uretère; mais celui-ci se bifurquoit à un pouce
de sa naissance, & venoit aboutir par chaque mem-
bre de sa division, aux deux points d’insertion ordi-
naires. Note du trad.

(1).
[Seite 243]

On en compte huit & même plus dans un
seul rein.

(2).
[Seite 243]

Ferrein avoit pris ces conduits sécrétoires, pour
des petits vaisseaux d’un autre genre auxquels il
avoit donné le nom de névro-lymphatiques; il les
regardoit comme la base parenchymateuse de tous les
[Seite 244] viscères, & prétendoit que dans les reins d’un adulte,
ils étoient assez fins & assez étendus, pour avoir
dans un seul de ces organes, 10000 brasses de lon-
gueur.

(1).
[Seite 245]

Ce qui oppose un nouvel obstacle à ce reflux,
c’est que l’ouverture des uretères dans la vessie, est
infiniment plus petite que le diamètre du reste de leur
étendue. Note du trad.

(2).
[Seite 245]

L’ouraque, chez les adultes, est un ligament
solide qui se termine au nombril; on l’a cependant
vu quelquefois former une espèce de canal, par lequel
les urines s’échapoient en plus ou moindre quantité.
Cabrole cite l’exemple d’une demoiselle de dix-huit
ans qui n’urinoit que par cette voie. Note du trad.

(1).
[Seite 246]

On ignore quelle est la source de cette muco-
sité; car on ne trouve aucune glande qui puisse la
fournir; mais il est évident que son usage est de garan-
tir les voies urinaires, de l’impression vive que feroit
sur elles l’acrêté du fluide qui les parcourt. Note du
trad.

(1).
[Seite 248]

Hallé, sur les phénomènes & les variations que
présente l’urine, considérée dans l’état de santé.
Mém.
de la soc. de médecine, T. III.

(2).
[Seite 248]

Ces parties, qui ont en effet une apparence
terreuse, sont réellement un mélange de posphate
calcaire & d’acide lithique; elles paroissent être le
superflu de la matière destinée à la nutrition & à la
réparation des os; aussi, remarque-t-on que les uri-
nes en sont plus chargées, lorsque les os malades se
nourrissent moins. Note du trad.

(3).
[Seite 248]

Hartenkeil, de vesicae urinariae calculo. Vir.
1785.

(1).
[Seite 249]

Bertholet, mém. de l’acad. des sciences de Paris,
an. 1780.

(1).
[Seite 250]

J’observai dernièrement encore ce phénomène
sur des jumeaux de différens sexes, qu’un accouche-
ment prématuré avoit séparés de leur mère au qua-
trième mois de leur âge. Quoiqu’ils fussent très-bien
conformés, à peine leur sexe pouvoit être aperçu. Ils
ne différoient l’un de l’autre qu’en ce seul point; leur
figure, leurs traits, leur taille, tout en eux se res-
sembloit parfaitement.

(2).
[Seite 250]

Voyez les belles figures de l’homme & de la
femme, que Vésale a sans doute empruntées du fa-
meux Titien, pour les placer à la tête de son ouvrage
anatomique.

(1).
[Seite 251]

J’ai noté fort au long toutes ces différences,
dans mon traité ostéologique.

(1).
[Seite 255]

Quand elle est retardée par quelques circons-
tances particulières, le resserrement du passage ne
pouvant se faire avec la promptitude ordinaire, de-
vient ensuite extrêmement difficile. Note du trad.

(2).
[Seite 255]

Il est des sujets chez qui cette descente des
testicules ne se fait en aucun temps de leur vie,
Note du trad.

(1).
[Seite 256]

Ils produisent en ce cas une tumeur, qu’il se-
roit dangereux de confondre avec une hernie. Note
du trad.

(1).
[Seite 257]

Cette tunique est sillonnée dans son milieu,
par une espèce de couture qui s’étend depuis la racine
de la verge jusqu’au bord de l’anus. L’entre-croise-
ment des fibres qui la forment, est assez serré pour
interdire toute communication entre les deux poches
qu’elle divise. Note du trad.

(2).
[Seite 257]

Neubaver, de tunicis vaginalibus testis & funi-
culi spermatici.
1767.

(1).
[Seite 258]

Sommering est parvenu à injecter avec du mer-
cure toute l’étendue de ces vaisseaux, & même la
tête entière de l’épididyme.

(1).
[Seite 260]

Il est encore fort douteux si les corps qui
nagent dans l’humeur séminale, sont des animaux
vivans. M. De Buffon & plusieurs autres, n’y ont
apperçu que des corps ovoïdes, qui ne leur paroissoient
rien moins qu’animés. Note du trad.

(1).
[Seite 261]

Voyez Spallanzani, opusculi di fisica animale
e vegetabile.
Mod. 1776. Et dissertazioni, &c. lb.
1780.

(1).
[Seite 263]

Morgagni, adversar. anat. IV.

(2).
[Seite 263]

Cette humeur qui chez les jeunes gens, sur-
[Seite 264] tout dans la saison des chaleurs, s’épaissit & se coa-
gule, devient très-acrimonieuse par son séjour; c’est
à raison de cet inconvénient, que la circoncision est
en usage dans presque toutes les contrées dont la
température est fort chaude. Les chrétiens eux-mê-
mes, quelque répugnance qu’ils aient pour cette
pratique, l’ont adoptée dans le Sénéga; & il est de
fait, que les Européens incirconcis qui habitent l’O-
rient, souffrent beaucoup de l’accumulation de cette
humeur. Guidon de Chauliac, le restaurateur de la
chirurgie de son siècle, dit que la circoncision est
utile à plusieurs personnes, sans parler des Juifs ni
des Sarrasins, parce qu’elle empêche à des ordures de
s’amasser à l’entour de la racine du gland, & de l’en-
flammer.

(1).
[Seite 266]

Cette humeur s’accompagnant chez les femmes,
dans les pays chauds, des mêmes inconvéniens que
chez l’homme, on a cru devoir également les circon-
cire dans leur jeune âge; c’est en effet, ce qui se pra-
tique dans plusieurs contrées de l’Afrique & de l’Asie.
Nieburh a rapporté d’un de ses voyages au Levant,
une gravure des parties naturelles d’une fille Arabe,
de dix-huit ans, qui avoit été circoncise, & me l’a
cédée pour la rendre publique. C’est ce que j’ai fait,
l’ayant publiée dans mon ouvrage, de generis hum.
varietate,
après l’avoir fait graver sur l’airain.

(2).
[Seite 266]

Elles ne varient pas seulement, quant à leur
étendue, mais aussi quant à leur nombre. Voyez l’ou-
vrage de Neubaver, de triplici nympharum genere.

(1).
[Seite 267]

Nous voulons parler ici de ce prétendu tablier
naturel qu’on remarque chez les femmes des Hotten-
tots, lequel, au rapport de Wilh. Ten. Rhyne qui a
été sur les lieux, n’est autre chose qu’un prolonge-
ment des nymphes. Steller a fait la même observation
sur les femmes de Kamtschad.

(2).
[Seite 267]

J’ai en ce moment sous les yeux, un exemple
de cette distribution de cils à l’entour du méat uri-
naire; je le trouve dans une pièce anatomique qui a
été détachée du cadavre d’une femme très âgée, &
que je tiens de Buchner, médecin recommandable,
mon ami. On voit de plus sur cette pièce, qui dé-
montre les organes de la génération de la femme,
l’hymen intact, & toutes les autres parties d’une
structure achevée.

(3).
[Seite 267]

Il paroît que les deux trous fréquemment ob-
servés par J. Dryander, dans le fond de la vulve de
femmes vivantes, ont les mêmes usages.

(1).
[Seite 268]

Il n’est que trop d’exemples de filles déchues
de cet état, chez lesquelles des circonstances favora-
bles l’ont conservé. Je crois donc avec notre auteur,
qu’il est un signe de virginité, mais un signe équivo-
que. Note du trad.

(1).
[Seite 269]

Ce n’est qu’une sympathie qui existe entr’elle
& les autres parties du corps. Ses rapports sont avec
l’espèce; ceux-là seuls sont essentiels: aussi ne peu-
vent-ils être impunément détruits, tandis qu’il est
possible de la séparer de l’individu, même sans acci-
dent. Note du trad.

(1).
[Seite 272]

Ne connoissant rien de plus exact sur cette li-
queur, que ce qu’Harvée en a écrit dans son ou-
vrage, Exercit. de gener. animalium, qu’il nous soit
permis de le transcrire mot par mot. ‘“Non omnes
quorumlibet animalium foeminas, nec mulieres quidem
omnes, talem humorem emittunt, nec citrà ejusmodi
emissionem conceptus necessariò frustratur. (Novi
enim plurimas quae citrà tolem ejectionem foecundae
satis essent, & nonnullas etiam quae postquam emis-
sionem hujusmodi expertae sunt, majore quidem vo-
luptate in coitu delectarentur, sed de foecunditate
subitâ plurimum amitterent. Infinita etiam sunt exem-
pla foeminarum quae, licet in coitu voluptatem sen-
tiant, nihil tamen emittunt, & nihilominus conci-
piunt.) Miror maximè eos qui emissionem hanc ad
generationem necessariam putant, non animadver-
tisse humorem illum foras ejici, & circà clitoridem,
vulvaeque orificium, utplurimum profundi; rarò intrà
vulvam, nunquam verò intrà uterum, ut cum maris
spermate misceatur; esseque consistentiâ serosum, seu
ichorosum ad modum urinae, non autem geniturae
instar, lentum atque unctuosum, ut tactu facilè in-
notescit.
”’

(1).
[Seite 273]

La plupart des naturalistes, Buffon entr’au-
tres, pensent qu’il est d’autres animaux-mammaires,
particulièrement dans l’espèce des singes, qui parta-
gent avec la femme cet écoulement périodique. J’ai
eu occasion d’observer pendant plusieurs années con-
sécutives, différentes femelles de singes, celles sur-
tout auxquelles on attribue cette fonction; & je me
suis assuré, ou qu’elles n’éprouvoient aucun flux
sanguin, ou qu’elles n’avoient que quelques hémor-
ragies utérines, absolument dépourvues de tout carac-
tère de périodicité.

(2).
[Seite 273]

Cette assertion autrefois si généralement ré-
pandue, qu’il existoit des nations entières, sur-tout
en Amérique, où les femmes n’étoient pas réglées,
n’a même pas besoin aujourd’hui de réfutation. Il
paroît que ce qui avoit donné lieu à cette erreur,
c’est que les voyageurs Européens, ayant vu dans
ces contrées un grand nombre de femmes presque
nues, n’en avoient jamais observé aucune offrir
des signes de menstruation. Ce n’est pas fort étonnant,
puisque d’une part, étant regardées à cette époque
comme infectées d’un vice contagieux, on les exclut
rigoureusement de la société, on les rélègue même
dans des habitations très-éloignées, pour y jouir d’un
repos salutaire, loin de la vue des hommes. D’autre
part, elles soignent particulièrement la propreté de
leurs corps, & demeurent le plus constamment pos-
sible, dans une position telle, que leurs extrémités
inférieures croisées l’une sur l’autre, puissent cacher
à la fois, & leurs parties sexuelles, & le flux auquel
elles livrent passage. Consultez Amérikaansche voya-
gien na rio de barbice en suriname,
par Adr. Van-
Berckel.

(1).
[Seite 274]

En France, il n’est pas rare de voir les fem-
mes n’être réglées qu’à cette épogue, & même plus
tard; cependant le terme le plus commun est celui
de la quatorzième année. Note du trad.

(2).
[Seite 274]

C’est à tort qu’on a prétendu que le sang mens-
truel est un sang gâté ou corrompu; si quelquefois
il paroît différer du sang artériel, il ne faut chercher
la raison de cette différence, que dans son séjour,
ou dans un vice de malpropreté. Note du trad.

(1).
[Seite 279]

C’est sur-tout pendant la première grossesse
des femmes, que leurs pailles se rembrunissent.

Klingstaedt assure qu’elles sont noires chez les
femmes Samoïedes, avant même qu’elles aient perdu
leur virginité.

(1).
[Seite 281]

On assure que ce fait est très-commun en
Russie. Voyez comment. acad. sc. petrop. T. III.

(1).
[Seite 282]

Il est dans nos environs, & je l’ai vu très-
fréquemment, un bouc de neuf ans, d’une force &
d’une taille également remarquables, qui depuis six
ans, donne tous les deux jours une demi-livre de très-
bon lait. Tel celui de Lemnos dont parle Aristote,
hist. anim. T. III.

(1).
[Seite 283]

Wargentin a cependant remarqué qu’il y avoit
beaucoup plus de naissances en Suède, dans le mois
de septembre, que dans aucun autre de l’année; ce qui
sembleroit prouver que c’est sur-tout dans le mois
de décembre, que les Suédois aiment à se rapprocher
de leurs femmes.

(2).
[Seite 283]

Tel l’état dans lequel Ruisch a vu deux uterus
de femmes récemment enceintes: le premier étoit
celui d’une courtisanne qu’un jeune homme avoit
égorgée aussitôt après en avoir joui: le second, ce-
lui d’une épouse que son mari avoit tuée quelques
heures après l’avoir surprise en adultère.

(3).
[Seite 283]

Si on considère la force avec laquelle la se-
mence est éjaculée par la verge, la promptitude de
l’absorption qui en est faite par la matrice, & en
même temps, combien peu il en faut pour féconder
un germe, on concevra sans peine la possibilité du
fait dont on se sert pour prouver l’existence de je ne
sais quelle vapeur séminale; c’est-à-dire, qu’une femme
peut concevoir, quoique sa membrane hymen ait ré-
sisté au coït.

(1).
[Seite 284]

A moins qu’elle n’ait lieu dans les premiers
temps de la conception, ou à moins que la matrice
ne soit partagée en deux cavités, ce qui n’est pas fort
rare; quoi qu’il en soit, & quoi qu’en aient pensé des
auteurs graves, la superfétation est un fait dont on
ne peut plus douter. On connoît l’observation de cette
femme Américaine qui, ayant vu successivement son
mari, anglais, & son esclave, nègre, accoucha en-
suite de deux enfans, dont l’un étoit blanc & l’autre
noir. Note du trad.

(1).
[Seite 285]

Arétée de Cappadoce est le premier qui ait parlé
de cette membrane; Fallope en fit mention après lui;
d’autres auteurs, dans les siécles suivans, la connu-
rent aussi, & la désignèrent sous différens noms; les
uns la nommoient simplement chorion; d’autres la
surnommoient spongieuse, tomenteuse, fongueuse, fila-
menteuse, rétiforme,
&c. Albinus l’apelle l’enveloppe
membraneuse.
Aujourd’hui elle porte le nom de Hun-
ter,
parce qu’en effet, il est le seul qui en ait donné
une description exacte.

(1).
[Seite 286]

Je ne sais pourquoi Blumenbach refuse des vais-
seaux sanguins à ces deux membranes; ils sont de la
dernière évidence dans le chorion, & paroissent
s’offrir au premier coup-d’oeil. A la vérité, plus ténus
dans l’amnios, on ne les y apperçoit pas aussi facile-
ment; mais une injection fine parvient chaque jour à
les remplir. Note du trad.

(1).
[Seite 288]

On cite d’un autre côté, des exemples de foe-
tus oui n’ayant point de cordon ombilical, n’ont pas
laissé de se nourrir & de vivre; il faut avoir bien
peu de critique pour ajouter foi à de telles supposi-
tions.

(2).
[Seite 288]

Les observations qu’on trouve dans Mauriceau
& Kerckring, de foetus d’un ou de quelques jours, sont
au dessous d’une réfutation sérieuse.

(3).
[Seite 288]

Ruisch. thes. anat. VI. & X.

(1).
[Seite 289]

Ce calcul n’est relatif qu’à la population en géné-
ral; il cesse d’être exact dès qu’on l’applique aux naissan-
ces de tel ou tel autre autre pays. Dans le Groenland,
par exemple, les jumeaux sont extrêmement rares;
dans l’Irlande, au contraire, presque toutes les con-
ceptions sont doubles.

(2).
[Seite 289]

Il arrive cependant quelquefois, mais fort rare-
ment, qu’on ne trouve qu’un amnios.

(1).
[Seite 290]

Je dois ajouter à ce qui vient d’être dit sur la
vésicule ombilicale, que, fort délicate & susceptible
[Seite 291] d’une altération très-prompte, on ne la trouve que
dans des avortons morts récemment; & même alors
on ne l’aperçoit qu’à l’aide d’une bonne loupe, & d’une
dissection extrêmement soignée. C’est ce que j’éprou-
vai il y a peu de jours: J’avois un oeuf humain dont
le volume égaloit à peine celui d’un oeuf de pigeon:
l’ayant ouvert, j’y trouvai un embryon gros à-peu-
près comme une fourmi; mais je n’y rencontrai d’a-
bord aucune apparence de vésicule ombilicale. Ce ne
fut qu’après avoir examiné avec plus de soin, & légé-
rement séparé l’amnios du chorium, que je l’aperçus
entre l’une & l’autre de ces deux membranes. Elle étoit
un peu moins petite qu’un grain de moutarde, renfer-
moit une lymphe très-claire, & tenoit par un filet
vasculaire assez perceptible, à l’un des côtés du cordon
ombilical, qu’on observe à cette époque être fort
mol, & d’une grosseur considérable proportionnément
à sa longueur.

(1).
[Seite 293]

Ce défaut de circulation directe de la mère à
l’enfant, ou plutôt ce défaut d’anastomose entre les
vaisseaux de l’une & de l’autre, explique encore
pourquoi le placenta se détache avec tant de facilité;
& pourquoi sa séparation n’est suivie d’aucun des acci-
dens qui ont coutume d’accompagner toute solution
de continuité. Note du trad.

(1).
[Seite 294]

C’est ce qui a fait croire à plusieurs physiolo-
gistes, que le foetus se nourrissoit plutôt du chyle
lacté de la mère, que de son sang.

(1).
[Seite 298]

Gleichen.

(1).
[Seite 299]

Haller, ce grand homme, prétendoit que non
seulement les viscères & les os eux-mêmes; du foetus,
mais encore presque tous les fluides, quoiqu’ils échap-
pent aux sens, pré-existent dans le germe maternel à
l époque de la conception.

Il faisoit principalement valoir en saveur de cette
hypothèse, un argument qu’il tiroit de la continuité
des membranes & des vaisseaux sanguins, entre le
germe fécondé du poulet & l’oeuf dans lequel il est
renfermé. J’avoue, que plus j’ai eu l’occasion de dé-
montrer ce phénomène dans mes conférences phy-
siologiques, moins j’ai été frappé du raisonnement
qu’on fonde sur lui: je ne puis même assez m’étonner
que l’immortel Haller, qui n’a vu que des rapports
de position entre les vaisseaux du foetus & ceux de
la matrice, air soutenu qu’on ne pouvoit se dispenser
d’admettre une espèce d’identité entre ceux du germe
fécondé du poulet, & ceux de l’oeuf qu’il habite.

(1).
[Seite 300]

On peut consulter Wolff Uberden Bildungstrich
sur la différence qui se trouve entre la force de for-
mation, & la force plastique des anciens, ou la force
essentielle.

(1).
[Seite 302]

J’ai donné la plupart des autres, dans comment.
societ. sc. Gotting.
T. VIII.

(1).
[Seite 303]

Tulpius, observ. med. L. IV.

(1).
[Seite 304]

C’est avec raison que Blumenbach ne parle ni
des accouchemens prématurés, ni des naissances tar-
dives; les premiers sont des accidens maladifs, dont
l’exposition appartient à un autre traité; les autres
ne semblent même pas être dans l’ordre des choses
possibles. Si la nature eût pu s’écarter en ce dernier
point du terme qu’elle s’est fixé, elle l’eût déjà
fait, non en faveur seulement des femmes, mais à
l’égard de toutes les espèces d’animaux. Note du
trad.

(1).
[Seite 306]

Je viens de publier un exemple récent de ce
phénomène dans comment. soc. sc. Gott. T. VIII.

(1).
[Seite 307]

Ces efforts sont si considérables, & la violence
avec laquelle l’enfant est expulsé est si grande, que
plusieurs auteurs ont pensé qu’il se faisoit pendant
l’accouchement un écartement des os du bassin, & que
cet écartement étoit en grande partie la cause des
douleurs que les femmes éprouvoient.

Considérant la structure de ces parties, & fondé
sur un grand nombre d’observations, je crois, il est
vrai, que pendant la grossesse, & sur-tout aux ap-
[Seite 308] proches de son terme, les cartilages & les ligamens
du bassin se tuméfient un peu; mais je doute fort que
les os soient violemment écartés les uns des autres à
l’époque de l’accouchement. Il me paroît bien plus
naturel de rapporter la mobilité des pièces du bassin,
qu’on a quelquefois observée chez de nouvelles ac-
couchées, au relâchement successif des parties mol-
les, qu’à la diduction subite des parties dures. On
conçoit que l’afflux des humeurs, & le défaut d’ac-
tion des vaisseaux lymphatiques, comprimés par le
poids de l’uterus, peuvent déterminer un engorge-
ment; on conçoit que cette dernière cause n’existant
plus, les pièces du bassin peuvent se mouvoir les unes
sur les autres; mais il est bien difficile de se persua-
der que les os se séparent aussi brusquement qu’on l’a
avancé.

(1).
[Seite 309]

La matrice tend à se rétablir ainsi, même après
la mort; & c’est à l’aide de ces efforts de resserre-
ment, que la nature fait cesser, dans l’état de vie, la
perte de sang qui succède au détachement du placenta.
Note du trad.

(1).
[Seite 310]

Trew, de different. quibusdam inter hom. natum
& nascend.
Nur. 1736.

(2).
[Seite 310]

Sabattier, dissert. sur les organes de la circu-
lation du sang dans le foetus,
à la fin de son traité
d’anat.

(1).
[Seite 311]

Haller, de foramine ovali & Eustachii valvulâ.
Gott. 1748.

(1).
[Seite 312]

On trouve dans les nov. comment. acad. scient.
Petrop.
T. XX., l’opinion assez singulière que Wolff
s’étoit formée du trou ovale; il le regardoit comme
une seconde embouchure de la veine-cave inférieure.
Il imaginoit par conséquent, que ce vaisseau s’ou-
vroit a la fois dans l’une & dans l’autre oreillette.

(1).
[Seite 313]

Ce n’est pas ici le lieu d’examiner comment doit
se faire la docimasie des poumons, ou quelle est son
autorité au jugement de la loi; on peut consulter sur
ce sujet, l’ouvrage posthume de Guill. Hunter, inséré
dans medic. observat. and. inquiries. T. VI.

(1).
[Seite 314]

Il est plus arrondi, & n’a aucune des bosse-
lures qui, peu après, semblent l’étrangler en divers
points de son étendue. Note du trad.

(1).
[Seite 315]

On observe qu’à la suite de grands efforts, la
glande tyroïde devient quelquefois le siége de tumeurs
aériennes plus ou moins volumineuses; ce phéno-
mène pathologique ne semble-t-il pas prouver l’exis-
tence d’une voie de communication entre sa cavité
& l’intérieur du larynx? Et s’il en étoit ainsi, répu-
[Seite 316] gneroit-il fort de croire, que l’humeur onctueuse
qu’elle renferme, est destinée à lubréfier la membrane
profonde du larynx? Note du trad.

(1).
[Seite 318]

Je ne parle ici que de l’ossature humaine; car
celle du poulet se marque beaucoup plus tard; elle ne
commence que vers le neuvième jour de l’incubation,
& cette époque répond à la dix-septième semaine de
la grossesse. S’il m’est permis de hasarder une conjec-
ture, je dirai que la nature accélère sans doute plus
le développement des os de l’homme & des autres
animaux vivipares, parce que ces parties sont les seu-
les qui les puissent soutenir contre le choc des corps
extérieurs; tandis que les ovipares trouvent un abri
contre ces causes de lésion, dans la coque qui les ren-
ferme. Quoi qu’il en soit, il ne faut point trop presser
la comparaison qu’on a coutume de faire, entre le
foetus humain & le germe du poulet; & c’est une
faute dans laquelle est tombé Haller, lorsqu’il a dit
sans restriction, qu il en est des os du poulet, comme
de ceux de l’homme & de tous les autres animaux.

Cette erreur s’est dès-lors tellement accréditée,
qu’on a vu des médecins appelés en jugement, pour
éclaircir des doutes élevés sur des naissances préma-
turées, l’établir en principe, & asseoir sur elle l’opi-
nion qu’ils émettoient. Voyez Hug. Marreti, con-
sultation au sujet d’un enfant,
&c. Dij. 1768.

(1).
[Seite 321]

Nous avons déjà combattu dans Magaz. Got-
ting.
an. II., l’opinion où l’on est encore aujour-
d’hui, qu’il existe des peuples en Amérique, aux-
quels la nature a refuse la barbe. Tous les habitans
de ce nouveau monde en sont pourvus; mais tandis
que les uns la cultivoient au moins en partie, les
autres l’ayant arrachée avec des instrumens particu-
liers, il est arrivé aux descendans de ceux-ci, ce
que nous avons observé en traitant de la force de
formation, qu’une mutilation accidentelle s’est mar-
quée, avec le temps, du caractère de la nature; &
en effet, elle est beaucoup plus rare chez eux.

(1).
[Seite 322]

J’ai publié dans bibl. medic. T.I. l’observa-
tion d’une jeune Suissesse qui devint enceinte à l’âge
de neuf ans.

(2).
[Seite 322]

Il seroit sans doute difficile de trouver en
France un seul sujet qui, avant cet âge, n’eût pas
senti ou donné des preuves de ce qu’il est. Note du
trad.

(3).
[Seite 322]

L’homme, ainsi que tous les corps organiques,
est soumis à l’influence des climats; de même que
ceux-ci, il croît beaucoup moins dans les régions
froides, que dans les contrées dont la température
est chaude. Il est cependant des bornes que la nature
a coutume de respecter; & il est évident, qu’il ne
faut pas plus ajouter foi à l’histoire des nains de
Madagascar, qu’à celle des géans de la Terre-Ma-
gellanique (*).

(*) Notre auteur ne rejetteroit pas ainsi quelques
phénomènes individuels; il est de fait que la nature
en a produit en ce genre de très-remarquables. On
connoît l’histoire du nain du roi de Pologne, & celle
de cet enfant de six ans, qui à une taille de cinq pieds,
réunissoit la plupart des caractères de l’âge viril.
Note du trad.

(1).
[Seite 323]

Je ne répéterai pas ici ce que j’ai déjà dit
dans mon traité d’ostéologie, sur le décroissement des
os, naturel à la vieillesse.

(2).
[Seite 323]

La principale de ces causes, est un état de sé-
[Seite 324] cheresse, de rigidité & de constriction, qui faisant
chaque jour de nouveaux progrès, ajoute à la soli-
dité des parties, gêne le mouvement des organes,
& s’oppose à la distribution convenable des sucs nour-
riciers. Cette cause elle-même remonte à l’exercice
de nos différentes fonctions; & on observe que ceux
dont la vie a été fort active, arrivent plus promp-
tement au terme de la vieillesse. Note du trad.

(1).
[Seite 325]

Jaq. Bruhier, sur l’incertitude des signes de la
mort.
Par. 1749.

(2).
[Seite 325]

Bâcon, hist. vitae & mortis. Lond. 1740.



Blumenbach, Johann Friedrich. Date:
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